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Article | 07/02/2019

Deux exemples de perturbations environnementales le long du fleuve Colorado et de son plateau, États-Unis d'Amérique

07/02/2019

Matthias Schultz

Professeur de SVT, Lycée H. de Chardonnet, Chalon sur Saône

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Perturbations environnementales liées aux activités humaines (exploitations minières, tourisme, barrages et gestion de l'eau) : visibilité, qualité de l'air, régime hydrologique et charge sédimentaire.


La géologie du Grand Canyon du Colorado et de la région environnante (plateau du Colorado) a déjà été abordée dans de précédents articles dont Bryce Canyon (Utah, USA), un musée des formes d'érosion torrentielle dans des argiles gréseuses plus ou moins indurées, Les discordances du Grand Canyon du Colorado (Arizona, USA), Le Grand Canyon du Colorado vu du ciel (Arizona, USA), Monument Valley : grès et argiles, diaclases, érosion, mésas et buttes témoins, anciens volcans…, Le Parc national de Canyonlands, la vallée de Betatakin… : reculées et mini-canyons du plateau du Colorado (USA), Waterpockets, potholes, et taffonis… superbes alvéoles érosives dans les grès du plateau du Colorado (États-Unis d'Amérique), Pourquoi y a-t-il tant d'arches dans le Parc national des Arches (Utah, États-Unis d'Amérique) ?, et Quelques déformations des roches globalement tabulaires du plateau du Colorado (États-Unis d'Amérique).

Il nous a paru intéressant de revenir sur l'emblématique Grand Canyon pour mettre en évidence deux perturbations environnementales[1] de son fragile écosystème désertique, toutes deux aisément observables lors de mon passage dans la région au mois d'août 2018 : perturbation de la transparence atmosphérique, et perturbation de l'hydrologie et la charge sédimentaire du fleuve Colorado.

Perturbation de la visibilité et de la qualité de l'air

Le Grand Canyon est une destination extrêmement touristique, réputée pour ses panoramas spectaculaires. À ce titre, la qualité de l'air (en termes de transparence optique notamment) est suivie de près par le Service des Parcs Nationaux (voir à ce sujet Park Air Profiles - Grand Canyon National Park). Elle peut fortement varier. Au début du mois d'août 2018, par exemple, la visibilité dans le canyon était assez médiocre. Ainsi les panoramas proposés ci-dessous sont-ils, quelque peu paradoxalement, caractérisés par une mauvaise netteté…

Panorama en direction de la rive Sud du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Figure 1. Panorama en direction de la rive Sud du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

La rive Sud, à environ 12 km, est largement noyée dans la brume, de même que le fleuve Colorado au fond du canyon, près de 8 km plus loin et 1600 m plus bas. La visibilité peut être comparée avec celle des articles précédents, notamment Les discordances du Grand Canyon du Colorado (Arizona, USA).


Panorama en direction de la rive Sud du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Figure 2. Panorama en direction de la rive Sud du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Les lointains, notamment la rive Sud à environ 12 km, sont largement noyés dans la brume, qui forme des bancs flottant à diverses hauteurs. La visibilité peut être comparée avec celle des articles précédents, notamment Les discordances du Grand Canyon du Colorado (Arizona, USA).


Panorama en direction du Sud-Est du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Figure 3. Panorama en direction du Sud-Est du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Les lointains, notamment la rive Sud à environ 12 km, sont largement noyés dans la brume, qui forme des bancs flottant à diverses hauteurs. La visibilité peut être comparée avec celle des articles précédents, notamment Les discordances du Grand Canyon du Colorado (Arizona, USA).


Panorama en direction du Sud-Est du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Figure 4. Panorama en direction du Sud-Est du Grand Canyon pris depuis la rive Nord (secteur de Cape Royal)

Les lointains sont largement noyés dans la brume, qui forme des bancs flottant à diverses hauteurs. La visibilité peut être comparée avec celle des articles précédents, notamment Les discordances du Grand Canyon du Colorado (Arizona, USA).

Notez le rapace sur la gauche de l'image, probablement un urubu à tête rouge (nom scientifique Cathartes aura, turkey vulture en anglais). La question de l'impact de cette visibilité réduite sur les pratiques de chasse à vue des rapaces dans cette région où sont également réintroduits les condors de Californie (Gymnogyps californianus) mérite d'être posée.


L'origine des variations de la transparence de l'atmosphère est bien sûr pour partie naturelle : le Grand Canyon constitue un point bas assez exceptionnel dans la région (respectivement 1300 et 1600 m plus bas que les rives Sud et Nord, cette dernière culminant à 2800 m d'altitude), une profonde vallée qui piège l'air froid et les nuages, parfois pendant de longues périodes. Une partie des bancs de brume visibles sur les figures ci-dessus peut donc être imputée à un brouillard froid matinal qui se dissipera au cours de la journée.

