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Article | 06/11/2024

Énergie et puissance

06/11/2024

Delphine Chareyron

ENS de Lyon / DGESCO

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Nicolas Taberlet

Laboratoire de Physique / ENS de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Les concepts d’énergie et de puissance. Introduction historique et ordres de grandeur.


Un poster pour accompagner l'article

Un poster reprend les points-clés de l'article. Il est basé sur les figures originales conçues par les auteurs mais dessinées par un illustrateur pour un rendu plus esthétique. Ces figures sont reprises dans l'article. Un graphiste a composé le poster. Outre son rendu équilibré et fluide devant permettre au plus grand nombre de se plonger dans le contenu scientifique, il est possible de l'imprimer en plusieurs tailles, du A3 (A3 ou A2 comme matériel de travail de groupe) au format poster A0.

La version A0 de ce poster Énergie et puissance est disponible en téléchargement.

Introduction

L’énergie est depuis longtemps un sujet qui s’invite dans le quotidien des français. Après la crise pétrolière de 1973, de nombreuses campagnes d’économie d’énergie ont été menées. Plus récemment, les particuliers ont été sensibilisés aux économies de chauffage avec l’isolation de l’habitat, et à la consommation électrique avec les ampoules dites “basse consommation”. Aujourd’hui on insiste plus sur la notion plus générale de transition énergétique avec, par exemple, une incitation au passage au tout électrique (voitures et pompes à chaleur), avec, surtout, une baisse de consommation des énergies fossiles responsables d’émissions de gaz à effet de serre. Dans son dernier rapport, le GIEC nous alarme sur les effets désastreux de l’accumulation de CO2 dans l’atmosphère sur le climat et nous pousse à limiter la hausse mondiale des températures [1]. La situation géopolitique d’aujourd’hui et du passé révèle l’importance de l’énergie dans notre société humaine, notamment avec la nécessité d’y avoir accès pour élever l’espérance de vie des populations [2][3][4] et la réalité des relations entre les hommes avec l’image d’« esclave énergétique » [5][6][7].

Nous proposons dans cet article de revenir sur les notions d’énergie et de puissance, en évoquant les différentes unités utilisées (unités du Système international ou unités commerciales), en se faisant une idée de ce que représente 1 kWh, et en illustrant par de multiples exemples.

Historique et contexte de l’utilisation de l’énergie par l’humain

Historiquement, on pourrait commencer par évoquer la première révolution énergétique correspondant à ce que l’on a appelé la révolution néolithique. L’humanité est passée d’un mode de vie nomade à un mode de vie sédentaire. Cela a consisté en une rupture de notre mode d’approvisionnement et de gestion de notre source d’énergie : notre alimentation [4].

La deuxième révolution énergétique, dont les conséquences concernent plus particulièrement les aspects traités dans cet article, correspond à la révolution industrielle et a eu lieu il y a environ 250 ans. Celle-ci s'est déroulée principalement, dans un premier temps, en Europe et aux États-Unis. Elle a permis, pour la première fois, que des machines accomplissent le travail pour les humains.

En ce qui concerne la nature des énergies utilisées, jusqu’au XVIIIe siècle, c'était principalement des énergies renouvelables : force humaine, force animale, force de l’eau et du vent. Puis l'homme s'est servi de la combustion du charbon, produit par le bois des forêts. Cette utilisation massive du bois a entrainé une grande déforestation et les hommes ont alors cherché à utiliser d’autres ressources : la houille, puis à partir de 1860 le pétrole, et le gaz naturel à partir des année 1920. Ensuite, à partir des années 1960 vient l’utilisation de l’énergie nucléaire, et de nouvelles sources renouvelables : hydroélectricité, photovoltaïque, éolien, géothermie…

Évolution de la consommation mondiale annuelle d'énergie de 1800 à 2023 (en TWh)

Une animation de l'évolution de la consommation annuelle entre 1800 et 2023 est disponible sur le site de l'iconographie.

