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Article | 01/03/2024

Pourquoi certains quartz sont-ils “fumés” ?

01/03/2024

Bernard Barailler

Ancien membre Club Dauphinois de Minéralogie et de Paléontologie, Ingénieur INP Grenoble

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Les quartz fumés du Mont-Blanc, une occasion de revenir sur les couleurs et de comprendre l’origine de cette coloration particulière.


Les couleurs du quartz

Il apparait que depuis longtemps les humains (dès Homo erectus), et pas seulement aujourd’hui les enfants, les collectionneurs et “joaillers”, sont fascinés par le quartz, ses formes lisses, sa transparence et ses couleurs variées (Garcia-Ruiz, 2016 [13], 2018 [14]). Toutefois, dans les roches granitiques, au sens large, les quartz, derniers minéraux à cristalliser, “bouchent” les trous et sont alors xénomorphes : leur forme ne reflète pas le réseau cristallin du quartz. D'autres contextes de cristallisation (filons, géodes) permettent l'expression de quartz automorphes : cristaux avec leur “pointe” caractéristique, quartz bipyramidaux ou gwindels (quartz “vrillés” autour du grand axe c).

Le quartz est généralement incolore ou légèrement blanchâtre (quartz laiteux), mais il peut avoir toute une palette de couleurs : améthystes violettes, citrines jaunes, quartz hématoïdes rouge sang… Enfin, certains quartz sont dits “fumés” lorsqu'ils sont gris-bruns et encore transparents (figure 1) voire morion lorsqu'ils en deviennent opaque (figure 2). Provenant du Mont-Blanc, quelques quartz fumés d’une belle couleur “cognac” sont associés avec des octaèdres de fluorines rose (figure 27). Les plus beaux spécimens, exposés dans les musées, forment alors des cathédrales cristallines d’une grande beauté (figure 27).

Quartz fumé bipyramidé, Mont-Blanc (6 cm)

Répondre à la question de l'origine de la teinte des quartz fumés est en apparence simple mais nécessite d'aborder préalablement la notion de couleur. La couleur (et sa perception) est un processus avec de nombreuses étapes mettant en jeu des phénomènes physiques, chimiques, biologiques et neurologiques, complexes. Les principes fondamentaux de ce processus seront abordés ici de manières simplifiée.

La couleur des quartz fumés est liée principalement aux impuretés d'ions Al3+ et aux rayons gamma (γ) reçus par des quartz initialement incolores et transparents. Mais quelles sont dans la nature les sources de ces rayons γ ? Comment arrivent-ils jusqu'au quartz ?

Pour obtenir un quartz fumé, un seuil d'irradiation optimal de 150 000 grays[1] est nécessaire, à une température inférieure à environ 50°C durant tout le processus d'irradiation.

Pour les quartz fumés dans les zones granitiques, il convient donc d'aborder la courbe de baisse de température d'un pluton granitique en lien avec sa couverture et les processus tectoniques régionaux.

Enfin la migration des fluides peut avoir un rôle prépondérant eu égard à la forte solubilité des ions uranium U6+, radium Ra2+, potassium K+… Ceci permet en effet d'expliquer pourquoi, pour un même encaissant granitique, on peut avoir des quartz incolores et plus loin, à quelques mètres seulement, des quartz fumés voire morions.


La perception des couleurs : un processus complexe

La couleur, et sa perception, est un processus complexe au cours duquel interviennent de multiples étapes : nature de la lumière incidente, interaction lumière-matière, captation des photons par l'œil, réaction chimique dans les cellules de la rétine, création d'impulsion électrique, transmission neurologique, interprétation avec la sphère du langage (figure 3).

La perception de la couleur, un processus complexe

Il est à noter que les rayons incidents peuvent appartenir à une gamme Ωa de fréquences[2] différente de celle Ωb des rayons reçus par le détecteur, en l'occurrence l'œil humain pour la couleur (figure 4).

Pour qu'il y ait un rayonnement qui arrive à nos yeux, il faut une source d'énergie parmi les suivantes.

  • Une réaction chimique, comme les lucioles dans la nuit : énergie chimique → Ωvisible.
  • La réflexion de rayonnement du spectre visible : Ωvisible → Ωvisible.
  • Un rayonnement électromagnétique invisible du style rayonnement X qui renvoie également des rayons X permettant de décrire la structure cristalline : ΩX → ΩX.
  • La fluorescence[3] ultraviolette : ΩUV --> Ωvisible.
  • Cela peut également être la phosphorescence qui perdure plus longtemps[4] : Ωvisible → Ωvisible.
  • Restitution de chaleur sous forme de rayonnement électromagnétique par un corps “chaud” avec une fréquence maximale d'émission dépendant de la température du corps[5] : Soleil → Ωvisible ; corps humain → ΩIR.
  • Circulation de courant électrique dans un matériau semi-conducteur (diode électroluminescente – LED). Au moment où un électron rebouche un “trou”, il passe de la bande de conduction à la bande de valence, il perd alors une certaine quantité d’énergie qui est émise sous la forme d’un photon : Courant électrique → Ωvisible (voir plus loin, la théorie des bandes).

La lumière incidente

Pour en expliquer les caractéristiques, la lumière peut être décrite comme une onde électromagnétique avec des fréquences ν, ou comme constituée de particules de masse nulle, les photons, porteur d'une énergie E, les deux descriptions étant liées (lien E-ν, voir plus loin).

La couleur d'un objet correspond à des photons qui sont réfléchis par cet objet et qui arrivent à nos yeux. Par exemple, s'il n'y a pas de lumière incidente, hors phénomène de luminescence, l'objet est noir.

Les photons réfléchis dépendent des photons incidents qui ont frappé l'objet. Dans le cas de la lumière naturelle sur Terre, il s'agit des photons émis par le Soleil qui est une étoile au stade de naine jaune. Elle possède un spectre d'émission qui lui est propre (type spectral). Si la Terre était exposée au rayonnement d'une étoile à un stade différent (par exemple, une géante rouge) le spectre émis serait probablement différent et donc les couleurs réfléchies également.

La figure suivante montre la gamme de rayonnement en fonction de leur fréquence, avec les domaines de fréquence Ωi correspondants.

