Article | 10/06/2004
Opportunity au bord du cratère Endurance, Spirit proche des Columbia Hills, Mars Express se positionne
10/06/2004
Résumé
Les deux robots martiens Spirit et Opportunity continuent leur progression et leur récolte de données à la surface de Mars. La sonde européenne Mars Express se positionne en orbite martienne, étalonne ses outils et envoie des images.
Table des matières
Opportunity
Opportunity était arrivé début mai au bord du cratère Endurance, dont les flancs internes révélaient une succession lithologique prometteuse (voir article du 10 mai 2004) On y voyait une couche (a) assez chaotique (éjectas probables constitués majoritairement de la couche b) surmontant une couche (b) claire qui avait toute les caractéristiques visuelles de la couche d'argiles évaporitiques indurées (avec "myrtilles") que le robot étudie depuis 4 mois, et un ensemble de couches finement stratifiées (c) à caractéristiques visuelles bien différentes, présentant une discordance intra-formationnelle (d). Le substratum des ces couches est noyé sous un tablier d'éboulis.
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié
Qu'y a-t-il de nouveau depuis quatre semaines dans les images et les informations transmises par la NASA ? Le robot a entrepris le tour du cratère, en photographiant l'intérieur et l'extérieur sous tous les angles.
Ci-dessous, sur une photographie prise d'orbite avec une relativement faible résolution, le trajet effectué le 2 juin, et les noms donnés au différents sites.
Source - © 2004 NASA/JPL/ASU (or MSSS)
La figure suivante est une mosaïque d'images montrant le haut de la couche extérieure du cratère (éjectas probables).
Source - © 2004 NASA/JPL
On a l'impression de dalles juxtaposées, parfois imbriquées comme les pièces d'un puzzle, parfois moins imbriquées, parfois pas du tout imbriquées (figures suivantes). Quelle pourrait être l'origine de ces dalles, et même de ces puzzles de dalles ? Des fragments de strates éjectées et retombées à plat, les grands fragments se brisant en tombant, d'où parfois l'allure de puzzle ?
Mais ces dalles révèlent sur leur face supérieure les traces d'une stratification, preuve que très souvent la stratification fait un angle avec la face supérieure plane. Ce ne serait donc pas des strates "à plat" (on ne verrait pas de stratification sur le haut de la surface), mais des blocs d'argiles évaporitiques indurées inclinés dans tous les sens, et aplanis, usés par l'érosion éolienne. Sur les figures suivantes, on voit bien que les strates internes ne sont pas parallèles ; il ne s'agit donc pas de la fracturation d'un bloc unique, mais de la juxtaposition de nombreux fragments séparés tombés dans tous les sens et qui auraient été aplanis ensuite par l'érosion éolienne. Ci-dessus une figure montrait, elle, en bas à droite, un puzzle d'une quinzaine de dalles jointives avec les strates apparemment avec la même inclinaison. Il s'agirait d'un gros bloc unique, fêlé lors de sa chute et maintenant aplani.
Certaines de ces roches ont été particulièrement étudiées, comme la roche Pyrrho Mania. Les myrtilles (de 2 à 4 mm de diamètre) donnent l'échelle. Le petit rectangle clair (4 x 16 cm) est détaillé sur la figure d'après. On y voit un étrange réseau de micro rides et sillons difficile à interpréter. Interaction entre une érosion éolienne créant une surface ondulée et une stratification complexe ?
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell/USGS | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell/USGS |
La NASA a également fait tout une galerie de photographies des pentes internes du cratère, qui confirment les conclusions tirées il y a un mois des premières photographies, sans apporter de nouvelles révélations sensationnelles.
Source - © 2004 NASA/JPL | Source - © 2004 NASA/JPL | Source - © 2004 NASA/JPL |
Source - © 2004 NASA/JPL | Source - © 2004 NASA/JPL | Source - © 2004 NASA/JPL |
La NASA a également obtenu des compositions colorées (fausses couleurs), visualisant et exagérant les différences spectrales vues par les différents spectromètres, ce qui reflète les différences lithologiques, minéralogiques et chimiques des couches internes. Les figures suivantes montrent la falaise Burn Clift en "vraies couleurs" (vue choisie pour illustrer la succession stratigraphique de la figure 1)et en "fausses couleurs".
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell |
La NASA indique que les blocs bleu turquoise seraient en basalte (la NASA n'indique rien sur la nature des éboulis bleus qui tapissent les flancs inférieurs), que les niveaux jaunes et rouges seraient riches en évaporites, et que les strates vertes seraient un mélange de roches basaltiques et d'oxyde de fer. À ce jour (10 juin) la NASA n'interprète pas le mode de genèse de ces couches "vertes" (en fausse couleur). Mais la disposition finement stratifiée de ces roches et leur nature possible de basalte très oxydé suggéreraient que ces couches soient des cendres volcaniques fines (éoliennes) ayant sédimenté dans un milieu aquatique (retombée volcanique sédimentées en milieu lacustre ou marin calme), ou alors la sédimentation de cendres basaltiques fines amenées là par un courant (rivière, courant lacustre ou marin ?) et ayant sédimenté dans ce milieu calme.