Les feux de forêt, réguliers dans les écosystèmes arides et semi-arides de l'Ouest Américain, font aussi partie des phénomènes naturels perturbant la visibilité. Ils produisent de grandes quantités d'aérosols, qui peuvent voyager sur des milliers de kilomètres et parfois s'accumuler dans le canyon, tant que le vent ne les chasse pas plus loin ou que les précipitations ne les font pas tomber au sol. En ce mois d'août 2018, un petit feu de broussailles était d'ailleurs actif au niveau de la rive Nord du Grand Canyon, mais son ampleur limitée ne saurait expliquer les abondantes particules fines présentes dans le canyon à cette date. En revanche, l'actualité de ce mois d'août 2018 était marquée par de très importants incendies forestiers dans plusieurs états comme l'Idaho, le Colorado et surtout la Californie, qui a alors connu des records historiques (voir Incendies de 2018 en Californie et figure 5). Les fumées de ces feux ont été dispersées sur une large partie des États-Unis (voir figures 6 et 7) et sont responsables d'une large part de la “brume” qui gênait la vue dans les figures 1 à 4.

Si les feux sont des perturbations naturelles des écosystèmes de l'Ouest Américain, si la gestion de ces feux forestiers a pu être maladroite autrefois (on a ainsi pu chercher à éteindre systématiquement tous les feux de broussailles dans les années 1970, une stratégie contre-productive à moyen terme car elle provoque l'accumulation de combustible – buissons, bois mort – qui finit par alimenter des incendies géants beaucoup plus destructeurs car impossibles à maitriser), il semble clair que le système est en train de basculer vers des incendies gigantesques beaucoup plus fréquents. La densité de population, avec une forte proportion de feux déclenchés par l'Homme, joue un rôle dans ce changement ; mais c'est principalement le réchauffement climatique qui bouleverse les écosystèmes et génère la récurrence renforcée de ces incendies géants.


Image satellite des feux de forêt californien records du Mendocino Complex et Carr Fire, le 6 août 2018

Figure 6. Image satellite des feux de forêt californien records du Mendocino Complex et Carr Fire, le 6 août 2018

Les fumées sont poussées par le vent de Nord-Ouest par delà la Sierra Nevada en direction de la région du plateau du Colorado.


Image satellite à plus vaste échelle des feux de forêt de l'Ouest Américain (chaines des Cascades et des Sierras californiennes), le 1er août 2018

Figure 7. Image satellite à plus vaste échelle des feux de forêt de l'Ouest Américain (chaines des Cascades et des Sierras californiennes), le 1er août 2018

Les fumées sont ici faciles à distinguer des nuages bas très blancs, visibles par exemple sur la côte Nord-Ouest, l'océan Pacifique et certains reliefs. Les fumées sont poussées par un vent de Sud-Ouest et se dispersent sur l'ensemble du pays.


Outre les feux de forêt, une part des particules en suspension dans l'air peut aussi provenir de l'érosion des sols. Cette part difficile à estimer est sans doute minoritaire en temps normal, contribuant faiblement au « bruit de fond » optique, mais peut augmenter à la faveur d'évènements ponctuels de type tempête de poussière. Les sols des régions désertiques du plateau du Colorado sont en effet particulièrement fragiles. Ils sont fréquemment constitués d'encroûtements microbiens noirâtres (voir à ce sujet, par exemple, Biological soil crust, Biological Soil Crust of Southeast Utah, ou encore Biological Soil Crust Activity, et les figures 8 et 9) qui associent plusieurs espèces de bryophytes, de lichens, de mycètes et d'eubactéries, notamment des cyanobactéries dont les filaments et biofilms fixent les grains de sables, les limons, les argiles… Ces biosols sont peu épais, fragiles et lents à se former. Le simple piétinement, et à fortiori d'autres actions plus lourdes telles que le surpâturage, l'exploitation minière, le passage de véhicules hors des routes… endommagent les biofilms bactériens, accélèrent la désertification et libèrent les particules minérales piégées. Elles peuvent alors être remobilisées par le vent sous forme de nuages de poussières et contribuer à la baisse de visibilité à grande distance.

