Image de la semaine | 16/09/2019
Les aragonites de la carrière de Montclaret, Saint-Georges-Haute-Ville, Loire
16/09/2019
Résumé
Filons et géodes d'aragonite hydrothermale dans une carrière de basalte.
L'aragonite est, avec la calcite, l'une des deux formes usuelles de cristallisation du carbonate de calcium CaCO3 (les autres formes, beaucoup plus rares, sont la vatérite et la glendonite qui, elle, est un carbonate hydraté). L'aragonite cristallise dans le système orthorhombique (alors que la calcite cristallise dans le système trigonal, anciennement appelé rhomboédrique). C'est une forme stable à haute pression (cf. figure 3 de Les aragonites des grottes de Limousis (Aude) et de Clamouse (Hérault)) et elle ne devrait se trouver que dans des roches métamorphiques, jamais dans des roches sédimentaires ou volcaniques. Mais elle peut néanmoins cristalliser (hors équilibre) à basse pression à partir de solution de HCO3− et Ca2+, sous l'action d'êtres vivants (les coraux par exemple), dans des systèmes hydrothermaux avec des eaux riches en magnésium, dans certaines grottes… La forme macroscopique des cristaux d'aragonite est très variable, allant d'hexagones assez trapus (cf. Aragonite sur la Lithothèque de l'ENS de Lyon) à des aiguilles très fines, classiques dans certaines grottes (cf. Les aragonites des grottes de Limousis (Aude) et de Clamouse (Hérault)) et dans des fractures de certains basaltes (cf. "Oursins" d'aragonite, Gergovie, Puy de Dôme (63)).
Le volcan de Montclaret est un volcan complexe bien décrit dans la notice de la carte géologique de Firminy au 1/50 000, mis en place en plusieurs phases (effusives et phréatomagmatiques) échelonnées entre −28 et −20 Ma (Oligo-Miocène), et situé sur le rebord occidental du graben du Forez. Il est mis en relief par l'érosion. Ses laves (basaltiques) traversent et recoupent le socle hercynien qui est ici recouvert de quelques dizaines de mètres d'épaisseur de sédiments oligo-miocènes. En empruntant un réseau de fractures, des eaux hydrothermales ont circulé dans la masse du volcan encore chaude (ou réchauffée par des injections tardives de magma), le plus souvent dans les pyroclastites d'origine phréatomagmatique (dont des pépérites), parfois dans les laves massives (basalte). Ces eaux chaudes y ont déposé beaucoup de carbonate de calcium, majoritairement sous sa forme aragonite, sans doute parce que ces eaux circulant dans des pyroclastites basaltiques étaient riches en magnésium. Ces cristaux d'aragonite n'ont pas cristallisé “classiquement” à partir des épontes (les bords du filon), et perpendiculairement à ces dernières. Ils sont parfois de grande taille (> 10 cm), et ont souvent cristallisé en gerbe à partir d'un centre de nucléation, parfois parallèlement à la direction du filon. Tout cela traduit une cristallisation hors équilibre, sans doute rapide, à partir d'une solution aqueuse sursaturée en carbonate de calcium.
Ce volcan de Montclaret est exploité en carrière par la société Thomas Granulat (sans aucun lien de parenté avec l'auteur de ce texte) pour récupérer le basalte qui, broyé, donne un excellent granulat. Sauf autorisation spéciale, l'accès de la carrière est interdit au public, mais un sentier géologique aménagé (qui ne rentre pas dans la carrière) offre une belle vue sur le front de taille et sur la situation de cet ancien volcan sur le bord du graben du Forez.
Nous allons vous montrer 5 photographies prises sur un front de taille sub-vertical recoupé de filonnets sub-horizontaux, où on voit donc les filons par la tranche. Puis nous vous montreront 6 photographies prises sur une autre paroi sub-verticale mais recoupée de filonets eux aussi sub-verticaux, où on voit donc les filons “de face”. Enfin, nous vous montreront 11 photographies de blocs et échantillons non en place, ce qui permet de voir les filons sous tous les angles possibles.
La collecte de blocs de toutes tailles laissés au pied des fronts de taille par l'exploitant permet d'étudier des échantillons « sous toutes les coutures » et de reconstituer la géométrie des filons et des cristallisations qui les constituent. Les photos 14 à 16 montrent un cas simple, avec un unique filon planaire dont la moitié subsistant est très mince. On voit (1) un filon très mince, mais vu de face, (2) le même filon vu par la tranche après une rotation de l'échantillon de 90°, et (3) l'arrière de l'échantillon après une nouvelle rotation de 90°, face uniquement constitué de brèche pyroclastique. Les photos 17 à 20 montrent le cas d'un filon plus complexe, ramifié et d'épaisseur variable, vu avec des angles et des grossissements différents.
Source - © 2012 D'après Barbarin et al., BRGM |