Image de la semaine | 29/01/2018
Le Désert de Platé (Haute Savoie), un lapiaz face au Mont Blanc et riche en fossiles
29/01/2018
Résumé
Un lapiaz jeune sur un karst mature : dissolution, aven, calcaires à oursins et discocyclines.
Comme tous les lapiaz, il se caractérise par roche calcaire plus ou moins nue parcourue de rigoles plus ou moins rectilignes de largeur centimétrique à plurimétrique et de profondeur très variable. Une végétation rase (herbacées, arbustes), ne parvient à s'implanter que dans les fentes de dissolution du calcaire, et laisse à nu des pans entiers de calcaire d'âge éocène supérieur (Bartonien et Priabonien, 40 à 34 Ma). Ce lapiaz est situé à une altitude moyenne de 2200 m. Au fond, distant d'une vingtaine de kilomètres, le Mont-Blanc.
Figure 2. Le Désert de Platé, l'un des plus beaux et des plus vastes lapiaz de France Comme tous les lapiaz, il se caractérise par roche calcaire plus ou moins nue parcourue de rigoles plus ou moins rectilignes de largeur centimétrique à plurimétrique et de profondeur très variable. Une végétation rase (herbacées, arbustes), ne parvient à s'implanter que dans les fentes de dissolution du calcaire, et laisse à nu des pans entiers de calcaire d'âge éocène supérieur (Bartonien et Priabonien, 40 à 34 Ma). Ce lapiaz est situé à une altitude moyenne de 2200 m. Au fond, distant d'une vingtaine de kilomètres, le Mont-Blanc. | Figure 3. Le Désert de Platé, l'un des plus beaux et des plus vastes lapiaz de France Comme tous les lapiaz, il se caractérise par roche calcaire plus ou moins nue parcourue de rigoles plus ou moins rectilignes de largeur centimétrique à plurimétrique et de profondeur très variable. Une végétation rase (herbacées, arbustes), ne parvient à s'implanter que dans les fentes de dissolution du calcaire, et laisse à nu des pans entiers de calcaire d'âge éocène supérieur (Bartonien et Priabonien, 40 à 34 Ma). Ce lapiaz est situé à une altitude moyenne de 2200 m. Au fond, distant d'une vingtaine de kilomètres, le Mont-Blanc. |
Le lapiaz du Désert de Platé se trouve au cœur de l'un des synclinaux perchés décrit la semaine dernière dans Synclinaux perchés simples et complexes dans les massifs subalpins (Savoie et Haute Savoie). La surface de ce lapiaz, qui est une surface structurale, est constituée de calcaires de l'Éocène supérieur qui, avec le Crétacé supérieur, surmontent la célèbre barre urgonienne. En pays calcaire, les morphologies superficielles les plus spectaculaires des karsts sont souvent des lapiaz (aussi appelés lapiés, lapiez, lapiès ou karren). Il s'agit de surfaces calcaires parcourues de "rigoles de dissolution" et parsemées de mini dépressions fermées plus ou moins marquées de taille décimétrique à métrique. Les rigoles apparaissent soit à partir des diaclases initialement présentes dans la roche, progressivement élargies par l'action des eaux de ruissellement chargées de CO2, soit le long de la ligne de plus grande pente par simple dissolution, sans qu'il y ait besoin de fissure initiale. Une simple micro-dépression peut s'approfondir par la dissolution et former des "cupules" à la surface du calcaire. Le dioxyde de carbone dissout dans ces eaux de ruissellement (eaux de pluie ou de fonte des neiges) provient du CO2 atmosphérique. Mais comme souvent les fractures, rigoles et dépressions sont tapissées de voiles bactériens, de concentrations de cyanobactéries…, c'est surtout la respiration de ces êtres vivants (bactéries…) qui produit le CO2, CO2 que ces organismes ont eux-mêmes directement ou indirectement extrait de l'atmosphère par la photosynthèse. Ces fissures peuvent être suffisamment profondes (aven) pour communiquer avec un réseau de galeries souterraines, qui alimenteront éventuellement des exsurgences.
La dissolution des carbonates par les eaux chargée de CO2 peut s'écrire : CO2 + H2O + CaCO3 → 2 HCO3- + Ca2+. C'est la réaction inverse de ce qu'il se passe dans les grottes riches en stalactites, stalagmites et autres concrétions, lors de la précipitation des calcaires chimiques et biochimiques.