Historiquement, c'est surtout le surpâturage qui a conduit à une accélération de la désertification et de l'érosion des sols du plateau du Colorado avec les énormes troupeaux de bovins du XIXe et du début du XXe siècle supprimant une part du couvert végétal et piétinant les biosols. Certains modèles indiquent que dès la fin des années 1800, la charge de poussière émise par les sols dégradés par les humains dans le Sud-Ouest des États-Unis avait quintuplé, induisant divers effets sur la transparence atmosphérique mais aussi une diminution de l'albédo des neiges des montagnes Rocheuses, donc un réchauffement local et un raccourcissement de la durée de l'enneigement de plusieurs semaines.

Puis, à partir des années 1950, l'exploitation minière a été particulièrement dommageable pour les sols. Des dépôts économiquement intéressants d'uranium et de vanadium se rencontrent en effet, entre autres, dans le membre Salt Wash de la formation Morrison, d'âge jurassique, et dans le membre basal gréso-conglomératique Shinarump de la formation Chinle, d'âge triasique (figures 12 et 13). Il s'agit dans les deux cas d'alluvions déposées dans d'anciens chenaux fluviatiles, où l'uranium s'est concentré secondairement au niveau de micro-environnements réducteurs (car plus riches en débris organiques). Les minéralisations datent seulement du Cénozoïque : l'uranium étant assez soluble sous sa forme oxydée, il a dû être transporté par des fluides qui percolaient dans les roches poreuses jusqu'à précipiter sous sa forme réduite au contact de matière organique. Les premières exploitations datent de 1912, époque à laquelle le radium était recherché ; la production de vanadium a démarré en 1935 ; mais c'est dans les années 1950, suite à la seconde guerre mondiale et au projet Manhattan, et au besoin stratégique de développer une production nationale d'uranium, que l'activité minière a réellement augmenté. De très nombreuses pistes furent tracées durant cette période pour accéder aux dépôts d'uranium. L'exploitation déclina ensuite dans les années 1980, conduisant à l'abandon des pistes, des mines et de haldes (monticules de déchets d'exploitation minière) polluantes pour l'eau, les sols, l'air (poussières, gaz radioactifs), et parfois les constructions (utilisation de stériles comme matériaux de construction). Les restes de cette exploitation sont encore visibles dans le paysage, y compris dans les parcs nationaux où certaines pistes sont encore marquées 50 ans après l'arrêt de leur utilisation (voir figure 11), et le resteront sans doute pour plusieurs siècles.

Depuis la baisse du pâturage bovin et ovin et la diminution (provisoire ?) de l'exploitation minière de l'uranium dans la région, d'autres activités (exploitation de pétrole de schistes bitumineux, gaz naturel, charbons et autres combustibles fossiles) ont pris le relais. De nouveaux usages, notamment touristiques et récréatifs (par exemple l'usage de véhicules tout-terrains, la randonnée hors sentier…), ont pris une part prépondérante dans la dégradation des sols désertiques.

Encroûtements bactériens constituant une fine couche de sol sur les grès rouges du Parc national des Arches, Utah

Figure 8. Encroûtements bactériens constituant une fine couche de sol sur les grès rouges du Parc national des Arches, Utah

Parmi ces encroûtements bien visibles au premier plan entre les buissons, notez les empreintes de pas de touristes. Le piétinement dégrade très rapidement ce type de sols.




Un exemple de dégradation des sols dans le Parc national de Canyonlands, Utah

Figure 11. Un exemple de dégradation des sols dans le Parc national de Canyonlands, Utah

Vue d'ensemble depuis le panorama de Grand View Point, avec les reculées de la White Rim à gauche de l'image, près de 400 m en contrebas du photographe, surplombées par des badlands dans les grès argileux rouges de la formation Moenkopi. On retrouve une atmosphère assez brumeuse dans le lointain (à comparer avec les photos de l'article Le Parc national de Canyonlands, la vallée de Betatakin… : reculées et mini-canyons du plateau du Colorado (USA).

Un regard au centre de l'image met en évidence plusieurs pistes. Sinuant le long de la bordure du plateau (White Rim, à gauche), la piste actuellement utilisée pour le tourisme en véhicules tout-terrains ; et tracée tout droit au bulldozer, en diagonale d'en haut à gauche vers en bas à droite, une ancienne piste d'exploitation minière inutilisée depuis 50 ans mais toujours bien visible dans le paysage.


