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Article | 14/12/2023

Structures d'impacts et météorites de Mongolie : état des lieux et découvertes récentes

14/12/2023

Michel Detay

Pierre Thomas

Laboratoire de Géologie de Lyon / ENS de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Impacts, structures d’impact, météorites… généralités et cas de la Mongolie.


Version “augmentée”

Initialement publié le 04/01/2023, cet article a été complété, suite à un séjour en Mongolie en 2023, par une partie dédiée aux météorites exposées au Muséum d’Histoire naturelle de Mongolie, à d’Oulan-Bator, nouvellement rouvert après une période de déménagement/restauration.

Les structures d'impact, en tant que processus géologique majeur, n'ont été reconnues que relativement récemment. En 1950 encore la plupart des astronomes croyaient que les cratères lunaires étaient d'anciens volcans et tous les géologues, à l'exception de quelques-uns, se sont moqués de l'idée que la surface de la Terre a été marquée par des structures d'impact de plusieurs kilomètres de diamètre. Aujourd'hui, plus de 200 cratères d'impact majeurs ont été identifiés sur Terre (dont certains de plus de 100 km de diamètre). La plupart des géologues s'accordent désormais sur la formation de la Lune qui provient d'un impact météoritique majeur entre la proto-Terre et une protoplanète (Théia) il y a 4,51 Ga (à peine plus tard que les 4,55 Ga de la Terre). L'aspect de la plupart des astres du système solaire confirme le rôle joué par l'impactisme. Cet impactisme doit donc de fait être considéré comme un processus géologique majeur. Comme en témoignent les cratères d'impact observés sur quasiment toutes les surfaces solides du système solaire (sauf Io), les collisions sont incessantes depuis la formation des planètes. La gravitation est fondatrice de l'accrétion des planètes, elle-même basée sur l'agglomération de planétésimaux. La cratérisation est ainsi le processus géologique dominant dans le système solaire.

Notre planète est parsemée d'au moins quelque 200 cratères d'impact. De très grandes surfaces (Antarctique, Groenland, fonds sous-marins) sont inaccessibles à l'observation voire ont été recyclées (fonds océaniques) et leurs cicatrices d'impact nous sont inconnues, la tectonique globale recyclant les fonds océaniques.

Structures d'impact identifiées en Mongolie

Seulement deux cratères d'impact ont été confirmés en Mongolie (Figure 1 et Tableau 1). Une troisième structure, Unegel Uul, présente les caractéristiques géomorphologiques d'un cratère d’impact mais les études de terrain n'ont pas permis de confirmer cette hypothèse.



Cratère d'impact de Tabun-Khara-Obo

Le cratère d'impact de Tabun-Khara-Obo (également appelé Tavan Khar Ovoo ou Tavan Har) est situé à peu près à mi-chemin entre Oulan-Bator et Pékin, dans la province (Aimag) de Dornogovi, au Sud-Est de la Mongolie.

Le point d'impact est localisé à 44°07′52,3″N, 109°39′16,1″E et est à 792 m d’altitude. Cette structure fait 1,3 km de diamètre. Il s'agit d'une structure d'impact facile à voir, car située à 1,8 km de la route Saynshand-Khatanbulag.

L'impact a eu lieu dans un encaissant métamorphique (terrane) du bloc de Chine du Nord, constitué de métasédiments à faciès épidote-amphibolite, dont des quartzites blanches, d'âge protérozoïque.

Cette formation a été identifiée pour la première fois comme un probable cratère d'impact en 1970 (Suetenko et al., 1970 [28]), mais l'hypothèse n'a été confirmée que plusieurs décennies plus tard.

Sur le terrain, la partie visible du cratère a un diamètre de 1,3 km. Le bord du cratère s'élève de 20 à 30 m au-dessus du fond du cratère. Le fond du cratère est recouvert d'une couche de dépôts lacustres de 171 m d'épaisseur, ce qui laisse entendre que ce cratère était autrefois occupé par un lac. Le remplissage sédimentaire du cratère Tabun-Khara-Obo ne permet pas l'échantillonnage du fond du cratère, où les textures les plus caractéristiques de l'impact seraient susceptibles d'être bien visibles. Elles ont cependant pu être reconnues par forage (Amgaa et al., 2009 [1] et 2021 [2]). Les forages réalisés sur le site en 2008 ont confirmé des caractéristiques correspondant à un impact à grande vitesse tels que ceux causés par des météorites.

