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Article | 25/09/2020

La géologie de Lyon depuis la confluence Rhône-Saône

25/09/2020

Gilles Dromart

Laboratoire de Géologie de Lyon / UCBL-ENS de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Sortie géologique dans Lyon, depuis la Confluence et le pont Raymond Barre, à partir de panoramas et de données géologiques complémentaires, forages et coupes.


Pour aborder la géologie de Lyon et de sa région, deux ressources complémentaires sont proposées : un article, “régional”, retraçant Les grands traits de l'histoire géologique de Lyon et, cet article, plus “local”, proposant de s'intéresser à La géologie de Lyon depuis la confluence Rhône-Saône.

Pour les Lyonnais, le quartier Confluence est un site bien connu. Lors de sorties scolaires ou d'étude, de nombreux élèves et étudiants lyonnais ou de passage s'y rendent pour en étudier l'architecture et/ou pour visiter son Musée des Confluences, avec ses expositions permanentes ou temporaires et ses manifestations régulières. Le pont “modes doux” (tram-vélo-piétons) Raymond Barre dessert le quartier au Sud et jouxte le musée, c'est donc un point de passage pour toute personne se rendant sur les lieux, ou du moins un point de rencontre ne demandant pas de grand détour. Le présent article propose donc une découverte de la géologie de Lyon depuis ce pont en utilisant son point de vue remarquable vers le Sud comme point de départ.

Panorama vers le Sud depuis le pont Raymond Barre (à côté du Musée des Confluences de Lyon), vue de la rive droite du Rhône de la confluence avec la Saône

Figure 1. Panorama vers le Sud depuis le pont Raymond Barre (à côté du Musée des Confluences de Lyon), vue de la rive droite du Rhône de la confluence avec la Saône

Ce panorama montre, en rive droite du Rhône, deux “reliefs” séparés par une “vallée”, la vallée de l'Yzeron.

Le socle indiqué sur la vue interprétée peut être facilement observé et “touché” au pied du pont ferroviaire de la Mulatière (en blanc sur la photo, à droite) en rive droite de la Saône, côté Mulatière.


Carte géologique simplifiée du Sud de Lyon vers la confluence Rhône - Saône

Figure 2. Carte géologique simplifiée du Sud de Lyon vers la confluence Rhône - Saône

La carte géologique du secteur observé (un peu élargi) permet de repérer l'Yzeron actuel, petit cours d'eau peu à même d'entailler une large vallée, du moins dans des conditions proches des débits actuels.

On observe que les dépôts alluvionnaires récents et les formations glaciaires du Quaternaire recouvrent une grande partie de la carte, et que les terrains autres, mis à part le socle, apparaissent essentiellement dans la large vallée actuelle du Rhône et dans l'étroite vallée de l'Yzeron actuel.

Pour comprendre les relations géométriques entre les formations observées à l'affleurement, les forages sont un outil essentiel car ils permettent de révéler les terrains recouverts par les dépôts récents mais aussi de vérifier si toutes les formations sont ou non présentes en un point donné, dans l'ordre stratigraphique attendu.


Log interprétatif d'un forage avec sonde “gamma ray” sur la rive droite du Rhône, à Oullins

Figure 3. Log interprétatif d'un forage avec sonde “gamma ray” sur la rive droite du Rhône, à Oullins

Les forages permettent de récupérer, observer et caractériser les terrains traversés. Avec ou sans échantillonnage, les forages permettent aussi l'introduction d'outils de mesure (sondes diagraphiques) pour un relevé régulier d'une grandeur telle, ici, le taux d'émission spontanée gamma dont les sources principales sont les minéraux contenants uranium, thorium et potassium, minéraux des roches cristallines, détritiques ou organiques.

Ainsi, forage peut allier prélèvements et mesures physiques. Des forages peuvent servir à étalonner les relations entre les terrains et les valeurs physiques associées, alors que d'autres pourront être essentiellement des sondages physiques, plus rapides, permettant de suivre la position de couches ou de limites facilement repérables par des caractéristiques physiques préalablement validées.

La donnée de position topographique la plus directe est la profondeur du forage, mesurée depuis la surface topographique et donc depuis un “zéro” dépend de la position géographique. Un autre repère important pour positionner côte à côte les résultats des sondages est la cote, c'est-à-dire l'“altitude” par rapport à un niveau de référence. Une cote constante indique alors une horizontale.

Les cotes données ici sont les cotes NGF (nivellement général de la France) dont le zéro est donné pour la France métropolitaine par le marégraphe de Marseille (NGF IGN 69)


Cartographie des affleurements et forages réalisés dans le secteur étudié au Sud de la confluence Rhône – Saône (Lyon)

Figure 4. Cartographie des affleurements et forages réalisés dans le secteur étudié au Sud de la confluence Rhône – Saône (Lyon)

Certains sondages correspondent aux besoins d'aménagements tels que le prolongement du métro B, l'aménagement du Port Édouard Herriot, aux études préalables à la construction du Musée des Confluences, à des besoins en eau de l'industrie pétrochimique. Ceci explique le nombre important de forages effectués dans le secteur. La compilation des résultats de ces nombreux sondages permet une bonne connaissance du sous-sol, indispensable pour percer un tunnel de métro mais aussi fort utile pour mettre en évidence des paléo-reliefs aujourd'hui comblés et recouverts.