Exemple de strates prospectées pour l'uranium, vue du secteur de Chimney Rock, à l'entrée Ouest du Parc national de Capitol Reef, Utah

Figure 12. Exemple de strates prospectées pour l'uranium, vue du secteur de Chimney Rock, à l'entrée Ouest du Parc national de Capitol Reef, Utah

Chimney Rock est un pinacle de type « demoiselle coiffée » ou « cheminée de fée », protégé pour un temps de l'érosion par une coiffe de grès clairs et durs (cf., par exemple, La « Salle de bal des demoiselles coiffées », Théus, Hautes Alpes). On distingue la formation Moenkopi argilo-gréseuse rougeâtre en position basse et au premier plan. Elle est surmontée par la formation Chinle formée d'abord du membre basal gréseux Shinarump, bien développé ici ; puis d'argilites grises épaisses, visibles ici sous forme de badlands à l'arrière-plan, en position stratigraphique haute. Toutes ces roches sédimentaires datent du Trias. Les argilites grises de la formation Chinle correspondent à un paléo-environnement marécageux, réduit, comportant des cendres volcaniques riches en uranium, tandis que les grès argileux de la formation Moenkopi se sont formés au niveau de plaines tidales, en conditions plus oxydantes. À la limite entre ces deux formations superposées, les grès et conglomérats discontinus du membre Shinarump représentent d'anciens chenaux fluviatiles. Ils ont été minéralisés en uranium dans un second temps (au Cénozoïque), à la faveur de micro-environnements réduits qui ont permis la précipitation de l'uranium dissout dans les fluides oxydés percolant à travers les roches. Ce minerai d'uranium a été activement exploité à partir des années 1950. L'extraction minière dans la région a fortement diminué dans les années 1980, avec la baisse des prix et la prise de conscience des problèmes environnementaux générés, le développement des parcs nationaux, l'opposition des populations locales (notamment amérindiennes) et des militants écologistes. Les gisements d'uranium suscitent un regain d'intérêt depuis les années 2000, dans un contexte énergétique de plus en plus tendu.


Exemple de strates prospectées pour l'uranium, vue du secteur de Chimney Rock, à l'entrée Ouest du Parc national de Capitol Reef, Utah

Figure 13. Exemple de strates prospectées pour l'uranium, vue du secteur de Chimney Rock, à l'entrée Ouest du Parc national de Capitol Reef, Utah

Chimney Rock est un pinacle de type « demoiselle coiffée » ou « cheminée de fée », protégé pour un temps de l'érosion par une coiffe de grès clairs et durs (cf., par exemple, La « Salle de bal des demoiselles coiffées », Théus, Hautes Alpes). On distingue la formation Moenkopi argilo-gréseuse rougeâtre en position basse, formant des falaises puis des badlands dans le lointain. Elle est surmontée par le membre basal Shinarump de la formation Chinle, gréseux, de couleur claire, bien développé ici, en position stratigraphique haute, et visible au premier plan notamment. Les argilites grises constituant la partie supérieure de la formation Chinle ne sont pas observables sur cette photo. Toutes ces roches sédimentaires datent du Trias. Les grès et conglomérats discontinus du membre Shinarump représentent d'anciens chenaux fluviatiles. Ils ont été minéralisés en uranium dans un second temps (au Cénozoïque), à la faveur de micro-environnements réduits qui ont permis la précipitation de l'uranium dissout dans les fluides oxydés percolant à travers les roches. Ce minerai d'uranium a été activement exploité à partir des années 1950. L'extraction minière dans la région a fortement diminué dans les années 1980, avec la baisse des prix et la prise de conscience des problèmes environnementaux générés, le développement des parcs nationaux, l'opposition des populations locales (notamment amérindiennes) et des militants écologistes. Les gisements d'uranium suscitent un regain d'intérêt depuis les années 2000, dans un contexte énergétique de plus en plus tendu.


D'autres perturbations anthropiques d'échelle régionale, voire nationale, peuvent enfin s'ajouter à l'érosion des sols et aux incendies forestiers : il s'agit de toutes les combustions humaines, depuis les moteurs à explosion des véhicules, les activités diverses des métropoles, et surtout les centrales thermiques au charbon. Plusieurs de ces centrales sont présentes sur le plateau du Colorado (où diverses mines exploitent activement le charbon), et restent un facteur de pollution atmosphérique, bien que des progrès aient été faits sur le traitement de leurs rejets.

Centrale thermique Navajo, près de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du Grand Canyon sur le fleuve Colorado

Figure 14. Centrale thermique Navajo, près de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du Grand Canyon sur le fleuve Colorado

Cette centrale de 2250 MW brule du charbon local (mine de Kayenta, Arizona, qui exploite les lits de charbon d'âge crétacé de Black Mesa), alimentant en électricité les états voisins : Arizona, Nevada et Californie, ainsi que les pompes d'irrigation du Central Arizona Project. Sa fermeture en 2019 est envisagée. Diverses études menées sur son impact sur la qualité de l'air et la visibilité au niveau du Grand Canyon ont été menées. Elles ont conduit à d'importants investissements pour limiter les rejets en particules fines et surtout en oxydes d'azote et de soufre à l'origine d'aérosols (ce dernier effort pouvant à lui seul améliorer la transparence de l'air au niveau du Grand Canyon de près de 7 %).


