Image de la semaine | 29/06/2009
Les anciennes mines de cuivre, argent et barytine du secteur Padern-Montgaillard (Aude)
29/06/2009
Résumé
Sites miniers accessibles dans les Corbières.
Les taches verdâtres à droite correspondent à des imprégnations de malachite. Ces concrétions d'azurite se sont développées dans une fracture dans laquelle circulaient des fluides hydrothermaux. L'azurite semble s'être développée à partir de centres de nucléation, ce qui donne à cette échantillon l'allure de colonies bactériennes.
Azurite : Cu3(CO3)2(OH)2 ; Malachite Cu2(CO3)(OH)2
Vue générale de l'échantillon de la figure 1.
Azurite : Cu3(CO3)2(OH)2 ; Malachite Cu2(CO3)(OH)2
Ces concrétions s'observent à plat sur des plans de fracture minéralisés, que l'on peut obtenir en cassant des échantillons selon ces plans de fracture.
Figure 3. Échantillons de barytine cassé perpendiculairement à des plans de fracture imprégnés d'azurite bleue C'est en « ouvrant » ces plans de fracture que l'on peut observer des concrétions comme celles de la figure 1. Barytine : BaSO4 ; Azurite : Cu3(CO3)2(OH)2 | Barytine : BaSO4 ; Azurite : Cu3(CO3)2(OH)2 ; Malachite Cu2(CO3)(OH)2 |
Où trouver de tels échantillons ? En se promenant dans les montagnes quasi-désertes des Corbières, sur les communes de Padern et de Montgaillard (11), à moins de 35 km de la foule des plages sur-fréquentées du Languedoc-Roussillon. Dans ces montagnes sauvages, on trouve, perdus dans les bois au bout de petits chemins, des excavations, des tranchées, des fronts de carrières, des déblais… plus ou moins colonisés par la riche végétation méditerranéenne, pas plus dangereux (mais pas moins non plus) que n'importe quels surplombs rocheux, fossés, falaises ou tas d'éboulis naturels en montagne. Ces anciennes mines et leurs trésors minéraux ont plusieurs ennemis, dont la végétation qui recouvre tout et les services de l'état, qui, atteint d'un « principe de précautionnite » aigu et exacerbé, risquent de tout détruire (on appelle cela « sécuriser » en langage administratif). Allez-y avant qu'il ne soit trop tard ; c'est l'occasion de belles ballades, et cela permet de passer des vacances géologiquement riches.
Toutes les photographies de cet article ont été prises en juin 2008.
Cette région des Corbières est géologiquement très riche. Si on tape « Corbières » sur le moteur de recherche interne de Planet-Terre, on tombe sur 8 « image de la semaine » :
- Relations entre cisaillement et schistosité (plans C-S) à la base de la nappe des Corbières (Ripaud, 11), Plans de cisaillement et plans de schistosité.
- Schistosité moulant des stromatolites (oncolites) à la base de la nappe des Corbières, Pont de Ripaud (11), Schistosité défléchie par des corps « durs ».
- Failles normales associées à une nappe de charriage (Padern, 11), Des failles normales locales dans un contexte régional de raccourcissement
- Plis d'entraînement dans l'autochtone à la base d'une nappe de charriage (Ripaud, 11), Déformation de l'autochtone à la base de la nappe des Corbières.
- Failles inverses conjuguées cisaillant un galet (Coustouge, 11), Déformations dans la nappe des Corbières : failles inverses conjuguées dans un galet.
- Conglomérat affecté par un micro-chevauchement, Cucugnan (11), Déformations dans la nappe des Corbières : micro-chevauchement dans un conglomérat
- Un chevauchement décamétrique à la base de la nappe des Corbière, Padern (11), Déformations dans la nappe des Corbières : chevauchements dans le Trias
- Déformations dans les gypses de base de la nappe des Corbières (Durban Corbières, 11), Déformations dans la nappe des Corbières : plis anisopaques, brèches.
Bonnes vacances.