Spectre électromagnétique

Figure 4. Spectre électromagnétique

Le spectre dit “visible” est la gamme de fréquences détectable par l'œil humain, c’est-à-dire que l'on peut voir.


L'interaction lumière-matière

Les photons obéissent à la dualité onde-corpuscule, on peut leur attribuer une fréquence propre ν reliée à leur énergie E selon la loi de Planck E = hν, où h est la constante de Planck. Ces photons, en fonction de leur fréquence, peuvent être réfléchis, transmis, réfractés, diffusés (phénomènes ondulatoires “classiques”)...

Cette interaction matière-rayonnement est régie par les règles de la mécanique quantique et de la physique statistique. Les photons (spin 1) appartiennent à la famille des bosons qui ont un spin entier. Leur comportement répond à la statistique de Bose-Einstein : ils peuvent être plusieurs à occuper le même état quantique. La matière est composée d'électrons, protons et neutrons. Ce sont des fermions qui ont un spin demi-entier. Ils obéissent à la statistique de Fermi-Dirac : d'après le principe d'exclusion de Pauli deux fermions ne peuvent occuper simultanément un même état quantique.

Analyser l'interaction des photons incidents avec la matière reviendrait à résoudre l'équation de Schrödinger de toutes ces particules avec leur couplage… Au premier ordre, c'est l'interaction entre les électrons de valence des atomes de la surface de l'objet et les photons incidents qui dictent cette réflexion. Les autres photons sont réfractés, diffusés ou absorbés (chaleur, phonons, excitons…). Donc, en première simplification, ce sont les électrons périphériques qui sont en interaction avec les photons incidents qui vont provoquer la lumière que nous recevons dans les yeux.

On a principalement les interactions suivantes.

  • Les transitions du champ cristallin pour les éléments « chromophores » présents dans la structure cristalline même à l'état de traces (Fe2+, Cu2+, Mn2+ et Mn3+, Cr3+…). Ceci donne respectivement les couleurs verte à l'olivine, bleue au turquoise, rose à la morganite[6]… L'énergie du photon incident est utilisée pour opérer une transition de l'électron périphérique d'un niveau d'énergie à un autre.
  • Les transitions de transfert de charges au niveau des orbitales moléculaires : Fe2+↔ Fe3+ ; Ti4+↔ Ti2+… Ceci donne respectivement les couleurs bleue de la cordiérite et de l'aigue marine, bleue du saphir et du disthène… L'énergie du photon permet à un électron de passer d'un atome à un autre.
  • Les centres colorés sont des défauts au sein du réseau cristallin qui modifient les états d'énergie des électrons proches : lacune, atome interstitiel, association de deux défauts (Schottky, Frenkel)… Ceci donne la couleur des fluorines, des améthystes. C'est le cas aussi du quartz fumé avec la combinaison d'une radiation de haute énergie (rayon gamma) avec une substitution d'un ion Si4+ par des ions Al3+ et M+ (voir plus loin).
  • D'après la théorie des bandes pour les semi-conducteurs, la bande d'énergie interdite (gap) entre le niveau d'énergie des électrons de valence occupé et le niveau d'énergie de la bande de conduction n'est pas très importante. L'apport de l'énergie des photons incidents permet l'excitation d'un électron qui franchit ce gap et devient un électron libre dans la bande de conduction. Les semi-conducteurs possèdent alors un “gaz d'électrons libres” (« mer de Fermi ») dès qu'ils sont éclairés dans le domaine visible. Ce “gaz” réfléchit fortement les photons comme un miroir. C'est ce qui donne l'éclat métallique de la pyrite (figure 5) ou de la stibine.

Un minéral va donc répondre potentiellement avec plusieurs phénomènes physiques en fonction de l'énergie des rayons incidents (figure 6).

Réflexion (effet miroir) sur la surface d'un cube de pyrite

Figure 5. Réflexion (effet miroir) sur la surface d'un cube de pyrite

Cube de pyrite, 3 cm d'arête, Logrono Espagne


Spectre d'absorption du béryl (Be3Al2Si6O18)

À lire à propos des couleurs

G. Bonnet, 2004. La couleur, CultureSciences Physique - ISSN 2554-876X

Les effets de surface

De nombreux effets de surface peuvent modifier cette réflexion.

Une surface lisse aura tendance à réfléchir davantage qu'une surface rugueuse (figure 8). Par exemple les surfaces lisses d'un cube de pyrite vous renvoient quasiment toute la lumière incidente comme un miroir. Alors que la trace de la pyrite (c'est-à-dire la pyrite en poudre) est de couleur vert-noir à marron (figure 7).

La loi du contraste simultané des couleurs peut aussi modifier la perception de la couleur d'un minéral : on ne perçoit pas une couleur de la même manière selon les autres couleurs présentes dans l'environnement proche.

De la même façon si la lumière incidente est en dessous d'un certain angle (incidence rasante), il n'y aura pas de réflexion.

Il faut mentionner également que la surface est en fait une frontière entre deux milieux dont les indices de propagation des ondes sont différents. On parle de réflexion vitreuse entre deux diélectriques[7] (air/quartz) ou bien métallique (air/pyrite).

La couleur brun foncé dans un quartz peut également provenir d'inclusions comme le rutile, l'actinote, le graphite, la chlorite brune… Ce type de quartz (brun ou de toute une palette de couleurs) peut se trouver dans des terrains sédimentaires. Ceci n'a rien à voir avec le quartz dit fumé dont on va aborder la formation dans la suite.

L'œil : un filtre passe-bande

L'œil humain est un capteur qui fonctionne comme un filtre passe-bande. Il ne retient qu'une partie du spectre électromagnétique (figure 4), partie appelée de ce fait spectre visible (car “visible” par l'œil humain) et correspondant à la gamme de longueurs d'onde allant de 380 à 750 nm.

Chez les reptiles, le filtre peut être différent et permet de voir une partie de l'infrarouge, ce qui est très utile pour chasser la nuit en repérant les infrarouges dégagés par la chaleur animale des proies. On peut modifier ce filtre pour les êtres humains avec des lunettes de vision nocturne, basées sur des cristaux de niobate de lithium. Par ailleurs, la déficience des cônes de la rétine oculaire qui assurent la captation des couleurs au niveau de l'œil peut modifier la perception des couleurs. C'est notamment le cas du daltonisme.

