Image de la semaine | 07/02/2011
Plis et décrochements dans une zone de convergence (chaîne de subduction) : exemple de la chaîne du Makran, Iran du Sud-Est / Pakistan du Sud-Ouest
07/02/2011
Résumé
Convergence : plis et décrochements dans le Makran.
Les déformations dans les chaînes de subduction (comme la Cordillère des Andes) sont polyphasées et très complexes. En effet, bien que ces chaînes de subduction soient dues à une convergence lithosphérique, l'angle de plongement de la subduction, la direction et la vitesse de la convergence… peuvent varier au cours des millions d'années. Cela peut entraîner des variations du régime de contraintes, avec création de très nombreux types de structures tectoniques allant des plis et failles inverses aux failles normales et aux décrochements. De plus, les structures tectoniques les plus faciles à visualiser (car affectant des séries sédimentaires stratifiées) sont souvent masquées par des séries volcaniques ou intrudées par des plutons granodioritiques. Enfin, à l'exception notable des déserts côtiers du Pérou et du Nord-Chili, la végétation est souvent abondante sur ces chaînes de subduction (péri-Pacifique). Que ce soit avec de la géologie de terrain, ou grâce à des images aériennes ou satellitales, la tectonique des chaînes de subduction est souvent difficile à appréhender, et a fortiori à faire découvrir à des élèves.
La chaîne du Makran est une chaîne de subduction fort méconnue, peut-être car elle est située dans des régions politiquement peu accessibles, les zones frontières entre l'Iran du Sud-Est et le Pakistan du Sud-Ouest. Elle est associée à la subduction de l'océan Indien sous les plateaux irano-pakistanais, qui font partie de la plaque eurasiatique. Il s'agit d'une subduction qui plonge avec un angle faible ; les séismes sont localisés sur un plan (faiblement) incliné jusque vers 150-200 km de profondeur. Un volcanisme actif (mais modéré) se trouve dans cette chaîne de montagne. La fosse bordant cette subduction est très peu marquée, car elle est comblée par les apports sédimentaires venant de l'Indus.
Cette chaîne de montagnes comporte pourtant plusieurs énormes avantages « pédagogiques » : les séries sédimentaires sont bien stratifiées et peu recouvertes de formations volcaniques, les structures tectoniques y sont (relativement) simples, le climat désertique rend les structures tectoniques bien visibles, et la couverture d'images de haute résolution de Google Earth est remarquable. Il suffit, grâce à Google Earth, de se « promener » dans cette chaîne du Makran pour parcourir un véritable musée des plis et des failles décrochantes. Nous allons faire une telle visite, non pas en utilisant Google Earth, mais en prenant un vol régulier de Barheïn (émirat du Golfe Persique) à Delhi (capitale de l'Inde). Les figures 4 à 15 sont des photos prises à travers un hublot situé sur le côté Nord de l'avion. L'Ouest sera à gauche, l'Est à droite. L'échelle et les coordonnées ont été déterminées ultérieurement grâce à Google Earth et devraient vous permettre de retrouver tous les sites. À défaut de prendre l'avion pour l'Inde, nous vous invitons à vous « promener » au-dessus du Makran et à chercher des structures en dehors du trajet indiqué. La « bonne altitude Google Earth » pour avoir des vues ressemblant aux photos aériennes ci-après est d'une dizaine de kilomètres.
Source - © 2010 NSF - USGS, modifié
Avec Google Earth, on peut retrouver ces plis ou décrochements, les voir « de plus près » ou sous d'autres angles.
Pourquoi dans une même chaîne de montagnes due à une convergence a-t-on parfois des plis, parfois des décrochements conjugués, avec, dans ce cas précis, des décrochements postérieurs aux plis ? Des décrochements conjugués de direction NO-SE et NE-SO sont dus à un raccourcissement N-S, comme pout les plis d'axe E-O.
Dans le cas de plis d'axe E-O, une élongation verticale (la montée du sommet des plis) accompagne le raccourcissement N-S, sans qu'il y ait mouvement dans la direction E-O. Dans le cas de décrochements conjugués NO-SE et NE-SO, une élongation E-O accompagne le raccourcissement N-S, sans qu'il y ait de mouvement vertical.
Dans le cas de plis et failles inverses, le champ de contraintes régional possède une contrainte maximale σ1 horizontale (N-S dans ce cas), une contrainte intermédiaire σ2 elle aussi horizontale (E-O dans ce cas) et une contrainte minimale σ3 verticale. Dans le cas de décrochements, il « suffit », sans changer σ1 (horizontal et N-S dans ce cas), d'intervertir σ2 et σ3 ; σ3 devenant horizontale (et E-O dans ce cas) et σ2 devenant verticale. Dans ces deux cas, on a σN-S > σE-O, ce qui est logique dans un régime de convergence N-S.
Cette association entre, d'une part, des plis - failles inverses et, d'autre part, décrochements, avec des décrochements plutôt tardifs par rapport aux plis et failles inverses, n'existe pas que dans le Makran, mais est assez fréquente dans de nombreuses chaînes de montagnes, en particulier dans les zones externes des Alpes et dans le Jura (cf. figures 10 à 15 dans "faille du Vuache, Sillingy").