Outils personnels
Navigation

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Vous êtes ici : Accueil RessourcesPromenade géologique dans la vallée de l'Agly, Pyrénées-Orientales – 3/ Gorge et clue bordant le synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet

Image de la semaine | 05/02/2024

Promenade géologique dans la vallée de l'Agly, Pyrénées-Orientales – 3/ Gorge et clue bordant le synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet

05/02/2024

Pierre Thomas

Laboratoire de Géologie de Lyon / ENS de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Quand l’Agly recoupe deux barres calcaires formant gorge et clue. Antécédence ou surimposition. De la difficile mise en évidence de pendages et de failles.


Vue oblique (en direction de l'Est) de la topographie du synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet au Nord-Est des Pyrénées-Orientales

Figure 1. Vue oblique (en direction de l'Est) de la topographie du synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet au Nord-Est des Pyrénées-Orientales

Ce synclinal de direction E-O a la forme d'une gouttière bordée de deux barres rocheuses (Jurassique supérieur et/ou Crétacé inférieur). Le cœur du synclinal est constitué de marnes noires (Albien, ≈ 100 Ma) sur lesquelles pousse le célèbre vignoble de Maury (à consommer avec modération). L'Agly coule approximativement du Nord au Sud et entaille les deux barres rocheuses bordant la gouttière par deux gorges spectaculaires : les gorges de Galamus (au Nord) et la clue de la Fou (au Sud). Ce sont ces deux gorges qui sont l'objet de cette image de la semaine.

Comme sur de nombreuses figures Géoportail et Google Earth de cet article, le point rouge localise le village de Saint-Paul-de-Fenouillet et l'astérisque violet l'épicentre du séisme du 18 février 1996.

Localisation par fichier kmz du village de Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyrénées-Orientales), dans le synclinal éponyme. 806-Saint-Paul-de-Fenouillet.kmz


Vue oblique (en direction de l'Est, avec la même projection que la figure 1) du synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet au Nord-Est des Pyrénées-Orientales

Figure 2. Vue oblique (en direction de l'Est, avec la même projection que la figure 1) du synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet au Nord-Est des Pyrénées-Orientales

Ce synclinal de direction Est-Ouest a la forme d'une gouttière bordée de deux barres rocheuses (Jurassique supérieur et/ou Crétacé inférieur). Le cœur du synclinal est constitué de marnes noires (Albien, ≈ 100 Ma) sur lesquelles pousse le célèbre vignoble de Maury (à consommer avec modération). L'Agly coule approximativement du Nord au Sud et entaille les deux barres rocheuses bordant la gouttière par deux gorges spectaculaires : les gorges de Galamus (au Nord) et la clue de la Fou (au Sud). Ce sont ces deux gorges qui sont l'objet de cette image de la semaine.


Vue oblique du cours de l'Agly sur fond topographique

Figure 3. Vue oblique du cours de l'Agly sur fond topographique

Outre les superbes paysages que nous verrons des figures 8 à 28, l'intérêt de ces deux gorges concerne leur origine. Pourquoi l'Agly (ligne bleue) a-t-elle coupé les deux barres calcaires plutôt que de les contourner ? Pourquoi, en arrivant dans le secteur A, l'Agly continue-t-elle son trajet vers le SSE en traversant une énorme barre calcaire en creusant les gorges de Galamus (1) au lieu de continuer vers l'Est comme l'indique la flèche “vide” de gauche ? Le problème est le même dans le secteur B ou l'Agly franchit une deuxième barre calcaire par la clue de la Fou (2) au lieu de couler vers l'Est, ce qui, avec la topographie actuelle, semblerait beaucoup plus “facile”.

Il s'agit du classique problème “antécédence, surimposition, ou autre” (cf. La cluse du Val de Fier et l'anticlinal du Gros Foug (Savoie et Haute Savoie) : antécédence ou surimposition ? ou Deux canyons des Corbières Méridionales : Galamus et Pierre-Lys). Je n'ai pas trouvé de bibliographie locale convaincante à ce sujet et l'absence de carte géologique, et surtout de sa notice, n'aide pas.