Le karst du Désert de Platé fonctionne sans doute depuis longtemps (karst mature), mais la morphologie superficielle du lapiaz est jeune, car la région a été recouverte par les glaciations quaternaires. Ces glaciers ont sans doute poli la surface des calcaires. La morphologie actuelle avec ses "rigoles" et dépressions de toutes tailles a sans doute moins de 15 000 ans.
Planet-Terre vous a déjà montré d'autres beaux lapiaz européens à divers degrés de maturité, par exemple dans le Jura avec Un exemple de petit lapiaz : le lapiaz de Loulle (Jura), les Pyrénées avec Le lapiaz de la Pierre Saint Martin (Pyrénées Atlantiques), l'un des plus grands lapiaz de France, l'Ardèche et les Grands Causses avec Le bois de Païolive (Ardèche), un exemple de méga-lapiaz dolomitique, en Irlande avec Le karst des Burren (Irlande)… Et nous vous montrerons la semaine prochaine à quoi ressemble un lapiaz en pays tropical, en l'occurrence à Madagascar.
En attendant Madagascar, nous vous montrons 21 figures illustrant divers aspect morphologique du Désert de Platé, ainsi que certains des fossiles que l'on peut y observer.
Figure 4. Détail de la surface du Désert de Platé (Haute Savoie) On voit bien des micro-rigoles le long de la ligne de plus grande pente, et ce qui semble être le départ d'un aven. | Figure 5. Détail de la surface du Désert de Platé (Haute Savoie) On voit bien des micro-rigoles le long de la ligne de plus grande pente, et ce qui semble être le départ d'un aven. |
Figure 6. Détail de la surface du Désert de Platé (Haute Savoie) On voit bien des micro-rigoles le long de la ligne de plus grande pente, et ce qui semble être le départ d'un aven. | |
Figure 9. Surface calcaire parsemée de micro-dépressions, Désert de Platé Certaines de ces micro-dépressions sont sans doute dues à la présence de cyanobactérie (nostoc), invisibles par temps secs mais qui se développent après chaque pluies (les « crachats du diable », ou c« rachats de la Lune », cf. figures 15, 16 et 17 de Un exemple de petit lapiaz : le lapiaz de Loulle (Jura)). | Figure 10. Surface calcaire parsemée de micro-dépressions, Désert de Platé Certaines de ces micro-dépressions sont sans doute dues à la présence de cyanobactérie (nostoc), invisibles par temps secs mais qui se développent après chaque pluies (les « crachats du diable », ou c« rachats de la Lune », cf. figures 15, 16 et 17 de Un exemple de petit lapiaz : le lapiaz de Loulle (Jura)). |
L'abondance des discocyclines fait de ce calcaire une véritable lumachelle. | L'abondance des discocyclines fait de ce calcaire une véritable lumachelle. |
Source - © 2014 Damien Mollex / Lithothèque ENS de Lyon Figure 16. Lame mince de calcaire à discocyclines échantillonné sur le Désert de Platé (Haute Savoie) Une nummulite est visible dans le quart inférieur gauche de l'image. |
Figure 17. Restes fossiles dans le calcaire du Désert de Platé, restes difficiles à identifier à cette échelle La figure ci-dessous révèle qu'il s'agit de restes de tests d'oursin. La chaussure en bas à gauche donne l'échelle. | Figure 18. Zooms sur des restes fossiles difficiles à identifier à cette échelle La figure ci-dessous révèle qu'il s'agit de restes de tests d'oursin. La chaussure en bas à droite donne l'échelle. |
Figure 19. Détail des restes permettant l'identification d'oursins Zoom de la moitié gauche de la figure précédente. La présence de pièces ambulacraires avec sa perforation caractéristique permet de reconnaitre des restes (fragmentés) de plusieurs oursins (voir des détails de pièces ambulacraires par exemple dans La Madone des oursins et des silex, cité souterraine de Naours, Somme, Oursins fossiles avec leur lanterne d'Aristote, carrière de Caberan, Menerbes (Vaucluse) ou Cinq oursins fossiles racontent leur histoire). |
La morphologie particulière du lapiaz se voit bien sur la carte topographique et la vue aérienne. La carte géologique montre que toutes les photos ont été prises sur des terrains E7c (calcaires blancs du Bartonien et du Priabonien). | La morphologie particulière du lapiaz se voit bien sur la carte topographique et la vue aérienne. La carte géologique montre que toutes les photos ont été prises sur des terrains E7c (calcaires blancs du Bartonien et du Priabonien). |
La morphologie particulière du lapiaz se voit bien sur la carte topographique et la vue aérienne. La carte géologique montre que toutes les photos ont été prises sur des terrains E7c (calcaires blancs du Bartonien et du Priabonien). |