Centrale thermique Navajo, près de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du Grand Canyon sur le fleuve Colorado

Figure 15. Centrale thermique Navajo, près de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du Grand Canyon sur le fleuve Colorado

Cette centrale de 2250 MW brule du charbon local (mine de Kayenta, Arizona, qui exploite les lits de charbon d'âge crétacé de Black Mesa), alimentant en électricité les états voisins : Arizona, Nevada et Californie, ainsi que les pompes d'irrigation du Central Arizona Project. Sa fermeture en 2019 est envisagée. Diverses études menées sur son impact sur la qualité de l'air et la visibilité au niveau du Grand Canyon ont été menées. Elles ont conduit à d'importants investissements pour limiter les rejets en particules fines et surtout en oxydes d'azote et de soufre à l'origine d'aérosols (ce dernier effort pouvant à lui seul améliorer la transparence de l'air au niveau du Grand Canyon de près de 7 %).


Panorama du secteur de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du Grand Canyon sur le fleuve Colorado

Figure 16. Panorama du secteur de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du Grand Canyon sur le fleuve Colorado

On voit au second plan une petite partie du lac Powell, qui retient au milieu du désert les eaux du fleuve Colorado derrière le barrage de Glen Canyon, lui-même visible à droite de l'image. Dans le lointain à gauche de l'image, on distingue la centrale thermique Navajo, et au centre la ville de Page, créée en 1957 pour la construction du barrage, sur sa mesa plus verte que les environs arides.


Vue sur une petite partie du lac Powell et sur la centrale thermique Navajo en fond, Arizona

Figure 17. Vue sur une petite partie du lac Powell et sur la centrale thermique Navajo en fond, Arizona

L'énergie hydroélectrique produite par le barrage de Glen Canyon tend à diminuer avec la baisse du niveau du lac Powell. Cette baisse est due à la baisse du débit du fleuve, elle-même conséquence des perturbations climatiques (anthropiques) de ce début de XXIe siècle, se traduisant surtout dans l'Ouest américain pas une augmentation des sécheresses. Cette baisse du niveau du lac est traduite par le dépôt calcaire blanchâtre laissé presque à mi-hauteur des parois de grès rouge bordant le lac visibles sur cette photo. En ce mois d'août 2018, la production d'électricité avoisinait seulement 50 % de la capacité maximale. La centrale à charbon Navajo, entre autres, compensait cette baisse de production électrique.


Nous avons abordé toutes ces perturbations environnementales sous l'angle de leur impact sur la visibilité dans le Grand Canyon, mais on pourrait bien sûr les analyser avec d'autres grilles, par exemple en termes de conséquences sur la santé humaine (effets pulmonaires des polluants atmosphériques notamment), ou encore d'effets sur la végétation (dépôts de polluants et pluies acides), sur les rapaces et l'ensemble de la faune, sur l'altération des roches et la qualité des sols, sur l'agronomie régionale…

Abordons à présent un second exemple de perturbation humaine du fleuve Colorado : les changements de régime hydrologique.

Perturbation du régime hydrologique et de la charge sédimentaire du fleuve Colorado

Le fleuve Colorado, reconnu par les explorateurs européens à partir du XVIe siècle, n'a reçu son nom actuel que plus tard, et le doit étymologiquement à sa couleur rouge-brune. Pourtant, l'observation actuelle du fleuve montre des eaux essentiellement verdâtres (figures 18 à 20).

Le méandre Horseshoe Bend du fleuve Colorado, en amont du Grand Canyon et environ 6 km en aval du barrage de Glen Canyon, creusé dans les grès rouges Navajo à proximité de Page, Arizona / Nation Navajo

Figure 18. Le méandre Horseshoe Bend du fleuve Colorado, en amont du Grand Canyon et environ 6 km en aval du barrage de Glen Canyon, creusé dans les grès rouges Navajo à proximité de Page, Arizona / Nation Navajo

Notez l'aspect verdâtre des eaux ainsi que la ripisylve (végétation herbacée à arbustive des rives) qui colonise les sédiments sableux laissés par le fleuve au fond du canyon.