Coupe lithologique transversale du cratère Tabun Khara Obo, Mongolie

Nous (M. et A.-M. Detay) avons pu nous rendre sur place fin septembre 2019 et réaliser quelques observations de terrain et des vols de drone au-dessus du cratère. Sur les images en drone (Figures 3 et 4), le cratère de Tabun-Khara-Obo présente la géométrie circulaire caractéristique des cratères d'impact simple. Sur le terrain, le cratère est partiellement rempli de sable et d'évaporites.

Le cratère d'impact de Tabun-Khara-Obo (Mongolie), photographié par drone

Figure 3. Le cratère d'impact de Tabun-Khara-Obo (Mongolie), photographié par drone

Vue vers le Nord-Est. Altitude de vol : 967 m.


Le cratère d'impact de Tabun-Khara-Obo, Mongolie, photographié par drone

Figure 4. Le cratère d'impact de Tabun-Khara-Obo, Mongolie, photographié par drone

Vue vers l'Est. Altitude de vol : 1 123 m.


Survol par drone du cratère de Tabun-Khara-Obo, Mongolie (47s)

Version “hd” de la vidéo au format webm ou mp4.

L'élévation de la crête du mur au-dessus du fond de la dépression est en moyenne de 20-30 m et atteint un maximum de 50 m à l'Est. Les micaschistes et les diorites à l'intérieur du mur semblent intensément déformés. On observe des brèches qui se présentent sous forme de lentilles principalement dans la paroi interne du cratère et ont une épaisseur de plusieurs mètres. Des brèches de choc ont également été trouvées à l'extérieur du cratère jusqu'à 500 m du bord du cratère.

Les observations de terrain sont :

  • la géométrie circulaire de la structure ;
  • la foliation des roches orientée vers l'extérieur à partir du centre du cratère ;
  • les brèches observées sur place en bordure du cratère qui montrent une déformation liée à l'impact.

Par ailleurs, à l'échelle microscopique, Anderson et Ochirbat (2004 [3]) ont identifié des fractures planes ainsi que des masses fondues. Les grains de quartz présentent des fractures parallèles représentant de possibles plans de clivage liés à l'impact (cf. quartz choqué figure 4 et figure 5 dans L'astroblème de Rochechouart–Chassenon et ses impactites). Enfin, ces mêmes auteurs ont diagnostiqué des verres potentiellement liés à l'impact (type microtectites ou plus probablement verre diapléctique, cf. L'astroblème de Rochechouart–Chassenon et ses impactites). Toutes les roches prélevées à proximité du cratère sont décrites collectivement comme des impactites.

Tous ces éléments ont permis de confirmer l'origine de la structure de Tabun-Khara-Obo comme étant un cratère d'impact.

Image Landsat du cratère Tabun-Khara-Obo (Mongolie)

L'âge de l'impact est estimé à 150±20 Ma (Jurassique moyen - Crétacé inférieur). Le forage du site en 2008 a révélé des caractéristiques rocheuses compatibles avec des impacts à grande vitesse (métamorphisme de choc, éléments trace) tels que ceux causés par des météorites (Amgaa et al., 2009 [1] et 2021 [2]).

Comme le cratère d'impact est généralement 20 à 30 fois plus grand que le diamètre de l'impacteur. Un calcul inverse permet de déduire que le cratère Tabun-Khara-Obo (1,3 km de diamètre) est le résultat de l'impact d'un projectile de 43 à 65 m de diamètre.

Remarquons que les “hasards” de l’érosion font que la morphologie du cratère de Tabun-Khara-Obo, bien que daté à environ 150 Ma, est plutôt semblable à celle d’un cratère assez “récent” tel que celui de Roter Kamm (Namibie, 3,7 Ma).

La structure de Tsenkher

La structure de Tsenkher (43°38′41″'N, 98°22′09″'E) se situe dans le Gobi-Altaï de Mongolie. Cette structure présente des indices géomorphologiques qui laissent penser à un impact ou un objet volcanique. En effet, la structure de Tsenkher est quasi-circulaire. Le diamètre apparent est de 3,6 à 3,7 km en moyenne, mais il varie de 3,5 km à environ 4 km.