Le 8 juin, après avoir pesé le "pour" et le "contre", la NASA a décidé de faire rentrer le robot dans le cratère. Le "pour", c'est la possibilité d'images en gros plan, d'analyses in situ des couches inférieures, en particulier ces couches vertes en fausses couleurs…. Le "contre", c'est le risque d'accident, de chute du robot au fond du cratère, et la difficulté possible (probable ?) pour en sortir même sans chute, à cause du patinage sur les fortes pentes tapissées de myrtilles. Les figures suivantes montrent le bord du cratère par où va s'aventurer Opportunity (pente de 18°, avec sable et myrtilles) et le trajet prévu vers la première cible.
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell |
Pourvu que le robot ne chute pas au fond du cratère, qu'il puisse atteindre ces strates mystérieuses et qu'il puisse nous renseigner sur leur nature et leur disposition ! Attendons la suite...
Spirit
Pendant ce temps, le robot Spirit progresse. Spirit s'est posé au sein d'une plaine recouverte de blocs basaltiques. Par contre, à 2 km de son site d'atterrissage, des collines (Columbia Hills) "ressortent" de sous le basaltes. Le matériel constituant ces collines constitue vraisemblablement le substratum de la plaine basaltique. Spirit s'y dirige donc.
Source - © 2004 NASA/JPL/MSSS/USGS
Le 21 mai (sol 137), Spirit était localisé à 680 m de son premier objectif West Spur. De là il gagnera peut être Lookout Point (d'où il devrait avoir une vue générale du site, ce qui permettra à la NASA de choisir des cibles), à moins que ce qu'il découvre sur son trajet n'amène la NASA à changer son programme. Ce qu'il voit déjà est prometteur. Les six images suivantes (prises du Nord au Sud) montrent un panorama général de ces collines.
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié |
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié |
À plusieurs endroits fléchés, on y devine des "affleurements" et une structures en couches (strates, terrasses…). La figure suivante montre une vue satellite verticale de ces collines, avec quelques éléments interprétatifs.
Source - © 2004 NASA/JPL/MSSS
Plus Spirit s'approche, plus les vues sont détaillées. En voici trois exemples. La première vue est une vue (en couleurs) plus détaillée du champ photographié 15 jours plus tôt. Sur la seconde vue, prise le 2 juin, on voit bien West Spur, le premier objectif. Sur la troisième vue, prise à 400 m de West Spur, on voit bien les objectifs scientifiques : des boulders, gros éboulis venant du sommet des collines, et de possibles affleurements (outcrop).
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell | |
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell |
Spirit est maintenant très près de son objectif, la base des collines.
Source - © 2004 NASA/JPL | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié | Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell, modifié |
Que va-t-il découvrir ?
Mais n'oublions pas qu'au cours de ce trajet, Spirit s'arrête périodiquement pour effectuer des analyses. Par exemple, il a analysé plusieurs fois le sol meuble en surface ou après avoir creusé des petites tranchées (de l'ordre de 10 cm de profondeur). Le sol s'avère être localement riche en sulfate de magnésium. Il ne s'agit pas de couches sédimentaires de sulfates mais vraisemblablement d'une imprégnation du sol par des sels issus de l'évaporation d'une nappe phréatique.
Source - © 2004 NASA/JPL/Cornell/Max Planck Institute
Sonde Mars Express
Et n'oublions pas non plus que pendant ce temps là, la sonde européenne Mars Express qui fonctionne fort bien, est en train de se placer sur son orbite définitive et d'étalonner ses instruments. Pendant cette période d'installation, elle a, à ce jour, néanmoins publié 92 photographies dont deux concernent le cratère Gusev, site d'atterrissage de Spirit.
Ci-dessous, une vue verticale de la région avec agrandissement autour du site d'aterrissage (marqué d'une croix).
Source - © 2004 ESA/DLR/FU Berlin (G. Neukum), id=SEMCRPYV1SD, modifié | Source - © 2004 ESA/DLR/FU Berlin (G. Neukum), id=SEMCRPYV1SD, modifié |
Les figures suivantes montrent des vues obliques générales et détaillées de cette même région. Les Colombia Hills sont indiquées par une flèche.
Source - © 2004 ESA/DLR/FU Berlin (G. Neukum), id=SEMP3J474OD, modifié | Source - © 2004 ESA/DLR/FU Berlin (G. Neukum), id=SEMP3J474OD, modifié |