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Article | 18/04/2014

Le séisme du 7 avril 2014 dans l'Ubaye (Alpes de Haute-Provence) : un séisme en extension dans une chaîne de convergence, exemple de la complexité de la dynamique actuelle des Alpes

18/04/2014

Patrick Thollot

ENS de Lyon - Laboratoire de Géologie de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Quand le mécanisme au foyer d'un séisme nous rappelle que convergence n'implique pas exclusivement des mouvements compressifs.


Le séisme du 7 avril 2014 en Haute Ubaye

Le séisme qui a fait trembler la région de la Haute Ubaye entre Barcelonnette et Guillestre, lundi 7 avril 2014 au soir, est un bel exemple de la sismicité active dans les Alpes internes. C'est donc l'occasion de revenir sur la magnitude des séismes, le contexte géologique des Alpes internes, et de s'interroger sur l'origine de l'activité dans cette chaîne de montagnes née il y a tout de même plus de 30 millions d'années, et ce d'autant plus que ce séisme est en extension, ce qui peut en surprendre plus d'un puisqu'on est dans une chaîne de montagne résultant d'une convergence…

Le séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014 a eu lieu à 21h27, l'heure légale d'été. Sa magnitude locale, déduite de l'amplitude des ondes reçues par les sismomètres proches a été rapidement estimée à ML~5,2. La magnitude de moment MW, déterminée plus tard, a été estimée à MW~4,8.

Le séisme de l'Ubaye de 2014 est le plus important enregistré dans les Alpes depuis le séisme d'Annecy du 15 juillet 1996, de ML~5,2. Ce dernier séisme avait affecté la faille du Vuache [w5], orientée NNW-SSE, selon un mouvement de décrochement senestre compatible avec une compression NW-SE, tout à fait cohérente avec les déformations finies régionales (plis et chevauchements orientés NNE-SSW). Le séisme d'Annecy, touchant une région fortement urbanisée, avait provoqué des dégâts estimés à l'époque à 400 millions de francs (~60 millions d'euros).

Le séisme de l'Ubaye de 2014, touchant une zone très faiblement peuplée, n'a pratiquement occasionné aucun dégât matériel.

Contexte géologique et sismicité passée

L'Ubaye est un bassin versant situé juste au Sud de la limite entre Hautes-Alpes et Alpes de Haute-Provence, dont le point culminant est l'Aiguille de Chambeyron (3412 m). Au Nord de cette même frontière, on trouve la région du Queyras, bassin versant du Guil, qui culmine au pic de Font Sancte. Les deux sont dominés, côté italien, par le Mont Viso (3841 m). Le séisme de 2014 s'est produit à la limite entre Ubaye et Queyras, entre les villes d'Embrun et de Barcelonnette, sous le massif du Parpaillon.

Localisation géographique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Figure 1. Localisation géographique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Vue en perspective depuis le SSW vers le NNE. Le cercle jaune bordé de noir indique la position de l'épicentre du séisme.


Contexte géographique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Figure 2. Contexte géographique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Vue en perspective depuis le SSW vers le NNE. Le cercle jaune bordé de noir indique la position de l'épicentre du séisme.

En blanc, quelques repères géographiques. En trait jaune épais, le Front Pennique (F.P.) et son prolongement probable sous la nappe du flysch à helminthoïdes (en tiretés). Est aussi indiquée par un trait plus fin une faille importante qui suit la vallée de la Durance de Briançon à Guillestre et qui se poursuit sous le massif du Parpaillon.


Localisation géologique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Figure 3. Localisation géologique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Vue en perspective depuis le SSW vers le NNE. Le cercle jaune bordé de noir indique la position de l'épicentre du séisme.

Sur fond de carte géologique de la France au millionième.


Contexte géologique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Figure 4. Contexte géologique du séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Vue en perspective depuis le SSW vers le NNE. Le cercle jaune bordé de noir indique la position de l'épicentre du séisme.