Structure d'impact de Tsenkher (Mongolie)

La structure de Tsenkher a été étudiée en utilisant un large éventail de données de télédétection, de géophysique, et d'observations de terrain. La structure présente une dépression centrale peu profonde, de 3,6 km de large, bordée par une crête quasi-circulaire (bord de cratère présumé) avec des brèches au Nord-Ouest. La dépression centrale est partiellement oblitérée par un remplissage fluvial.

De nombreuses occurrences de roches bréchiques, principalement sous la forme d'une couverture d'éjectas à l'extérieur du bord élevé de la structure indiquent une origine explosive (impact cosmique ou volcanisme explosif). Les roches hôtes dans la région sont principalement des grès et des siltstones faiblement magnétiques et riches en silice. Au cours de l'expédition de 2007 (Ormö et al., 2010 [25]), ont également été effectués des levés magnétiques et gravimétriques de cette structure. Les données géophysiques montrent une structure en forme de bol, sans racines, ce qui lève l'hypothèse d'une formation magmatique (dôme intrusif ou caldeira volcanique).

Bien que les hypothèses d'intrusion, de tectonique saline et de cratère de maar ne puissent être complètement écartées, la morphologie de la structure de Tsenkher implique fortement une origine d'impact. S'il s'agit d'un impact, sa morphologie est bien préservée et sa position dans le remplissage du bassin indique que sa formation est relativement récente, à la fin du Tertiaire ou au Quaternaire. La morphologie de la crête externe est similaire à celle des cratères de rempart sur Mars, dont la formation a été attribuée à la fluidisation d'une couche cible riche en eau et de matériaux éjectés, ou à l'entrainement atmosphérique et au dépôt de matériaux éjectés. Une histoire fluviale complexe et probablement lacustre est envisagée dans la structure de Tsenkher. La structure est également associée à l'archéologie, notamment à des vestiges du paléolithique et de l'âge du bronze.

Carte géomorphologique de la structure de Tsenkher (Mongolie)

La structure d'Uneged Uul

Les études de télédétection couplées aux études de terrain du complexe circulaire d'Uneged Uul (la “montagne du renard”, centrée à 44°15′35,00″N, 109°20′54,00″E) dans les sédiments du Jurassique supérieur au Crétacé inférieur de l’Est du Gobi suggèrent que cette entité pourrait provenir d'un impact.

Le pic central de la structure Uneged Uul, Mongolie

Figure 11. Le pic central de la structure Uneged Uul, Mongolie

(A) Vue panoramique de la partie Nord du pic central en forme de crête complexe, formant des collines douces d'éboulis schisteux principalement lâches, vue du bassin annulaire Nord schisteux, vue depuis le bassin annulaire Nord.

(B) Debout au sommet du pic central, au centre même de la structure Uneged Uul, en regardant vers le Sud-Est. La crête au centre de l'image correspond à la branche centrale Sud du pic central complexe montré dans la Figure 3 ; ombre du premier auteur (taille du corps 171 cm) pour l'échelle.


Scène 3D de la structure circulaire de Uneged Uul (Mongolie) avec une image satellite SPOT

Figure 12. Scène 3D de la structure circulaire de Uneged Uul (Mongolie) avec une image satellite SPOT

Notez la crête annulaire centrale bien visible (CAR) et le pic central complexe en forme de crête distinctif (CP) au centre de la structure.


La structure d'Uneged Uul présente une ressemblance géomorphologique frappante avec des structures d'impact terrestres complexes érodées, en particulier en ce qui concerne son domaine interne comprenant un pic central possible entouré d'un collier circulaire et un domaine externe de crêtes domales.

Cependant, aucune caractéristique métamorphique de choc convaincante n'a pu être détectée dans les roches et les minéraux.

Dans l'état actuel des connaissances, il n'a pas été possible d'apporter des preuves concluantes de métamorphisme de choc pour la structure d'Uneged Uul. Aucune structure d'impact typique n'a été rencontrée sur le terrain (shatter cone, métamorphisme d'impact…).

Météorites

Les météorites racontent l'histoire de la formation du système solaire et des planètes. De tout temps, les météorites ont été idolâtrées pour leur origine mystérieuse (bolide lumineux, chute, détonation) et les propriétés magiques qu'on leurs prêtait (objet divin selon les croyances et les légendes). Elles témoignent ainsi de l'histoire des idées et de l'humanité avec des destins parfois étonnants : de l'objet sacré à la proto-sidérurgie (presque 2000 ans avant l'apparition de la métallurgie du fer) en passant par leur culte voire leur ingestion.

