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Article | 02/05/2024

« L'Anthropocène n'existe pas », ou la collision de la rigueur scientifique et de l'urgence écologique et médiatique

02/05/2024

Cyril Langlois

ENS de Lyon - Préparation à l'agrégation SV-STU

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Construction scientifique de l’échelle des temps géologiques, place des évènements forts mais pas nécessairement intégrables dans cette échelle.


Introduction

Le 20 mars 2024, l'hebdomadaire scientifique de référence Nature publiait parmi les “News” de son site internet un compte-rendu (Witze, 2024(a) [14]) de la décision rendue le jour même par la plus haute instance internationale de la géologie, l'IUGS (International Union of Geological Sciences), d'approuver le résultat du vote dévoilé le 4 mars par la Commission Internationale de Stratigraphy (International Commission of Stratigraphy, ICS) qui rejetait, à 12 voix contre 4, la proposition d'ériger l'Anthropocène en nouvelle subdivision de l'échelle des temps géologiques. Cette décision, à priori définitive, vient conclure un petit conflit interne à l'ICS, certains membres de la sous-commission chargée du Quaternaire ayant contesté la légitimité de certains votants. Au-delà de l'anecdote, cet épisode est l'occasion de revenir sur les raisons pour lesquelles cette division de l'Anthropocène est rejetée par la science stratigraphique alors que ce terme parait pertinent à de nombreux égards et que son usage s'est largement répandu hors des cercles scientifiques : une dénomination médiatique, toute pertinente qu'elle soit, ne fait pas un concept scientifique. C'est aussi l'occasion de rappeler comment est construite, depuis le début du XXe siècle, l'échelle des temps géologiques.

L'Anthropocène : brève histoire d'un mot

L'Anthropocène est d'abord un concept médiatique, mis en avant par le chimiste hollandais de l'atmosphère et prix Nobel de chimie Paul Joseph Crutzen (1933-2021) en 2000, avec le biologiste américain Eugene Filmore Stoermer (1934-2012), qui employait déjà cette appellation de manière informelle depuis une dizaine d'années (Crutzen et Stoermer, 2000 [3]). C'est surtout par un article de Paul Crutzen dans la revue Nature (Crutzen, 2002 [2]) que ce mot a fait florès. Mais Crutzen lui-même rappelait dans cet article que, dès le XIXe siècle, des auteurs comme l'italien Antonio Stoppani avaient déjà envisagé de désigner sous un nouveau nom la période récente où l'ampleur des activités humaines ferait de notre espèce un agent géologique à part entière. Stoppani avait forgé le nom Anthropozoïque (dans la lignée des ères Paléo-, Méso- et Cénozoïque) dès 1871 (Zalasiewicz et al., 2011 [16]).

L'Anthropocène désigne donc les temps actuels, durant lesquels l'espèce humaine et ses activités sont si omniprésentes et si marquantes sur les écosystèmes qu'elles pourraient y laisser des traces pérennes à l'échelle des temps géologiques, susceptibles d'être préservées dans les archives sédimentaires. Depuis, et déjà auparavant, de nombreux travaux ont documenté, qualifié et quantifié cette emprise profonde d'une seule espèce sur son environnement biotique comme abiotique. L'appellation a ainsi été adoptée par de très nombreux domaines de recherche, depuis l'écologie jusqu'aux sciences sociales et, avec la prise de conscience de l'urgence écologique, a rapidement quitté le domaine scientifique pour infuser dans la sphère médiatique généraliste. Selon les termes du groupe de travail sur l'Anthropocène de la Commission Internationale de Stratigraphie (ICS), l'“Anthropocène” a acquis toute une gamme de significations dans des communautés scientifiques très différentes[1]. Dans ces multiples récupérations, la définition rigoureuse de cette nouvelle entité historique n'est pas précisément questionnée, et notamment pas à quand remonte précisément l'entrée dans cet Anthropocène.