Sur fond de carte géologique de la France au millionième.

En blanc, quelques repères géographiques. En trait jaune épais, le Front Pennique (F.P.) et son prolongement probable sous la nappe du flysch à helminthoïdes (en tiretés). Est aussi indiquée par un trait plus fin une faille importante qui suit la vallée de la Durance de Briançon à Guillestre et qui se poursuit sous le massif du Parpaillon.


Un coup d'œil sur la carte géologique de la France au millionième nous apprend que ce massif se développe dans la nappe du flysch à helminthoïdes (vert à "pois" noté c2 sur la carte), une formation sédimentaire syn-tectonique mise en place au Crétacé supérieur au front de la zone de subduction liguro-piémontaise. Cette nappe est déposée sur une série sédimentaire autochtone (c'est-à-dire en place sur son socle), série dite dauphinoise, qui affleure au Sud-Ouest. L'expression géomorphologique de cet autochtone, surtout visible en aval dans le Gapençais, est dominée par des paysages de badlands formés par l'érosion dans les « terres noires », des marnes du Jurassique moyen et supérieur. À l'Est, c'est le domaine briançonnais qui affleure, montrant un empilement de nappes de couverture sédimentaire briançonnaise, une couverture caractérisée par un Trias calcaro-dolomitique massif (Chambeyron, Font Sancte). Pour le détail de l'histoire des unités géologiques de ce secteur, les notices des cartes au 1/50.000 d'Embrun et Barcelonnette, couvrant la zone, ne sont malheureusement pas très pertinentes en raison de leur date de publication ancienne (1969-1970), avant l'arrivée du paradigme de la tectonique des plaques. Les feuilles adjacentes de Chorges (à l'Ouest, 1989) et de l'Aiguille de Chambeyron (à l'Est, 1994) sont bien plus intéressantes en ce qui concerne les interprétations paléogéographiques et tectoniques "modernes".

La nature des terrains connues, arrêtons-nous un instant sur les structures. Un peu au Nord de l'Ubaye et du Queyras, en remontant la vallée de la Durance vers Briançon, le domaine briançonnais, à l'Est, chevauche directement le domaine dauphinois, à l'Ouest, par un des contacts majeurs des Alpes, le Chevauchement Pennique Frontal, ou Front Pennique. Ce contact, d'échelle crustale, bien visible sur le profil sismique ECORS Alpes, limite les Alpes dites externes, à l'Ouest, des Alpes internes, à l'Est : celles qui sont en grande partie passées en subduction.

Au niveau de l'Ubaye, le suivi en surface du front Front Pennique est perturbé par la présence de la nappe du flysch à helminthoïdes. Le front et la base de cette nappe peuvent d'ailleurs être vus comme le prolongement de ce Front Pennique. On constate que la position de l'épicentre du séisme de 2014 correspond géographiquement au prolongement du Front Pennique sous la nappe du flysch à helminthoïdes.

Comment vérifier si la direction de la faille principale ayant joué lors de ce séisme correspond à celle du Front Pennique ? On peut, par exemple, utiliser les répliques du séisme. En effet après un séisme important, si les contraintes ont été relâchées sur la zone de rupture principale, elles ont augmenté à ses extrémités : le relâchement de ces contraintes propagées correspond aux "répliques" d'un séisme. Si le nombre de répliques ne permet pas encore de mettre en évidence une direction, il peut être intéressant d'étudier la sismicité passée de la zone.