Après des structures d'impact de Mongolie ci-dessus, nous ferons un bref rappel culturel, puis nous vous proposons un inventaire des météorites trouvées en Mongolie.

Les météorites se sont d'abord imposées dans l'histoire de l'humanité comme des objets sacrés d'origine divine. Très vite et très tôt les météorites ont été utilisées pour fabriquer des armes et des bijoux en procurant un pouvoir cosmique à leurs détenteurs (par exemple, la dague de Toutankhamon – 1330 ans avant notre ère). Certaines météorites ont même été ingérées (Novo Urei) ! Enfin, les météorites ferreuses ont permis d'accéder à l'Âge de fer avant l'âge de la métallurgie du fer (extraire du “fer métal” des minerais de fer usuels est beaucoup plus difficile que d'extraire du cuivre de son minerai). Les météorites ont toujours eu un destin particulier dans l'histoire des civilisations.

Objets sacrés

Les météorites ont été considérées comme des objets de dévotion et de rituel par de nombreuses cultures depuis la préhistoire. Le culte des météorites était pratiqué par les anciens Grecs et Romains en Europe et au Proche-Orient ; la « pierre de Delphes » (“omphalos” symbole du centre du monde) symbolisait la chute d'un corps céleste et revêtait une importance particulière dans ce célèbre sanctuaire antique (McBeath et Gheorghe, 2005 [22]). Les artéfacts météoritiques les plus anciens seraient des perles, identifiées en 1912 dans les tombes 67 et 133 de El Gerzeh, un cimetière prédynastique datant de 3300 ans avant notre ère et situé en Égypte à 60 km au Sud du Caire (Gounelle, 2017 [14]).

Les peuples autochtones du monde entier pratiquaient le culte des météorites, par exemple les Inuits au Groenland (météorite de Cap York rapporté par Robert Peary à l'American Museum of Natural History de New York), les Aborigènes en Australie, ainsi que différentes cultures dans toute l'Asie, en Inde, en Chine, au Tibet et aussi en Mongolie (voir, plus loin, le Buddha from space). Des fragments de la météorite Gibeon ont été utilisés pendant des siècles par les Nama en Namibie. Aujourd'hui encore la roche sacrée de Hadschar al Aswad dans la Kaaba de la Mecque (Arabie Saoudite) est considérée comme une probable météorite par les scientifiques et est vénérée par les croyants (Farrington, 1900 [12] ; Mardon et al., 1992 [20]) du fait que cette « pierre noire » aurait été offerte par l'archange Gabriel à Abraham et Ismaël.

Les premiers habitants de l'Amérique ont entretenu des rapports étroits avec les pierres tombées du ciel. En Amérique du Sud, les Amérindiens emmaillotaient les météorites comme des momies. En 1928 une météorite de 24 kg a été retrouvée dans les ruines d'un village précolombien daté du XXIIe siècle avant notre ère. En Arizona, à Camp Verde, on a retrouvé en 1915 une météorite emmaillotée couverte de plumes. Elle s'est avérée être un morceau de la célèbre météorite de Canyon Diablo. Au Mexique, une météorite drapée comme une momie a été trouvée à Casas Grande (la plus grosse masse est conservée au Smithsonian National Museum à Washington).

La météorite de fer de Willamette (AMNH), d'une masse de 15,5 t, a été vénérée comme une pierre sacrée par les indigènes d'Amérique du Nord (Iijima, 1995 [16]). Tout comme des fragments de la météorite de fer Canyon Diablo (Blau et al., 1973 [6]), qui a formé le cratère Barringer (également appelé Meteor Crater) il y a environ 50 000 ans en Arizona, ont longtemps été adorés par un certain nombre de tribus indiennes d'Amérique du Nord.

Au Canada la météorite de Saskatchewan (appelée Iron Creek) était vénérée depuis des temps immémoriaux par les indiens des plaines de l'Alberta.

Météorite de Willamette, AMNH de New York

Météorites et art

Les météorites pierreuses ont été utilisées pour sculpter des oiseaux et de multiples œuvres d'art ; des bijoux et des couteaux ont été fabriqués à partir de fer météoritique, dans la société inuit par exemple.

