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Article | 23/05/2003

Quelques données sur le séisme de Rambervillers, 22 février 2003

23/05/2003

Éric Jacques

Institut de Physique du Globe de Strasbourg

Jérôme Van der Woerd

Institut de Physique du Globe de Strasbourg

Christophe Sira

Institut de Physique du Globe de Strasbourg

Henri Haessler

Institut de Physique du Globe de Strasbourg

Benoît Urgelli

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Caractéristiques du séisme de Rambervilliers en 2003 (Ml = 5,4), impact sur les habitations.


D'après les données du Bureau Central Sismologique Français (BCSF).

  • Localisation : WNW de Saint-Dié
  • Date : 22 février 2003
  • Heure origine (légale) : 21h41min (France)
  • Magnitude : Ml=5,4
  • Latitude : 48,34°N
  • Longitude : 06,66°E
Localisation géographique

Introduction

Ce séisme important pour le territoire métropolitain a été largement ressenti sur le quart Nord-Est de la France (en dehors des Vosges et du Fossé Rhénan, jusqu'à Lyon et Paris), en Allemagne, en Suisse et en Belgique. Il n'a pas causé de victimes ni de dégâts très importants, hormis des cheminées tombées, des fissures dans les murs et la fragilisation d'édifices.

Le dernier séisme important connu dans la région avait atteint la magnitude de 4,8 en 1984 (Haessler et Hoang, 1985). Les Vosges, au même titre que le l'ensemble du Fossé Rhénan, les Alpes et les Pyrénées constituent une zone bien connue des sismologues où se produisent régulièrement des tremblements de terre.

Localisation des témoignages

Le séisme de magnitude 5,4 Ml s'est produit à l'Ouest de Saint-Dié (48,34°N; 6,66°E) le samedi 22 février 2003 à 21h41 (heure légale). Il fait partie des séismes qui se trouvent au seuil des séismes importants : au-dessus de cette magnitude, on pourrait avoir des dégâts beaucoup plus significatifs encore. Ce choc principal a été suivi de nombreuses secousses secondaires (répliques) dont, entre autres, une de magnitude 3,4 Ml moins d'un quart d'heure après (21h54), et une de 3,1 Ml (à 5h54 le lendemain matin).

Données sismo-tectoniques

Le tremblement de terre s'est produit au Nord d'une zone relativement sismique (Audin et al., 2002), connue depuis longtemps, dont fait partie le tremblement de terre historique de Remiremont de 1682 (Vogt, 1993 ; Lambert, 1997). Cette zone sismique s'étend sur un axe NNE-SSW de 80 km de long sur 20 km de large de Lure au Sud à Thaon-les-Vosges au Nord, grossièrement à la limite entre les Vosges cristallines et la couverture sédimentaire secondaire. La sismicité instrumentale s'y distribue sous forme "d'essaims" allongés de direction NNE-SSW et NS, comme la crise de 1984 (Haessler et Hoang, 1985), mais aussi dans des directions NW-SE, comme la crise de 1972-1974.

Carte de localisation géologique

Figure 3. Carte de localisation géologique

Extrait de la carte géologique de France 1/1 000.000.



 

Les mécanismes aux foyers de certains de ces séismes régionaux sont :

  • soit décrochant senestre NS (Haessler et Hoang, 1985) (cf. crise sismique de Remiremont (1984) sur la carte de la sismicité régionale, Figure4) ;
  • soit normal-décrochant (senestre NNE-SSW ou dextre NW-SE, comme en 1974), soit encore chevauchant NE-SW (voir crise de 1974, Figure4), l'ensemble étant compatible avec une « contrainte compressive à grande échelle orientée NW-SE, perpendiculaire à l'axe alpin. »
  • ceci est également compatible avec un rejeu de l'ancien décrochement ductile du socle de Sainte-Marie-aux-Mines dans un sens senestre (plan NNE-SSW) comme le suggère un mécanisme au foyer sur cette faille.
Décrochement sénestre, plan NE-SW

Chevauchement, plan NE-SW

Décrochement dextre, plan NW-SE

Les travaux de recherche menées par les équipes de l'IPGS sur les répliques du choc principal du 22 février 2003 devrait permettre de localiser précisément l'orientation de la faille qui est à l'origine du séisme.

Le choc principal a en effet été suivi d'un ensemble de plus de 60 répliques, dont des magnitudes 3 Ml. Celles-ci ont été localisées par le Réseau National de Surveillance Sismique (RéNaSS) (10 stations dans un rayon de 200 km autour de l'épicentre). Ces stations sont essentiellement au Sud et à l'Est (réseau Fossé Rhénan), la plus proche étant située à 40 km de l'épicentre. Trois autres stations du Commissariat à l'Énergie Atomique sont également à proximité, à moins de 100 km au Sud et à l'Est. Une des stations du ReNaSS se trouve à l'Ouest, à environ 50 km, et une station du LDG-CEA est au Sud-Ouest. Huit autres stations étrangères associées au RéNaSS se situent dans un rayon de 250 km, en Allemagne et en Suisse, à l'Est et au Nord. Ainsi près de 21 stations se trouvent à moins de 250 km. La couverture azimutale est donc bonne excepté vers l'Ouest.

