Image de la semaine | 03/12/2018
Arches, mais aussi boules, diaclases et peintures rupestres, dans le massif granitique crétacé du Spitzkoppe, Namibie
03/12/2018
Résumé
Altération atypique d'un granite formant des arches, mais aussi des formes plus classiques, et des abris ayant préservé des peintures rupestres.
Source - © 2009 Mariusba - CC BY-SA 3.0 | |
Le granite du Spitzkoppe est l'un des massifs granitiques de l'Ouest Namibien (avec les granites du Brandberg et de l'Erongo), granites mis en place au Crétacé inférieur (130 Ma) de façon contemporaine à l'ouverture de l'Atlantique Sud. Le climat semi-désertique et la rareté de la végétation permettent d'apprécier l'évolution morphologique de ce granite. Classiquement, l'altération et l'érosion des granites forment des reliefs en boules, à cause de l'interaction altération/érosion/diaclase (cf., par exemple, Altération, érosion en boule et chaos granitiques : Devils Marbles Conservation Reserve, Australie, Les chaos de granite rose de Ploumanac'h et de Trégastel (Côtes d'Armor)...). La forme en boule vient du fait qu'en général il y a plusieurs directions de diaclases délimitant des polyèdres plus ou moins équidimensionnels. Si l'évolution locale du granite (refroidissement, histoire post-refroidissement…) n'a engendré qu'une seule famille de diaclases verticales, alors l'altération et l'érosion vont engendrer des lames et des murs de granites séparés par des couloirs étroits. L'étroitesse d'une de ces lames de granites, favorisée par de subtiles variations du granite, va parfois permettre à l'érosion de percer la base de cette lame, ce qui va engendrer une arche.
Source - © 2018 D'après National Park Service, modifié
En parcourant le massif du Spitzkoppe, on peut découvrir les effets morphologiques à différents stades qu'ont engendré les phénomènes d'altération et d'érosion sur ce granite quand les diaclases forment un réseau avec souvent une direction très largement dominante. On peut voir aussi une morphologie en boules classiques, qui sont particulièrement visibles dans le massif voisin de l'Erongo et que nous verrons dans les semaines qui viennent. On peut aussi faire de la pétrologie, de la zoologie, de la préhistoire…
À chaque fois qu'on est dans un massif granitique, il faut se poser la question de son origine, et en particulier de la nature du matériel qui a fondu pour lui donner naissanc : croute, manteau, ou un peu des deux. C'est en particulier le cas des granites dits “anorogéniques” car mis en place en dehors des zones de subduction ou de collision. Dans le cas du massif du Spitzkoppe, la simultanéité entre la mise en place de ce granite et de l'ouverture de l'Atlantique laisse supposer la participation du manteau. La quasi-exclusivité d'un granite riche en orthose laisse aussi supposer une forte participation de la croute. La présence d'enclaves basiques au sein du granite suggère très fortement une origine mixte. Il pourrait s'agir par exemple d'un important sous-plaquage de magma basique sous le Moho continental, avec fusion de la base de la croute due à la chaleur apporté par ce magma basique.
Et en plus de la géologie, le massif du Spitzkoppe permet de faire de la zoologie, de l'écologie, de la préhistoire…
Il n'y a pas que les damans et les lézards qui parcouraient les espaces du Spitzkoppe. Des hommes qui chassaient le parcouraient aussi il y a 6000 ans, et ils ont laissé des peintures et gravures rupestres qui persistent quand elles étaient effectuées sur les surplombs engendrés par l'altération/érosion du granite. Nous vous présentons quelques peintures/gravures du site connu sous le nom de Small Bushman Paradise.
Toutes les photographies de cet article ont été prises lors d’une excursion géologique organisée par le CBGA et encadrée par Olivier Dauteuil (Université de Rennes).