Dans l'article de 2002, Paul Crutzen [2] proposait effectivement d'assigner le nom “Anthropocène” à l'époque géologique actuelle, dominée de bien des manières par l'humain, en complément (supplementing) de l'Holocène – la période chaude des derniers 10-12 millénaires. Crutzen envisageait donc bien qu'à moins d'une catastrophe mondiale – un impact météoritique, une guerre mondiale ou une pandémie, l'humanité reste une force environnementale majeure dans les prochains millénaires et que la situation actuelle, appelée à durer, pouvait constituer une nouvelle division à part entière de l'échelle des temps géologiques. Par l'emploi de ce terme, Crutzen et Stoermer [3] choisissaient de positionner cette nouvelle étape à un niveau élevé dans la hiérarchie des divisions et subdivisions de l'échelle des temps géologiques, celui de la période, à l'instar de l'Holocène donc, mais aussi du Crétacé ou du Carbonifère tout entier. Niveau certes plus modeste que celui envisagé avec l'Anthropozoïque de Stoppani, sauf que l'échelle des temps géologiques de ce dernier n'était encore qu'une ébauche comparée à celle de l'orée du XXIe siècle. Le succès rencontré par cette appellation dans les médias et – surtout – dans les communautés scientifiques autres que celle des spécialistes de la stratigraphie et de la définition des temps géologiques, a finalement mis en demeure cette discipline de valider scientifiquement la réalité de ce nouveau chrononyme. Mais c'est là que la temporalité des médias s'est heurtée à celle d'une communauté et d'institutions scientifiques habituées à des travaux minutieux, voire tatillons, et à une structure décisionnelle très structurée et hiérarchisée, donc par nature lente, d'autant que ses décisions, une fois entérinées, sont censées définir le nouveau cadre chronologique adopté et exploité par l'ensemble de la communauté scientifique des sciences de la Terre.

L'échelle chronostratigraphique : une construction rigoureuse… encore inachevée

Se repérer dans les archives sédimentaires : un espoir du XIXe siècle

On fait remonter les premières observations rigoureuses des strates géologiques à Léonard de Vinci et la formulation des principes de la stratigraphie au Suédois Niels Stensen, dit Sténon, au XVIe siècle. Sténon souligne aussi l'utilité des fossiles pour définir le faciès des couches sédimentaires, mais il ne leur attribue pas d'intérêt chronologique, son cadre de référence restant le récit biblique. L'identification des discordances géologiques et leur liaison aux orogenèses est attribuée à l'anglais James Hutton (1726-1797), deux siècles plus tard (de la Cotardière, 2012 [1]) .

Mais c'est au XIXe siècle que l'examen du contenu fossilifère des couches sédimentaires a vraiment amené à considérer ces roches comme des archives de l'histoire géologique et biologique de la Terre. C'est l'un des premiers paléontologues, le français Alcide Dessaline d'Orbigny (1802-1857), qui échelonne les terrains fossilifères « en paléozoïques, triasiques, jurassiques, crétacés, tertiaires et contemporains » (de la Cotardière, 2012 [1]) et à les diviser encore en vingt-huit blocs qu'il nomme « étages ». C'est toujours ce terme qui désigne aujourd'hui la division fondamentale des terrains sédimentaires. D'autres naturalistes ont ensuite amélioré ce découpage, notamment pour le Tertiaire, découpé en trois étapes par Gérard Paul Deshayes (1795-1875), que le britannique Charles Lyell dénommera en 1833 Éocène, Miocène et Pliocène, d'après la ressemblance de leurs espèces fossiles avec les faunes actuelles (respectivement « aube du récent », « moyennement récent », « plus proche du récent »). Cette recherche de repères et d'outils de corrélation entre les affleurements géologiques grandit rapidement : le premier appel à la construction d'une échelle stratigraphique de référence fut lancé dès 1878, lors du premier Congrès International de Géologie, organisé à Paris (Gradstein et al., 2020 [6]).

C'est seulement après la découverte de la radioactivité, au début du XXe siècle, et la perspective de son application à la datation que la possibilité de définir une échelle des temps géologiques, porteuse de dates chiffrées, a pu voir le jour. C'est à l'un des pionniers de la datation radiochronologique des roches, l'écossais Arthur Holmes (1890-1965), que l'on doit les premières propositions d'une telle échelle datée : une première tentative en 1947, puis une version révisée en 1959. Dans ces publications, Holmes mettaient en regard l'épaisseur maximale estimée des terrains de chaque division stratigraphique et quelques dates radiochronologiques obtenues sur des roches soigneusement replacées dans l'épaisseur de leurs divisions stratigraphiques respectives. En reliant les points ainsi obtenus, Holmes en tirait des âges chiffrés pour les limites de chaque division géologique (Figure 1).

L'échelle des temps géologiques d'Arthur Holmes (1947)

Figure 1. L'échelle des temps géologiques d'Arthur Holmes (1947)

Grâce à cinq analyses isotopiques du plomb obtenues précédemment par Alfred Nier, Holmes les positionna selon leur âge géologique et leur position dans la pile stratigraphique, estimés aussi précisément que possible. En joignant ces points, il définit son « échelle ‘B’ » (en noir), sur laquelle on pouvait lire la date de la base de chaque intervalle géologique, ou la date d'une roche dont la position stratigraphique serait connue. La courbe grise représente l'équivalent de la construction de Holmes avec les dates radiométriques attribuées aujourd'hui à la base de chaque intervalle.


