Article | 05/06/2001
Origine des ondes S dans le noyau
05/06/2001
Résumé
Origine des ondes S dans la graine et relation avec la structure du noyau.
Question
Question posée par J. F. le 21 octobre 2000, par courrier électronique.
« La courbe des vitesses des ondes sismiques en fonction de la profondeur fait apparaître des ondes S dans le noyau interne (graine). D'où viennent ces ondes, puisque ce type d'ondes ne se propage pas en milieu liquide (elles n'ont pas pu traverser la partie périphérique du noyau) ? Sont-elles dues à des changements de nature d'autres types d'ondes ? »
Réponse
Lorsqu'une onde arrive au niveau d'une interface, une partie de l'énergie qu'elle véhicule est convertie en une autre forme d'onde. Ainsi, une onde P qui arrive à l'interface noyau externe/noyau interne (graine) devient partiellement onde S, qui traverse alors la graine (solide), et redevient à la sortie partiellement une onde P. Cette onde P traverse ensuite le noyau externe, le manteau et la croûte. Dans une station sismique, on reçoit donc des ondes P "normales"», ayant traversé sous forme d'onde P manteau et noyau (interne et externe). Mais on reçoit aussi, à la même station, les ondes P "surnuméraires", très faibles, et arrivant avec du retard, comme l'onde P devenue S dans la graine (et donc ralentie) et redevenue P à la sortie de la graine. Chaque conversion d'onde ne transforme qu'une très faible quantité d'énergie.... Voilà pourquoi les ondes S "intra-graine" ne sont pas faciles à détecter, le résultat de leurs conversions étant atténué et plus ou moins mélangé avec d'autres ondes P secondaires, résultats de réflexions ou conversions diverses.
C'est pour cela qu'il a fallu attendre 1936 pour que cette onde P particulière soit découverte par Inge Lehmann. Elle testa diverses solutions pour expliquer l'existence d'ondes P retardées : réflexions, réfractions et/ou conversions P/S sur les interfaces connues à l'époque. Aucune réflexion, réfraction ou conversion n'expliquant le retard observé, elle introduisit une nouvelle interface à 5.150 km de profondeur : l'onde P surnuméraire et son retard s'expliquait alors.
Comment des ondes S peuvent apparaître dans la graine alors que la graine est entourée d'une couche externe liquide qui ne transmet pas ce type d'ondes ?
Voyons, tout d'abord, ce qui différencie les ondes S des ondes P.
Les ondes P sont des ondes de compression qui se propagent aussi bien dans les fluides que dans les solides. Les mouvements réels sont parallèles à la direction de propagation. Ils correspondent à une alternance de dilatation/compression.
Les ondes S, qui elles correspondent à un cisaillement, ne se propagent que dans les solides car ces derniers offrent une résistance au cisaillement (contrairement aux fluides). Les mouvements réels sont perpendiculaires à la direction de propagation.
Comment des ondes S peuvent être excités dans le noyau interne (la graine) ? Cela revient à poser la question suivante : est-ce que des ondes P peuvent exciter des ondes S ?
Envisageons une onde P qui arrive à l'interface séparant un liquide d'un solide. Si l'onde P n'est pas perpendiculaire à cette interface, elle « secoue » la surface dans son propre plan, de manière non uniforme. Ce phénomène induit donc des zones de cisaillement source d'ondes S à l'intérieur du solide. Pour bien comprendre ce phénomène, il faut raisonner sur le front d'onde plutôt que sur le trajet du rai sismique, et envisager le transfert des contraintes au travers de l'interface à un instant donné.