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Image de la semaine | 12/12/2005

Dépôt de coquilles actuelles sur une plage

12/12/2005

Pierre Thomas

Laboratoire de Sciences de la Terre / ENS de Lyon

Florence Kalfoun

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Dépôts de coquilles sur une plage du Nord Pas-de-Calais : futures lumachelles ou futurs faluns ?



Les semaines précédentes, nous avons vu comment les eaux chargées de CO2 dissolvaient le calcaire en absorbant 1 CO2 atmosphérique :

CO2 + H2O + CaCO3 → 2 HCO3- + Ca2+

Puis nous avons vu comment la précipitation des calcaires dans le lit de rivières re-libérait 1 CO2 :

2 HCO3- + Ca2+→ CO2 + H2O + CaCO3

Mais tous les Ca2+ + 2 HCO3- ne précipitent pas dans les rivières, loin s'en faut, et les figures de précipitation montrées les semaines des 28 novembre 2005 et 5 décembre 2005 ont une taille exceptionnelle. Beaucoup des ions Ca2+ et HCO3- arrivent à la mer.

Dans les rivières, la concentration moyenne est de 13,4 mg/l pour le Ca2+ et de 52,2 mg/l pour HCO3-. La concentration de la mer est beaucoup plus élevée : 400 mg/l pour le Ca2+ et de 140 mg/l pour le HCO3-. Dans la mer, les concentrations en Ca2+ et en HCO3- sont telles que CaCO3 devrait précipiter spontanément. La mer est donc "sursaturée" en CaCO3 (calcite).

La précipitation, qui devrait être "thermodynamiquement" spontanée, se fait en réalité dans la nature dans trois contextes :

  1. par activité directe d'organismes, qui, avec un équipement enzymatique spécialisé, précipitent le CaCO3 pour faire test et coquilles.
  2. par l'action indirecte de la photosynthèse qui, en absorbant du CO2, déplace vers la droite l'équilibre:

    Ca2+ + 2 HCO3-→ CaCO3 + H2O + CO2

  3. par la présence de la matière organique, comme celle sécrétée par des voiles bactériens, qui joue un rôle de catalyseur, et qui favorise la précipitation de CaCO3 à son niveau. Cette précipitation se fait sans action directe d'organisme vivant, mais avec une action indirecte de la vie puisque la matière organique est d'origine biologique.

Dans ces trois contextes, c'est donc la vie qui "catalyse" directement ou indirectement la précipitation des carbonates marins (c'est la même chose en contexte d'eau douce). Sans vie, la précipitation se ferait sans doute ; mais dans la nature actuelle, la vie est omniprésente et c'est elle qui déclenche (directement ou indirectement) cette précipitation. La précipitation purement chimique est rarissime dans la nature actuelle, et l'immense majorité des calcaires viennent d'une précipitation biologique-biochimique, ou du moins favorisée par la présence de matière organique.

Pour illustrer cela, nous vous montrons cette semaine une accumulation actuelle de coquilles carbonatées. Une future lumachelle ou un futur falun ?

Vue d'ensemble de la plage du Nord-Pas-de-Calais


Vue rapprochée des coquilles déposées sur la plage

 

Nous vous montrons avec Google Earth aussi le contexte de cette accumulation : les plages du Pas-de-Calais (localisation exacte au niveau de la flèche rouge).


Dans les semaines qui viennent, nous vous montrerons d'ailleurs des équivalents fossiles de ces accumulations de coquilles, ce qui permettra de comparer natures actuelle et ancienne.

Le message géologique général de cette série de 8 semaines sur la dissolution/précipitation des carbonates, est que le bilan de ce "couple" dissolution/précipitation est globalement nul vis à vis du CO2 atmosphérique.