À lire à propos de l’œil et de la vision

G. Bonnet, G. Furelaud, 2004. L'œil : structure, origine et propriétés physiques, Planet-Vie

A. Cortel, G. Bonnet, G. Furelaud, 2004. Quelques expériences pour mettre en évidence les propriétés de l'oeil, CultureSciences Physique - ISSN 2554-876X

G. Bonnet, G. Camus, 2004. Les défauts de la vision, CultureSciences Physique - ISSN 2554-876X

Le cerveau et la verbalisation de la couleur

Ensuite, le système nerveux (nerf optique) transmet l'influx jusqu'au cerveau dans une zone appelé cortex visuel. Une destruction de l'aire V4 qui traite les couleurs rend le patient achromate, c'est-à-dire “aveugle aux couleurs”, mais le reste de sa vision est parfaitement normale. Enfin, le lien avec la sphère du langage au niveau du cerveau va permettre la verbalisation de la couleur perçue.

On a donc un processus complexe. La couleur est donc un critère de détermination des minéraux moyennement fiable. Ceci doit être complété par d'autres tests simples : dureté, couleur de la trace, densité, réaction à l'acide…

Enfin, l'analyse précise des minéraux demande des moyens plus sophistiqués : diffraction des rayons X, microsonde, etc.

Le cas du quartz fumé

Contexte géologique

Les quartz fumés peuvent se trouver dans de nombreuses conditions : pegmatites (Coustouges, Pyrénées-Orientales), en périphérie des plutons granitiques comme ceux du Massif Central ou du Massif armoricain, ou dans des « fours » comme ceux du granite du Mont-Blanc ou de l'Oisans (figures ci-dessous)…

Les quartz du Massif Central ou du Massif armoricain (massifs hercyniens) sont en général tardy-hercyniens. Les quartz des Alpes, eux, sont souvent contemporains des mouvements cénozoïques et non pas des granites anciens au sein (ou au voisinage) desquels ils se trouvent. Dans le Mont-Blanc, par exemple, les plus belles fentes sont d'âge miocène. Pour en savoir plus sur les filons de quartz des massifs hercyniens ou des Alpes, on pourra respectivement, se reporter à Quelques filons de quartz dans la chaine hercynienne : l'ile Callot (29), Roche d'Agoux (63), Saint-Paul-la Roche (24) et à Filons de quartz des Alpes et d'ailleurs.

Quartz fumés

Figure 9. Quartz fumés



Des pièges dans la théorie des bandes

En mécanique quantique, un électron isolé occupe des niveaux d'énergie spécifiques. Au sein d'un réseau cristallin, les électrons occupent des bandes d'énergie séparées par des portions interdites ; la dernière bande occupée par un électron est appelée bande de valence, et celle vide juste au-dessus bande de conduction.

En absorbant l'énergie fournie par les rayonnements, un électron peut quitter la bande de valence et passer dans la bande de conduction. Ce départ laisse dans la bande de valence un trou qui se comporte comme une charge positive. Ainsi formés, l'électron et le trou peuvent se déplacer librement et indépendamment dans le cristal. L'électron se meut dans la bande de conduction, le trou à l'intérieur de la bande de valence. Ces électrons et trous se recombinent plus ou moins spontanément en fonction de la température.


Les défauts structuraux et impuretés du minéral considéré, en rompant localement la périodicité du système cristallin, entrainent l'apparition de niveaux d'énergie supplémentaires à l'intérieur de la bande interdite. Alors les électrons et les trous libérés par l'irradiation peuvent y être piégés. Pour cela il faut leur fournir une énergie d'activation Ea ( figure 11).

Plus d'un piège est profond dans la bande interdite (Ea importante), plus il sera stable thermiquement. Le centre coloré associé disparaitra moins “facilement” par un apport de chaleur, le minéral gardera donc plus “facilement” sa couleur modifiée.

À la source du bronzage des quartz fumés

Pour un quartz dans un granite, les particules α, β et les rayons cosmiques ont une profondeur de pénétration trop faible . Au premier ordre, leur contribution d'irradiation peut être négligée.

Donc le “bronzage” si particulier des quartz fumés est dû aux rayons gamma (γ). Ces rayons γ proviennent des chaines de désintégration de l'uranium et du thorium notamment du radium, descendant de l'uranium (226Ra) et du thorium (228Ra). L'uranium est présent dans la biotite (voir plus loin). Par ailleurs, le potassium-40 (40K) présent dans les feldspaths se transforme en argon-40 (40Ar) en émettant des rayons gamma (avec une énergie de 1460,8 keV).

La structure du quartz est principalement un empilement de tétraèdres “SiO4”en structure hélicoïdale. Mais parfois, au sein du réseau, un intrus s'insère, comme un ion Al3+. Ces ions aluminium peuvent provenir du lessivage de l'orthose (KAlSi3O8) du granite encaissant. Le déficit de charge par rapport à Si4+ est compensé par un ion H+ (figure 12).

Normalement cette simple substitution n'a pas d'effet, le quartz reste incolore. En général, les rayons γ traversent le cristal sans obstacle. Mais si un rayon gamma arrache un électron d'un des atomes d'oxygène liés à l'aluminium, celui-ci peut se déplacer vers l'ion H+. Ce dernier devient neutre “H” et migre alors dans le réseau cristallin. L'ensemble Al3+ et O devient un piège [AlSiO4/h+]0. Sa configuration électronique absorbe la lumière visible rendant ainsi le quartz noir. On a également une absorption dans l'ultraviolet (figure 13).

Les quartz bronzent sous les rayons gamma


Irradiation γ et formation d'un piège [AlSiO4/h+]0

De façon générale (figure 14), on a le raisonnement analogue avec d'autres ions M+ : principalement Li+, mais aussi Na+, K+, voire également un trou, c'est-à-dire pas d'électron sur l'orbitale.

[AlSiO4/M+]0 + γ →[AlSiO4/h+]0 + M+ + e

M+ + e → M

Création et disparition des centres colorés, température critique

La durée de vie moyenne τ d'un électron célibataire dans un piège est donnée par la loi d'Arrhenius : 1/τ = ν°.exp(−Ea/kT), où k est la constante de Boltzmann, T la température (en Kelvin), ν° un facteur de fréquence (s−1) et Ea l'énergie d'activation (en eV), c'est-à-dire la “ profondeur ” du piège. On peut aussi écrire τ = τ° exp (Ea/kT), en notant τ° = 1/ν° (en s).