Ce changement créé par la révolution industrielle a été motivé par une raison socio-économique liée à la puissance mécanique de l’être humain. La comparaison entre l’énergie produite par un humain et celle d'une machine, couplée au déploiement des énergies fossiles est une des raisons principales de la disparition de l’esclavage au XIXe siècle [4][7].

L'énergie

Comme l'a écrit Feynman dans son cours de mécanique : « Il est important de réaliser que dans la physique d’aujourd’hui, nous n’avons aucune connaissance de ce qu’est l’énergie » [9]. C’est une entrée en matière un peu abrupte mais qui montre la complexité de cette notion. Bien que l’énergie soit liée aux propriétés de la matière, c’est un concept abstrait qui ne peut être défini qu’indirectement. Il s’agit d’une quantité que l’on peut associer à tout système et qui dépend de différents paramètres caractérisant l’état de celui-ci. L’énergie peut permettre à un système de se transformer : changer de forme, de vitesse, de position, de température, de composition…

Malgré la difficulté de définir le concept d’énergie, nous savons que c’est une grandeur qui se conserve, c’est le premier principe de la thermodynamique.

L’énergie ne se crée pas, elle peut uniquement se convertir d’une forme en une autre.

Historique de la notion

Historiquement, le concept d’énergie et sa formulation ont mis du temps à émerger, notamment à cause de l’absence de vocabulaire adéquat. Au XVIIe siècle, on trouve les termes de « force » (avec un sens très élargi), « force vive », « puissance » mais avec des définitions vagues. C’est William Thomson, aussi connu sous le nom de Lord Kelvin, qui va proposer d’utiliser le mot « energy » à la place de « force » en 1850. Et William Rankine, qui perfectionne la machine à vapeur, formulera en 1853 la conservation de l’énergie mécanique. Il faudra attendre 1875 pour que le mot « énergie » apparaisse dans la littérature scientifique française [10].

Unités

Le Système international d’unités (SI) donne comme référence le joule [J] (en hommage aux travaux du physicien anglais James Joule) pour l’unité de l’énergie.

Le joule est une unité dérivée du kilogramme, de la seconde et du mètre [11]. Un joule correspond au travail d’une force d’un newton ([N] = [m] [kg] [s-2]) dont le point d’application se déplace d’un mètre dans la direction de la force. L’énergie correspond à du travail emmagasiné. Les deux grandeurs s’expriment avec la même unité. Le terme « énergie », du grec ancien ἐνεργής peut être traduit par “force en action”. Ainsi en unités de base : [J] = [m2] [kg] [s-2].

On retrouve cette “définition” du joule dans le système “mksa” (mètre, kilogramme, seconde, ampère), par exemple, en se rappelant que l’énergie potentielle est le produit de la masse [kg] par l’accélération [m.s-2] par le “dénivelé” [m] ( E p = mgh E_p = mgh ), ou que l’énergie cinétique découle du produit de la masse [kg] par le carré de la vitesse [m2s-2] ( E c = 1 2 mv 2 E_c = frac 1 2 mv^2 )… voire que la formule célèbre d’Einstein sur l’« équivalence masse-énergie » est E = mc 2 E = mc^2 (avec c c la vitesse de la lumière dans le vide).

Comme nous l'avons déjà évoqué ci-dessus, et on le retrouvera à l'aide des multiples exemples suivants, l'énergie peut prendre différentes formes, ainsi cette unité possède plusieurs autres définitions basées sur des unités dérivées du SI. Par exemple, dans le domaine de l’électricité, le joule est aussi défini comme l'énergie dissipée « par effet Joule » à travers une résistance d'un ohm parcourue par un courant de un ampère pendant une seconde : [J] = [Ω] [A2] [s-1].

Selon les quantités d’énergie auxquelles on s’intéresse, il est utile d’utiliser plusieurs unités dérivées. En effet, le joule est une unité très petite par rapport aux énergies mises en jeu à l’échelle humaine, mais très grande par rapport aux échanges au niveau microscopique de l’atome. Ainsi pour ces différentes échelles, on utilise d’autres unités plus adaptées à ces ordres de grandeur.