Positions des épicentres des séismes de deux "essaims de séismes" récents de l'Ubaye (Alpes de Haute-Provence, entre Briançon, au N, et Barcelonnette, au S)

Figure 5. Positions des épicentres des séismes de deux "essaims de séismes" récents de l'Ubaye (Alpes de Haute-Provence, entre Briançon, au N, et Barcelonnette, au S)

Les triangles bleus sont des stations sismologiques. Les cercles représentent les séismes avec un diamètre proportionnel à leur magnitude. En blanc, séismes de M>1 enregistrés entre 2003 et 2004 (magnitude maximale 2,7). En rouge, séismes de M>1 enregistrés depuis février 2012 (en rouge cerclé de blanc, épicentre du séisme de magnitude 4,3 du 26/02/2012, dont le foyer était à 8,8 km sous le niveau de la mer). En noir, les 20 derniers séismes enregistrés (dernier en date de magnitude 4,8 le 7/04/2014, dont le foyer était à 8,5 km sous le niveau de la mer).


On constate que l'Ubaye est très active depuis le 26/02/2012, avec, entre autres, un séisme de magnitude 4,3 qui avait quasiment le même épicentre que le séisme de 2014. Depuis le séisme de 2012, plusieurs milliers de séismes ont été enregistrés : on parle de séismes en « essaim ». Or l'essaim actif depuis 2012 s'aligne grossièrement selon une direction NNW-SSE sub-parallèle à celle du Front Pennique. De plus, à seulement quelques kilomètres au Sud-Est de la zone actuellement active, une « crise » de séismes en essaim avait généré plus de 16 000 séismes en 2003 et 2004, grossièrement alignés selon la même direction. Notons au passage que cette région est l'une des plus actives des Alpes françaises : en 1959, un séisme de magnitude 5,5 à Saint-Paul-sur-Ubaye fit de nombreux dégâts immobiliers.

Qu'en est-il du mécanisme au foyer de ces séismes ? La déformation finie à grande échelle marquée par le Front Pennique est nettement en raccourcissement, ce qui pourrait amener le profane à penser à un mécanisme compressif…

Mécanisme au foyer, extension locale en contexte de raccourcissement


Le mécanisme au foyer déterminé par inversion des formes d'ondes à plusieurs stations sismologiques est nettement extensif (extension ~E-W), avec une composante décrochante. La direction constatée d'après les répliques suggère de choisir le plan focal de direction NNW-SSE : le mécanisme au foyer donne un azimut N160°, un pendage 75°SW, et un sens et une direction de glissement du bloc supérieur sur le plan focal de -133° par rapport à l'azimut du plan (mouvement normal avec une composante décrochante du bloc supérieur vers le Nord-Ouest, donc dextre).

Dans le détail, on remarque que le plan focal retenu n'a pas un pendage vers l'Est comme le Front Pennique, mais vers l'Ouest. Il s'agit peut-être d'une faille conjuguée à cet accident. Il est également possible que, malgré l'alignement observé des séismes récents dans cette zone, la rupture précise du 7/04/2014 ait affecté une faille orientée selon l'autre plan focal, orienté N050°, 45°SE, glissement à -32° soit un mouvement normal et décrochant senestre. Quoi qu'il en soit, ces dernières considérations ne modifient pas l'interprétation de premier ordre d'un contexte extensif Est-Ouest.

Mécanismes au foyer des séismes de l'essaim de 2003-2004

Les mécanismes au foyer des séismes de l'essaim de 2003-2004 (Jenatton et al., 2007) sont également extensifs et/ou décrochants, avec une direction d'extension ~E-W.

Le séisme du 7/04/2014 (cercle jaune) replacé sur une coupe des Alpes à la hauteur de Barcelonnette

Figure 8. Le séisme du 7/04/2014 (cercle jaune) replacé sur une coupe des Alpes à la hauteur de Barcelonnette

On a souligné en rouge le Front Pennique (F.P.) et son prolongement sous la nappe du flysch à helminthoïdes. Les flèches jaunes symbolisent le caractère extensif du mécanisme au foyer, situé sur une faille à proximité du Front Pennique. Fh : Flysch à helminthoïdes, Br. : Briançonnais, SL : Schistes Lustrés, MCI : Massifs Cristallins Internes.