Autrement dit, plus la température est grande, plus la durée de vie τ tend vers son minimum τ°, temps au bout duquel la recombinaison est alors effective, le piège est alors “vide” et le cristal redevient transparent. On a donc une compétition entre le nombre de rayons γ incidents (dose d'irradiation) qui “créé” des pièges, et l'agitation thermique (température) qui les “détruit”.

A contrario, si l'énergie d'activation est forte, c'est-à-dire la profondeur du piège importante, le piège sera plus stable.

Pour le quartz fumé, lorsqu'on dépasse une température critique d'environ 220°C, le quartz reprend sa configuration initiale et redevient incolore.

Le rayon de l'ion hydronium H+ (0,0015 pm) est plus de 50 000 fois plus petit que celui du lithium Li+ (76 pm) (cf. Les éléments chimiques ou ChemGlobe H et Li). Il a donc une plus grande facilité à migrer et à se déplacer au sein du réseau cristallin. Il est à noter que le taux de diffusion des ions Al3+ est très faible : 10−27 m2/s à T = 400°C (Pankrath, 1988 [27]). Il faudrait, à cette température, 10 millions d'années pour parcourir 1 μm (Freer, 1981 [10]) ! A contrario, H+ diffuse beaucoup plus vite (échange H–Li) : 10−11 m2/s à 800°C (Jollands et al., 2020 [20]).

Par ailleurs, au vu de la structure hélicoïdale du quartz, on voit qu'il existe des canaux privilégiés au sein desquels les ions peuvent migrer plus facilement et qu'on appelle les c-axis channels (canaux d'axe c[8] (figure 15).


Ensuite, l'anisotropie de la conduction thermique du quartz est importante : Kc = 11,3 J/msK alors que Ka = Kb = 6,5 J/msK. Le flux de chaleur est donc 2 fois plus important suivant l'axe c. Les ions auront donc tendance à migrer plus facilement le selon la direction de l'axe c, dans les c-channels.

Enfin, de nombreuses possibilités de recombinaison existent. Voici celles qui amènent la création des pièges [AlSiO4/h+]0. Elles concernent principalement les ions Li+ et H+.

[AlSiO4/Li+]0 + γ → [AlSiO4/h+]0 + Li+ + e.

L'ion lithium peut diffuser dans les interstices du réseau cristallin. Les trous et les électrons peuvent également migrer. On a alors l'apparition d'un centre [AlSiO4]. La rencontre avec un ion H+ donne alors :

[AlSiO4] + H+ → [AlSiO4/H+]0.

De même que pour le lithium, avec les centres avec hydrogène on a :

[AlSiO4/H+]0 + γ → [AlSiO4/h+]0 + H+ + e.

La production des pièges [AlSiO4/h+]0 provient donc de deux sources principales (figure 16).

Modes de production des pièges [AlSiO4/h+]0

En termes d'énergie d'activation, pour le quartz fumé, les centres Al-OH sont plus stables que les centres Al-Li, ce qui revient à avoir des pièges Al-Li plus profonds (Halliburton et al., 1981 [17] ; Sim et Catlow, 1989 [39]). Ceci suggère que quand la proportion de centres Al-Li est forte, cela conduit à avoir des quartz plus fumés (Guzzo et al., 1997 [16]).

Un seul rayon γ ne fait pas un quartz fumé, il faut une certaine dose d'irradiation. Le paragraphe suivant détaille les conditions expérimentales d’obtention d’un quartz fumé.

Conditions expérimentales pour obtenir un quartz fumé

Les conditions expérimentales pour réaliser un quartz fumé à partir d'un quartz incolore sont les suivantes.

Une irradiation de rayons γ avec une dose D  > 100 kGy, la dose optimale serait de 150 kGy comme le montre la figure 17, ci-dessous, basée sur la résonance de spin électronique (ESR) (Benzid et Timar-Gabor, 2020 [5] ; Rezaee et al., 2021 [36] ; Iqbal et al., 2019 [19]).

Réponse ESR des pièges Al-h pour des doses croissantes de radiation gamma

Figure 17. Réponse ESR des pièges Al-h pour des doses croissantes de radiation gamma

APP en % : amplitude de pic à pic du signal ESR (electron spin resonance) ramené à la valeur maximale (100 %).


Une température T<50°C durant la période d'irradiation. Tc = 50°C est la température critique au-dessus de laquelle la chaleur augmente la mobilité des électrons et ainsi contrebalance la création des centres colorés (Scherer et al., 1993 [38]). Par ailleurs, avec la chaleur certains ions M+ peuvent diffuser, principalement H+ (Nunes et Lameiras, 2005 [26]). Ceci rendrait le quartz à nouveau incolore. À noter que si l'on chauffe un quartz fumé au-delà de 220°C, il redevient incolore grâce au même processus de diffusion (Barbosa, 2009 [3]).

La présence d’ions Al3+ en substitution de Si4+. Le caractère plus ou moins fumé est donné par le Darkening Degree (DD), avec DD = α2 – α1, avec α les coefficients d'absorption (pour une bande de fréquence donnée), α2 après irradiation et α1 avant irradiation. DD est proportionnel à la concentration d'ions Al3+ dans le réseau cristallin : DD [cm−1] ~ 0,64.(2,3 + 1,2.10−2.CAl [N/106 Si]. Pour avoir un caractère fumé vraiment perceptible, il faut DD > 2 cm−1. À noter que l'on a une relation analogue avec les ions Lithium Li+ (Guzzo et al., 1997 [16]). Des échantillons de quartz incolores avec CAl = 322 ppm (332 atomes d'Al pour 1 million d'atomes de Si) ne prennent pas une coloration fumée même à 300 kGy. Ceux à 3 378 ppm sont colorés dès 100 kGy (Rezaee et al., 2021 [36]). Lors de la formation du quartz, les concentrations des centres colorés peuvent varier dans le temps (figure 18). Cela suggère que les ions Li+ et H+ auraient tendance à migrer en suivant le flux de chaleur (paragraphe précédent) le long de l'axe c vers les épontes. Les pièges restent alors majoritairement à la pointe du cristal. Le reste du cristal pouvant être le lieu de recombinaisons. Ceci expliquerait la concentration de centres colorés sur les surfaces progressives de croissance. Ceci peut se produire pendant la période de croissance à des températures T>50°C. Pour les quartz lamellaires de La Gardette, la température de croissance en solution saline est comprise entre 270 et 350°C. Pour les quartz de basse température du Massif Central, la température est probablement comprise entre 50 et 200°C.