Pourquoi ce changement de couleur sur des temps historiques ? C'est la charge sédimentaire du fleuve qui donnait son aspect turbide aux eaux porteuses de sables, silts et argiles rouges. Cette charge était très importante historiquement du fait de la vigoureuse incision des cours d'eau dans le plateau du Colorado en surrection, et du climat marqué à la fin de l'été par de violents épisodes de précipitations entrainant des crues brutales, au fort effet érosif. Or la quantité de sédiments en suspension a fortement diminué, principalement du fait de la construction de très nombreux barrages sur le fleuve et ses affluents (figures 23 à 25). On peut imaginer ce qu'était la couleur naturelle du fleuve avant ces importants aménagements humains en observant de petits cours d'eaux moins aménagés de la région, par exemple le Petit Colorado, affluent à la forte turbidité encore bien visible au niveau du Grand Canyon (dernières photographies de l'article Le Grand Canyon du Colorado vu du ciel (Arizona, USA)) ou sur des photographies historiques du fleuve Colorado (figure 23). Cette baisse de charge sédimentaire permet le développement d'algues vertes qui contribuent au changement de teinte des eaux du fleuve, et diminue la force abrasive de ces dernières.

La baisse de charge sédimentaire s'accompagne en contrepartie de forts problèmes d'ensablement/envasement des barrages, dont l'espérance de vie ne dépasse pas quelques siècles, voire quelques décennies pour les estimations les plus pessimistes. De gros lâchers de barrage expérimentaux simulant des crues ont été tentés pour restaurer partiellement l'écologie du fleuve et désensabler les ouvrages, avec des résultats mitigés tant les perturbations initiales sont fortes.

Le régime hydrologique est en effet globalement très modifié : écrêtement des crues par les barrages (le débit naturel du Colorado pouvait varier auparavant de quelques m3/s à plusieurs milliers de m3/s sur une année), et perte nette du débit du fleuve (perte ayant atteint un tiers du débit entre 2002 et 2010 !). En aval du Grand Canyon, jusqu'au delta mexicain du fleuve, le bas Colorado est d'ailleurs largement asséché.

Le débit total du fleuve diminue pour de nombreuses raisons que nous ne pouvons détailler toutes, mais parmi lesquelles on peut citer :

  • des prélèvements croissants pour les besoins des villes et de l'irrigation agricole. Le Colorado alimente en effet en eau potable plus de 35 millions de personnes. L'eau du fleuve alimente des villes comme Las Vegas, Phoenix, Los Angeles et San Diego, soutient une production d'électricité suffisante pour couvrir les besoins domestiques de 3 millions de personnes, et sert à irriguer 15 % des cultures états-uniennes. Le Sud-Ouest des États-Unis connait une croissance démographique et économique soutenue, qui a entrainé une augmentation des extractions d'eau ainsi que des conflits autour de cette ressource. La gestion très décentralisée et souvent dispendieuse de l'eau aggrave les tensions entre acteurs, états, et avec le Mexique voisin, parent pauvre de l'attribution de l'eau. On sait en particulier que les états des USA se sont partagé l'eau du fleuve sur la base du débit moyen constaté entre 1905 et 1925, période qui s'est révélée rétrospectivement, du fait de fluctuations climatiques naturelles, comme la plus humide en 800 ans. En conséquence, la ressource a été trop abondamment prélevée, notamment en Californie, de sorte que la partie mexicaine du fleuve est régulièrement asséchée, le fleuve n'atteignant plus la mer.
  • une perte nette d'eau par évaporation et infiltration dans les aquifères. Cette perte est accrue par les lacs de retenue constitués au milieu du désert, en climat aride, et dans une géologie particulièrement perméable : grès Navajo poreux au niveau du lac Powell, par exemple. Certains auteurs estiment la perte d'eau induite par ce seul lac de retenue à près de 6 % du débit du Colorado, soit près de 3 % du volume du lac chaque année !
  • baisse des précipitations, et changement du régime de fonte des neiges dans les Montagnes Rocheuses. Ce dernier point est d'ailleurs lié depuis le XIXe siècle au moins à une baisse de l'albédo des neiges, empoussiérées du fait de l'érosion des sols, déjà mentionnée en première partie… Le réchauffement climatique vient aggraver ce problème déjà ancien. On constate donc que les différentes problématiques écologiques régionales sont largement interconnectées.

Diminution du débit total et des crues, et baisse de la charge sédimentaire, se conjuguent pour faire chuter le pouvoir érosif du fleuve. Si on ajoute l'arrivée dans la ripisylve d'espèces invasives au puissant système racinaire telles que les tamaris (Tamarix ramosissima principalement), qui s'ajoutent aux espèces locales telles que les peupliers (Populus fremontii, cottonwood en anglais), on obtient une fixation des bancs de sables et une stabilisation des berges. Cela contraste avec les chenaux mouvants, peu végétalisés que connaissait autrefois le fleuve. Les éboulements dans le lit du fleuve sont dorénavant moins redistribués lors des crues (créant des rapides nouveaux, parfois dangereux pour les sports nautiques, surtout avec une eau glaciale…), et les dépôts de limons sont limités hors des lacs de barrage, faisant disparaitre certaines plages anciennes. Le régime hydrologique, la sédimentologie et l'écologie du fleuve Colorado sont donc très largement perturbées par l'Homme.