Lorsqu’on travaille à l’échelle des particules, comme dans le cas du collisionneur de particules LHC, ou pour l’étude des semi-conducteurs, on utilisera l’électron-volt (eV). La calorie (cal) est souvent utilisée pour mesurer des échanges d’énergie sous forme de chaleur. Il existe aussi des unités d’énergie “commerciales” comme le kilowattheure (kWh) que l’on retrouve sur les factures d’électricité. La tonne équivalent pétrole (tep) est utilisée notamment pour comparer différentes productions d’énergie par rapport à celle utilisant le pétrole.

On rappelle les équivalences :

  • 1 eV = 1,602.10-19 J
  • 1 cal = 4,18 J
  • 1 kWh = 3,6.106 J
  • 1 tep = 11 630 kWh = 4,18.1010 J.

Au sujet des différentes unités d'énergie (définitions et correspondances), on pourra consulter les articles : Mémento sur l'énergie (partie 1) : Les unités d'énergie et de puissance et Concepts et chiffres de l'énergie : Mémento des unités.

La figure 1 présente différentes situations mettant en jeu plusieurs ordres de grandeurs, de l’électron-volt (eV) jusqu’à quelques tonnes équivalent pétrole (tep).

Note : afin de mieux réaliser l’ampleur de l’échelle s’étalant entre 1 eV et 1 tep, nous proposons une comparaison imagée se basant sur l’unité de masse : cela revient à l’écart entre la masse d’une abeille et celle de la Terre. Sur cette échelle, 1 joule correspondrait approximativement à la masse du mont Fuji.

Quantités d'énergie sur une gamme allant de l’eV à quelques tep

Figure 1. Quantités d'énergie sur une gamme allant de l’eV à quelques tep

Le joule [J] est l'unité du système international.

Note : sur la flèche grise du bas de la figure nous proposons une comparaison imagée se basant sur l’unité de masse : l’écart entre l’eV et la tep revient à l’écart entre la masse d’une abeille et celle de la Terre. Sur cette échelle, 1 joule correspondrait approximativement à la masse du mont Fuji.


Matières premières et formes d’énergie

Pour rendre compte de toutes les formes que peut prendre l’énergie, donnons ici, succinctement, quelques exemples de conversion.

  • Le Soleil transforme de l’énergie par fusion nucléaire en énergie de rayonnement et par répercussion en énergie cinétique (vents = mouvements de convection au sein de l’atmosphère), potentielle (évaporation de l’eau), chimique (photosynthèse).
  • Dans une centrale nucléaire, l’énergie de fission est ensuite convertie en énergie thermique, puis en énergie cinétique dans des turbines pour entrainer des alternateurs et ainsi être convertie en énergie électrique.
  • De même, dans un moteur thermique, le pétrole fournit par combustion de l’énergie thermique, cette production de gaz, via les forces de pression entraine les pistons, l'énergie est transformée en énergie cinétique.

Nous proposons maintenant de lister quelques formes d’énergie et de donner des exemples de valeurs que nous choisissons proches les unes des autres (quelques joules) afin de mieux les comparer.

Tableau 1. Quelques exemples de formes d'énergie et de systèmes mettant en jeu quelques joules

Énergie potentielle de pesanteur

E p = mgh E_p = mgh

m m masse [kg], g g accélération de la pesanteur [m.s-2], h h hauteur [m]

Énergie libérée par une pomme de 150 g qui chute de 2 m → 3 J

Énergie cinétique

E c = 1 2 mv 2 E_c = frac 1 2 mv^2

m m masse [kg], v v vitesse [m.s-1]

Énergie dépensée par une vandoise de 500 g pour nager à 3 m.s-1 → 2,25 J

Énergie électrique

E elec = 1 2 Cu 2 E_elec = frac 1 2 Cu^2

C C capacité [F] (farad), u u différence de potentiel [V] (volt)