Cette extension, qui pourrait sembler paradoxale dans une chaîne de montagnes ne serait-elle pas qu'un phénomène local limité à l'Ubaye ? Vérifions à l'échelle des Alpes françaises. En utilisant les mécanismes au foyer d'un grand nombre de séismes importants ayant eu lieu dans les Alpes externes et internes il est possible de construire une carte interpolée du champ de déformation actuel dans les Alpes.

Carte interpolée du champ des déformations sismiques dans les Alpes, obtenue à partir des mécanismes focaux

Figure 9. Carte interpolée du champ des déformations sismiques dans les Alpes, obtenue à partir des mécanismes focaux

Les séismes dont le mécanisme au foyer a été utilisé pour l'interpolation sont marqués par des cercles dont la couleur correspond à la déformation liée à ce séisme. Le caractère extensif ou compressif de la déformation est indiqué par un paramètre r correspondant au pendage de l'axe de déformation principal, pris positif pour une compression (vert à rouge), négatif pour une extension (vert à bleu).


Qu'observe-t-on ? L'ensemble des Alpes internes, entre le Front Pennique à l'Ouest et la plaine du Pô à l'Est, est en extension (en bleu sur la figure ci-dessus). Les seules zones majeures de compression (en rouge) en France sont dans les chaînes subalpines septentrionales (Aravis, Bornes, Bauges, Chartreuse) et méridionales (nappe de Digne, arc de Nice).

Comment donc expliquer cette activité sismique extensive dans les Alpes internes ?

La réponse vient du mouvement relatif complexe de la plaque Adriatique (aussi appelée plaque apulienne) par rapport à la plaque Eurasie. Les mesures par GPS de la cinématique actuelle montrent des déplacements à très faibles vitesses, proches des incertitudes de mesure, ne permettant pas une démonstration nette des mouvements autour de l'arc alpin. La cinématique GPS est cependant compatible avec une extension dans les Alpes internes.

Le GPS ne résolvant pas la question, il est donc nécessaire d'étudier la cinématique de l'arc alpin sur une plus grande échelle de temps. La méthode couramment employée est celle du paléomagnétisme. Rappelons-en rapidement le principe : les minéraux magnétiques des roches (typiquement hématite, magnétite) enregistrent, en-dessous d'une certaine température, le champ magnétique ambiant lors de leur cristallisation (roches magmatiques) ou d'un réchauffement (roches métamorphiques) ou s'alignent avec le champ magnétique ambiant lors de leur dépôt (roches sédimentaires). Dans les Alpes internes, une formation présente une forte susceptibilité magnétique (c'est-à-dire a enregistré un champ magnétique fossile) : l'Ammonitico Rosso, un marbre (calcaire ici légèrement métamorphique) au faciès pélagique, du Jurassique inférieur (180 Ma), connu en France sous le nom de marbre de Guillestre, ou marbre griotte, et riche en oxydes de fer magnétiques. Plusieurs auteurs ont fait des prélèvements dans cette formation et déterminé l'orientation et l'âge du champ magnétique « fossile » enregistré dans la roche. Les oxydes de fer de l'Ammonitico Rosso ont vu leur magnétisation réinitialisée par un métamorphisme modéré (~300°C) au début de l'Oligocène (vers ~35 Ma). La cinématique déduite du paléomagnétisme de ces prélèvements est donc la somme des mouvements subis par les Alpes internes au cours du Néogène (depuis ~35 Ma).

Carte tectonique simplifiée, et cinématique post-Oligocène des Alpes Occidentales

Figure 10. Carte tectonique simplifiée, et cinématique post-Oligocène des Alpes Occidentales

Les rotations de différents domaines, notées H, L, T et C (pour les différents auteurs), ont été déduites du paléomagnétisme. La cinématique décrite par les flèches blanches est liée à la faille du Simplon (SFZ). Massifs cristallins externes notés AA, MB, BL, PX et AR. Accidents majeurs notés FPT (Chevauchement Pennique Frontal), SFZ (Zone de Faille du Simplon), et TL (Ligne de Tonale = Ligne Insubrienne).


