Image de la semaine | 30/09/2013
Les shatter cones de l'astroblème de Vredefort, Afrique du Sud
30/09/2013
Résumé
Les cônes de percussion comme indices d'impact de météorite.
La semaine dernière, nous vous avons montré les impacts d'Henbury (Australie), impacts petits et jeunes. Cette semaine, nous vous en montrons un grand et vieux. La région de Parys-Vredefort, au SSO de Johannesburg (Afrique du Sud) se trouve au centre d'un des plus grands et des plus vieux cratères d'impact du monde, la structure de Vredefort. Cet impact date de 2 023 Ma. Très érodé, ce cratère d'impact est assez peu visible dans la morphologie. On ne voit que de vagues structures circulaires concentriques, centrées autour d'un dôme de roches métamorphiques et granitiques d'âge > 3Ga. Ce dôme, appelé dôme de Vredefort, a un rayon d'environ 25 km. Il est ceinturé par les roches (verticalisées) du supergroupe du Witswatersrand (2 970 à 2 710 Ma), principalement des grès et quartzites. Ce sont ces grès et quartzites verticalisés qui forment l'élément morphologique le plus visible. Autour de ce dôme de socle métamorphique et de sa ceinture de quartzites verticales, on trouve une série de rides anticlinales et synclinales grossièrement concentriques, peu visibles dans la morphologie, dont les terrains (sédimentaires) sont âgés de 2 710 à 2 100 Ma. Ces structures concentriques sont (peu) visibles jusqu'à 150 km du centre du dôme. On trouve des shatter cones dans le dôme métamorphique et surtout dans les quartzites périphériques. Les deux tiers Sud et Est de cette structure sont masqués, car recouverts par des sédiments phanérozoïques. Pendant des dizaines d'années, l'origine de ces structures grossièrement concentriques fut l'objet de débats (metamorphic core complex, intrusion magmatique cachée, cratère d'impact…). La découverte de shatter cones et d'autres roches que nous verrons les deux prochaines semaines ont finalement prouvé que la structure de Vredefort était constituée des restes très érodés d'un très grand cratère d'impact.
On pourra trouver un article de synthèse et une bibliographie sur la structure de Vredeford dans un article de Jean François Moyen (qui m'a montré ces affleurements).
Les shatters-cones correspondent à des fractures coniques qui partent d'un sommet (apex) et qui se répètent en cônes emboîtés, chaque cône d'ordre n+1 naissant sur une surface d'un cône d'ordre n (structures dites « cone in cone »). On ne trouve ces structures que dans deux contextes : sous le fond des cratères d'impacts ou associés aux explosions nucléaires souterraines. Sauf en cas de déplacements ultérieurs, la pointe des cônes est approximativement dirigée vers le point d'impact (ou de l'explosion nucléaire). L'origine précise de cette géométrie est loin d'être comprise. Ces fractures coniques seraient dues au passage d'une onde de choc de très haute pression (> 2 GPa). Ces shatter cones sont d'origine très précoce, avant la fin de l'éjection du matériel hors du cratère, puisqu'on peut en retrouver dans les brèches retombées dans ou autour du cratère (c'est le cas à Rochechouart). Ils sont particulièrement bien marqués dans les roches homogènes et isotropes comme les quartzites, beaucoup moins visibles dans les roches telles que gneiss et migmatites. Malgré leur genèse très imparfaitement comprise, la présence de cônes de percussion est un indice très fort de la présence d'un impact de météorite (quand l'érosion en a effacé la morphologie).
Dans la structure de Vredefort, on trouve des shatter cones dans le dôme métamorphique central et surtout dans ses quartzites périphériques (du fait de la nature de ces dernières). Dans ces quartzites, ils sont très majoritairement horizontaux. Mais on en a trouvé jusqu'à 75 km du centre du dôme. Des brèches d'impact plus ou moins fondues ont été trouvées jusqu'à 150 km du centre de la structure. La localisation des shatter cones, leur orientation, la répartition des brèches d'impacts, la faible visibilité des structures concentriques… pose le problème de la taille réelle du cratère et de sa géométrie. La genèse des cratères d'impact est détaillée, entre autres, dans l'article Les impacts dans le système solaire. Les cratères de grande taille, comme c'est le cas de Vredefort, sont des cratères complexes (avec piton central) ou des bassins (avec anneau central) à cause des phénomènes de rebond affectant leur centre. À Vredefort, le dôme métamorphique central (rayon d'environ 25 km) et sa périphérie de quartzites verticalisées correspondent certainement au piton/anneau central. L'état actuel de l'érosion empêche de savoir si cette structure centrale avait un centre déprimé ou non (anneau ou piton ?). Peut-être une étude systématique de la foliation dans les roches métamorphique de ce dôme permettrait-elle de savoir s'il s'agissait d'un piton ou d'un anneau.
La limité externe véritable de la cavité est plus difficile à déterminer, même pour les cratères peu érodés. En effet, à l'extérieur de la cavité directement creusée par l'impact, des phénomènes d'effondrement, des failles normales… font s'effondrer la bordure externe de la cavité vers son centre, créant des terrasses internes et agrandissant le diamètre apparent de la dépression finale. Il n'y a pas de consensus sur les dimensions véritables de la cavité initiale par rapport aux dimensions de la cavité terminale, elle-même très érodée et localisée très imparfaitement. On peut proposer que la cavité initiale à Vredefort mesurait 150 à 200 km de diamètre, pour une cavité terminale d'environ 300 km de diamètre.