Image de la semaine | 14/03/2016
Les stromatolithes cambriennes de Barneville-Carteret et de Saint-Jean-de-la-Rivière (Manche)
14/03/2016
Résumé
Stromatolithes fossiles visibles à marée basse sur une plage de la Manche.
Ces coupoles dégagées et mises en valeur par l'érosion marine pourraient faire croire à des coupoles actuelles comme on peut en voir au lac Thetis ou à Shark Bay en Australie.
Ces coupoles dégagées et mises en valeur par l'érosion marine pourraient faire croire à des coupoles actuelles comme on peut en voir au lac Thetis ou à Shark Bay en Australie.
Pour l'immense majorité des gens qui connaissent les stromatolithes, les milieux dans lesquels se construisent ces concrétions ressemblent à une lagune ou à un lac de la surface desquelles émergent des boules ou des coupoles de calcaire, comme on en voit au lac Thetis (cf. Les stromatolithes du lac Thetis près de Cervantes, Australie occidentale) ou à Shark Bay (deux sites australiens), au Bahamas, au Mexique... Les stromatolithes français "vivants" forment bien des boules ou des coupoles, mais croissent plutôt dans des ruisseaux en pays calcaire Tarn et Garonne, Jura (cf., par exemple, Stromatolithes actuels, travertins et cascade pétrifiante de Saint Pierre-Livron, Caylus (Tarn et Garonne) et Stromatolithes vivant dans des ruisseaux du massif du Jura). Peut-on voir en France des "paysages stromatolithiques" comme ceux des classiques sites australiens, avec des boules et des coupoles émergeant de la surface de la mer ou d'un lac ? Oui, mais ce sont des stromatolithes datant du Cambrien inférieur. Ils sont abondants dans une couche presque horizontale de « schistes et calcaires » cambriens affleurant au niveau de l'estran de Barneville-Carteret et Saint-Jean-de-la-Rivière dans la Manche. L'érosion marine a dégagé et mis en valeur ces coupoles stromatolithiques et, en faisant abstraction du climat et de l'arrière-pays, on pourrait se croire aux Bahamas ou en Australie. Ces coupoles ne sont accessibles qu'à marée basse de relativement fort coefficient. Et même pendant ces périodes de basse mer, leur visibilité peut être très variable en fonction de la divagation de bancs de sables se déplaçant au gré des courants et des tempêtes qui ont précédé.
Ce site est inventorié dans l'inventaire du patrimoine géologique de la région de Basse Normandie réalisé par la DREAL. Mais celui-ci n'est pas libre d'accès (pourquoi ?) ou perdu dans les méandres du site web (très peu convivial et peu pratique) du patrimoine géologique national. Par contre, la fiche concernant ce site géologique est, elle, disponible : fiche du site BNO0226 - Schistes et calcaires cambriens de Saint-Jean-de-la-Rivière.
Cette fiche a été élaborée avec la bibliographie citée dans ses annexes, c'est-à-dire ancienne (y en a-t-il de plus récente ?), et décrit cet affleurement comme suit.
« La formation des Schistes et calcaires de Saint-Jean-de-la-Rivière du Cambrien inférieur affleure sur le platier rocheux situé entre Saint-Jean-de-la-Rivière et Portbail. Dans la localité type, la formation des Schistes et calcaires de Saint-Jean-de-la-Rivière est constituée par une alternance d'argilites et de siltites verdâtres, à rides d'oscillation et pseudomorphoses de cristaux de sel, et de calcaires bleu-noir, en petits bancs : calcaires oolithiques, calcaires à algues* et stromatolithes, calcaires à archaeocyates, dont l'épaisseur totale atteint 200 mètres. La faune rencontrée dans cette formation, notamment les trilobites (Bigotina) et les archaeocyathes, lui confèrent un âge Cambrien inférieur. Les algues* ont édifié de remarquables structures stromatolithiques en forme de coupoles, où il existe une hiérarchie verticale, tour à tour à disposition plane, mamelonnée et en colonnes stratifiées, qui forment des séquences plus ou moins complètes. La zonéographie verticale de ces séquences témoigne d'un milieu de sédimentation en domaine de plate-forme peu profonde à intertidal. »
* par "algue", il faut sans doute comprendre unicellulaires photosynthétiques, principalement des cyanobactéries qui étaient encore appelées « algues bleues » dans les années 1970.
Pour plus de détails sur les stromatolithes et leur morphologie, voir l'article de synthèse Les stromatolithes.
Nous allons, en seize photographies, visiter ce remarquable affleurement.
Il y aura tout d'abord 6 images de coupoles surbaissées de grande taille, typiquement 1 à 2 m de diamètre pour 20 à 30 cm de hauteur. Souvent, la mer en a érodé les couches supérieures, ce qui laisse voir la structure concentrique en pelures d'oignon de ces stromatolithes.
La plupart des "couches" individuelles constituant les coupoles mesurent de 1 à 5 cm d'épaisseur. | La plupart des "couches" individuelles constituant les coupoles mesurent de 1 à 5 cm d'épaisseur. |
La plupart des "couches" individuelles constituant les coupoles mesurent de 1 à 5 cm d'épaisseur. | La plupart des "couches" individuelles constituant les coupoles mesurent de 1 à 5 cm d'épaisseur. |
La plupart des "couches" individuelles constituant les coupoles mesurent de 1 à 5 cm d'épaisseur. | La plupart des "couches" individuelles constituant les coupoles mesurent de 1 à 5 cm d'épaisseur. |
Quand l'érosion a bien "étêté" une coupole dont les "couches" individuelles sont particulièrement épaisses, on peut voir la structure interne de chaque couche. On observe alors que chacune de ces couche de premier ordre est constituée d'un empilement de lamines, des couches de deuxième ordre en quelque sorte.
Figure 9. Coupole stromatolithique montrant des couches de premier ordre particulièrement épaisses Le cache de l'objectif photographique donne l'échelle. | Figure 10. Structure interne d'une couche de premier ordre montrant un empilement de lamines de deuxième ordre Pierre Thomas, 1996 |
En plus des coupoles stromatolithiques de diamètre métrique, il en existe de beaucoup plus petites, interstratifiées dans des niveaux silteux, et souvent regroupées en amas. Ces petits stromatolithes montrent très souvent une très belle structure concentrique.
Figure 11. Groupe de petits stromatolithes dépassant d'une couche silto-gréseuse érodée Le marteau et les patelles donnent l'échelle. | Figure 12. Vue sur un groupe de petits stromatolithes dépassant d'une couche silto-gréseuse érodée Le marteau et les patelles donnent l'échelle |
Le marteau, au centre de la photo, donne l'échelle. | |
Figure 14. Un autre groupe de petits stromatolithes |
Source - © 2014 L. Baillet - APGN
Figure 16. Vue générale de l'estran de Barneville-Carteret et Saint-Jean-de-la-Rivière
C'est en se promenant (à marée basse) sur le platier rocheux de l'arrière-plan que l'on peut observer ces beaux stromatolithes.
Si, quand on passe dans la région, la marée est trop haute et qu'on n'a pas le temps de s'attarder, on peut voir de belles sections de stromatolithes dans les murs des champs ou des maisons des villages voisins.
Source - © 2014 IGN - APGN | |
Figure 20. Vue aérienne du secteur de Barneville-Carteret Le platier à stromatolithes correspond à l'ellipse rouge. | Figure 21. Carte géologique du secteur de Barneville-Carteret Le platier à stromatolithes correspond à l'ellipse rouge. |