Quartz lamellaire de La Gardette (France) fumé par une irradiation gamma

Figure 18. Quartz lamellaire de La Gardette (France) fumé par une irradiation gamma

Les épisodes de croissance sont mis en évidence par des zonations des centres colorés.


Enfin, la présence d'ions hydroxyle (OH) ou hydronium (H+) a tendance à réduire fortement la couleur fumée du quartz (Guzzo et al., 1997 [16]).

Pour les quartz alpins, les teneurs en ppm d'Al, Li et H sont variables. Elles varient notamment en fonction du type de quartz. Les quartz lamellaires qui sont plutôt à caractère hydrothermal (La Gardette) peuvent avoir des teneurs très élevées. En revanche pour les quartz macromosaïques du Mont-Blanc, les teneurs maximales restent beaucoup plus faibles (figure 19).

Les quartz macromosaïques (Friedlaender, 1951 [11]), hydrothermaux, sont composés de secteurs cristallins maclés, décalés les uns des autres. Ils sont reconnaissables aux lignes de suture présentes sur leurs faces. Leur croissance s'est effectuée dans une solution saline relativement stable pour des températures comprises entre 270 et 450°C (hors habitus Tessin).

Teneurs en H, Li et Al dans les quartz alpins

Les centres Al−H sont les centres dominants dans le quartz d'origine hydrothermale, tandis que les centres Al−Li sont dominants pour celui d'origine pegmatitique (Guzzo et al., 1997 [16]). Par ailleurs, au sein d’un même cristal, on peut avoir un forte variabilité de ces teneurs en H, Li et Al dans les zones de croissance du cristal. Un changement de pH pourrait impliquer cette forte variation des teneurs en Al et Li durant les phases de croissance (Perny et al., 1992 [30])


Origine des rayons gamma dans les minéraux

Dans la Terre, les rayons gamma proviennent en général de réactions dans les noyaux d'uranium, thorium et potassium. De nombreux minéraux comportent des traces notables d'uranium (figure 21).

Teneur en uranium de minéraux fréquents

Pour les minéraux qui contiennent de l'uranium dans leur formule structurale, leur forte teneur implique une irradiation localisée forte même dans des encaissants qui peuvent être peu radioactifs. Parmi ces minéraux on trouve, par exemple, l'uraninite (UO2) (pechblende), la famille de l'autunite (Ca(UO2)2(PO4)2·10-12H2O) y compris la torbernite (Cu(UO2)2(PO4)2·12H2O) (figure 22), et la brannérite (UTi2O6) (figure 23).

Origine des rayons gamma dans les roches

Comme on peut le voir, l'uranium est présent dans de nombreux minéraux qui composent les roches notamment le granite (quartz, feldspath, mica). Le tableau de la figure suivante donne les teneurs en uranium, thorium et potassium pour différentes roches et notamment des granites.

Teneur en U, Th et K des principales roches crustales

Pour le granite, la moyenne est de l'ordre de 5 ppm d'uranium. Ces teneurs sont toutefois variables en fonction des massifs granitiques. Les données dans la littérature sont variables. Ceci est probablement dû à l'âge des granites, leur altération par l'eau… Ceci dépend aussi du protolithe et des processus magmatiques. On peut également avoir une forte hétérogénéité au sein d’un même granite (Ballouard, 2016 [2]).

Pour le granite du Mont-Blanc, les teneurs sont de l'ordre de 19 ppm d'U et 31 ppm de Th (Labhart et Rybach, 1974 [21] ; Poty et al., 2012 [34]). Pour les granites du Massif Central la valeur moyenne serait de l'ordre de 4 ppm d'uranium.

Solubilité de l'uranium et rôle des fluides

La solubilité des ions uranium est variable en fonction notamment de la température, du pH, des conditions d'oxydo-réduction (conditions “rédox”)… Une propriété importante de l'uranium est sa solubilité dans les solutions oxydées (U6+) mais son insolubilité dans les milieux réduits (U4+) (figure 25).


Par exemple, les ions uranium en solution saline à une température T>300°C peuvent atteindre une teneur de 1000 ppm (soit 1 ‰) (Bastrakov et al., 2010 [4]) ! Aux températures submagmatiques, les solubilités de l'uranium ont été étudiées expérimentalement par Peiffert et al. (1994 [28], 1996 [29]) ainsi que Zharikov et al. (1987), à 770°C et 500-600°C, respectivement. Ces études révèlent que des solubilités extrêmement élevées de l'uranium (jusqu'à ~ 1 000 ppm) sont possibles dans les saumures aqueuses de chlorures-fluorures. Ces conditions sont équivalentes à celles retrouvées lors des deux phases de métamorphisme du granite du Mont-Blanc durant le cycle varisque et lors de l’orogenèse alpine. Des portions du massif du Mont-Blanc ont alors été exposées aux “saumures” issues du socle de Trias à des températures de l’ordre de 400 à 500°C (Leloup et al., 2005 [22]).

L'uranium fait partie des éléments dit incompatibles, lors d'un phénomène de fusion, il se concentre dans la phase liquide. Il va se donc se retrouver dans les roches les plus différenciées comme le granite et notamment dans les derniers « jus » qui forment les pegmatites (comme à Coustouges dans les Pyrénées) et les filons périgranitiques (nombreux dans le Massif Central).

Le radium, lui, est issu de la désintégration de l'uranium. Il est l'une des sources principales des rayons gamma. L'ion radium Ra2+ est fortement soluble dans l'eau principalement sous forme d'hydroxyde Ra(OH)2 (figure 25).

L'ion potassium peut être issu de l'hydrolyse totale de l'orthose (KAlSi3O8) présente dans les sommets du granite du Mont-Blanc.