On constate une rotation anti-horaire des domaines internes des Alpes, de plus en plus importante du Nord (~25°) au Sud (~70° dans l'Ubaye, ~120° dans les Alpes Ligures italiennes). Cette rotation, et son gradient croissant vers le Sud, peuvent s'expliquer par une combinaison de mouvements (voir figure ci-dessous) dont l'origine est probablement la rotation anti-horaire de la plaque Adriatique à l'Est. Le couplage entre Adriatique, Alpes internes et Alpes externes est assuré par un jeu dextre de la Ligne Insubrienne (entre Alpes internes à l'Ouest et Adriatique à l'Est) et du Front Pennique. À ce couplage de la rotation viennent se greffer un détachement (mouvement en extension) vers le Sud des Alpes internes depuis la faille du Simplon, au Nord, et une rotation d'un microbloc constitué par les Alpes Ligures (extrême Sud-Est de l'arc alpin), entre la plaque Adriatique et l'Argentera, avec un jeu senestre.

Schéma de la cinématique actuelle de l'arc des Alpes internes

Figure 11. Schéma de la cinématique actuelle de l'arc des Alpes internes

Les hachures verticales indiquent la zone des Alpes ligures, soumise à un cisaillement senestre.


La rotation de l'Adriatique à l'Est de l'arc alpin est due au « recul » vers l'Est de la plaque Adriatique, sous l'effet du retrait du panneau plongeant maintenant subduit sous les Apennins, comme le montre la figure ci-dessous.

Cinématique de la Méditerranée occidentale depuis 35 Ma

Figure 12. Cinématique de la Méditerranée occidentale depuis 35 Ma

La plaque Adriatique et son mouvement relatif par rapport à l'Europe sont annotés en rouge. En vert on a figuré le mouvement de retrait du panneau de lithosphère océanique téthysienne appartenant à la plaque Adriatique, et plongeant en subduction sous Corse-Sardaigne-Baléares-Espagne. En bleu, l'extension "arrière-arc" correspondante, responsable de l'ouverture de la Méditerranée Occidentale.


Dans l'état actuel des connaissances, il semble que cette rotation, combinée à un poinçonnement de l'Europe vers le Nord-Ouest localisé au Nord des Alpes françaises, implique pour les zones internes une extension Est-Ouest couplée à un déplacement vers le Sud, en accord avec les mouvements GPS et les déformations sismiques actuelles.

Conclusion

Pour conclure, retenons que la dynamique des Alpes françaises est complexe.

D'une part, les déformations finies majeures qui structurent les massifs alpins montrent un raccourcissement, issu d'une compression ~NW-SE lié à la subduction de l'océan alpin, puis du Briançonnais et du Dauphinois sous l'Adriatique au Crétacé supérieur et au Paléogène. Le rapprochement entre les plaques Afrique et Eurasie, qui a été à l'origine de cette compression, est toujours en cours, à raison d'à peine à 1 cm/an. Il est essentiellement accommodé par de la compression dans les chaînes du Maghreb, générant des séismes parfois meurtriers, comme par exemple celui de Boumerdès, près d'Alger, le 21/05/2003, de ML~6,7, ou celui, beaucoup plus meurtrier, d'El Asnam, 10/10/1980, M~7,3, 2600 morts.

D'autre part, la cinématique actuelle des Alpes semble essentiellement dirigée par un mouvement particulier de rotation de la plaque Adriatique dans un sens anti-horaire, lié au retrait d'un panneau plongeant en subduction sous les Apennins. Le retrait de ce panneau a par ailleurs entraîné l'ouverture récente de la Méditerranée occidentale (entre -30 et -20 Ma) et de la mer tyrrhénienne (depuis 8 Ma). Conséquence de cette rotation, les zones internes des Alpes sont maintenant en extension ~E-W, et ce probablement depuis le début de cette rotation. On trouve en effet des déformations finies extensives ~E-W dans les schistes lustrés du Queyras (boudinage, fentes de tension, failles normales conjuguées) datées vers -30 à -20 Ma (Tricart et al., 2004), qui peuvent être interprétées comme corroborant ce modèle, même si d'autres facteurs, notamment l'exhumation des massifs cristallins internes, ont aussi joué un rôle.