Énergie accumulée par un condensateur de 47 nF chargé sur 12 V → 3,38 J

Énergie magnétique

E mag = 1 2 Li 2 E_mag = frac 1 2 Li^2

L L inductance [H] (henry), i i intensité du courant électrique [A] (ampère)

Énergie accumulée par une bobine de 1 H traversée par un courant de 3 A → 4,5 J

Énergie thermique

E th = mCΔT { E _ th = mCΔT }

m m masse [kg], C C capacité thermique massique [J.kg-1.K-1], T T température [K] (kelvin)

Énergie nécessaire pour élever la température d'un gramme d’eau de 1°C (ou 1K) → 4,18 J

Énergie élastique d'un ressort

E elas ressort = 1 2 k ( ΔL ) 2 { { E _ { elas - ressort } = { frac { 1 } { 2 } } } k ( ΔL ) ^ 2 }

k k raideur [N.m-1], L L allongement [m]

Énergie accumulée par un ressort ( k k  =10 N.m-1) étiré de 1 m → 5 J


Pour renchérir un peu plus les exemples des formes d'énergie, nous changeons maintenant d'ordres de grandeurs.

Tableau 2. Autres formes d'énergie et de systèmes mettant en jeu des énergies beaucoup plus petites ou beaucoup plus importantes que quelques joules

Énergie de rayonnement

E r = E_r = hν

h h constante de Planck : h h  = 6,62.10-34 [J.s], ν ν fréquence [Hz]

Énergie rayonnée par un photon rouge (λ = 650 nm) → 3.10-19 J

Énergie chimique

E réaction = E liaison-réactifs E liaison-produits E_réaction = sum E_{liaison-réactifs} − sum E_{liaison -produits}

E liaison E_réaction = ΣE_{liaison-réactifs} − ΣE_{liaison- produits} [J.mol-1]

L'énergie de détonation du TNT est de 4,184 MJ/kg.

Ainsi, 1 g de TNT équivaut à 4 184 J.

Énergie de liaison (énergie nucléaire)

E = Δmc 2 E = Δmc^2

Δm Δm différence entre la masse d’un noyau et celle de la somme de ses nucléons [kg], c c vitesse de la lumière [m.s-1]

L’énergie de liaison d’un noyau de deutérium H 1 2 H lsup 2 lsub 1 (1 proton et 1 neutron) est (avec Δm Δm = 4.10-30 kg) → 3,6.10-13 J


La puissance

Définition

Pour comprendre comment énergie et puissance sont liées on peut prendre une analogie avec le débit d’un robinet et le volume de liquide récolté [12]. Pour se servir un volume d’eau, on ouvre le robinet, et en fonction du débit, on attend un certain temps pour que le volume désiré soit atteint.

Le volume délivré est égal au débit multiplié par le temps.

Volume = débit × temps

L’énergie est analogue au volume et la puissance au débit.

Énergie = puissance × temps

La puissance est un débit d’énergie.

L’unité de l’énergie est le joule [J], celle du temps la seconde [s], la puissance est ainsi mesurée en joules par seconde [J]/[s], autrement appelé watt [W] (en hommage à James Watt).

Pour bien saisir la relation entre puissance et énergie, on peut proposer une autre illustration en s'intéressant à la situation suivante où une personne de 60 kg (Josée) souhaite monter de 10 mètres (environ 4 étages), figure 2.

Pour grimper de 10 mètres, l'énergie nécessaire, que nous assimilerons ici uniquement à de l'énergie potentielle, est : E p = mgh E_p = mgh .

Avec la masse m m de Josée égale à 60 kg, on approxime l'accélération de la pesanteur g g à 10 m.s-2 et une hauteur h h de 10 m, on trouve : E p E_p  = 6 000 J.

Deux possibilités s’offrent à Josée, soit monter à toute allure en 30 secondes, soit prendre son temps pour monter en 2 minutes. Dans les deux cas, il faut fournir la même énergie égale à 6 000 J.

