Image de la semaine | 11/03/2013
Anciens fours à chaux à Aubière et à Romagnat (Puy de Dôme)
11/03/2013
Résumé
Des traces d'activité chaufournière, patrimoine géologico-industriel de l'agglomération de Clermont-Ferrand.
Nous avons vu la semaine du 18 février 2013 comment un forage oublié et/ou mal localisé et/ou imparfaitement bouché avait été accidentellement mis à jour par des travaux d'aménagement. Assez souvent, des ouvrages géologiques (ou associés à la géologie) ont été oubliés du grand public, à défaut de l'avoir été des autorités compétentes et/ou des spécialistes et amateurs. Parfois, des travaux d'aménagement (élargissement de route, aménagement de lotissement, de nouveaux locaux industriels…) mettent à jour (hélas trop souvent de façon temporaire) ces témoignages d'un passé géologico-industriel. On peut avoir d'autres exemples de ce type d'oubli que l'incident de Cébazat en restant dans l'agglomération clermontoise. En témoignent ces deux fours à chaux oubliés par l'immense majorité des habitants d'Aubière (dont j'étais à l'époque), mis à jour en 1982 à l'occasion de travaux d'élargissement de l'ex-"Nationale 9" et d'aménagement de parking, de locaux à vocation commerciale et de lotissements. Ces travaux ont, par hasard, coupé en deux ces fours à chaux et, pendant quelques mois, ont révélé que ce qui n'était apparemment qu'une simple petite colline en friche était en fait un monticule artificiel destiné à enterrer ces deux fours à chaux. L'agglomération clermontoise n'est pas spécialement riche en témoignages géologico-industriels mis à jour par l'activité "moderne". Il doit en être de même de toutes les agglomérations. C'est seulement celle que je connais le mieux. Si certains d'entre vous ont des exemples de tels découvertes (et il doit, statistiquement, y en avoir beaucoup), qu'ils n'hésitent pas à nous proposer un article.
Les fours à chaux étaient destinés à fabriquer de la chaux, dont les usages sont multiples : agriculture (pour le chaulage et la neutralisation des terrains argileux et acides), industriels (pour la déphosphoration des fontes et des aciers), bâtiments et maçonnerie… et de façon très anecdotique (mais bien connue des professeurs de SVT) pour mettre en évidence le CO2. Pour faire de la chaux, on met ensemble dans des fours des couches de calcaire en alternance avec des couches de charbon (charbon de bois jusqu'au 19ème siècle), puis houille. On enflamme le tout. Quand la température du calcaire dépasse 800°C, et il y transformation du calcaire en chaux :
- CaCO3 → CaO + CO2,
CaO est l'oxyde de calcium, également appelé « chaux vive ».
Si on hydrate la chaux vive, une réaction fortement exothermique se produit et donne de la chaux éteinte :
- CaO + H2OCa(OH)2,
Ca(OH)2 est l'hydroxyde de calcium, également appelé « chaux éteinte ».
C'est cette chaux éteinte qui est utilisée en agriculture, dans l'industrie, en maçonnerie…
La chaux éteinte (Ca(OH)2) est légèrement soluble dans l'eau (environ 1,4 g/l). On obtient alors de l'« eau de chaux ».
La chaux éteinte (et l'eau de chaux) réagit avec le CO2 gazeux pour former du carbonate de calcium :
- Ca(OH)2 + CO2 → CaCO3 + H2O.
C'est pour cela que l'on utilisait la chaux comme mortier car la chaux durcit quand elle devient carbonate de calcium.
Et quand du CO2 trouble de l'« eau de chaux », c'est parce qu'il se forme un précipité de CaCO3, insoluble.
À chaque fois qu'un professeur de SVT fait souffler un élève dans de l'eau de chaux pour mettre en évidence le CO2 respiratoire, il participe à tout un cycle de réactions chimiques : on part de carbonate de calcium, on fabrique de la chaux en libérant du CO2, on dissout cette chaux dans de l'eau, et on reforme du carbonate de calcium si cette chaux réagit avec du CO2.
Source - © 1906 B.Bussard, H.Dubois, Leçons élémentaires de chimie | |
Source - © 2012 jeanvilarsciences.free.fr
L'activité chaufournière était intense au Sud de Clermont-Ferrand, où les calcaires de Limagne, en particulier ceux constituant la base du célèbre plateau de Gergovie, ont été exploités pour la chaux depuis les Romains jusqu'en 1970, date de la fermeture des derniers fours à chaux de Romagnat. Il y avait des fours à chaux à Aubière, donc, à Gergovie (commune de la Roche Blanche), à Jussat (commune de Chanonat), et à Romagnat.
Les fours à chaux d'Aubière, dit de la Malmouche, sont abandonnés depuis très longtemps, étaient oubliés de la grande majorité de la population et ont disparu à tout jamais, aux moins ceux montrés ici. Il n'en est pas de même des plus récents, ceux de Romagnat. Ces derniers ne sont pas oubliés car le four principal (en béton et maçonnerie) n'est pas détruit. Il se situe à l'extrémité de la rue des Fours à Chaux, au pied d'un Bois des Fours à Chaux. Ces fours font partie du patrimoine local et il s'est créé une association « les amis des fours à chaux ». Ces fours sont ouverts à la visite lors de journées type "journées du patrimoine", et on peut suivre ce qui reste des différents matériels utilisés en 1970 pour la fabrication de la chaux. Le propriétaire des lieux les prête pour qu'on y donne des représentations théâtrales... Le complexe chaufournier de Romagnat semble heureusement sauvé et préservé de l'oubli.
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