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Image de la semaine | 07/04/2014

Figures d'impacts dans des dépôts phréato-magmatiques et/ou sutseyens des falaises de Capelas, île de Sao Miguel, Açores

07/04/2014

Pierre Thomas

ENS de Lyon - Laboratoire de Géologie de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Figures d'impact, figures de charge, chenaux... dans les dépôts volcao-sédimentaires du flanc Est du stratovolcan des Sept Cités (Sete Cidades), Açores (Portugal)


Figures d'impact dans des dépôts phréato-magmatiques et/ou surtseyens sur le flanc Est du stratovolcan des Sept Cités, île de Sao Miguel, Açores

Figure 1. Figures d'impact dans des dépôts phréato-magmatiques et/ou surtseyens sur le flanc Est du stratovolcan des Sept Cités, île de Sao Miguel, Açores

Cette falaise de bord de route est constituée de dépôts bien classés et bien stratifiés de pyroclatites. L'échelle est donnée par les brins d'herbe et le couteau suisse en bas à droite de l'image. Vue leur taille (entre 2 et 64 mm), ces projections peuvent être appelées lapilli. Ces dépôts ont une couleur brunâtre à jaunâtre caractéristique des hyaloclastites palagonitisées. Des explosions volcaniques violentes ayant lieu à une certaine distance ont parfois projeté de gros blocs de laves, qui sont retombés sur ces dépôts non consolidés. Ils se sont alors enfoncés en "tordant" ou en "perçant" ces couches de lapilli, en donnant de véritables figures d'impact. Au moins 5 de ces figures d'impact sont visible sur cette photo. La figure suivante montre un détail de l'impact central.



Nous avons vu la semaine dernière (Le stratovolcan des Sept Cités...) que la base des falaises recoupant les flancs Ouest du stratovolcan des Sept Cités (Sete Cidades) était constituée de dépôts jaunâtres stratifiés, que nous avons interprétés comme des dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques. Nous sommes maintenant dans une position géologique similaire, une falaise recoupant le flanc Est du stratovolcan des Sept Cités, mais beaucoup plus facile d'accès.

Les falaises du Porto de Capelas, île de Sao Miguel, Açores

Figure 3. Les falaises du Porto de Capelas, île de Sao Miguel, Açores

Mis à part la vue de Surtsey et du fou à pattes bleues, toutes les figures de charge suivantes ont été photographiées sur le bord de la route descendant à ce petit port, ou dans le port lui-même.


L'Ouest de l'île de Sao Miguel, Açores (Portugal)

Figure 4. L'Ouest de l'île de Sao Miguel, Açores (Portugal)

Le port de Capelas est localisé par la punaise rouge. La Ponta do Escalvado et la Ponta de Ferraria vues la semaine dernière sont localisées par la punaise jaune. Ces deux sites sont en situations analogues par rapport au stratovolcan des Sept Cités et à sa superbe caldeira sommitale.


Une éruption phréato-magmatique provient de la rencontre d'un magma et de terrains gorgés d'eau (nappe phréatique …). Le contact de l'eau et de la lave entraine la production de vapeur d'eau à haute pression et la fragmentation de la lave au cours d'explosions. Une éruption surtseyenne (dont le nom vient de l'ile de Surtsey en Islande qui est sortie de la mer en 1963) est d'un type très voisin ; elle a lieu quand la lave est émise à fleur d'eau dans un lac ou une mer très peu profonde. Les terrains émergés près des côtes et ceux constituant les volcans venant de sortir de l'eau étant généralement remplis d'une nappe phréatique, tous les intermédiaires peuvent exister entre les éruptions phréato-magmatiques et surtseyennes. Ces éruptions ont un indice d'explosivité très important, et pourraient être qualifiées de « grises » même si le magma est basaltique, car le contact de l'eau refroidit assez fortement la lave. Ce refroidissement brutal entraine une vitrification d'une bonne partie de la lave. Les dépôts formés des retombées de ces débris largement vitreux sont appelés hyaloclastites. Très souvent, le contact verre/eau transforme ce dernier en un mélange complexe de minéraux d'altération (principalement des minéraux argileux et parfois des zéolites). Ce mélange est souvent appelé palagonite. Il donne souvent une couleur brun jaunâtre à ces dépôts.

Une éruption surtseyenne ayant eu lieu en 1963 sur l'île de… Surtsey (Islande)

Figure 5. Une éruption surtseyenne ayant eu lieu en 1963 sur l'île de… Surtsey (Islande)

On peut distinguer le panache clair de vapeur d'eau condensée du panache constitué de projections volcaniques très sombres, car refroidies par l'eau et émis en l'air par des explosions violentes. Ce sont de telles explosions qui peuvent projeter des gros blocs qui vont retomber sur les couches périphériques formées de fins granules de lave pulvérisée.


Nous allons vous montrer 2 images présentant le cadre dans lequel ont été prises ces photographies d'impacts, puis 9 photos d'impacts, souvent montrées par paire (vue d'ensemble puis vue de détail). L'échelle est donnée soit par le couteau suisse, soit par des touffes d'herbes. On peut remarquer des différences "subtiles" entre tous ces impacts : couche antérieure à l'impact fléchies et/ou percées, remplissage du "cratère d'impact" non stratifié ou au contraire fait de couches bien distinctes à géométrie concave…


Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques


Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques

Figure 11. Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques

Détail du centre de la figure précédente.



Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques

Figure 13. Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques

Détail du centre de la figure précédente.



Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques

Figure 15. Détail d'une figure d'impact dans les dépôts surtseyens et/ou phréato-magmatiques

Détail du centre de la figure précédente.



Il n'y a pas que des figures d'impact dans cet affleurement le long de la route menant au port de Capelas. On voit aussi ce qui ressemble à des chenaux remplis, à des flexures et à d'autres structures plus difficiles à interpréter. En effet, ces couches ont été déposées soit sous une faible tranche d'eau soit à une très faible altitude au-dessus de la mer, souvent en strates approximativement horizontales, mais pas toujours. Ces strates ont pu être érodées par des vagues, des courants de marée, du ruissellement dû à de bonnes pluies... Ces couches meubles ont pu glisser, être perturbées par des explosions violentes ou des impacts créant des cratères métriques… Et on ne voit ces structures qu'en coupe, et non dans leurs trois dimensions. Mais ce n'est pas parce qu'un examen rapide de ces structures ne permet pas de les interpréter formellement qu'il faut se dispenser de les admirer. À vos interprétations !


Les îles volcaniques sont, par nature, assez riches en volcanisme surtseyen. Et comme elles sont souvent isolées, elles sont le lieu d'endémisme et de nombreuses spéciations. Aux Açores, c'est surtout la flore dite macaronésienne qui est typique. Aux Galapagos, autres îles volcaniques, flores et faunes sont particulières, et ont joué un rôle dans l'élaboration, au XIXème siècle, de la jeune théorie de l'Évolution (cf. Sélection naturelle, VIH, pinsons : ce que Darwin ne pouvait pas savoir). Y voir, comme ci-dessous, un (presque) endémique insulaire donner l'échelle à une figure d'impact surtseyenne est un plaisir rare pour un naturaliste.