La puissance, un débit d'énergie

En montant en 30 secondes :

  • la puissance à fournir est de énergie / temps = 6 000 / 30 = 200 W.

En montant en 2 minutes, soit 120 secondes :

  • la puissance à fournir est de énergie / temps = 6 000 / 120 = E50 W.

Dans ce deuxième cas, la puissance à fournir est beaucoup plus faible, il faut ainsi plus de temps pour arriver à la même quantité d’énergie. On perçoit bien, dans cette situation, ce que représente la puissance ici “physique” à mettre en jeu.

Attention, on gardera en mémoire quelques limitations. En ce qui concerne la restitution de l'énergie : si l'on prend l'exemple d'une moto, et qu'on lui ajoute un réservoir dix fois plus gros, la moto ne pourra pas accélérer dix fois plus vite. Dans notre exemple avec Josée, il y a aussi une limitation de la force musculaire d'un être humain. Par exemple, un humain n'est pas capable de porter une voiture pour lui faire traverser un ruisseau, mais en la démontant et en la transportant par morceaux, cela devient possible. On pourra, à ce sujet, consulter La physique des héros.

Autre illustration de la puissance humaine

Un autre exemple très parlant de ce que représente la puissance et de sa relation avec l'énergie et le temps est présenté dans la vidéo réalisée par des étudiants de l'Académie de Stockholm, dans laquelle ils sollicitent la puissance musculaire du cycliste professionnel Robert Förstemann pour griller une tartine.

Puissances instantanée, nominale et moyenne

Dans l'exemple de la figure 2, pour monter de 10 mètres, nous avons pris comme hypothèse que la puissance développée par Josée restait constante au cours du temps. Cela n’est pas toujours le cas. On s'en rend notamment compte dans l'expérience à laquelle le cycliste Robert Förstemann s'est livré, sa puissance développée n'est pas constante sur toute la durée de l'effort.

De la même manière, lors d’un déplacement en voiture, la puissance délivrée par le moteur varie tout au long de la conduite, alors que le plein de carburant (énergie emmagasinée) est fixé initialement. Ainsi, on appelle puissance instantanée la puissance délivrée à chaque instant.

Prenons l'exemple d'un petit générateur électrique à manivelle. Sur la séquence vidéo de la figure 3, nous montrons son principe de fonctionnement. L'entrainement manuel de l'axe de rotation du moteur/générateur, correspond à de l'énergie mécanique, convertie en énergie électrique aux bornes de l'alternateur.

Lorsque le générateur alimente une ampoule à filament, un courant traverse le filament qui chauffe et rougeoie en fonction de la température et de la puissance.

Sur la séquence vidéo présentée figure 4, la puissance électrique transmise à l'ampoule au cours du temps est mesurée à l'aide d'un wattmètre. Nous avons aussi accès aux valeurs instantanées de la tension [V] et de l'intensité du courant [A]. La puissance instantanée [W] n'est pas constante dans le temps et varie entre 100 mW et 600 mW, ici.

Figure 3. Alimentation d'une ampoule à l'aide d'un générateur à manivelle


Figure 4. Mesure de la puissance délivrée à une ampoule par un générateur à manivelle


On pourrait aussi calculer la puissance moyenne délivrée sur cette séquence (moyenne dans le temps).

La puissance nominale est une donnée que l’on retrouve pour toutes les machines. Les grandeurs nominales (courant, tension, puissance, fréquence) sont indiquées sur la plaque signalétique des machines (figure 5). Le régime nominal correspond aux conditions de fonctionnement idéal du convertisseur.

La figure 5 A) correspond à la plaque signalétique d'un grille-pain. En fonctionnement normal, branché sur une prise délivrant une tension sinusoïdale de 230 V, le grille-pain consommera 1 200 W.