Cependant, la définition des divisions stratigraphiques et temporelles resta longtemps mal formalisée, surtout basée sur la lithologie (unités lithostratigraphiques, p. ex. la craie du Crétacé) et des limites correspondant à des discordances, potentiellement diachrones d'un affleurement à l'autre. Cette incohérence motiva les appels à la mise en place de l'ICS et de ses sous-commissions à partir du Congrès Géologique International de 1952 et à l'élaboration d'une procédure standardisée et internationale de découpage des enregistrements géologiques et des durées associées. L'objectif était ambitieux, mais les enjeux d'un tel cadre général ont toujours été considérés comme fondamentaux, comme l'exprimait déjà Arthur Holmes en 1913 :

 

Avec l'acceptation d'une échelle de temps fiable, la géologie aura acquis une clé inestimable pour de nouvelles découvertes. Dans chaque branche de la science, sa mission sera d'unifier et de corréler, et avec son aide, une lumière nouvelle sera jetée sur les problèmes les plus fascinants de la Terre et de son passé.[2]

 
 --Arthur Holmes, The Age of the Earth, 1913

Une charte pour les accorder tous…

Divisions chronostratigraphiques et géochronologiques

La construction de l'échelle des temps géologiques est désormais soumise à une procédure longue et rigoureuse, sous l'égide de deux structures internationales, la Commission Internationale de Stratigraphie (International Commission of Stratigraphy, ICS), chapeautée elle-même par l'Union Internationale des Sciences Géologiques (International Union of Geological Sciences, IUGS), fondée en 1961 et reconnue aujourd'hui par 117 pays.

Les travaux de l'ICS comprennent en fait deux volets, qui peuvent paraitre difficiles à distinguer, mais que les stratigraphes de l'ICS tiennent à séparer. Comme on le lit dans l'ouvrage qui synthétise l'état de l'échelle des temps géologiques en 2020 (Gradstein et al., 2020 [6]) :

 

 […] dans la communication internationale, l'enregistrement dans les roches de l'histoire de la Terre est subdivisée en une échelle « chrono-stratigraphique » d'unités stratigraphiques standardisées à l'échelle mondiale, comme le « Carbonifère », « l'Éocène », « la zone à ammonite Zigzagiceras zigzag » ou « le chron de polarité magnétique M19r ». À l'opposé du battement régulier de l'échelle « chronométrique » (mesurée en années avant l'an 2000 EC), l'échelle chronostratigraphique est basée sur des unités temporelles relatives dans lesquelles des points de référence globaux placés aux stratotypes de limite définissent les limites des principales unités formalisées, telle que le « Permien ». L'échelle chronostratigraphique est une convention commune, alors que son étalonnage sur le temps linéaire est une question de découverte et d'estimation.[3]

 
 --Gradstein et al., 2020 [6]

Ou, comme le résume à l'extrême le Guide International de Stratigraphie, frisant la lapalissade :

  • Les unités chronostratigraphiques sont des unités stratigraphiques tangibles, parce qu'elles englobent toutes les roches formées durant un intervalle de temps défini.[4]
  • Les unités géochronologiques sont des unités temporelles – une propriété intangible – donc des unités intangibles, non des unités stratigraphiques en elles-mêmes.[5]
Chronostratigraphie, cyclostratigraphie, radiochronologie et échelle des temps géologiques

Figure 2. Chronostratigraphie, cyclostratigraphie, radiochronologie et échelle des temps géologiques

L'échelle des temps géologiques est l'association d'une échelle chronostratigraphique, définissant les divisions conventionnelles de l'enregistrement géologique, et de datations chiffrées par les méthodes de la radiochronologie et de la cyclostratigraphie.


Autrement dit, l'échelle chronostratigraphique est l'organisation, les unes par rapport aux autres, d'unités temporelles conventionnelles (d'où le nom de charte – chart – donné en anglais à cette construction) correspondant à l'enregistrement sédimentaire et fossilifère effectivement observé sur le terrain, de par le monde. L'unité de base de cette charte est l'étage. La définition d'un étage se fait par le choix d'un affleurement de référence, un stratotype, sur lequel la base de cette unité est jugée la mieux représentée (d'où l'appellation de stratotype de limite). La fin de l'étage est automatiquement définie par le stratotype de limite de l'étage suivant. L'ajout de dates chiffrées à ces stratotypes, par les moyens de la radiochronologie, de la dendrochronologie ou de la cyclostratigraphie (l'identification, dans les sédiments, de périodicités liés à des changements climatiques eux-mêmes régis par les cyclicités du mouvement de la Terre sur son orbite – les cycles de Milankovitch, de durées connues), permet de caler les subdivisions stratigraphiques sur des durées chronologiques (Figure 2). Ces durées sont dénommées selon une seconde nomenclature : à l'étage stratigraphique est associé un âge. Les étages sont eux-mêmes empilés et groupés en séries, elles-mêmes rassemblées en systèmes, auxquels correspondent chronologiquement des époques et des périodes, respectivement, et ainsi de suite. Le Tableau 1 résume ces correspondances, de la plus petite division à la plus grande. L'ensemble des intervalles géochronologiques constituent l'échelle des temps géologiques proprement dite.