Les points 3, 4 (barres calcaires) et 5 (charnockite) ont été traités les semaines précédentes.


Vue oblique du cours de l'Agly sur fond d'image aérienne

Figure 4. Vue oblique du cours de l'Agly sur fond d'image aérienne

Se repose le problème du tracé du l'Agly. Pourquoi l'Agly (ligne bleue) a-t-elle coupé les deux barres calcaires (1 et 2) plutôt que de les contourner ? Pourquoi, en arrivant dans le secteur 1, l'Agly continue-t-elle son trajet vers le SSE en traversant une énorme barre calcaire en creusant les gorges de Galamus ? Le problème est le même dans le secteur 2 ou l'Agly franchit une deuxième barre calcaire par la clue de la Fou au lieu de couler vers l'Est, ce qui, avec la topographie actuelle, semblerait beaucoup plus “facile”.

Il s'agit du classique problème “antécédence, surimposition, ou autre” (cf. La cluse du Val de Fier et l'anticlinal du Gros Foug (Savoie et Haute Savoie) : antécédence ou surimposition ? ou Deux canyons des Corbières Méridionales : Galamus et Pierre-Lys). Je n'ai pas trouvé de bibliographie locale convaincante à ce sujet et l'absence de carte géologique, et surtout de sa notice, n'aide pas.


État en décembre 2023 de la couverture 3D des cartes géologiques BRGM à 1/50 000 disponibles sur le web via le site du BRGM (InfoTerre), le site Géoportail, ou Google Earth, et lacune de Saint-Paul-de-Fenouillet

Figure 5. État en décembre 2023 de la couverture 3D des cartes géologiques BRGM à 1/50 000 disponibles sur le web via le site du BRGM (InfoTerre), le site Géoportail, ou Google Earth, et lacune de Saint-Paul-de-Fenouillet

Ce n'est pas facile de “travailler” avec de telles lacunes… surtout quand elles affectent des terrains géologiquement “riches”.


Le cours de l'Agly sur fond de ”vieille” carte géologique à 1/80 000

Figure 6. Le cours de l'Agly sur fond de ”vieille” carte géologique à 1/80 000

Faute de carte récente à 1/50 000 en ligne, on peut, si on dispose d'une “vieille cartothèque”, ce qui est le cas de l'ENS de Lyon, avoir recours à la “vieille” carte à 1/80  00 et la scanner. D'après cette carte à 1/80 000 et sa notice (levés effectués en 1935, révisés en 1963), on voit que la barre Nord (1) est constituée de Jurassique inférieur l2 et de l4-3 (calcaire plus ou moins dolomitique), de CIV.J2 (Crétacé basal et Jurassique supérieur) et de CI II a (calcaire de faciès urgonien). La barre Sud n'est faite que de calcaire à faciès urgonien (CI II a). D'après cette carte, la barre Nord est en contact tectonique (faille fortement pentée vers le Sud) avec du Crétacé supérieur (C5-4b). Toujours d'après cette “vieille” carte, la barre Sud (urgonienne) repose sur le socle par un contact stratigraphique. La flèche jaune localise là où ce contact Sud est recoupé par la vallée de l'Agly (voir figure 26). Le point n°3 (au Sud) correspond à la deuxième barre calcaire de la semaine dernière (cf. Promenade géologique dans la vallée de l'Agly, Pyrénées-Orientales – 2/ Plis à charnière verticale, schistosité verticale et linéations horizontales de scapolites, à Trevillach (Pyrénées-Orientales)). Cette barre calcaire est limitée par des failles, ce que ne représente pas la vieille carte à 1/80 000.