Les aigles et autres oiseaux sculptés dans les célèbres aérolithes (météorites pierreuses) d'Emesa en Syrie, comme symbole de l'origine céleste, étaient considérés comme des auxiliaires fidèles de la divinité elle-même (Antoniadi, 1939 [4]).

Au Tibet, le fer météoritique (appelé régionalement “namchag”, ce qui signifie « fer du ciel » en langue tibétaine) était autrefois sculpté, mais cette tradition s'est éteinte et seuls des artéfacts anciens sont connus.

De l'utilisation du fer avant l'âge des métaux

Le fer météoritique a été utilisé dans la production de couteaux et de poignards par diverses civilisations anciennes. Des artéfacts probablement faits de fer météoritique ont été trouvés dans d'anciennes tombes de rois égyptiens et dans des sanctuaires mésopotamiens. En outre, les météorites métalliques étaient autrefois la principale source de fer pour la société esquimaude (Mardon et al., 1992 [20]). Kotowiecki (2004 [19]) a rapporté une hache et des bracelets composés de fer météoritique de Pologne.

Mets météoritiques

Parmi les multiples plaisirs météoritiques, il faut signaler que la météorite de Novo-Urei (uréilite), tombée en Russie en 1886, a été en partie mangée par les tribus de Sibérie. Les uréilites sont principalement composées d'olivine et de pyroxène (et environ 3 % de carbone, sous forme de graphite et de nanodiamants). La météorite Novo-Urei a été brisée et en partie mangée par des témoins de la chute.

Météorites trouvées en Mongolie

Il tombe approximativement sur Terre 40 000 à 100 000 tonnes de matériel extraterrestre par an, mais moins de 1 % de ces objets ont une taille suffisante pour être retrouvés (trop petits ils se consument dans l'atmosphère terrestre [étoile filante], trop gros ils se désintègrent lors de l'impact). À ce jour, seulement une vingtaine de météorites ont été officiellement découvertes en Mongolie.

La plupart des météorites découvertes en Mongolie sont exposées au Musée national d'histoire naturelle d'Oulan-Bator et deux météorites se trouvent aux musées de Mandalagovi et de Khuvsgul. Au total, une vingtaine de spécimens ont été décrits comme étant des météorites de Mongolie.

  • Adzhi-BogdoI (LL3-6, brèche) ~ 910 g, 44°50′N, 95°10′E
  • Adzhi-BogdoII (fer IA) 582 kg, 44°52′N 95°25′E
  • Jalanash (achondrite, uréilite (URE) S3) ~ 700 g, 48°N, 89°E
  • Kerulensky (Kherlen) (douteux) 27,78 kg, 49°12′N, 113°28′E
  • Khruteisky (achondrite, uréilite (URE) S3) 402,1 g
  • Manlai (Manlay) (fer IIIA) 166,8 kg, 44°20′N, 106°30′E
  • Matad (chondrite ?) 189,5 g, 47°36′N, 114°45′E
  • Noyan-Bogdo (chondrite ordinaire (L6 ; S3)) 220 g, 42°55′N, 102°28′E
  • Sargiin Gobi (fer IAB) 17,5 kg, 45°59′1″N, 105°45′32″E
  • Tamir-Tsetserleg (chondrite ?) 173 kg
  • Tugalin-Bulen (chondrite ordinaire H6 ; S1) ~10 kg, 45°N, 103°E
  • Khan Khogshi (fer ?), 49°25′N, 94°47′E
  • Nartiin-had (chondrite ordinaire LL ?) 1,946 kg
  • Tengeriin Dush (fer ?) ~10 kg
  • Altgana, 52,5 kg
  • Zeertiin Khondii
  • Galshar-Tuvshinshiree, 550 kg

Le désert de Gobi, en Asie centrale, est l'un des plus grands déserts de la planète. Il mesure environ 2 000 km (Ouest-Est) × 1 000 km (Nord-Sud) et est situé dans le Sud de la Mongolie et en Chine du Nord. Comme tous les déserts, il renferme de nombreuses météorites. Ce n'est bien sûr pas parce qu'il en tombe plus dans les déserts qu'ailleurs, mais parce qu'elles sont plus faciles à trouver. Pour articuler quelques ordres de grandeur, selon la NASA, 84 000 météorites tombent sur Terre chaque année. Ainsi, chaque jour ce sont 230 météorites de plus de 10 g qui arrivent sur Terre. On estime qu'environ 5 000 météorites de plus d'un kilogramme atteignent le sol chaque année mais 75 % d'entre elles disparaissent en raison de la météorologie ou de la nature du terrain (océans, déserts…) et, sur les 25 % restantes, peu sont collectées.