L'attribution d'un stratotype de limite (boundary stratotype) est devenue la norme pour définir un étage, mais cette règle vient remplacer une procédure antérieure, pour laquelle l'étage était défini par un stratotype d'unité ou stratotype d'étage (stage unit stratotype), c'est-à-dire un affleurement censé représenter au mieux l'intégralité de l'étage et la durée correspondante, de sa base à son sommet. Ce qui impliquait de trouver un affleurement à la sédimentation la plus continue et abondante possible, portant l'enregistrement du plus grand nombre d'événements possibles, subdivisable lui-même le plus finement possible pour servir de référence à tous les autres affleurements qui témoigneraient d'une portion de cet intervalle de temps. C'est ainsi qu'avaient d'abord été définis les stratotypes, sélectionnés parmi des formations reconnues comme particulièrement riches d'informations sur ce moment de l'histoire géologique du globe. Le développement de la stratigraphie dans les pays d'Europe au XIXe siècle conduisit inévitablement à proposer la majorité de ces premiers stratotypes parmi des affleurements d'Allemagne, de Grande-Bretagne et de France, déjà très étudiés. Le nom de l'étage étant établi à partir de celui de la localité du stratotype, ou en relation avec cette localité, un grand nombre d'entre eux font référence à des affleurements britanniques (par exemple, Oxfordien), français (Lutétien) ou germanique (Maastrichtien).

Tableau 1. Divisions stratigraphiques et temporelles de la charte chronostratigraphique et de l'échelle des temps géologiques

Chronostratigraphie

Géochronologie

 

Intervalle stratigraphique

Intervalle chronologique

Exemple

Étage

Âge

Maestrichtien

Série

Époque

Crétacé supérieur

Système

Période

Crétacé

Érathème

Ère

Mésozoïque

Éonothème

Éon

Phanérozoïque


La définition des Points Stratotypes Mondiaux

Une telle définition ne permettait pas d'obtenir des intervalles parfaitement contigus et sans recouvrement ni lacune. C'est pourquoi « les périodes, les époques et les âges ont progressivement été conçues comme des intervalles de temps contigus, dissociés de toute section [stratigraphique] particulière »[6] (Walsh et al., 2004 [12]). En conséquence, la nécessité pour le stratotype de refléter au mieux l'intervalle de temps disparaissait. Il restait cependant le principe de raccorder les divisions stratigraphiques et chronologiques à un enregistrement concret ; d'où la restriction progressive de cet ancrage à la représentation des limites de l'étage et finalement à la seule limite inférieure de celui-ci, la limite supérieure étant automatiquement confondue avec la limite inférieure de l'étage suivant. Cette redéfinition des stratotypes selon un protocole rigoureux, du stratotype d'unité au stratotype de limite, n'a émergé que dans les années 1960. De plus, si « le besoin d'un jeu de systèmes/périodes et d'époques/séries standards à l'échelle mondiale était largement accepté […], l'extension de ce schéma au niveau des étages/âges était bien plus controversée » (Walsh et al., 2004 [12]). Le premier Point Stratotype Mondial ne fut attribué qu'en 1977, à la limite des systèmes/périodes Silurien-Dévonien, sur un affleurement à Klonk, en Tchéquie (Walsh et al., 2004 [12]). Ça n'est donc que depuis une quarantaine d'années que les divisions chronostratigraphiques sont peu à peu redéfinies, les unes après les autres, par des Points Stratotypes Mondiaux (PSM ou GSSP pour Global Boundary Stratotype Section and Point).

C'est la raison pour laquelle la charte chronostratigraphique internationale fait encore aujourd'hui l'objet de mises à jour assez fréquentes (deux pour la seule année 2023, en avril et en septembre). Ces mises à jour entérinent la définition de nouveaux Points Stratotypes Mondiaux et de révisions des dates de certaines limites. Et ces améliorations ne sont toujours pas achevées, sans même envisager le cas particulier de l'Anthropocène : plusieurs étages, et même certains niveaux supérieurs, ne disposent toujours pas d'un GSSP, certains n'ont même toujours pas de stratotype du tout, ni d'unité ni de limite, et donc pas de nom ! Le Cambrien comprend ainsi une série, le Terreneuvien, dont le dernier étage n'a pas de nom (il est toujours étiqueté « étage 2 », après que l'« étage 1 » ait reçu le nom de Fortunien, avec son GSSP à 541,0±0,1 Ma accepté en 1992) et qui est suivie d'une « Série 2 », elles-mêmes divisée en « étage 3 » et « étage 4 », qui attendent toujours leurs stratotypes. À l'heure actuelle, seules quelques systèmes/périodes géologiques sont ainsi entièrement pourvus en clous d'or (l'Ordovicien, le Silurien et le Dévonien), d'autres y sont presque (l'Aptien attend encore son GSSP au Crétacé, comme le Bartonien pour le Paléogène et le Burdigalien au Néogène), tandis que certains en sont encore loin : le Carbonifère et le Trias ne sont pourvus qu'à 40 % (trois GSSP seulement pour sept étages).