Carte géologique des terrains situés à la cote 140 m au Sud de la confluence Rhône - Saône

Figure 5. Carte géologique des terrains situés à la cote 140 m au Sud de la confluence Rhône - Saône

Les terrains présents à la cote 140 m (socle, molasse miocène, ou alluvions pliocènes) sont précisés pour chaque point d'observation directe de forage (cercle) et chaque point de déduction à partir des affleurements de surface (losanges) (sous un socle affleurant ou rencontré à une cote donnée, il y a nécessairement du socle). Comme point de repère, la surface de la pointe Sud de la confluence Rhône - Saône est environ à la cote 165 m. La carte représente donc les terrains que l'on observerait si on arasait tout pour se ramener à l'horizontale passant 25 m sous ce point.

Cette carte révèle l'extension des terrains miocènes dans la partie Est de la carte (attention le Nord est en bas) et montre clairement que les terrains les plus jeunes, pliocènes, comblent des incisions importantes, avec l'une d'elles dans le socle, du Sud puis virant à l'Ouest (flèches bleues notées “Ria pliocène” qui marquent la remontée de la mer dans la vallée incisée fini-miocène), et deux autres dans le socle et/ou les terrains miocènes, vers le Nord et l'Est. Le cours du Rhône actuel et celui de l'Yzeron ne se superposent pas exactement à ces paléo-cours d'eau.

Ces incisions post-molasse miocène et anté-Pliocène, sont la conséquence d'un important surcreusement lié à l'abaissement du niveau de la Méditerranée (−1200 m par rapport à l'actuel) lors de la crise de salinité messinienne, à la fin du Miocène (cf. La crise de salinité messinienne en Méditerranée).


Les observations de surface, mais aussi les cartes telles que la carte ci-dessus permettant de “décaper” la surface à différentes profondeurs, et des données complémentaires telles que des “sondages” ou mini-coupes sismiques permettant de repérer des réflecteurs bien marqués (toit du socle, par exemple) aboutissent à un modèle tomographique étendu latéralement et verticalement. Toutes ces données latérales et verticales, et ce modèle “3D” permettent, entre autres, la réalisation de coupes montrant les incisions des paléo-cours d'eau et leur évolution dans le temps.

Coupes montrant les incisions messiniennes et leur remplissage pour le thalweg principal du paléo-Rhône (en haut) et un tributaire (en bas)

Figure 6. Coupes montrant les incisions messiniennes et leur remplissage pour le thalweg principal du paléo-Rhône (en haut) et un tributaire (en bas)

En Haut. Coupe stratigraphique A montrant le profil du thalweg principal de l'incision fluviale messinienne, et son remplissage par les dépôts marins transgressifs de la Ria du Pliocène inférieur puis son comblement ultime par les nappes alluviales continentales du Pliocène supérieur (écho des surrections alpines et centraliennes).

En bas. Coupe stratigraphique B montrant le profil du thalweg d'un tributaire de l'incision fluviale messinienne, et son remplissage par les dépôts marins transgressifs de la Ria du Pliocène inférieur et par des conglomérats fluviatiles latéraux.

Localisation des coupes A et B sur la carte à la cote NGF 140 m, ci-dessus.

Le paléo-Rhône empruntait à la fin du Miocène les incisions du socle repérées comme “Ria pliocène” sur la figure 5. Il venait donc, localement à l'échelle de la confluence actuelle, de l'Ouest et non pas comme maintenant du Nord. La confluence paléo-Rhône - paléo-Saône était, elle, déportée plus au Nord, possiblement vers Caluire, probablement dans le secteur de Trévoux.


Une coupe synthétique, plus large, est aussi proposée. Elle montre l'agencement de tous les terrains repérés sur la première carte géologique (figure 2) à l'échelle de l'agglomération lyonnaise.

Coupe géologique simplifiée au travers de l'agglomération lyonnaise et log stratigraphique correspondant

Figure 7. Coupe géologique simplifiée au travers de l'agglomération lyonnaise et log stratigraphique correspondant

On remarque que le Rhône actuel, entre Fourvière et Lyon 7, coule à l'aplomb d'un paléo-tributaire du paléo-Rhône qui coulait, lui, plus à l'Ouest dans un thalweg plus profond.


Matériel support

Sont proposées au téléchargement les figures de cet article en meilleure définition pour une éventuelle impression à emporter sur le terrain.

Remerciements

Gilles Dromart remercie :

  • La société THARSIS ENERGY pour les moyens budgétaires et infographiques alloués à l'étude de la géologie de Lyon ;
  • Le SYTRAL pour l'autorisation à l'accès aux carottes et documents des sondages des extensions de la ligne de métro B ;
  • Yannick Decroux (FONDASOL), Romain Prost (SYSTRA), Stéphane Brulêt (MENARD Établissements) pour communication de documents de sondages ;
  • Speranta-Maria Popescu (GEOBIOSTRATDATA.Consulting) pour les datations palynologiques du forage d'Oullins ;
  • Jean-Pierre Suc (Sorbonne Université) et Emmanuel Egal (EGIS TUNNEL) pour leur contribution respective aux synthèses sur la crise de salinité messinienne et la géologie de Lyon.