Image de la semaine | 30/06/2014
Traces de coups de pioche préhistoriques dans une minière néolithique de silex, Spiennes (Mons), Belgique
30/06/2014
Résumé
Exploitation de rognon de silex dans d'étroites galeries souterraines creusées dans de la craie.
Nous avons vu la semaine dernière que la Belgique exportait des pierres ornementales, en particulier la célèbre « Pierre Bleue de Belgique ». Dès le Néolithique, la Belgique, ou du moins ses habitants de l'époque, faisait commerce et "exportait" des silex taillés depuis la région de Mons. C'est au milieu du 19ème siècle qu'on découvre d'extraordinaires quantités de silex taillés dans la région de Spiennes, à 6 km au Sud de Mons (Belgique). On était là sur une très vaste zone d'extraction de silex et de fabrique d'outils en silex taillés. Ces silex étaient extraits depuis le Paléolithique dans des argiles et des nappes alluviales formées aux dépens de la craie campanienne (Crétacé supérieur). Le site a acquis une renommée mondiale quand on a découvert des dizaines de puits de mines atteignant la craie non altérée et ses silex de qualité supérieure. Chaque puits vertical mesure de 5 à 16 m de profondeur pour environ 1 m de diamètre. Au fond des puits, des courtes galeries (quelques mètres de longueur, 50 à 150 cm de hauteur) partent en rayonnant dans diverses directions. Les mineurs cherchaient manifestement des silex de bancs précis qui devaient posséder des qualités particulières. Des silex taillés de Spiennes ont été trouvés à plus de 140 km des sites d'extraction, et faisait donc l'objet d'un commerce important. Les datations au 14C d'objets trouvés sur les sites donnent un âge compris entre 4300 et 2200 ans avant notre ère. Ces datations sont confirmées par des restes de céramiques découverts sur place et appartenant à la culture de Michelsberg (4300 à 3700 ans av. J.-C.). Ces mines et ces ateliers de taille de silex datent donc du Néolithique, souvent encore appelé « âge de la pierre polie ». Cela montre qu'en cette période de sédentarisation des populations européennes, du développement de l'agriculture, des débuts de la céramique…, Homo sapiens taillait encore des silex, et développait même de véritables centres d'extraction et d'industrie lithique et faisait commerce de ces pierres. Le début de la "civilisation moderne" ! Ces objets et autres lames en pierre taillée pouvait servir tels quels : une lame en silex avec un bon tranchant coupe très bien, et pouvait être très utile en tant que couteau ou outil pour les moissons. Ces objets en pierre taillée pouvaient aussi servir d'ébauches en vue d'un polissage ultérieur.
La fabrication et l'utilisation d'objets en pierre taillée ne semble avoir disparu qu'avec l'apparition des métaux.
De très nombreux puits naturellement ou artificiellement comblés après la fin de leur exploitation ont été (et seront encore) dégagés par les archéologues. Le site des minières néolithiques est au cœur du Géoparc du Bassin de Mons, il a été classé au Patrimoine Mondial de l'Humanité par l'UNESCO en 2000. Le fait que la ville de Mons va être Capitale Européenne de la Culture en 2015 a servi d'accélérateur à la réalisation d'un Centre de Découverte "Silex's" ouvert au public au printemps 2015, qui permettra, entre autres, d'accéder à une ou plusieurs de ces mines souterraines néolithiques, mines choisies, entres autres, pour la "grande" taille de leurs galeries. Situé à 8 km de la frontière française, à 20 km de Maubeuge, 35 km de Valenciennes… ce patrimoine est très facilement accessible aux collègues de la région Nord-Pas de Calais.
Avant cette ouverture programmée pour 2015, l'accès aux mines et aux chantiers de fouilles n'étaient possibles que sur demandes motivées. J'ai pu accéder à l'une de ces minières (bien trop petite et "fragile" pour être ouverte à un tourisme "de masse") en 2013 avec l'aimable autorisation du Centre de Recherche Archéologique du Camp à Cayaux du Service public de Wallonie (Spiennes) et grâce à Maxime Dumenil de l'Université de Mons. Merci à eux.
Source - © 2013 B. Clarys | Source - © 2010 Jean-Pol Grandmont |