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Image de la semaine | 08/01/2007

Glissement de boue, Il Sasso - Sassatella (Émilie Romagne, Italie)

08/01/2007

Pierre Thomas

ENS de Lyon - Laboratoire des Sciences de la Terre

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Le glissement de boue de Il Sasso - Sassatella : rides de progression et comparaison avec des coulées de lave et de glace.


Vue générale (été 2006) du glissement de terrain de Il Sasso - Sassatella (Italie)

Figure 1. Vue générale (été 2006) du glissement de terrain de Il Sasso - Sassatella (Italie)

La flèche rouge indique le site fléché aux images 2, 3 et 4


Après deux semaines d'interruption pour cause de coulées de lave et de cadeau de Noël, nous finissons l'exploitation de mes vacances italiennes 2006. Le hasard est souvent l'occasion de découvertes géologiques pour qui sait en profiter. Ces vacances italiennes se déroulaient dans un petit hameau de l'Apennin, propriété familiale d'un ami de 30 ans. Il se trouve que ce hameau est situé à 500 m d'un superbe glissement de terrain, nombreux dans cette région argileuse... Pour que je trouve ce hameau perdu dans la nature, cet ami m'avait d'ailleurs dit : « Tu prends la route SS 486, et tu tournes à droite avant un grand glissement de terrain à 45 km au Sud de Sassuolo ».Il s'agit d'un glissement fonctionnant périodiquement. Le dernier glissement important date de 2002.

L'image 1 montre l'état de ce glissement à l'été 2006. Mais le plus intéressant vient de l'étude des images Google Earth de ce même glissement, images prises à une date inconnue, entre 2002 et 2006.

Vue générale Google Earth du glissement de terrain de Il Sasso - Sassatella (Italie)

Figure 2. Vue générale Google Earth du glissement de terrain de Il Sasso - Sassatella (Italie)

Le hameau de Il Sasso est localisé par la croix rouge.


Les images 3 et 4 montrent deux vues détaillées (verticale et oblique) du milieu du glissement.

Les images 5 et 6 montrent deux vues détaillées de l'extrémité aval du glissement.

Ce qui est frappant dans ces images détaillées, c'est que le glissement, colonisé par la végétation (arbustes de plusieurs mètres), montre des rides courbes, à concavité tournée vers le haut. Les rides sont dues à une progression de la coulée plus rapide en amont qu'en aval, d'où le plissement de la surface du glissement. La forme convexe vers l'aval indique que le centre du glissement progresse plus vite que les bords.

Ce plissement de la surface peut avoir eu lieu à 2 époques différentes :

  • un plissement ancien, plus vieux que quelques dizaines d'années, ayant affecté à l'époque une surface nue, et colonisé depuis par la végétation ;
  • un plissement datant de 2001, ayant plissé une surface avec sa végétation mais sans la détruire.

Des observations du secteur central fléché en rouge suggèrent que la deuxième solution est la plus probable. La moitié amont de la coulée de boue n'a pas de couvert végétal important : tout a été détruit en 2001 par des flots rapides et destructeurs. La partie fléchée en rouge a gardé son couvert arboré ; il n'y a pas eu en cet endroit de flots rapides et destructeurs. Par contre, on retrouve une zone avec son couvert arboré détruit en aval de la flèche rouge : il a donc eu en aval de la flèche rouge des flots boueux rapides et destructeurs. On peut interpréter cela de la façon suivante : (1) le haut de la coulée a été parcouru en 2001 par des flots rapides et destructeurs. Ces flots se sont arrêtés en amont de la flèche rouge. (2) La zone fléchée en rouge n'a fait que glisser lentement d'une bonne centaine de mètres vers l'aval, sans destruction du couvert végétal. (3) L'aval de cette zone affectée de glissements lents a donné lieu à des avalanches et à des flots destructeurs et rapides.

Ces rides de progression courbes peuvent se retrouver à toutes les échelles sur des coulées de laves. Les images 7 à 10 montrent de telles rides de progression.



Vue de rides de progression courbes : coulée du flanc SE du Teide (Canaries)

Figure 9. Vue de rides de progression courbes : coulée du flanc SE du Teide (Canaries)

Cette coulée mesure une cinquantaine de mètres de largeur.



La progression plus rapide au centre d'un écoulement visqueux se voit aussi sur certains glaciers, comme la Mer de Glace, là où les alternances de glaces plus ou moins sales se traduisent par des alternances claires et sombres (bandes de Forbes) convexes vers l'aval.