Si les étages/âges sont ainsi peu à peu revus et que de nouveaux stratotypes leur sont attribués, cela ne signifie pas pour autant que leur dénomination est nécessairement modifiée, même si le nouveau stratotype se trouve à un endroit complètement différent du stratotype d'unité initialement choisi : à titre d'exemple, le GSSP du Lutétien ne se trouve pas en région parisienne, mais dans le Pays basque espagnol, mais l'étage n'a pas changé de nom pour autant, afin de ne pas introduire de rupture dans la littérature scientifique.

La définition de nouveaux points stratotypes, ou la révision des stratotypes et des divisions existants, sont entérinées par l'IUCS après plusieurs étapes de vote par les différents niveaux hiérarchiques concernés (Figure 3). La définition des divisions de chaque période géologique (c'est-à-dire les niveaux comme, par exemple, le Cambrien, le Carbonifère, le Jurassique, ou le Paléogène – cf. Tableau 1) est supervisée par l'une des sous-commissions de l'ICS. Celles-ci proposent aux instances supérieures de l'ICS des affleurements candidats à un GSSP, ou élisent préalablement un affleurement candidat parmi ceux soumis par différents groupes de recherche. Le bureau exécutif de l'ICS vote à son tour pour retenir ou non la proposition. Si celle-ci est acceptée, ce choix doit encore être ratifié par le comité exécutif de l'IUGS, dernière instance décisionnelle. Si le choix est retenu, le Point Stratotype Mondial est officialisé par la pose d'un repère sur l'affleurement choisi (repère aussi appelé « clou d'or ») et par la publication de la description de l'affleurement et des critères justifiant son choix dans la revue trimestrielle Episodes, éditée par l'ICS (Figure 3).

Notons encore qu'en raison du manque d'affleurements sédimentaires avant la dernière grande glaciation de la fin du Précambrien, ainsi que de la bien plus grande durée que représentent les temps précambriens, les divisions chronostratigraphiques du Protérozoïque et de l'Archéen correspondent directement, pour les plus fines, à des séries/époques et non à des étages/âges. De plus, antérieurement à la dernière période du Protérozoïque (le Néo-Protérozoïque), elles ne sont pas définies par des stratotypes, mais uniquement par des dates, arbitrairement choisies : la période Méso-Protérozoïque est ainsi subdivisée en trois époques de 200 Ma chacune (avec des bases à 1000, 1200 et 1400 Ma). Les Points Stratotypes sont ainsi remplacés par des Âges Stratotypes, ou GSSA (Global Standard Stratigraphic Age), symbolisés sur la charte non par des petits clous jaunes, mais par des horloges stylisées (Figure 4).


La charte chronostratigraphique internationale, dans sa version la plus récente de septembre 2023

Figure 4. La charte chronostratigraphique internationale, dans sa version la plus récente de septembre 2023

À retrouver, ainsi que les versions anciennes et la plus récente en anglais et en de nombreuses traductions, sur la page dédiée de l’International Commission of Stratigraphy.


Pourquoi l'Anthropocène n'est pas admis par les stratigraphes (pour l'instant ?)

P. Crutzen et E. Stoermer, en proposant l'Anthropocène, l'ont directement envisagé comme un nouvel intervalle de temps dans l'échelle des temps géologiques, plus précisément une nouvelle époque, venant prendre la suite de l'Holocène. Les stratigraphes soulevèrent immédiatement des objections à cette idée : l'influence humaine est-elle si énorme qu'elle justifie de marquer une nouvelle série plutôt qu'un simple étage ? Est-elle à ce point identifiable dans l'enregistrement sédimentaire (si elle l'est même effectivement) ?

Pour la première fois, une nouvelle division de l'échelle des temps géologiques était proposée de l'extérieur de la communauté des stratigraphes. Ceux-ci pouvaient juger malvenu et précipité un nouveau remaniement des plus récentes divisions de l'échelle des temps géologiques, puisque la division de l'Holocène en trois âges très courts (Greenlandien, Northgrippien et Meghalayien, dont les limites correspondent à la sortie de la dernière glaciation pour le Greenlandien et à des événements climatiques marqués à −8 200 ans et −4 200 ans) ne remonte qu'à 2018 (Walker et al., 2019 [11]) !