Ajoutons encore une température de l'eau très froide en aval des retenues : là où les eaux pouvaient varier entre 27°C en plein été et presque 0°C en hiver, les eaux relâchées par le barrage de Glen Canyon, par exemple, sont à une température constante de 8°C toute l'année (car pompées en profondeur dans le lac Powell à l'importante inertie thermique). Ce changement a entrainé la disparition de plusieurs espèces locales de poissons, remplacées par des espèces invasives et/ou introduites pour la pêche sportive, plus adaptées aux eaux froides et claires. On observe aussi une propagation de moules invasives dans de nombreux lacs de retenue.

Tous ces impacts environnementaux des barrages, malgré leurs intérêts pour la gestion des besoins en eau et en énergie renouvelable, et l'attrait récréatif des lacs de retenue, génèrent depuis la planification des travaux une contestation citoyenne importante.

Enfin, des problèmes croissants de pollution des eaux du Colorado se posent, surtout du fait de la « ruée vers l'énergie » de la fin des années 2000, qui ont connu une véritable frénésie de prospection, d'extraction et d'exploitation de ses ressources minières et énergétiques. Les exploitations anciennes ou actuelles de pétrole (issu surtout de schistes bitumeux), de charbon, de gaz naturel, d'uranium… dans le bassin versant du fleuve entrainent ainsi des risques importants de pollution.

Le barrage de Glen Canyon, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon, Arizona

Figure 19. Le barrage de Glen Canyon, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon, Arizona

Il s'agit d'un barrage-voute adossé aux grès rouges Navajo qui forment une gorge assez resserrée à proximité de la ville de Page. Construit entre 1957 et 1964, il entraina la formation du lac Powell, deuxième plus grand lac de retenue des États-Unis après le lac Mead formé par le barrage Hoover, toujours sur le fleuve Colorado, en aval du Grand Canyon. Ces deux barrages font partie d'un énorme système de gestion des eaux sur 7 états du bassin du Colorado (voir figure 24) comprenant de nombreux autres barrages et des canaux courant sur des milliers de kilomètres (jusqu'à Los Angeles et San Diego notamment). Le lac Powell contient jusqu'à 33 km3 d'eau stockés, s'étend sur 299 km à travers les canyons inondés d'Arizona et Utah, et couvre plus de 65 000 ha à son remplissage maximal, à une altitude de 1100 m, en plein désert. En plus de la gestion des ressources en eau, il entraine des usages récréatifs importants et une production électrique annuelle d'environ 4 GWh en moyenne.

On note cependant, comme aux figures 16 et 17, la baisse du niveau des eaux en ce mois d'août 2018, traduite par le dépôt calcaire blanchâtre laissé sur les parois de grès rouge bordant le lac. La production d'électricité avoisinait seulement 50 % de la capacité maximale au moment de la prise de vue.


Le barrage de Glen Canyon et son installation hydroélectrique, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon, Arizona

Figure 20. Le barrage de Glen Canyon et son installation hydroélectrique, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon, Arizona

Il s'agit d'un barrage-voute adossé aux grès rouges Navajo qui forment une gorge assez resserrée à proximité de la ville de Page. Construit entre 1957 et 1964, il entraina la formation du lac Powell, deuxième plus grand lac de retenue des États-Unis après le lac Mead formé par le barrage Hoover, toujours sur le fleuve Colorado, en aval du Grand Canyon. Ces deux barrages font partie d'un énorme système de gestion des eaux sur 7 états du bassin du Colorado (voir figure 24) comprenant de nombreux autres barrages et des canaux courant sur des milliers de kilomètres (jusqu'à Los Angeles et San Diego notamment). Le lac Powell contient jusqu'à 33 km3 d'eau stockés, s'étend sur 299 km à travers les canyons inondés d'Arizona et Utah, et couvre plus de 65 000 ha à son remplissage maximal, à une altitude de 1100 m, en plein désert. En plus de la gestion des ressources en eau, il entraine des usages récréatifs importants et une production électrique annuelle d'environ 4 GWh en moyenne.

Notez la couleur verte, la faible turbidité et le calme des eaux du Colorado au sortir des turbines du barrage.

