Image de la semaine | 18/12/2017
Une "forêt pétrifiée" de gymnospermes permiens du Damaraland, près de Khorixas, Namibie
18/12/2017
Résumé
Troncs silicifiés montrant fibres de bois, cernes annuels et des cavités géodiques à quartz, dans le Petrified Forest National Monument de Namibie.
Le mois de décembre est une époque où les gymnospermes, en particulier les sapins, épicéas et autres conifères sont à l'honneur. Nous vous présentons pour Noël 2017 des images de sapins de Noël un peu plus vieux que ceux qu'on installe dans les villes et les maisons, puisqu'ils datent de 280 Ma (Permien inférieur). Toutes les photographies qui suivent ont été prises dans le Petrified Forest National Monument en Namibie, à l'Ouest de la ville de Khorixas. Ce gisement montre actuellement plus de 50 troncs de plus de 20 mètres de long et d'innombrables fragments d'arbres plus petits. Aucun de ces arbres n'est en position de vie (comme on peut en voir dans nos bassin houillers français, cf. Tronc en charbon en position de vie dans des grès, ou Une souche de Sigillaire en position de vie dans des grès, hélas non silicifiés) mais tous ces troncs sont couchés à plat dans la série permienne horizontale (comme on peut aussi en voir dans nos bassins houillers français, cf. Fossiles de troncs d'arbres dans une couche de charbon, mais eux non plus, non silicifiés). Aucun ne montre son système racinaire. Ces troncs sont statistiquement parallèles entre eux. Ils auraient été arrachés de leur forêt par des tempêtes ou des débâcles, transportés par des fleuves et sédimentés là où ils se trouvent, interstratifiés dans les sables et argiles permien(ne)s devenus maintenant grès argileux. Le terme de « forêt pétrifiée » est donc légèrement impropre puisqu'il n'y avait pas de forêt sur ce site.
Une fois ensevelis et préservés des xylophages et autres moisissures, les constituants organiques de ces arbres (lignine et cellulose principalement) ont très lentement été décomposés (par des bactéries) et/ou dissouts (par les eaux très siliceuses et acides circulant dans les sédiments gréso-pélitiques). Dès que de la place, si minime soit-elle, était libérée par la disparition des composés ligno-cellulosiques, cette place était occupée par de la silice précipitant à partir des eaux circulantes, silice qui remplaçait donc, micron cube après micron cube, le matériel organique. Ce type de silicification est suffisamment fin et progressif pour préserver la structure du bois. La silice qui a remplacé le bois est principalement sous forme d'opale (silice quasiment amorphe) et/ou de calcédoine (silice cryptocristalline). Dans des cavités internes aux troncs ont pu se développer des cristaux de quartz. Cette silice est colorée (par des oxydes de fer et/ou de manganèse) en brun rouge à brun noir. La Forêt Pétrifiée de Namibie n'a rien à envier à celle, beaucoup plus célèbre, de l'Arizona, si ce n'est que la silice y est un peu moins colorée.
Nous vous montrons des images (d'ensemble et/ou de détail) de trois autres troncs de grandes tailles (images 4 à 8), trois images de la multitude de fragments plus petits (images 9 à 11), quatre images montrant des cristallisations de silice internes à un tronc (images 12 à 15) et dix images montrant des détails de la structure préservée du bois (images 16 à 25).
Source - © 2002 D'après C.R. Scotese, PALEOMAP Project, modifié
Outre ses gymnospermes fossiles, la Namibie est aussi connue pour une gymnosperme vivante, mais endémique de la Namibie et du Sud de l'Angola, Welviltschia mirabilis. Cette plante a longtemps été considérée comme une espèce panchronique (on utilisait avant l'expression impropre de « fossile vivant »), analogie moderne d'aspect très voisin d'espèce ancienne dont la morphologie n'aurait que peu varié au cours de l'évolution. Welviltschia mirabilis était alors considéré comme très voisin de la gymnosperme ayant été à l'origine des angiospermes. Nous verrons bientôt ce qu'on pense en 2017-2018 de la position de Welviltschia mirabilis dans l'arbre phylogénétique des végétaux spermaphytes.
Toutes les photographies de P. Thomas de cet article ont été prises lors d'une excursion géologique organisée par le CBGA (Centre briançonnais de géologie alpine) et encadrée par Olivier Dauteuil (Université de Rennes).