Image de la semaine | 23/06/2014
La « pierre bleue belge » et ses fossiles du Tournaisien (Carbonifère inférieur)
16/06/2014
Résumé
Un calcaire micritique à bioclastes utilisé en ornementation, le « petit granit » ou « pierre bleue belge » du Carbonifère inférieur de Wallonie, riche en fossiles de coraux et articles (entroques) de crinoïdes.
Après avoir vu, la semaine dernière, des fossiles d'origine inconnue dans divers lieux publics, nous présentons cette semaine une formation fossilifère caractéristiques et bien connue que l'on peut retrouver un peu partout aussi bien en pavage de rues piétonnes qu'en pierre ornementale dans des lieux publics.
La « pierre bleue belge » aussi appelée « petit granit de ... » (Soignes, Tournais... selon le lieu d'extraction) est un calcaire micritique riche en bioclastes du Carbonifère inférieur de Belgique exploitée dans le Hainaut (Tournais, Soignes...) ou dans la vallée de l'Ourthe. Cette pierre connaît de multiples applications en intérieur comme en extérieur (cf., par exemple, fédération "pierre bleue", carrières du Hainaut), nous ne vous en montrons ici que des applications extérieures (pavage de rue et bancs publics) dans deux sites, la rue de Saint Cloud à Lyon (7ème) et les jardins du quai Branly à Paris (7ème).
De nombreux fossiles sont trouvés dans ces formations du Tournaisien (Carbonifère inférieur) de Belgique (cf. fossilraptor). Ici, pas de jolis fossiles entiers pour collectionneurs, mais des coupes, sur des surfaces planes ou polies, de coraux, de brachiopodes, de crinoïdes, de mollusques et de bioclastes divers..
Deux types de coraux sont visibles. Les formations massives, en grandes cellules sont des coraux tabulés du genre Michelinia, le cœur montre parfois une recristallisation du remplissage (remplissage précoce ?). D'autres coraux "solitaires" sont des tétracoralliaires du genre Sychnoelasma, en coupe perpendiculaire on a alors des formes arrondies avec des stries radiales internes, stries qui dominent les coupes obliques et longitudinales.
On trouve aussi des fragments de coquilles de brachiopodes dans ce calcaire micritique du Carbonifère inférieur, selon des plans de coupe variés.
Les bioclastes les plus nombreux sont des articles isolés ou empilés de crinoïdes (échinodermes). Les articles isolés sont aussi appelés entroques et sont le composant principal des calcaires dits calcaires à entroques ou calcaires à encrines. Pour voir des crinoïdes "entiers" et d'autres calcaires à entroques reportez-vous, par exemple, à Scyphocrinites, crinoïdes d'Erfoud (Maroc) ou à Comatules (Crinoïdes nageurs) fossiles du Kimméridgien, carrière de Cerin (Ain).
Un passage rapide dans la rue de Saint Cloud (Lyon) a permis aussi d'y trouver un bel exemplaire de mollusque enroulé à spires non jointives.
Cette « pierre bleue belge » du Carbonifère inférieur marin vient de la province du Hainaut. Il s’agit de la prolongation occidentale du Massif des Ardennes. Dans la région, ce calcaire carbonifère est en général recouvert par de minces couches de Crétacé supérieur et/ou de Cénozoïque, et n’affleure que dans le fond des vallées, ou quand les travaux de carrières ont enlevé cette "pellicule" post-paléozoïque.
Les carrières de Tournai sont en Belgique, mais à seulement 6 km de la frontière française et 30 km de Lille ou de Valenciennes, les deux grandes agglomérations françaises locales, et pourraient très bien faire l’objet d’excursions géologiques de la part des collègues des lycées du Nord.
Nous verrons, la semaine prochaine, que le rayonnement géologique belge date de bien avant l'exploitation de son calcaire micritique du Carbonifère inférieur ("seulement" 125 ans pour les carrières du Hainaut) puisque la Belgique exportait des roches dès le 4ème millénaire avant notre ère.
Cette petite image de la semaine a bénéficié des conseils avisés de Pierre Thomas (ENS de Lyon), Bertrand Lefebvre (Univ. Lyon 1) et Markus Aretz (Univ. Toulouse 3).