Image de la semaine | 04/11/2019
Les staurotides du massif des Maures (Var) et de la vallée de l'Ével (Morbihan)
04/11/2019
Résumé
Prismes et macles (croix de Malte et croix de Saint André) de staurotide, association avec grenat et andalousite en contexte métamorphique de collision.
La staurotide [(Fe,Mg)1,5-2Al9(SiO4)4O6(O,OH)2] est un silicate de métamorphisme classique dans les séries métapélitiques (alumineuses) de basse pression - haute température et de moyenne pression - moyenne température. Elle est de ce fait assez souvent associée à l'andalousite, à la sillimanite ou au disthène. Elle cristallise dans le système monoclinique. Elle forme des prismes à base losangique, souvent maclés en croix. Elle est le plus souvent de couleur brune à rougeâtre, avec des cassures irrégulières. Les cristaux peuvent être de grande taille (plusieurs centimètres) et sont recherchés pas les minéralogistes, amateurs, enseignants mais aussi, hélas, vendeurs et “commerçants”. Deux régions françaises sont célèbres pour leurs staurotides : les Maures, fragment de socle hercynien intégré à la chaine pyrénéo-provençale par la tectonique cénozoïque, et la Bretagne, également d'âge hercynien. La géologie du massif des Maures est détaillée dans une Présentation de la géologie régionale du Var : le massif hercynien des Maures et de Tanneron
. Nous vous montrons 16 photographies d'affleurements et d'échantillons des Maures, et 6 photographies d'échantillons de la vallée de l'Ével, dans le secteur de Baud (Morbihan). J'ai ramassé tous ces échantillons (sauf celui des figures 23 et 24 qui m'a été donné) sans dégrader les affleurements (sans donner un coup de marteau) mais en ramassant des pierres dégagées par la mer ou par des travaux de réfections de chemins forestiers, d'adduction d'eau… Ces affleurements sont trop beaux et pas si fréquents que cela pour être dégradés. Certains de ces échantillons sont maintenant dans la collection de l'ENS de Lyon.
Si on n'aime pas les plages surpeuplées, on peut se promener dans l'arrière-pays et voir d'aussi belles staurotides et des paysages encore plus beaux.
La notice de la carte géologique au 1/50 000 d'Hyères-Porquerolle décrit ainsi ces micaschistes à minéraux.
Micaschistes à deux micas, micaschistes à minéraux. Ils dérivent d'une série détritique et contiennent des niveaux plus quartzo-feldspathiques, d'autres plus micacés. Ils présentent assez souvent un délit en dalles à surfaces micacées. Développement des minéraux dans certains niveaux. Les grenats peuvent atteindre 1 cm de diamètre, les staurotides peuvent former des baguettes de 5 à 10 cm de long sur 1 cm de large. Développement du disthène en baguettes centimétriques, localement associé à l'andalousite et à la sillimanite.
Si j'ai trouvé de l'andalousite (cf. fig 8 et 9) et du disthène (cf. la semaine prochaine) dans les Maures, je n'y ai pas trouvé de sillimanite visible macroscopiquement, ni récemment sur le terrain, ni dans les échantillons ramenés 30 ans plus tôt. Mais si on en croit la carte géologique, cette région des Maures a pourtant eu une histoire métamorphique complexe, avec recristallisations minérales dans les trois champs de stabilité des trois silicates d'alumine (Al2SiO5). Cristallisations juste au voisinage du point triple, ou passage successif dans les trois domaines, et dans ce cas dans quel ordre ?
La Bretagne est la région française la plus célèbre pour ses cristaux de staurotide, entre autres dans le secteur de la vallée de l'Ével près de Baud (Morbihan). Je n'ai pas de photographie d'affleurement de cette région, mais j'avais ramassé des plaques de micaschistes et des échantillons isolés, il y a plus de 30 ans, et des collègues professeurs de SVT bretons m'ont donné une plaque de micaschistes avec de beaux cristaux dont un bien maclé (figures 23 et 24). Le relief breton assez faible et la végétation abondante rendent les plaques de micaschistes difficiles à trouver et donc à photographier. Par contre, la staurotide étant un minéral très peu altérable, on en trouve de nombreux cristaux isolés et dégagés de leurs micaschistes en se promenant dans les champs juste après les pluies qui suivent les labours.
La carte géologique au 1/50 000 de Bubry décrit ainsi les micaschistes à staurotides de la vallée de l'Ével (Morbihan).
Micaschistes grossiers à silicates d'alumine, paragneiss subordonnés. La série comprend principalement des micaschistes beige argenté, à foliation bien marquée par l'alternance de minces lits micacés et de lits quartzeux. À l'Est de Baud, entre Koet-ar-Puns et Tellené, les cristaux centimétriques de staurotide sont particulièrement abondants et fort répandus dans les champs ; de plus, on y observe aussi parfois du disthène.
Dans ces affleurements en place et surtout en minéraux isolés dans la terre des champs, on trouve de la staurotide en prismes simples mais aussi en macles, macles qui ont fait la célébrité de la Bretagne chez les minéralogistes. Les deux macles les plus fréquentes sont (1) la macle en croix de Malte (ou croix grecque), dite croisette de Bretagne où les deux prismes sont associés perpendiculairement, et (2) la croix de Saint André où les deux prismes sont associés à 120° (cf. figures 28 et 29).
Source - © 2019 D'après Esclados Perrot, modifié |