Vue oblique 3D sur la “vieille” carte géologique de Saint-Paul-de-Fenouillet

Figure 7. Vue oblique 3D sur la “vieille” carte géologique de Saint-Paul-de-Fenouillet

Grâce aux possibilités offertes par Google Earth, on peut superposer une image scannnée de la vieille carte au 1/80 000 sur la topographie et voir l'Agly traverser les deux barres calcaires par des gorges (1) et (2). La morphologie du synclinal se voit assez bien. D'après le 1/80 000, son “remplissage” est géologiquement identique à celui du Sud (des marnes noires datant de l'Albien, ≈ 95-100 Ma).


Vue aérienne oblique (en direction de l'Est) sur les gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales), au centre de l’image

Figure 8. Vue aérienne oblique (en direction de l'Est) sur les gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales), au centre de l’image

On voit que les couches de calcaires ont un pendage très fort vers la droite (vers le Sud). À droite, la clue de la Fou.


Vue aérienne verticale des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Figure 9. Vue aérienne verticale des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

À gauche des gorges (au Nord, en amont), les strates de calcaires semble dessiner un V très ouvert. Il y aurait un très fort pendage vers la droite (vers le Sud). À droite des gorges (vers l'aval), les couches ne semblent quasiment pas “déviées” par la topographie des gorges. Ces couches seraient quasi-verticales.


Les gorges de Galamus sont parcourues par une route touristique. J’y ai pris des photographies (diapositives argentiques) il y a bien des années, et on en trouve beaucoup d'autres sur le web. C'est un parcours réputé pour les amateurs de canyoning et on trouve de nombreuses photographies prises au fond sur le web. De quoi faire un parcours géologique virtuel. Plus pour un intérêt esthético-touristique que géologique, nous vous présentons 9 photographies prises au débouché Sud ou dans le cœur des gorges.

Débouché Sud des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales) dans le synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet

Figure 10. Débouché Sud des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales) dans le synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet

À droite, accroché à la paroi, l'ermitage de Saint-Antoine de Galamus.




Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Figure 13. Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Le calcaire, très massif et homogène, rend très difficile la visibilité des strates et de leur pendage.


Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales) avec l'Agly au fond

Figure 14. Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales) avec l'Agly au fond

Le calcaire, très massif et homogène, rend très difficile la visibilité des strates et de leur pendage.


Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Figure 15. Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Le calcaire, très massif et homogène, rend très difficile la visibilité des strates et de leur pendage.


Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Figure 16. Parois verticales au centre des gorges de Galamus (Pyrénées-Orientales)

Le calcaire, très massif et homogène, rend très difficile la visibilité des strates et de leur pendage.




Quatre kilomètres après être sortie des gorges de Galamus et avoir traversé la “plaine” que représente le synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet (voir figures 3 et 4), l'Agly entaille et traverse la barre calcaire (faciès urgonien) limitant au Sud ce synclinal par la clue de la Fou. Les figures 19 à 28 concernent cette clue de la Fou.

Vue oblique (vue dirigée vers le Sud) montrant la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Figure 19. Vue oblique (vue dirigée vers le Sud) montrant la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

L'Agly, arrivant du Nord traverse la barre urgonienne limitant le synclinal juste au Sud de Saint-Pau-de-Fenouillet. Au premier plan, les marnes noires de l'Albien.


Vue globale (mosaïque) de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales), photographiée depuis les hauteurs dominant Saint-Paul-de-Fenouillet

Figure 20. Vue globale (mosaïque) de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales), photographiée depuis les hauteurs dominant Saint-Paul-de-Fenouillet

La barre calcaire entaillée par l'Agly est en calcaire de faciès urgonien (CI II a d'après la vieille carte à 1/80 000). Les collines du premier plan sont constituées de marnes albiennes (C3-1 d'après cette même carte géologique). Il semble qu'on voie un pendage des couches calcaires, qui semble être inclinées vers le Sud, ce qu'indique d'ailleurs la carte géologique à 1/80 000. Ce pendage semble en contradiction avec le tracé non dévié de cette barre calcaire (voir figures 22 et 23).


