Image de la semaine | 23/11/2020
Les canyons dans la molasse miocène du Bas Dauphiné
23/11/2020
Résumé
Érosion dans la molasse grésifiée : canyon, figures sédimentaires et formes dues à une grésification irrégulière.
L'érosion récente a creusé des “mini-canyons” dans les grès molassiques de Haute-Savoie, de Savoie, de l'Isère, de la Drome… Grès dont nous avons observé les chenaux, les flute casts et les galets mous les trois dernières semaines. Certains de ces mini-canyons sont réputés et peuvent se visiter comme le Canyon du Castran près de Frangy (Haute-Savoie). D'autres sont méconnus de tous (sauf des habitants des villages voisins) mais peuvent se découvrir au hasard de promenades ou de prospection dans les chemins creux et des bords de ruisseau du Bas Dauphiné (Isère et Drôme). La vigueur de l'érosion et la “jeunesse” de ces mini-canyons peut étonner. Il ne faut pas oublier que la molasse miocène locale est largement recouverte de formations glaciaires (moraines). La surface topographique est donc géologiquement très jeune (130 000 ans pour les moraines du Riss, 20 000 ans pour celles du Würm). Les petits cours d'eau n'ont pas encore atteint leur profil d'équilibre et leur érosion est encore vigoureuse.
Nous allons vous faire visiter un de ces canyons méconnus, plus pour l'étrangeté des paysages incongrus dans ce pays de collines basses que pour étudier la molasse que nous avons découverte ces trois dernières semaines. Ce canyon est parcouru par un ruisseau à faible débit, débit suffisant pour rendre la progression malaisée (hors période de sécheresse) mais insuffisant pour faire du canyoning. Pendant la sécheresse de l'été 2020, le ruisseau était réduit à quelques flaques d'eau et le canyon était parcourable sur la majorité de son tracé. Parce que la partie étroite de ce canyon n'est pas parcourue par un sentier, parce qu'il est très fragile et ne supporterait pas une fréquentation importante, parce que ses parois sont parfois instables et sujettes à des éboulements potentiels, nous ne le localiserons pas avec précisions. Aux lecteurs de Lyon, Grenoble ou Valence de le découvrir lors de leurs escapades et explorations géologiques dominicales. Il y a encore de belles découvertes géologiques à faire en France !
Les grès molassiques miocènes péri-alpins ont souvent une remarquable tenue face aux glissements de terrain et éboulements, ce qui permet aux ruisseaux de creuser des canyons aux parois verticales et à celles-ci de persister des siècles et des siècles. Cette propriété mécanique des falaises de la molasse a été utilisée par les hommes pour creuser des abris, peut-être initialement des carrières de grès, mais vite reconverties en champignonnières, entrepôts et hangars, voire habitations troglodytiques (cf. Craie tuffeau et cavités troglodytiques du Val de Loire). La plupart de ces cavités sont maintenant abandonnées, mais on peut faire de belles “découvertes” en se promenant dans le triangle Lyon-Voiron-Valence.
Outre ces paysages inattendus dans le Bas Dauphiné, ce canyon permet de revoir ce que nous avons vus les trois dernières semaines le long de la rue Paul Descartes à Saint-Fons (Rhône), à savoir stratifications obliques, flute casts, grésifications irrégulières… Nous verrons la semaine prochaine quelques aspects de cette grésification que la notice de la carte géologique de Givors décrit comme « capricieusement consolidé en molasse gréseuse ».