La figure 5 B) correspond à la plaque signalétique d'un aspirateur. On peut lire deux valeurs de puissance. La puissance annotée "IEC" correspond à la puissance nominale, c'est-à-dire consommée en fonctionnement normal, branché sur une prise délivrant une tension sinusoïdale de 230 V, sur une longue période, conformément à la norme IEC 60 034–2–1:2014. L'aspirateur est néanmoins capable de supporter des "pics" de fonctionnement (objet qui se coince, par exemple) demandant une consommation ponctuelle (puissance maximale) allant jusqu'à 1 600 W.


La figure 5 C) correspond à la plaque signalétique du générateur à manivelle. On peut lire les valeurs nominales et les performances (tension, vitesse, courant délivré et couple) pour un fonctionnement à vide (sans charge – no load) et pour lequel le rendement est maximal (at maximum efficiency).

Les expériences précédentes permettent de bien comprendre que la puissance nominale correspond uniquement à un point de fonctionnement. De la même manière, sur le culot de l'ampoule il est affiché une puissance nominale de fonctionnement. On a pu voir que si l'on tourne la manivelle lentement, donc que l'on délivre des grandeurs électriques (U et I) plus faibles que les valeurs nominales, la puissance transmise sera bien au-dessous que celle affichée sur l'ampoule. Ces dernières réflexions ont aussi comme objectif d'aiguiser l'attention et d'être prudent avec des valeurs de puissances annoncées et mesurées. Cela permet de "déjouer" les annonces de soit-disant "moteurs perpétuels" ou générateurs à rendement plus grand que 1.

Puissances – ordres de grandeur

Dans cette partie, comme nous l'avons fait pour l'énergie, nous proposons de donner quelques ordres de grandeur de puissance.

  • La puissance consommée par un être humain au repos, correspondant à la survie des fonctions de base de son organisme (métabolisme basal), est d'environ 100 W [13].
  • La puissance fournie par une tranche de centrale nucléaire usuelle est de l'ordre de grandeur du gigawatt (GW). On pourra retrouver les informations sur le fonctionnement des centrales nucléaires et les différents puissances des installations dans le dossier L'énergie nucléaire en 14 questions, CEA [14], ou encore dans l'article sur le Parc nucléaire français, du site Connaissance des énergies [15].
  • La puissance des installations solaires photovoltaïques en France fin 2023 est d'environ 20 GW, d'après les chiffres annoncés par RTE [16].
  • La puissance mise en jeu par l’ensemble des marées océaniques de la Terre est de l'ordre de 3 TW. Cette puissance potentielle théorique est calculée en se basant sur des données astronomiques : on mesure le ralentissement de la rotation de la Terre et l’éloignement de la Lune pour déterminer l’énergie dissipée par le phénomène de marées [17][18]. On retrouve le même ordre de grandeur en mesurant les variations de la hauteur de la surface des océans à l'aide d'images satellitaires [19].
  • On estime que la photosynthèse utilise en moyenne 0,1 % de la puissance solaire totale disponible pour la production de matière organique (sucres). Cela représente ainsi environ 174 TW [20][21]. C'est une puissance "brute" qui correspond à puissance consommée pour la survie des plantes ainsi qu'à la matière organique créée. La puissance disponible est en moyenne de l'ordre de 140 TW [22].
Exemples de valeur de puissances de quelques phénomènes

On retrouvera des présentations de certaines de ces puissances ou énergies dans les articles suivants :

Le kilowattheure, une unité d'énergie

Présentation et exemples

Dans cette partie, après avoir défini la relation entre la puissance et l'énergie, nous revenons à l'énergie pour nous intéresser au kilowattheure.

Comme son nom l'indique, 1 kWh est la quantité d'énergie fournie par une puissance de 1 kW pendant 1 heure, soit 3 600 secondes.

Dans la figure 7, nous proposons de présenter des conversions d'énergie pour "produire" 1 kWh (à gauche), et des exemples d'usage (à droite). Ici, l'intérêt est de pouvoir se donner une représentation de cette quantité d'énergie.

