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Article | 29/10/2002

Hominidés, homininés et hominines

29/10/2002

Cyril Langlois

Laboratoire Paléoenvironnements et Paléobiosphère, Université Claude Bernard, Lyon 1

Benoît Urgelli

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Pour s'y retrouver dans la dénomination des groupes taxonomiques de la lignée humaine.


Question

« Il semble régner une certaine ambiguïté au niveaux des taxons dans le programme de TS, les documents d'accompagnement et les ouvrages scolaires pour la partie lignée humaine. Doit-on suivre Guillaume Lecointre jusqu'au bout ? »

Question posée par Titolet le 2 octobre 2002, par courrier électronique.

« Dans le nouveau programme de TS, on introduit le terme d'homininé. Dans les compléments, il est précisé que « Homo sapiens » est la seule espèce actuelle d'homininés. Pourtant, dans la littérature scientifique, on considère que les homininés regroupent les panines (et donc le chimpanzé) et les hominines (« lignée » humaine). N'y a-t-il pas confusion dans les programmes entre homininés et hominines ? »

Question posée par Laville le 2 septembre 2002, par courrier électronique.

Réponse

En bref

C'est un cas classique d'ambiguïtés sur la dénomination des groupes taxonomiques.

  • Classiquement, on parlait d'Hominidés à propos de la lignée humaine, placée en groupe-frère des Chimpanzés, et le clade (= groupe monophylétique) (Hominidés + Chimpanzé (Pan) + Gorille (Gorilla) + Orang-Outan (Pongo, parfois sorti du lot et en groupe-frère)) formait les Hominoidés.
  • En raison de la très faible différence génétique entre Homo (+ apparentés fossiles) et Chimpanzé, certains proposent d'appeler cet ensemble (Homo + Australopithèques et consort + Pan) Hominidés, le clade "en dessous", (Homo + Australopithèques), devenant alors le clade des Homininés.

Rigoureusement, le groupe des Paninés n'est pas correct, "cladistiquement" parlant, car il s'agit d'un groupe paraphylétique, puisqu'il regroupe Orang-Outan, Gorille et Chimpanzé, c'est-à-dire les « grands singes ».

Dans la littérature anglo-saxonne

La littérature anglo-saxonne, pour sa part, montre le conflit entre ces deux dénominations, Hominids ou Hominines, et pour l'heure, c'est l'appellation classique d'Hominids (Hominidés) qui est la plus usitée pour désigner la lignée humaine.

Colin Tudge, dans The Variety of Life (2000) , Oxford University Press (en gros un équivalent en anglais de l'ouvrage de Lecointre et le Guyader et qui inclut les fossiles), utilise le nom d'Hominidae (Hominidés) sensu stricto pour parler du seul genre Homo et de ses cousins immédiats, Australopithèques et consort. Il donne l'arborescence suivante.

Par contre, Michael Benton, dans Vertebrate paleontology (2000), Blackwell, donne un cladogramme équivalent à celui de Lecointre et le Guyader, avec les termes latins, qui évitent à mon avis les confusions.

Bref, c'est encore flou... Mais, si l'on suit Lecointre et Le Guyader, et pour répondre enfin à la question, l'Homme est le seul représentant actuel des Hominines (sans é, = Hominini en latin). Mais sur ces problèmes de sémantique systématique, il n'y a pas encore de "vérité vraie", et c'est ce qui conduit à des querelles byzantines...

Dans le lexique du CNRS

(Voir aussi À la recherche des origines de l'Homme, Dossier CNRS)

Voici ce que l'on trouve sur le site du CNRS, dans le lexique du dossier consacré à l'hominisation. Il rejoint la classification de Lecointre et Le Guyader ou de M.J. Benton.

  • Hominidé : famille des Hominidae qui englobe toutes les formes humaines présentes et passées ainsi que de façon générale, les grands singes actuels et leurs ancêtres.
  • Hominoïde : famille des Hominoidea comprenant les hommes, les grands singes et les gibbons actuels ainsi que leurs ancêtres.

En résumé, pour s'y retrouver

Tudge, The Variety of Life : ouvrage qui parle des Hominids pour la lignée humaine, et des Hominoïdea pour Chimpanzé + Gorille + Homme.

G. Lecointre, H. Le Guyader, La classification phylogénétique du vivant, les auteurs distinguent :

  • les Hominines (Homo et autres Australopithèques)
  • les Panines (Chimpanzé commun et Bonobo (chimpanzé nain))
  • les deux groupes constituant à leur tour les Homininés (avec accent)
  • ensuite, Homininés + Gorillinés (les deux espèces actuelles de Gorilles) forment les Hominidés
  • puis (Hominidés + Pongidés (= l'Orang-Outan actuel et le Sivapithèque, fossile)) constituent les Hominoïdés
  • et enfin, (Hominoïdés + Hylobatidés (les Gibbons)) sont groupés dans les Hominoïdes.

Soit en résumé,

Louis de Bonis, lui, dans la Famille de l'Homme, écrit que 

  • d'une part, toutes les données, génétiques et paléontologiques, ne concordent pas pour dire que l'Homme est plus proche du Chimpanzé que du Gorille,
  • d'autre part, il parle d'Hominidés pour le groupe (Gorille + Chimpanzé + Homme (et apparentés fossiles)), et désigne les Hommes et les fossiles de la lignée humaine par le terme Hominiens.

Dans la littérature, y compris dans de très récents articles de Nature, des fossiles, pourtant rapprochés de la lignée humaine par leur découvreurs, sont toujours désignés par hominids. Souvent, c'est en fait par prudence : comme on n'est pas sûr qu'ils soient plus proches de l'Homme que d'un Singe, on passe directement de la Famille (Hominidés) au Genre.

Par exemple, le fameux Toumaï, Sahelanthropus tchadensis, découvert en 2002, est décrit par Brunet et al. comme suit (Nature 418, 11 July 2002, 145-151) : Ordre des Primates (L. 1758) / Sous-ordre des Anthropoïdea (Mivart, 1864) / Superfamille des Hominoïdea (Gray, 1825) / Famille des Hominidae (Gray, 1825) / Sahelanthropus (gen. nov.) (nouveau genre).

D'autres articles, lorsqu'ils traitent de fossiles du genre Homo, par exemple Homo erectus, les désigne comme des hominins.