Même si les membres de l'ICS se sont donc fait forcer la main, la sous-commission dédiée à la stratigraphie du Quaternaire, reconnaissant que « l'Anthropocène a émergé comme un terme scientifique populaire utilisé par les scientifiques, le public scientifique et les médias pour désigner la période de l'histoire de la Terre durant laquelle les humains ont une influence significative sur l'état, la dynamique et le futur du Système Terre », a étudié cette proposition et monté un groupe de travail dédié à l'examen de la question. Les premières réflexions de ce groupe, qui incluait Paul Crutzen, remontent à 2009 et, dix ans plus tard, en mai 2019, une première délibération entérinait seulement la validité de la question, c'est-à-dire reconnaissait d'une part, par 29 voix sur 33, que « l'Anthropocène pouvait être traité comme une unité chrono-stratigraphique formelle définie par un GSSP » (International Commission of Stratigraphy [7]) et d'autre part, par le même score, que « la base de l'Anthropocène devait être l'un des signaux stratigraphiques envisagés vers le milieu du XXe siècle ».

Une division imprécise ?

Ce dernier vote signifiait que le groupe rejetait les propositions les plus iconoclastes, qui envisageaient de faire débuter l'Anthropocène beaucoup plus tôt que ne l'avait imaginé Paul Crutzen. Le paléoclimatologue William F. Ruddiman, par exemple, défend depuis 2003 que l'humanité a commencé à modifier la dynamique climatique dès le début du Néolithique, avec le développement de l'agriculture et de l'élevage, responsables d'un dégagement accru de gaz à effet de serre (méthane et dioxyde de carbone), suffisamment important pour avoir ralenti, voire contrecarré, l'entrée dans un nouvel intervalle glaciaire (Ruddiman, 2003 [9] ; Ruddiman et al., 2016 [10]). Dans cette optique, l'Anthropocène serait peu distinct de l'Holocène et cette proposition remettrait en question les deux Points Stratotypes Mondiaux proposés en 2018 pour les étages de l'Holocène, et même celui de la base de l'Holocène, ratifié en 2008. Cela aurait donc demandé de revenir sur des décisions encore toute fraiches.

On a aussi voulu faire débuter l'Anthropocène et l'émission massive de gaz à effet de serre avec la « Révolution Industrielle » de l'Europe du XIXe siècle. Dans l'un et l'autre cas, définir une base à l'Anthropocène parait irréaliste, le Néolithique comme la Révolution Industrielle n'ayant pas commencé instantanément ni influencé l'environnement dès leurs premières manifestations. Mêmes les dates attribuées à ces deux chrononymes sont sujettes à débat entre historiens ou archéologues.

Une division trop fine ?

Faire de l'Anthropocène une époque plutôt qu'un âge peut donc se défendre si l'on soutient que cette division succède à l'Holocène mais ne le remplace pas. Cependant, le placer à un niveau supérieur à l'étage laisse entendre que cet intervalle de temps aura une durée relativement longue. Or, vu la rapidité d'épuisement des ressources et les dégâts que l'espèce humaine a déjà causé en à peine deux siècles, on peut craindre (ou espérer) que l'influence humaine ne puisse pas durer bien longtemps et se réduise à une petite strate dans les futurs enregistrements géologiques (voir L'Anthropocène, le regard et les réflexions d'un géologue). Si elle marquera sans doute les archives paléontologiques comme une extinction de masse majeure, il parait très vaniteux de penser qu'elle puisse se prolonger sur des durées équivalentes à celles des époques géologiques précédentes. L'Anthropocène pose de ce point de vue un problème scientifique et philosophique : comment un stratigraphe pourrait-il présumer de la durée d'un épisode géologique dont il fait lui-même partie ?

Une division difficile à identifier ?

Néanmoins, une fois accepté que l'Anthropocène pouvait être une unité chronostratigraphique, il devenait légitime pour les chercheurs de proposer des sites candidats au statut de GSSP de cette nouvelle division. Mais à nouveau se posait la question 1°) du choix du marqueur qui devait définir l'entrée dans Anthropocène, et 2°) de la stabilité et de la synchronicité de ce marqueur sur les divers affleurements disponibles de par le monde. Le premier problème était donc de trouver un indice susceptible d'être enregistré dans les sédiments à l'échelle mondiale, dont l'origine soit indubitablement anthropique, et produit au cours du XXe siècle. Les marqueurs les plus pertinents semblaient être, d'une part, les éléments radiogéniques émis dans l'atmosphère par les premiers essais nucléaires effectués à l'air libre entre 1952 et 1954, et, d'autre part, les microparticules issues de la désagrégation des matières plastiques. Mais les résidus de combustion d'hydrocarbures ou les pesticides, dont la production a considérablement augmenté après la Seconde Guerre Mondiale, ont aussi été envisagés. Ce sont les radionucléides issus des essais nucléaires qui paraissaient l'indicateur le plus fiable, l'examen des microplastiques dans des lacs d'Europe ayant révélé qu'ils pouvaient migrer dans le sédiment et contaminer ainsi des couches antérieures à leur émission (Dimante-Deimantovica et al., 2024 [5]) : ils ne peuvent donc constituer un marqueur partout synchrone.