Observez également les infiltrations d'eau dans la paroi des gorges, qui montrent la grande perméabilité des grès Navajo, à l'origine d'une perte d'eau non négligeable dans la retenue, s'ajoutant à l'évaporation intense en climat aride. Ces trainées sombres ne sont pas sombres uniquement parce qu'elles sont mouillées, mais aussi parce que recouvertes de biofilms associés à des dépôts d'oxydes métalliques.

On constate aussi que la paroi gréseuse en premier plan, en rive droite, est renforcée : un barrage-voute s'appuie sur les roches de part et d'autre, qui doivent pouvoir en supporter la pression. Les tuyaux d'arrivée d'eau à l'usine hydroélectrique sont enterrés (pour limiter les vibrations) et enherbés (pour retenir le sol et limiter les températures extrêmes grâce à l'évapotranspiration).


Le barrage de Glen Canyon, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon, Arizona

Figure 21. Le barrage de Glen Canyon, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon, Arizona

On note, comme aux figures 16 et 17, la baisse du niveau des eaux en ce mois d'août 2018, traduite par le dépôt calcaire blanchâtre laissé sur les parois de grès rouge bordant le lac. La production d'électricité avoisinait seulement 50 % de la capacité maximale au moment de la prise de vue. La couleur claire, et la faible turbidité des eaux du lac Powell traduisent le dépôt des sédiments au fond du lac, envasant le barrage et diminuant la charge sédimentaire du fleuve Colorado en aval.


L'usine hydroélectrique du barrage de Glen Canyon, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon

Figure 22. L'usine hydroélectrique du barrage de Glen Canyon, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon

Une production électrique annuelle d'environ 4 GWh en moyenne a été constatée entre 1980 et 2013. En ce mois d'août 2018, cette production avoisinait seulement 50 % de la capacité maximale, permettant des travaux sur certaines turbines (turbine du premier plan ici).


À voir sur place

En plus de visiter le barrage de Glen Canyon et son usine hydro-électrique, il est possible d'admirer de superbes stratifications éoliennes dans la paroi du canyon, ainsi qu'une très belle dalle à contre-empreintes de reptiles du Jurassique inférieur exposée à l'entrée du petit musée du barrage.

Figure 23. Le barrage de Glen Canyon en cours de construction en 1962, à proximité de Page, Arizona / Nation Navajo, en amont du méandre Horseshoe Bend et du Grand Canyon

Notez la couleur brune naturelle des eaux chargées en sédiments du fleuve Colorado, qui s'engouffrent ici dans un canal de dérivation en rive droite.


Carte des principaux barrages dans le bassin versant du Colorado

Figure 24. Carte des principaux barrages dans le bassin versant du Colorado

Parmi ces barrages, celui de Glen Canyon, en amont du Grand Canyon, et les barrages Hoover et Davis, en aval.

Le Parc national du Grand Canyon (GCNP, en orange sur la carte) est situé le long du Colorado (essentiellement sur la rive Nord), il débute, à l'amont, peu après le lac Powell et le barrage de Glen Canyon, et se termine, à l'aval, avant le lac Mead et le barrage Hoover.


Image satellite de mars 2013 montrant les eaux turbides du Colorado se déversant dans le lac Mead, issu de l'implantation du barrage Hoover, en aval du Grand Canyon

Figure 25. Image satellite de mars 2013 montrant les eaux turbides du Colorado se déversant dans le lac Mead, issu de l'implantation du barrage Hoover, en aval du Grand Canyon

Les eaux turbides du Colorado pourront décanter lentement, d'où l'aspect beaucoup plus limpide des eaux du lac. Cela illustre à nouveau le problème de l'ensablement des barrages et de la diminution de la charge sédimentaire du fleuve en aval de ces constructions.


Une gestion environnementale complexe

À travers ces deux exemples limités, qui mériteraient certainement d'être approfondis bien davantage, nous avons pu entrevoir la complexité de gestion de l'environnement fragile des déserts de l'Ouest américain. L'aggravation du réchauffement climatique et des tensions démographiques, énergétiques et économiques dans la région n'incite guère à l'optimisme pour l'avenir. Nous constatons aussi l'interconnexion de tous les problèmes environnementaux, ce qui les rend plus difficiles à traiter sans une vision et une gestion régionale, nationale, voire internationale. Cela illustre enfin la limite du système des parcs nationaux, zones sanctuaires sensées être protégées de toute perturbation extérieure, mais qui ne peuvent échapper aux problèmes globaux ignorant les frontières, tels que la dispersion des polluants atmosphériques ou la hausse mondiale de l'effet de serre…



[1] Une « perturbation écologique » est un événement naturel ou anthropique, discret dans le temps, et qui engendre de la mortalité dans un écosystème. Ce dernier point n'étant pas étudié / développé dans cet article “géologique”, on parle de « perturbation environnementale ».