Vue détaillée de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales), photographiée depuis les hauteurs dominant Saint-Paul-de-Fenouillet

Figure 21. Vue détaillée de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales), photographiée depuis les hauteurs dominant Saint-Paul-de-Fenouillet

La barre calcaire entaillée par l'Agly est en calcaire de faciès urgonien (CI II a d'après la vieille carte à 1/80 000). Les collines du premier plan sont constituées de marnes albiennes (C3-1 d'après cette même carte géologique). Il semble qu'on voie un pendage des couches calcaires, qui semble être inclinées vers le Sud, ce qu'indique d'ailleurs la carte géologique à 1/80 000. Ce pendage semble en contradiction avec le tracé non dévié de cette barre calcaire (voir figures 22 et 23).


Vue aérienne oblique dirigée vers l'Est centrée sur la barre calcaire urgonienne limitant le Sud du synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyrénées-Orientales)

Figure 22. Vue aérienne oblique dirigée vers l'Est centrée sur la barre calcaire urgonienne limitant le Sud du synclinal de Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyrénées-Orientales)

Le pendage de cette couche n'est pas évident sur cette image. Son tracé est rectiligne (de direction Est-Ouest) et non dévié au niveau de la vallée de l'Agly ce qui indique un pendage quasi-vertical, ce qui semble en contradiction avec ce qu'on voit sur la figure 21.


Vue aérienne verticale de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Figure 23. Vue aérienne verticale de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

La barre calcaire, plus résistante à l'érosion que les terrains situés à gauche (au Nord) et à droite (au Sud) est recoupée par la vallée de l'Agly sans que son tracé ne soit dévié. Les contacts barre calcaire / terrains du Nord et du Sud sont quasi-verticaux, ce qui semble en contradiction avec ce qu'on voit sur la figure 21.


Vue depuis l'Est sur la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Figure 24. Vue depuis l'Est sur la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Au Sud (à gauche), on devine ce qui ressemble à des strates dans la barre calcaire, strates qui semblent pentées vers la gauche (vers le Sud). Ce n'est pas clair au Nord (droite de la barre). Ce pendage vers le Sud est compatible avec ce qu'on voit sur la figure 21. Il n'est pas contre pas compatible avec ce qu'on déduit des figures 22 et 23.


Mosaïque d'images montrant la rive droite de l'entrée de la clue

Figure 25. Mosaïque d'images montrant la rive droite de l'entrée de la clue

Un débit quasi vertical affecte le calcaire. Stratification ou cassures ? Au premier plan, un vieux pont romain (sa “romanité” est discutée).


Rive droite de la sortie de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Figure 26. Rive droite de la sortie de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

La stratification n'est pas clairement visible. Au second plan, un vieux pont romain (sa “romanité” est discutée).


Vue de la sortie Sud de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Figure 27. Vue de la sortie Sud de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Sur le terrain, et en restant sur le bord de la route, on peut bien voir comment est constituée la limite Sud de la barre calcaire urgonien. Au niveau de la petite baraque, on est dans le calcaire urgonien (“CU” sur la photo). À 10 m plus au Sud-Est (à droite), on est dans le socle hercynien granitique (repéré par “Gr”). Entre les deux, sur 1 à 2 m de largeur sous les buissons, dans une matrice argileuse, on trouve quelques quartz bipyramidés. Or, dans la région, les quartz bipyramidés sont caractéristiques des argiles et évaporites du Trias supérieur (cf. Gypse et quartz bipyramidés). Il y a donc 1 à 2 m de Trias entre le socle hercynien et l'Urgonien. Et il manque tout le Jurassique, largement présent quelques kilomètres au Nord, à l'Ouest et au Sud. Il est très probable que ce contact granite/calcaire urgonien soit une faille (quasi verticale), faille “lubrifiée” par du Trias. Du Trias est d'ailleurs cartée sur le 1/80 000 jute de l'autre côté de l'Agly, vieille carte qui, par contre, ne dessine pas ce contact comme une faille.