Il fallait également identifier des sites où la sédimentation s'effectuerait actuellement de manière continue, régulière et avec le moins de perturbations post-dépôts possible, c'est-à-dire de préférence une zone de dépôt anoxique (sans organisme bioturbateur), éloignée des zones actives et préservée de tout évènement susceptibles de déstabiliser les sédiments. Beaucoup des sites candidats envisagés sont donc des environnements marins ou lacustres profonds, anoxiques et sans mélange des eaux superficielles et profondes, comme c'est le cas dans de nombreux lacs. Des récifs coralliens actifs ont également été envisagés, les squelettes minéraux des coraux constituant de bons enregistreurs. Douze sites furent proposés au groupe de travail sur l'Anthropocène (Figure 5) (Waters et al., 2023 [13]).


En juillet 2023, c'est finalement le site du lac Crawford, au Canada, qui a été retenu par le groupe de travail sur l'Anthropocène comme candidat au statut de Point Stratotype Mondial de l'Anthropocène ; ses sédiments ont enregistré le plutonium produit par les essais nucléaires et contiennent également des microplastiques. La proposition de ce site comme GSSP a été faite officiellement en octobre 2023 et c'est sur ce choix que la sous-commission pour la stratigraphie du Quaternaire (SQS) a pu voter à partir de février 2024… pour finalement rejeter la proposition, à douze voix contre quatre, le 6 mars !

Bisbilles internes… et jugement final

Ce vote pour ou contre le candidat GGSP en mars 2024 aurait dû entériner le refus d'une inclusion de l'Anthropocène dans l'échelle des temps géologiques. Mais cette fois-ci, le débat ne s'est pas clos et des conflits internes se sont fait jour : le vote négatif a évidemment frustré nombre des participants au groupe de travail, qui depuis bientôt 15 ans examinaient et comparaient les sites candidats. En réaction, le président et l'un des vice-présidents de la sous-commission pour la stratigraphie du Quaternaire ont contesté la légitimité du vote et réclamé son annulation ! Selon eux, la décision de procéder au vote aurait été trop précipitée, bien qu'elle ait respecté le délai de trente jours que l'ICS exige après la proposition d'un stratotype candidat. Mais surtout, ils ont récusé onze des seize votants, qui contrevenaient au statut des votants de l'ICS du fait de leur trop longue participation à la sous-commission du Quaternaire. Le règlement de l'ICS stipule en effet que les membres des sous-commissions y participent pour une période de 4 ans renouvelable, mais que les participants qui y ont siégé plus de douze ans ne doivent plus participer aux votes. Cette restriction aurait donc dû s'appliquer à plusieurs membres de la sous-commission du Quaternaire… dont le président lui-même, à l'origine de la demande d'annulation ! Le recours à ce point du règlement manifestement un peu oublié semble avoir bousculé l'ICS, puisque, comme l'écrit le journal Nature :

 

La discussion a conduit d'autres sous-commissions de l'ICS à réexaminer les listes de leur membres pour y rechercher ceux qui auraient dépassé cette limite de 12 ans et ne seraient plus éligibles au vote.[7]

 
 --Witze, 2024(a) [14]

Cette protestation inédite a alors été portée devant l'instance supérieure de la Commission pour le Quaternaire, l'ICS et jusqu'au sommet de l'organisation, le comité exécutif de l'IUGS (cf. Figure 3). C'est ce dernier qui a finalement tranché en ce mois d'avril 2024, en décidant de conserver le résultat du vote du mois précédent (Witze, 2024(a) [14]).