Les répliques et le choc principal du RéNaSS se répartissent sur un axe grossièrement Nord-Sud entre Rambervillers et Autrey, à environ 8 km à l'Est de l'essaim de sismicité de 1974, et à 23 km au Nord de la crise sismique de Remiremont de 1984.

Un mécanisme au foyer du séisme a été calculé par le Centre Sismologique Suisse (chercher au 22/02/2003). Il permet d'identifier deux composantes normales décrochantes, l'une normale-senestre NS à pendage Ouest et l'autre normale-dextre NW-SE à pendage Nord.

Les équipes de Tectonique Active et de Sismologie de l'Institut de Physique du Globe de Strasbourg (IPGS) , ont par ailleurs déployé un réseau de 10 stations à 3 composantes et à enregistrement continu deux jours après le choc principal dans un rayon de 15 km entourant la zone des répliques. Cette intervention a pour objectif de mieux comprendre comment se répartissent les répliques autour du choc principal et comment ce séisme peut s'insérer dans le contexte tectonique et géologique de la région.

On pourra ainsi préciser, et la position des séismes, et la géométrie de l'essaim de répliques, afin de décider quelles structures géologiques sont activées préférentiellement dans la région.

Résultats de l'enquête macrosismique sur le terrain

Dès le mercredi 26 février 2003, une mission de terrain dans les 30 km autour de l'épicentre a été organisée par le BCSF, avec le concours du BRGM et de l'IRSN.

L'objectif était de déterminer l'intensité épicentrale et d'estimer la décroissance de l'amplitude de la vibration sismique. Cette mission a permis également de repérer sur la zone des amplifications locales liées aux conditions de terrain.

De nombreuses observations ont été réalisées. Des effets de site comme celui très probable sur la commune de Baccarat ou encore celui de la commune de Deneuvre ont pu être observés. L'intensité maximale devrait être comprises entre VI et VII sur les communes de Sainte-Helène et de Destord au Sud de Rambervillers. Au-delà d'une distance de 20 km, l'intensité semble décroître d'un degré.

Sur la zone des 30 km autour de l'épicentre, les dégâts principaux sont de degrés 1 à 2 et ont touché des bâtiments anciens (vulnérabilité A), situés au cœur historique des communes. De plus rares bâtiments en "agglo" (vulnérabilité B) ont été fissurés, confirmant ainsi une meilleure résistance à la secousse que les bâtiments anciens. Les églises ont connu de fréquentes fissurations légères, et de plus rares fissurations larges, certaines entraînant tout de même la fermeture des bâtiments au public et l'inquiétude des maires (Sainte-Hélène, Deneuvre).

Trois sources ont connu une augmentation notable de leur débit, comme celle de Montfort où l'eau a envahi les terrains voisins générant un risque d'inondation pour les riverains. Les observations ont continué sur le terrain jusqu'au mardi 4 mars 2003.

Quelques jours après le choc principal, dans la zone épicentrale, les personnes ont ressenti des grondements sourds ou des vibrations. Le réseau temporaire de sismomètres, installé par les chercheurs de Strasbourg, a enregistré de nombreuses secousses (appelés "répliques"). Ces répliques sont de plus en plus faibles et plus espacées dans le temps.

L'intervention sur le terrain a été effectuée par les équipes de recherche de l'IPG de Strasbourg (UMR 7516 CNRS-Université Louis Pasteur) avec l'aide des services d'observatoire de l'École et Observatoire des Sciences de la Terre (UMS 830 CNRS - ULP), sous tutelle de l'Institut National des Sciences de l'Univers (CNRS). Ces recherches s'inscrivent dans un projet de recherche sur les zones à faible sismicité qui est mené par l'équipe de Tectonique Active de l'IPG de Strasbourg, notamment au travers du projet européen Slow Active Faults in Europe (SAFE; e.g. Kervyn et al., 2002).

Bibliographie

Audin, L., J.-P. Avouac, M. Flouzat et J.-L. Plantet, Fluid-driven seismicity in a stable tectonic context: The Remiremont fault zone, Vosges, France, Geophysical Research Letters, 29, 6, 15-18, 2002. doi:10.1029/2001GL012988.

Vogt, J., Les tremblements de terre en France, Mémoire du BRGM, 96, 179-188, 1993.

Lambert, J., Les tremblements de terre en France, Mémoire du BRGM, 43-47, 1997.

Haessler, H., et P. Hoang-Trong, La crise sismique de Remiremont (Vosges) de décembre 1984 : Implications tectoniques régionales, Compte-Rendus de l'Académie des Sciences Paris, 300, II, 14, 1985.

Kervyn, F., M. Ferry, P. J. Alasset, E. Jacques, And M. Meghraoui, The potential for a large earthquake in intraplate Europe: the contribution of remote sensing, EGS Meeting With Abstract (Poster), Nice, 2002.