Autre vue large sur la sortie Sud de la clue de la Fou (Pyrénées-Orientales)

Schéma structural (légèrement modifié) se trouvant à la base de la version imprimée de la carte géologique de Rivesaltes à 1/50 000

Figure 29. Schéma structural (légèrement modifié) se trouvant à la base de la version imprimée de la carte géologique de Rivesaltes à 1/50 000

Les cercles rouges (1) et (2) localisent respectivement les gorges de Galamus et la clue de la Fou. Le rectangle bleu localise l'extrait de carte à 1/80 000 de la figure 6. Sur ce schéma structural, au niveau de la clue de la Fou (2), les auteurs ont carté le contact Urgonien/socle granitique comme une faille. Ils n'ont pas carté la limite Albien/Urgonien comme une faille. Les deux barres calcaires vues la semaine dernière (points bleus 3 et 4) sont également cartées comme limitées par des failles, ce qui n'est pas le cas sur le vieux 1/80 000. L'épicentre du séisme de 1996 est localisé par l'astérisque violet.


La barre calcaire formant la clue de la Fou pose un problème. Les strates semblent avoir un pendage vers le Sud, pendage certes fort mais non vertical. Une réponse possible à ce paradoxe, c'est que les limites Nord et Sud de cette barre sont des failles. Bien que la vieille carte à 1/80 000 ne l'interprète pas ainsi, la limite Sud de la barre calcaire formant la clue de la Fou semble bien être une faille. Elle met en contact du socle hercynien et du Crétacé par l'intermédiaire d'une “semelle” de Trias, ce qui représente un très grand écart d'âge. Cette limite Sud de la barre calcaire est cartée comme faille sur le schéma structural “moderne”. La limite Nord de cette barre n'est pas directement observable le long de la route. Elle semble verticale bien que le pendage des couches semble penté (assez fortement) vers le Sud. Il pourrait donc y avoir aussi une faille au Nord, entre l'Urgonien et l'Albien. Mais s'il y a une faille, elle est d'une ampleur bien moindre qu'au Sud, puisqu'il n'y a pas d'écart stratigraphique entre l'Urgonien et l'Albien. S'il s'agit d'une faille, ce ne serait qu'une faille “modeste” ayant fait jouer le contraste lithologique marne-calcaire.

Il existe deux autres arguments indirects suggérant fortement la présence de faille(s) au niveau de cette barre de calcaire urgonien traversée par la clue de la Fou.

1 - Il existe une source “minérale” au niveau de la clue de la Fou. Il s'agit d'une eau calcique et sulfurée qui a une température constante de 25°C. Elle vient donc d'assez profond, de beaucoup plus profond que les sources karstiques abondantes dans cette région calcaire. Et les sources thermales sont souvent aidées et guidées par des failles. Un éphémère établissement thermal a d'ailleurs utilisé ces eaux de 1906 à 1914 (cf. Compagnie des Eaux Minérales & Thermales de La Fou).

2 – Le deuxième séisme le plus important des Pyrénées au XXe siècle (le 18 février 1996, magnitude de 5,6, épicentre localisé sur cette barre calcaire par 42,8°N, 2,6°E., à 8 km à l'Est de Saint-Paul-de-Fenouillet (cf. Note préliminaire sur le séisme de Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyr.Orientales) du 18 Février 1996). Soumise au raccourcissement pyrénéen, des failles Est-Ouest rejouent encore de nos jours.

On attend avec impatience la mise en ligne de la carte géologique de Saint-Paul-de-Fenouillet et de sa notice pour avoir des données récentes sur cette région.

Localisation de Saint-Paul-de-Fenouillet (punaise jaune) sur la carte géologique de France

Figure 30. Localisation de Saint-Paul-de-Fenouillet (punaise jaune) sur la carte géologique de France

Plutôt que la carte de France à 1/1 000 000, on a ici la couverture des cartes au 1/50 000 disponibles en 2023 sur Google Earth, couverture qui montre les “vides” correspondant aux cartes non encore mises en ligne sur le web (inexistantes ou existantes mais pas mises au format web).