Localisation des principales météorites découvertes en Mongolie

Adzhi-Bogdo

Une météorite de fer (IAB) de 582 kg, Adzhi-Bogdo, est exposée au Musée Central d'Oulan Bator. Elle mesure 70×50×45 cm.

Une seconde météorite (brèche chondrite ordinaire LL6) est tombée le 30 octobre 1949 à Adzhi-Bogdo dans le Gobi Altaï, Mongolie (44°50′N, 95°10′E ; Graham et al., 1985 [15]). Plusieurs morceaux ont été trouvés dans l'ellipse de dispersion.

Quelques découvertes récentes

Quatre météorites ont été découvertes par les membres de l'expédition de météorites de l'Université fédérale de l'Oural dans la partie mongole du désert de Gobi en 2018. Les échantillons pesant 300, 170 et 100 g ont été trouvés dans la région de Shine-zhins.

Météorite d'Altgana

Une météorite ferreuse (sidérite) pesant 52,5 kg, trouvée à l'endroit appelé Altgana dans le Tunel soum, Khuvsgul Aimag. Elle a été apportée au musée par un natif, S. Gendenjav, en 1956.


Météorite de Galshar-Tuvshinshiree

En 1989, une météorite a été trouvée dans le Zeertiin Khondii à la frontière de Galshar Soum de Khentii Aimag et de Tuvshinshiree Soum de Sukhbaatar Aimag. La météorite est nommée d'après le site Galshar-Tuvshinshiree. La météorite mesure 79,5 cm de haut, 45-52 cm de large et pèse 550 kg. D'après sa composition chimique, il s'agirait d'une chondrite (composition SiO2 33,93 %, fer total 25,11 %, MgO 21,10 %, oxydes de fer (II ou III) 8,68 %, Al2O3 2,04 %, CaO 1,68 %, Ni 1,58 %, soufre total 1,26 %).


Météorites exposées au Muséum d’Histoire naturelle d’Oulan-Bator

Le Natural History Museum of Mongolia, situé dans la capitale Oulan-Bator, est resté longtemps fermé pour rénovation (non accessible en 2019). Il a déménagé dans un nouveau bâtiment dans lequel une salle est consacrée aux météorites.


Ci-dessous, un rapide aperçu de météorites photographiées en 2023 dans cette salle. On remarquera une forte représentation des météorites de fer par rapport aux autres météorites. Cela est dû au fait que les sidérites sont plus résistantes à l’altération et à l’érosion et sont aussi plus faciles à distinguer des roches locales (donc plus faciles à trouver). Il y a donc un biais de conservation et d’échantillonnage qui induit une sur-représentation des météorites de fer dans les collections.

Manlay. La météorite de Manlay (parfois orthographié Manlai) est certainement la plus spectaculaire de la collection. Elle trône au milieu de la pièce éclairée par dessous avec une lumière bleue ou rouge.

Elle a été découverte le 3 janvier 1955 (ou 1954, selon les publications) dans le Manlay sum de Ömnögovi (44°20′N, 106°30′E) et pèse 166,8 kg. Ses dimensions sont de l’ordre de 95×40×25 cm. C’est une météorite de fer présentant de belles regmaglyptes, aspérités en forme de creux que l’on trouve sur certaines sidérites. Les regmaglyptes sont des structures d’arrachement formées lors de la traversée de la haute atmosphère. Ces structures sont plus belles et plus nombreuses sur les météorites de fer (sidérites) mais on en trouve aussi sur d’autres types de météorites comme les chondrites.

La météorite de Manlay (Mongolie) avec éclairage bleu

La météorite de Manlay (Mongolie) avec éclairage rouge

Localisation de l’aïmag d’Ömnögovi (Mongolie)

Figure 23. Localisation de l’aïmag d’Ömnögovi (Mongolie)

Manlay se situe à l’Est de cette province.