Enfin, vers le Nord-Ouest, le poinçonnement de l'Europe par la plaque Adriatique semble toujours dominer, entraînant une dynamique compressive dans les chaînes subalpines septentrionales et le Jura. Au Sud (Provence, Alpes maritimes), les mouvements aux limites se traduisent par une dynamique également compressive.

Références diverses

Sur Planet-Terre

P. Thomas, 2009. Le séisme de Lambesc du 11 juin 1909 : contexte géologique et structural du dernier "gros" séisme de France métropolitaine. Le séisme de Lambesc, en Provence, au niveau d'un chevauchement E-W, est associé à un raccourcissement N-S avec jeu inverse du Nord sur le Sud.

P. Thomas, 2009. Séisme de L'Aquila (Italie), 6 avril 2009. Le séisme de l'Aquila a affecté une zone interne de l'Apennin, également en extension.

Fiches des services sismologiques pour le séisme de l'Ubaye du 7 avril 2014

Bureau Central Sismologique Français : BCSF

Réseau National de Surveillance Sismique : RéNaSS

Laboratoire GeoAzur de Nice : SismoAzur

Service Géologique américain : USGS

Pages sur les séismes de l'Ubaye

Laboratoire ISTerre de Grenoble, 2014. Séisme du 07 avril 2014 - Ubaye

Département Analyse, Surveillance, Environnement du CEA, 2014. Événement sismique du 7 avril 2014 de Magnitude 5,3 au Nord Est de Barcelonnette

Sismalp (Grenoble), 2012, tenu à jour. Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence) essaim 2012-2014

Laboratoire ISTerre (Grenoble), 2012. Essaim de séismes Ubaye 2012

Publications sur la dynamique alpine

M. Gidon et coll., 1994. Notice explicative de la feuille Aiguille de Chambeyron à 1/50 000, BRGM

M. Collombet, J.C. Thomas, A. Chauvin, P. Tricart, J.P. Bouillin, J.P. Gratier, 2002. Counterclockwise rotation of the western Alps since the Oligocene: New insights from paleomagnetic data, Tectonics, 21, 4, 14.1-14.15

B. Delacou, C. Sue, J.-D. Champagnac, M. Burkhard, 2004. Present-day geodynamics in the bend of the western and central Alps as constrained by earthquake analysis, Geophysical Journal International, 158, 2, 753-774

L. Jenatton, R. Guiguet, F. Thouvenot, N. Daix, 2007. The 16,000-event 2003–2004 earthquake swarm in Ubaye (French Alps), Journal of Geophysical Research, 112, B11, B11304 [pdf]

L. Jolivet, R. Augier, C. Faccena, F. Negro, G. Rimmele, P. Agard, C. Robin, F. Rossetti, A. Crespo-Blanc, 2008. Subduction, convergence and the mode of back-arc extension in the Mediterranean region, Bull. Soc. Géol. Fr., 179, 6, 525-550

G. Rosenbaum, G.S. Lister, 2005. The Western Alps from the Jurassic to Oligocene: spatio-temporal constraints and evolutionary reconstructions, Earth-Science Reviews, 69, 3-4, 281-306

P. Tricart, S. Schwartz, C. Sue, J.-M. Lardeaux, 2004. Evidence of synextension tilting and doming during final exhumation from analysis of multistage faults (Queyras Schistes lustrýs, Western Alps), Journal of Structural Geology, 26, 9, 1633-1645