L'idée sous-jacente à ce refus n'est pas seulement que ce site du lac Crawford ne convient pas comme Point Stratotype Mondial, mais plus fondamentalement que l'Anthropocène n'a pas à être défini comme une nouvelle époque ; il pourrait peut-être être conçu “seulement” comme un évènement, un repère temporel, à l'instar de la « Grande Oxygénation » de l'atmosphère il y a 2 milliards d'années (Witze, 2024(b) [15]). C'est en tout cas bien ainsi que le résultat du vote est très officiellement présenté sur le site de l'ICS et sur la page du groupe de travail sur l'Anthropocène :

Le vote par la Sous-commission sur la Stratigraphie du Quaternaire (SQS) de rejeter la proposition d'une époque Anthropocène en tant qu'unité formelle de l'Échelle des Temps Géologiques est approuvé.[8]

Conclusion

Cette décision de refuser le site candidat à un Point Stratotype Mondial pour l'Anthropocène, et par conséquent aussi de reconnaitre l'Anthropocène comme une nouvelle période géologique officielle est donc irrévocable, puisqu'elle provient du plus haut niveau des instances géologiques. Pour autant, nombre de géologues et de scientifiques d'autres disciplines (écologues, zoologues, biologistes de la conservation, climatologues et paléoclimatologues, etc.) continuent de plaider pour une reconnaissance de la spécificité des temps actuels vis-à-vis du fonctionnement des enveloppes externes de la planète, et du rôle prépondérant qu'y joue l'espèce humaine. L'appellation “Anthropocène” est désormais si fréquemment employée qu'elle continuera à l'être ; pour l'heure, elle restera un concept sans définition scientifique rigoureuse ni bornes nettement positionnées. On pourrait juger cette position de l'IUCS et de l'ICS conservatrice et à contre-courant, mais elle met encore en lumière l'écart d'appréhension du temps entre les sciences de la Terre, fixée sur les longues durées géologiques et soucieuses de construire un cadre de référence valable à l'échelle mondiale et sur le très long terme, et les sciences intéressées par les courtes durées et plus encore la sphère médiatique et le grand public, focalisés sur le court ou le très court terme.

Enfin, insistons sur le fait que ce refus de faire de l'Anthropocène une nouvelle division de l'échelle des temps géologiques ne signifie absolument pas que les stratigraphes et les sédimentologues contestent ou refusent la réalité de la profonde influence humaine sur les enveloppes externes. Au contraire, ils en observent les traces dans les sédiments des sites les plus reculés. Mais ils ne peuvent assurer que ces pollutions anthropiques soient partout synchrones, et rien ne leur permet de prédire que cette empreinte de l'humanité perdurera sur des millions d'années, ou même seulement quelques milliers. L'humanité, en détruisant son environnement, se menace d'abord elle-même.

Autre ressource “anthropocène” suite la décision de l’IUGS

Après d’autres émissions consacrées à l’Anthropocène sur France Culture, et suite à la décision de l’IUGS d’avril 2024, La Science, CQFD du 24 avril 2024 a invité J.-B. Fressoz et V. Huault à revenir sur cette décision et ce concept dans une émission intitulée Siences de la Terre : être ou ne pas être Anthropocène (~58 min, à réécouter).

Bibliographie

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P.J. Crutzen, E.F. Stoermer, 2000. The ‘Anthropocene’, Global Change Newsletter, 41, 17-18 (republié ici)

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I. Dimante-Deimantovica, S. Saarni, M. Barone, N. Buhhalko, N. Stivrins, N. Suhareva, W. Tylmann, A. Vianello, J. Vollertsen, 2024. Downward migrating microplastics in lake sediments are a tricky indicator for the onset of the Anthropocene, Science Advances, 10, 8, eadi8136

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[1] The ‘Anthropocene’ has developed a range of meanings among vastly different scholarly communities. – International Commission of Stratigraphy [7]

[2] With the acceptance of a reliable time-scale, geology will have gained an invaluable key to further discovery. In every branch of the science its mission will be to unify and correlate, and with its help a fresh light will be thrown on the more fascinating problems of the Earth and its Past.

[3] […] in international communication the rock record of Earth's history is subdivided into a “chrono- stratigraphic” scale of standardized global stratigraphic units, such as “Carboniferous,” “Eocene,” “Zigzagiceras zigzag ammonite zone,” or “polarity Chron M19r.” Unlike the continuous ticking clock of the “chronometric” scale (measured in years before the year CE 2000), the chronostratigraphic scale is based on relative time units in which global reference points at boundary stratotypes define the limits of the main formalized units, such as “Permian.” The chronostratigraphic scale is an agreed convention, whereas its calibration to linear time is a matter for discovery or estimation.

[4]  Chronostratigraphic units are tangible stratigraphic units because they encompass all the rocks formed during a defined interval of time.

[5] Geochronologic units are units of time-an intangible property-and thus intangible units, not in themselves stratigraphic units.

[6] the periods, epochs, and ages gradually became viewed as contiguous spans of time divorced from any particular section

[7] The discussion has prompted other ICS subcommissions to re-examine their membership rosters for people who might have passed the 12-year limit and thus be no longer eligible to vote.

[8] The vote by the ICS Subcommission on Quaternary Stratigraphy (SQS) to reject the proposal for an Anthropocene Epoch as a formal unit of the Geologic Time Scale is approved.