Par ailleurs, lors des phénomènes de métamorphisme, on a une déstabilisation du granite. L'ion fluorure F est libéré lors de la production de chlorite à partir de la biotite [K(Mg,Fe)3(OH,F)2(Si3AlO10] du granite, biotite qui peut contenir quelques pour mille de F en substitution d'OH. C'est pour cela qu'on trouve souvent des cristaux de quartz fumés avec un dépôt de chlorite dessus (figure 26).

Le fluor permet aussi d'avoir de la fluorine (ou fluorite) qu'on trouve après le quartz dans la séquence de cristallisation (figure 27).

Gwindel (quartz “vrillé”) chloriteux

Figure 26. Gwindel (quartz “vrillé”) chloriteux

Ce quartz gwindel fumé contient des dépôts de chlorite.



Le chlore est également présent, probablement du fait des circulations fluides à travers les évaporites sous-jacentes du Trias. En effet, les inclusions fluides dans les cristaux de quartz font apparaitre des cubes de sel (Mullis et al., 1994 [24] ; Deicha, 1955 [9]). Comme on l'a évoqué précédemment, les ions uranium sont particulièrement solubles sous la forme de complexes liés au fluor et au chlore. Or ces deux éléments, comme on vient de le voir, ont dû être présents dans les fluides cénozoïques qui ont parcouru le granite hercynien du Mont-Blanc. Lors de la circulation de cette saumure très oxydante, l'eau sous pression remonte à travers les failles et fractures du granite. Elle lessive les épontes environnantes et met ainsi en solution uranium, thorium, radium et potassium. Les fluides qui ont été en contact avec les quartz ont donc été probablement une source de rayons gamma, par leur composition en éléments chimiques radiogéniques.

L'encaissant granitique est-il la cause de l'irradiation des quartz fumés du Mont-Blanc ?

Évolution de la température d'un granite

À la surface de la Terre, la température moyenne est de 14°C. Ensuite, en simplifiant, dans les 30 premiers kilomètres de la croute terrestre, la température augmente de 1°C tous les 30 mètres (gradient géothermique moyen). Dans cette zone, la température à la profondeur d [m] est donc donnée par l'équation Td [°C] = 14 + (d/30). Ainsi un enfouissement ou un ré-enfouissement supérieur à 1100 m permet de passer le seuil de la température critique de 50°C. De même, à 6 km de profondeur, en dépassant la température de 220°C, on rend alors incolores des quartz initialement fumés !

Par ailleurs, il faut tenir compte du refroidissement du pluton granitique initial. La figure suivante montre la baisse de température de granites pyrénéens et du Mont-Blanc. On voit que l'évolution n'est pas linéaire et dépend du refroidissement intrinsèque du pluton granitique mais aussi de paramètres tectoniques et sédimentaires locaux (couverture). Pour une courte période de moins de 20 Ma, on peut prendre comme hypothèse une remontée constante du granite du Mont-Blanc sous l'effet de la tectonique alpine et de l'érosion qui s'en suit.

Refroidissement par paliers de différents granites (Pyrénées, Mont-Blanc)

Figure 28. Refroidissement par paliers de différents granites (Pyrénées, Mont-Blanc)

La cristallisation d'un granite est suivie par un refroidissement jusqu'à la température d'équilibre correspondant à sa profondeur. Ensuite, tout enfouissement ou remontée du pluton s'accompagne d'une transition vers une nouvelle température d'équilibre.


Profondeur de pénétration des rayons gamma dans le granite

Les rayons gamma ont une profondeur de pénétration limitée par la matière environnante. Si l'intensité initiale est I0, l'intensité qui a traversé x mètres de matière est modélisée par I = I0.exp(−μx), où μ est un coefficient d'absorption. Le coefficient d'absorption μ dépend de l'énergie du rayon gamma initial. Si vous lancez une flèche avec un arc, sa profondeur de pénétration dans la cible dépendra de l'énergie initiale que vous avez mise dans la flèche. Les calculs montrent que même pour un rayonnement gamma très énergétique son intensité initiale est divisée par 1 million en 1 mètre environ. Pour le granite, en moyenne, μ = 0,45 cm−1 pour E = 81 keV et μ = 0,12 cm−1 pour E = 1 232 keV (Najam et al. 2016 [25]). On peut donc estimer qu'un cristal de quartz ne reçoit les rayons gamma que des éléments radioactifs présents dans une sphère de granite qui l'entoure d'un rayon de 1 m (figure 30).

Atténuation de l'intensité d'un rayonnement γ dans un granite

Sphère d’encaissant d’origine des rayons γ affectant un quartz

Notons ici que, dans un espace “vide” (air) ou rempli d'eau, l'atténuation des rayons gamma est beaucoup plus faible que dans une roche.

Dose d'irradiation

Dans le cas des quartz du Mont-Blanc, la dose d'irradiation par heure fournie par l'encaissant granitique (19 ppm d'uranium) est comprise entre 6 et 8.10−4 mGy/h (Poty et al., 2012 [34]). Si on prend comme hypothèse qu'il faut une dose minimum de 100 kGy pour obtenir un quartz fumé à partir de rayons gamma, avec la dose moyenne de 7.10−4 mGy/h, il faudrait 16 millions d'années pour obtenir un quartz fumé (avec seulement 44 kGy, il faudrait 7 Ma – Poty, 1968[31]).

L'âge des quartz du Mont-Blanc est estimée à 18 Ma (Poty et al., 2012 [34]). Des datations récentes ont été obtenues à partir de monazite : plus 14 Ma pour les fentes horizontales, moins de 9 Ma pour les fours verticaux (Bergemann et al., 2019[]6).

La température de formation des quartz macromosaïques du Mont-Blanc, au sein de solutions salines, est comprise entre 270 et 450°C (Gnos et al., 2021 [15]). À titre d'exemple, la valeur choisie ici est de 380°C (Poty et al., 2012 [34]).

Au paragraphe précédent, on a pris comme hypothèse une remontée constante du granite du Mont-Blanc, donc une baisse linéaire de la température.

Alors, au prorata temporis, la durée d'irradiation avec une température T<50°C est  : t = 18 × (50-14) / (380-14) = 1,8 Ma.

Cette période de temps est bien inférieure à celle nécessaire pour obtenir des quartz fumés, c'est-à-dire 16 Ma pour 100 kGy (ou 7 Ma pour 44 kGy) (figure 31).