1 kWh d'énergie, exemples de masses mises en jeu et d'utilisations

Les exemples donnés sont des ordres de grandeur. On rappelle que 1 kWh = 103 × 3 600 J = 3,6.106 J.

  • Une batterie lithium-ion fournit actuellement entre 150 Wh.kg-1 et 200 Wh.kg-1 [23]. Il faut alors la décharge d'environ 6 kg de batterie pour "obtenir" 1 kWh. La décharge de la batterie donne directement accès à de l'énergie électrique.
  • L’énergie nucléaire est une forme d’énergie que l'on qualifie de concentrée puisque 1 kg d’uranium naturel fournit une énergie calorifique de 100 000 kWh [24]. Ainsi, la fission de 10 mg d’uranium libère 1 kWh.

    L'énergie libérée est sous forme de chaleur. Pour la convertir en énergie mécanique puis électrique, cela nécessite de mettre en œuvre d'autres convertisseurs dont les rendements seront à prendre en compte pour arriver jusqu'à l'usage.

  • Le pouvoir calorifique du pétrole est de 42.106 J.kg-1 en moyenne [25]. Ainsi, la combustion d'environ 100 g de pétrole "fournit" 1 kWh. Les combustibles fossiles sont, en France, principalement utilisés dans le domaine des transports, il faut encore un convertisseur pour transformer cette énergie calorifique en énergie mécanique.
  • L'énergie libérée par 10 tonnes d'eau qui tombent de 40 mètres, E p = mgh E_p = mgh , est de l'ordre de grandeur du kilowattheure. Cela correspond à une énergie potentielle que l'on convertit ensuite, par exemple dans les barrages hydroélectriques, en énergie électrique à l'aide d'alternateurs.
  • L'énergie emmagasinée par un véhicule de 10 tonnes lancé à la vitesse de 100 km.h-1, E c = 1 2 mv 2 E_c = frac 1 2 mv^2 , est aussi de l'ordre de grandeur du kilowattheure. Cela correspond à une énergie cinétique. Elle peut être utilisée "telle quelle" pour effectuer un déplacement.

    Un autre exemple d'utilisation de l'énergie cinétique repose sur le fonctionnement des éoliennes ou des hydroliennes, mises en mouvement respectivement par les vents ou les courants marins, l'énergie est ensuite convertie en électricité.

Nous venons de voir différentes formes d'énergie et masses impliquées correspondant à 1 kWh. En fonction de la nature de l'énergie (calorifique, mécanique…), il peut être nécessaire d'utiliser d'autres convertisseurs afin d'avoir accès à une énergie "utilisable" pour les besoins humains (comme les exemples proposés sur la droite de la figure 7).

De plus, afin de comparer au mieux ces différentes conversions, il faut bien sûr tenir compte du rendement sur cycle de vie de toute la chaine énergétique, c'est-à-dire prendre en compte la construction du convertisseur (centrale nucléaire, centrale électrique, centrale thermique, éolienne…), l'extraction et le transport des matières premières (uranium, minerais, métaux, pétrole…), la préparation des matières premières (enrichissement de l'uranium, traitements des minerais et métaux, raffinage du pétrole…), jusqu'au recyclage des convertisseurs (centrales et matériaux) et la prise en charge des déchets (éléments radioactifs ou autres produits toxiques).

Rendement sur cycle de vie

Pour bien comprendre le fonctionnement et les enjeux du rendement sur cycle de vie, on pourra consulter les articles Concepts et chiffres de l'énergie : comment définir le rendement d'un convertisseur d'énergie, Énergie, rendement… Comprendre pour comparer et Le rendement sur cycle de vie – Mémento sur l'énergie (partie 4).

Quelques chiffres de consommations et productions mondiales

Nous proposons, dans ce dernier paragraphe, de mettre en avant quelques données mondiales (à l'aide de trois graphes) sur la consommation, la production, et la nature des énergies.