Vue générale de la météorite de Manlay (Mongolie)



Borzon. Une météorite de fer est tombée près de Borzongiin (province d’Ömnögovi) en 1980. Elle pèse 780 g.

Météorite de Borzon (Mongolie)

Zarman. Il s’agit d’une autre météorite de fer de 685 g retrouvée en 1980 dans la province de Gobi-Altai.

Aj Bogd-1 et Aj Bogd-2. Aj Bogd est une montagne de la province de Gobi-Altai, dans le Sud-Ouest de la Mongolie et culmine à 3802 m. Deux météorites y ont été découvertes.

Météorite Aj Bogd-1 (Mongolie)

Découvert le 25 octobre 1952, la météorite Aj Bogd-2 est une météorite de fer présentant des regmaglyptes. Elle pèse 582,2 kg.

Météorite Aj Bogd-2 (Mongolie)

Météorite Aj Bogd-2 (Mongolie)


Kherlen. La météorite de Kherlen a été trouvée en mars 1950 près de la montagne d’Uudin am dans la province de Dornod. Il s’agit d’une sidérite qui pèse 100 g.

Météorite de Kherlen (Mongolie)


Tsenkher. Découverte en 1980 près de Tsenkher (aïmag d’Arkhangai, centre de la Mongolie), cette météorite pèse 605 g.

Météorite de Tsenkher (Mongolie)


Tugalin Bulen. Cette météorite est une chondrite ordinaire H6 S1. D’une masse d’une dizaine de kilogrammes, elle a été découverte le 13 février 1967 près de Tugalin Bulen (45°N, 103°E, centre de la Mongolie).

Météorite de Tugalin Bulen (Mongolie)

Khan Khugshin. Cette météorite a été découverte en 1957 dans les ruines d’un monument historique appelé ville militaire de Kublai Tsetsen Khan, situé sur la rive Ouest de la rivière Teel dans le soum de Nariin Telle, aïmag d’Uvurkhangai (centre de la Mongolie). Selon les analyses chimiques de la Commission géologique mongole, il s’agit d’une météorite ferreuse. Ses dimensions sont de l’ordre de 7,6×6,6×5,6 cm pour une masse de 506,7 g.

Météorite de Khan Khugshin (Mongolie)

Tectites

Curieusement on n'a pas encore trouvé et identifié de tectites en Mongolie. Les tectites sont des fragments de roches terrestres fondues et expulsées par l'impact d'une météorite (cf. par exemple Les tectites, des larmes de la Terre). Les fragments se sont refroidis rapidement lors de leur trajet aérien et sont retombés plus ou moins loin du cratère d'impact (parfois à des centaines de kilomètres).

Météorite de Chinga (Russie) et Buddha from space

Des chercheurs allemands et autrichiens ont établi qu'une statue bouddhiste vieille de quelque 1 000 ans, rapportée d'Asie en 1938 par une expédition nazie, est faite d'un métal météoritique provenant de la météorite de Chinga (51°3′30″N, 94°24′0″E). C'est une météorite métallique, une ataxite classée IVB. Elle a été trouvée en 1913 à Chinga dans la province de Tuva en Russie. Cette météorite n'est donc pas tombée en Mongolie mais en Russie.

Surnommée Iron Man (l'homme de fer) et pesant 10 kg, la statue, retombée dans le domaine public en 2009 à la suite d'une vente aux enchères, représente Vaiśravaṇa, l'une des quatre divinités bouddhiques des horizons (celle du Nord). D'après les spécialistes, elle serait un « hybride stylistique » entre le bouddhisme et la culture pré-bouddhiste Bön, du XIe siècle. Mais celle-ci comporte aussi un signe un peu particulier : la grande svastika (ou croix gammée, un symbole très ancien) gravée dans le centre de l'objet. C'est d'ailleurs sans doute cette croix qui a incité ses « découvreurs » nazis à la rapporter chez eux.

La statue a été ciselée à partir d'un fragment de la météorite qui s'est écrasée à Chinga, dans les zones frontalières entre la Mongolie et la Sibérie, il y a environ 15 000 ans. Les premiers débris en ont été officiellement découverts en 1913 par des prospecteurs d'or, mais il est probable que le fragment constituant la statue a été recueilli de nombreux siècles auparavant.



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