Durée d'irradiation à T<50°C pour un quartz du Mont-Blanc âgé de 18 Ma

Figure 31. Durée d'irradiation à T<50°C pour un quartz du Mont-Blanc âgé de 18 Ma

Hypothèse de remontée constante depuis 20 Ma, donc depuis la formation des quartz il y a 18 Ma, avec baisse linéaire de la température de 380°C à la situation actuelle de 14°C.


Donc, avec une température critique de 50°C, la dose de rayons gamma issus du granite encaissant n'est pas suffisante pour obtenir la couleur des quartz fumés du Mont Blanc.

On trouve dans le granite du Mont-Blanc des quartz incolores en dessous de 2400 m et des quartz morions au-dessus de 4000 m (environ 2 Ma de différence de remontée). Ceci montre également qu'en moins de 2 Ma d'années, en prenant l'hypothèse d'une irradiation uniquement due à l'encaissant granitique, on pourrait passer d'un quartz incolore à un quartz morion. Ce qui impliquerait une dose de radiation par heure de 57.10−4 mGy/h, bien supérieure à celle du granite mesuré de 7.10−4 mGy/h (Poty et al., 2012 [34]). La teneur d'uranium devrait alors atteindre 155 ppm par rapport aux 19 ppm mesurés actuellement.

Par ailleurs, dans le même filon, c'est-à-dire avec le même encaissant granitique, à quelques mètres de distance, on peut trouver des quartz morions et plus loin des quartz à peine fumés.

Ces trois constatations montrent que l'encaissant du granite seul n'est pas la cause de la coloration des quartz fumés du Mont-Blanc. Un premier modèle avait été élaboré pour expliquer la coloration fumée des quartz du Mont-Blanc à partir de l’encaissant granitique (Poty et al., 2012 [34]). Un des points-clés était une température critique de 150°C. En effet, cette température avait été arbitrairement choisie car elle était assez inférieure à 200°C, température au-delà de laquelle les quartz lamellaires de La Gardette, irradiés expérimentalement à 44 kGy, redevenaient incolores. Depuis, la température critique est fixée à 50°C (Scherer et al., 1993 [38], voir les conditions expérimentales), température qui ne permet plus une irradiation suffisante par l’encaissant pour expliquer la coloration des quartz du Mont-Blanc.

Rôle des fluides

Il est à noter également que les fluides qui ont présidés à la croissance des quartz à des températures et pressions élevées ont fortement altéré les épontes de granite environnantes. Notamment les ions uranium, thorium et radium, fortement solubles, ont été lessivés. À titre d’exemple, les pertes en uranium par le lessivage des eaux météoriques peut être de 30 à 50 % (Friedrich et al., 1987 [12]). Donc, les premières couches de granite encaissant (5 à 10 cm) seraient plus pauvres en ces éléments, donc l'irradiation globale probablement plus faible que la dose de 7.10−4 mGy/h retenue initialement sur des granites “sains”. Au bout de 10 cm, les rayons gamma des autres couches sont déjà fortement absorbés (pratiquement la moitié) (figure 32).


Par ailleurs, pour le même encaissant granitique au sein d'un même filon (teneurs en Al et Li supposées comparables), on retrouve des quartz blancs (aussi dits “laiteux”) et à quelques mètres des quartz très fumés voire morions. Or, dans la paragenèse, aucun des minéraux spécialement radioactifs pouvant expliquer ces variations (voire figure 21) ne semble avoir été trouvé en quantité appréciable. Une autre hypothèse pourrait être l’existence d’une paragenèse ancienne céée sous une température inférieure à 50°C. Elle aurait ensuite disparu à la faveur, par exemple, d’un changement de pH des fluides (Shen et al., 2020 [37]) et n’apparaitrait plus dans la paragenèse actuelle. Toutefois, dans les fours de quartz fumé du Mont-Blanc, la teinte (darkening degree) parait relativement homogène (figure 23). On ne voit pas non plus de figures d’attache de cristaux anciens. Ceci semble donc en contradiction avec une paragenèse ancienne qui aurait induit des irradiations plus localisées.

La solution à cette énigme pourrait être les fluides qui ont séjourné dans ces fentes granitiques. En effet, pour la solution saline à 400°C, la solubilité peut s'élever à 1000 ppm d'uranium. La solution est en contact direct avec les quartz, le facteur d'atténuation dans l'eau est moindre. Dans ces conditions le temps d'irradiation nécessaire à partir de fluides serait de seulement 0,3 Ma. Ceci est compatible avec la durée de 1,8 Ma d'exposition à des températures inférieures à 50°C (température critique).

Donc les fluides riches en ions radioactifs solubles peuvent être la cause du caractère fumé des quartz du Mont-Blanc. Ils peuvent également expliquer pourquoi on trouve les différences de couleur, notamment avec les quartz incolores.

D'abord il faut savoir que pour un Darkening Degree (DD en cm−1) équivalent, plus le cristal est épais plus l'atténuation perçue est grande, donc plus il apparait fumé.

Pour les quartz “blancs”, “laiteux”, que l'on voit dans les filons, la couleur blanche est due à de minuscules gouttes d'eau piégées dans le cristal qui diffusent la lumière. Ceci atténue donc la perception de la couleur fumée de ces quartz.

L'examen du granite du Mont-Blanc montre qu'il est traversé, à l'échelle microscopique, de micro-fractures engendrant une forte perméabilité (Poty et Cathelineau, 1999 [33]). On a donc une migration des fluides potentiellement facilitée. Dans une poche “étanche” de quartz, on aura un temps de résidence des fluides radioactifs potentiellement plus long que sur un filon massif fermé. Ceci pourrait expliquer le caractère plus fumé des quartz des fours.

Quand on analyse la géométrie des filons, on peut apercevoir des différences notables. Dans les fours du Mont-Blanc, les cristaux ont des positions relativement aléatoires et toutes leurs faces exprimées ont pu être en contact avec les fluides. Ceci donne une coloration relativement semblable aux différents quartz d'une même plaque. Pour des filons comme ceux du Massif Central, les cristaux ont eu une croissance compétitive marquée. Ils forment des blocs relativement étanches (figures 33 et 34). Leurs pointes perpendiculaires aux épontes ont principalement été en contact avec les fluides à des températures T<50°C. On note alors un caractère plus foncé sur les pointes que sur le reste des faces. Ceci suggère une contribution d'une irradiation de proximité (d<2 cm) par des fluides radioactifs.