Figure 5. Image Google Earth de la partie orientale des Corbières, entre Narbonne et Perpignan Dans cette admirable région, on peut certes aller à la plage (Gruissan, Port-Leucates, Le Barcares…, mais aussi goûter/acheter du très bon vin (Rivesaltes, Maury…) à consommer avec modération, faire de l'histoire et de la préhistoire (château de Quéribus, Tautavel…), faire des pèlerinages littéraires (Cucugnan…). Il est aussi possible de faire de la géologie, en allant par exemple dans le secteur Padern-Montgaillard (repère jaune) où abondent les mines de cuivre abandonnées. | Figure 6. Carte IGN (Géoportail) du secteur de Padern-Montgaillard Le secteur des anciennes mines est entouré en rouge. La carte IGN de ce secteur recense 13 entrées de mines (points noirs) perdues dans la montagne mais facilement accessibles à pied. Les galeries de mines sont souvent effondrées, mais il reste des excavations, des tranchées, des fronts de carrières, des déblais… perdus dans les bois et pas plus dangereux (mais pas moins non plus) que n'importe quel surplomb rocheux, fossé, falaise ou tas d'éboulis naturels en montagne. Et comme les services de l'état, atteint d'un « principe de précautionnite » aigu et exacerbé, risquent de tout détruire (on appelle cela « sécuriser » en langage administratif), allez-y avant qu'il ne soit trop tard. |
La bibliographie sur les gisements dans ce secteur des Pyrénées est des plus réduite. La géologie des Corbières est fort complexe. Sur un socle hercynien (fait de roches sédimentaires paléozoïques plissées) repose localement (et en discordance) des terrains mésozoïques. L'ensemble Paléozoïque + Mésozoïque est recouvert par une nappe de charriage (plus ses écailles basales) : la nappe des Corbières, qui est un charriage d'âge cénozoïque (pyrénéen) constitué de terrains mésozoïques. Les anciennes mines de Padern-Montgaillard exploitaient des remplissages hydrothermaux de filons et/ou de poches affectant des terrains du Carbonifère inférieur (Tournaisien à Viséen supérieur), de nature principalement carbonatée. La nature du remplissage est majoritairement constitué de barytine (BaSO4), parfois de silice ou de carbonates. Le cuivre, mais aussi des métaux en plus faible proportion comme l'argent, se trouvent disséminés dans barytine et quartz. Le cuivre est surtout présent sous forme de carbonates : malachite (Cu2(CO3)(OH)2) et azurite (Cu3(CO3)2(OH)2). L'âge de ces remplissages est vraisemblablement tardi-hercynien, mais il est fort probable qu'ils aient été remobilisé pendant l'orogénèse pyrénéenne.
Ces mines ont été exploitées du temps des romains, au Moyen-Âge, au XIXème siècle ; les dernières exploitations (pour la barytine) datent des années 1960.
Figure 7. Carte géologique BRGM / Google Earth du secteur de Padern-Montgaillard
Le socle paléozoïque est figuré par le brun et le gris. Trias, Jurassique et Crétacé sont en rose, orangé, bleu et vert. Les anciennes mines du secteur Padern-Montgaillard (cercle rouge) sont localisées dans les terrains du Carbonifère inférieur ( h1-2 = Tournaisien à Viséen supérieur).
Figure 8. Vue générale d'ancien travaux miniers du secteur de Padern/Montgaillard Même vu de loin, les masses de barytine (BaSO4), très blanche, se détachent des roches de l'encaissant plus brun. | |
Figure 9. En s'approchant d'une ancienne excavation du secteur minier de Padern/Montgaillard On voit très bien que la barytine (BaSO4), blanche, forme des filons et/ou des poches dans l'encaissant. Même vues d'assez loin, des taches vertes de malachite (Cu2(CO3)(OH)2) se voient. | L'imprégnation de cette barytine par de l'azurite bleue (Cu3(CO3)2(OH)2) se voit en bas à gauche. |
Figure 11. Gros plan sur un filon de barytine imprégné d'azurite, secteur minier de Padern/Montgaillard Au premier plan, quelques fleurs méditerranéennes. | En bas, toute la barytine a été enlevée, et la paroi est constituée de carbonates. En haut, il reste de la barytine (BaSO4) et des carbonates de cuivre bleus (azurite = Cu3(CO3)2(OH)2) ou verts (malachite = Cu2(CO3)(OH)2). L'image suivante est un gros plan sur la principale tache d'azurite. |
Voir localisation de cette tache sur la figure précédente. | Barytine : BaSO4 ; Azurite : Cu3(CO3)2(OH)2 ; Malachite Cu2(CO3)(OH)2 |
Figure 15. Nid d'oiseau sur un affleurement, excavation dans le secteur minier de Padern/Montgaillard Outre leur intérêt géologique, ces anciennes exploitations (galeries, abris sous roches…) servent d'habitat à de nombreux animaux (chauves-souris, oiseaux…), une raison de plus de ne pas les détruire. En témoigne ce nid d'hirondelle. Manifestement, nicher dans un milieu riche en métaux lourds ne semble pas gêner ces oiseaux. | Figure 16. Nid d'oiseau sur un affleurement, excavation dans le secteur minier de Padern/Montgaillard Outre leur intérêt géologique, ces anciennes exploitations (galeries, abris sous roches…) servent d'habitat à de nombreux animaux (chauves-souris, oiseaux…), une raison de plus de ne pas les détruire. En témoigne ce nid d'hirondelle. Manifestement, nicher dans un milieu riche en métaux lourds ne semble pas gêner ces oiseaux. |