Énergie mondiale consommée par personne, en kWh, en 2023

Figure 8. Énergie mondiale consommée par personne, en kWh, en 2023

Une animation de la carte de la consommation entre 1965 et 2023 est disponible sur le site de l'iconographie.


La figure 8 représente l'énergie consommée par personne, en kWh, en 2023 en fonction de sa zone d'habitation. On peut observer de fortes inégalités selon les différents continents. Il est intéressant d'aller voir l'animation pour voir l'évolution de ces consommations depuis 1965. On peut garder en tête qu'en 2023, un français consomme entre 30 000 kWh et 100 000 kWh par an.

Production mondiale d'électricité à partir de différente sources (energies fossiles, nucléaire ou renouvelable), en TWh, en 2023

La figure 9 représente la production mondiale d'électricité à partir de différente sources : énergies fossiles, nucléaire ou renouvelables, en TWh, en 2023. Il est intéressant d'aller voir l'animation (graphique 3 en bas de page) pour voir l'évolution depuis 1985. On pourra retrouver deux petites inflexions liées à la crise de 2008 et celle du Covid en 2020, mais il est très impressionnant de constater que la consommation est toujours en augmentation et que la part d'énergie fossile pour créer de l'électricité est aussi toujours en augmentation.

Répartition de la production mondiale d'électricité à partir de charbon, de pétrole et de gaz (en TWh) en 2023

Figure 10. Répartition de la production mondiale d'électricité à partir de charbon, de pétrole et de gaz (en TWh) en 2023

Une animation de la carte de la production entre 1985 et 2023 est disponible sur le site de l'iconographie.


La figure 10 représente la production mondiale d'électricité à partir de charbon, de pétrole et de gaz, en TWh, en 2023. Il est intéressant d'aller voir l'animation (graphique 24 en bas de page) pour voir l'évolution depuis 1985. On peut notamment observer que la France produit encore régulièrement autour de 50 TWh d'électricité à partir d'énergies fossiles.

Conclusion

Nous avons revu les définitions, unités, usages et illustrations des concepts d’énergie et de puissance. Ces notions de base restent cependant à manipuler avec précaution, non pas parce qu’elles sont particulièrement complexes, mais parce qu’elles sont utilisées et évoquées dans des contextes très variés pas toujours faciles à comparer.

Ainsi, nous avons évoqué la distinction entre puissance nominale, instantanée et moyenne, distinction qui explique qu’on ne peut prévoir l’énergie produite par un générateur (centrale, panneau photovoltaïque) à partir de la puissance installée, puisque l’énergie totale produite dépendra du facteur de charge moyen (dépendant de la durée réelle de fonctionnement et de la puissance instantanée à chaque instant).

De même, nous avons vu que l’énergie ne se crée pas, mais peut passer d’une forme à une autre… avec des rendements (ou facteurs de conversion) variables. Le lien simple avec la puissance permet de facilement comparer les consommations d’énergie d’appareils de même nature : l’aspirateur le plus puissant consommera plus d’énergie pour une durée égale d’utilisation, de même pour l’ampoule servant à nous éclairer. Par contre dès que l’on compare des systèmes techniquement différents délivrant un même service, les choses peuvent se compliquer. En effet comparer poêle à bois, chaudière au gaz, radiateur électrique et pompe à chaleur pour son chauffage n’est pas aussi facile car il faut alors comparer non pas les joules ou watt-heures “achetés” mais les quantités d’énergie mises en œuvre sur l’ensemble de la chaine énergétique (comparer les énergies primaires). La comparaison la plus complète, et la plus compliquée à faire, est réalisée en prenant en compte des bilans sur cycle de vie.

Nous voyons que la compréhension des notions d’énergie et de puissance reste à la base de nos réflexions sur notre consommation énergétique, surtout à l’heure de la nécessaire transition énergétique.

Pour poursuivre dans la thématique, on pourra aller consulter :

Références

[1] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), 2021. Changement climatique 2021 – Les bases scientifiques physiques – Résumé à l'intention des décideurs, 40p

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