Plaque de quartz “serrés” à pointes fumées

Figure 33. Plaque de quartz “serrés” à pointes fumées

Les pointes, côté fluides, montrent une coloration plus marquée que la partie côté épontes.


Échantillons de quartz fumés issus de filons hydrothermaux, La Roche d'Agoux (Puy-de-Dôme)

Figure 34. Échantillons de quartz fumés issus de filons hydrothermaux, La Roche d'Agoux (Puy-de-Dôme)

Dans ces vues en coupe, on voit bien que ce sont les pointes, au contact des fluides hydrothermaux, qui sont “fumées”.

À retrouver à la figure 14 de Quelques filons de quartz dans la chaine hercynienne : l'ile Callot (29), Roche d'Agoux (63), Saint-Paul-la Roche (24).


En résumé, la dose D reçue par un cristal est la somme de 3 composantes : D = Dencaissant + Dfluides + Dminéraux locaux.

Au premier ordre, on néglige la contribution des particules α, β et des rayons cosmiques. En effet un encaissant granitique aura tendance à irradier plus qu'un terrain sédimentaire classique. Des fluides radioactifs résidents ont un impact majeur de proximité, enfin la présence de minéraux radioactifs comme la torbernite, la pechblende dans la paragenèse associée au quartz contribue également à une irradiation de proximité.

Pour les quartz fumés du Mont-Blanc, en l'absence de minéraux radioactifs spécifiques dans la paragenèse on a : D ≈ Dencaissant + Dfluides.

On peut alors calculer la contribution des fluides à l'obtention d'une coloration fumée au travers de leur taux d'irradiation.

Pour les cristaux du Mont-Blanc qui ont 18 Ma, le temps d'irradiation à une température inférieure à 50°C est estimé à 1,8 Ma. En prenant une irradiation du granite réduite de moitié par le lessivage, l'atténuation liée à la distance et un calcul d'une irradiation sur 4π (l'enveloppe “sphérique” du four de quartz), la dose nécessaire minimum fournie par les fluides pour atteindre la couleur fumée serait de 64.10−4 mGy/h. Ce qui donnerait une valeur équivalente de 175 ppm d'U6+ dans le fluide (figure 35).


Cette valeur de 175 ppm est une valeur théorique moyenne car les fluides sont mobiles. Leur temps de résidence dans le four est variable. La poche peut être scellée par la cristallisation du quartz (figure 32). On peut aussi avoir un fluide avec un flux plus ou moins continu. La circulation des fluides est une activité cyclique comme on peut le voir, par exemple, avec la cristallisation d'améthyste/quartz de Chaméane (encaissant de leucogranite) (figure 36) ou la cristallisation de quartz coloration variable d'un filon du Puy-de-Dôme (figure 37).

Améthyste et activité cyclique des fluides minéralisateurs

Figure 36. Améthyste et activité cyclique des fluides minéralisateurs

Améthyste de Chaméane, Haute-Loire, France


Quartz et activité cyclique des fluides minéralisateurs

Figure 37. Quartz et activité cyclique des fluides minéralisateurs

Ce zonage montre que les conditions de cristallisation (dont la composition des fluides) ont changé au cours de la cristallisation du quartz. Quartz fumés zonés ramassés dans des champs près de Charbonnières-les-Varennes (Puy de Dôme).

À retrouver à la figure 15 de Quelques filons de quartz dans la chaine hercynienne : l'ile Callot (29), Roche d'Agoux (63), Saint-Paul-la Roche (24).


Conclusion

La couleur fumée des quartz est due à la présence de centre coloré [AlSiO4/h+]0 issus d'une irradiation par des rayons γ.

Ces radiations γ sont dû à l'encaissant, aux minéraux radioactifs locaux de la paragenèse, mais aussi tout particulièrement aux fluides radioactifs avec lesquels les quartz ont été en contact.

Ces fluides ont des temps de résidence variés liés à une activité souvent cyclique. Pour un même encaissant, ils peuvent induire les différences de coloration au niveau des quartz : incolores, fumés, morions...

Au-dessus d'une température critique de 50°C, les centres colorés sont créés mais aussi annihilés au même rythme. La dose d'irradiation nécessaire à la formation des quartz fumés (100 kGy) doit donc être réalisée en dessous de cette température critique de 50°C.

L'âge du cristal, sa température de formation et la pente de la baisse de température de l'encaissant permettent de déterminer alors l'importance du rôle des fluides.

Le temps de résidence de ces fluides radioactifs permet d'expliquer les différentes colorations des quartz fumés rencontrés dans la nature.

Remerciements

Merci à Bastien Audran (Géosciences Rennes) et Benjamin Rondeau (LPG, Nantes) pour les échanges sur le sujet des quartz fumés et à Pierre Thomas (ENS de Lyon) pour sa relecture et ses commentaires.

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[1] Le gray [Gy] est l'unité de dose absorbée du système international. Il représente une énergie d'un joule apportée par un rayonnement à une masse d'un kilogramme : 1 Gy = 1 J/kg.

[2] Rappel. Lien entre fréquence, notée f ou ν, et longueur d'onde, notée λ, en fonction de la célérité de propagation c, on a : λ = c / ν.

[3] La fluorescence est l’absorption par un atome d’un rayonnement et la réémission à une autre fréquence / longueur d’onde.

[4] Contrairement à la fluorescence, la phosphorescence implique un changement de spin dans l'état de l'électron excité.

[5] Loi de Wien pour un corps noir : λmax = 2,8987.10−3 / T, avec λ en m et T en K

[6] Morganite ou béryl rose : Be3Al2Si6O18.

[7] Un milieu est dit diélectrique s'il ne contient pas d'électrons libres permettant de conduire un courant électrique, mais peut être polarisé par un champ électrique.

[8] On décrit le réseau de la maille d'un cristal par un repère à 3 vecteurs dont on donne les 3 normes (longueurs) a, b et c, avec a⩽b⩽c, et les angles α, β et γ entre chaque couple de vecteurs. Pour le quartz α, l'axe c est l'axe “d'allongement”, a et b formant le plan de symétrie hexagonale.