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Article | 21/09/2016

Une France de pierre, vitrine des richesses minérales de la Russie

21/09/2016

Cyril Langlois

ENS de Lyon - Préparation à l'agrégation SV-STU

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

À l'occasion de l'exposition universelle de 1900, le dernier tsar de Russie, Nicolas II, offrit au président de la IIIe République, Émile Loubet, une carte des départements français en marqueterie de marbre, garnie de pierres fines et de métaux précieux, éclatante illustration de la richesse minérale de l'Oural, principale région minière de la Russie. Cette carte splendide, mais largement oubliée, est aujourd'hui exposée et accessible à tous au Palais Impérial de Compiègne, dans l'Oise.


Introduction


L'utilisation de mosaïques polychromes de roches polies pour la décoration des sols ou l'ornementation des meubles n'a rien de nouveau. Elle remonte à l'Antiquité romaine et réapparut au XVIe siècle en Italie, notamment à Rome. Un précédent article de Planet-Terre en a déjà témoigné (cf. Un peu de géologie en visitant Rome). L'exemple présenté ici s'en distingue puisqu'il ne s'agit ni d'une ornementation ni d'un élément de mobilier, mais d'un objet purement pratique et décoratif, une carte administrative de la France, sublimée en œuvre d'art (figure ci-dessus). Cette mosaïque, exposée aujourd'hui au Palais impérial de Compiègne[1], fut d'abord présentée dans le pavillon de la Russie de l'exposition universelle de Paris de 1900, et offert au président français d'alors, Émile Loubet, par l'ambassadeur du tsar Nicolas II. Un commentateur de l'époque, Paul Gers, décrit comme suit la visite du président Loubet au pavillon russe [ref9].

 

« Le Président passe entre deux haies de gardes russes et de matelots en uniforme qui font le salut militaire. Il est aussitôt conduit par un escalier qui s'amorce à gauche du vestibule, dans une salle du premier étage, où est exposée la carte de France en pierres précieuses, cadeau du Tzar (elle a été par la suite transportée dans la section des Invalides). »

« La carte de France avait été placée au fond de la salle aux voûtes ogivales enluminées de dessins. Elle reposait sur un tapis d'hermine, entourée de drapeaux tricolores des deux pays. Cette carte est faite de morceaux de marbre de toutes couleurs et de pierres précieuses. Le marbre détermine les départements. Les noms des villes, les rivières sont tracés avec des pierres précieuses. Un cadre, sobre d'ornements pour laisser toute sa valeur au bijou qu'il protège, n'a que ses coins légèrement fouillés au ciseau. »

 
 -- Paul Gers (1900), cité sur le site wordlfairs.info

Au cours des presque sept mois que dura l'exposition universelle (du 15 avril au 12 novembre 1900), cette œuvre fut exposée dans le pavillon des Mobiliers et Industries diverses (cultures étrangères), situé aux Invalides. Elle est aujourd'hui conservée au Palais de Compiègne, où chacun peut la voir en accédant aux collections des musées. Présentée sous une vitre, à l'intérieur d'un meuble en bois sculpté, cette carte d'environ un mètre de côté pèse 352 kg. En 1900, sa valeur était estimée à 4 millions de francs [ref1], soit l'équivalent, en 2015, de 15,5 millions d'euros[2] !


Cartel accompagnant la carte, au Palais de Compiègne

La plaque informative enchâssée dans le meuble, sous la carte

Vue de la carte de France, sous sa plaque de verre

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, les informations sur cette carte sont rares, difficiles à trouver et encore plus à vérifier. L'une des principales sources employées ici, l'article de l'historien Michael Heffernan, de 2002 [ref4], le soulignait déjà et tous les liens internet qu'il proposait ont depuis disparu ! Contactés, les responsables du palais de Compiègne ne disposent eux-mêmes que de très peu d'informations.

Les matériaux de la carte

Cette carte distingue les départements français (métropolitains) par différents types de "marbre", au sens des carriers et des décorateurs, c'est-à-dire une roche de bel aspect une fois polie. Chaque élément est une fine tranche de roche, polie, ajustée aux dimensions voulues et fixée sur le support (une plaque métallique lisse). La nature de ces marbres, que les descriptifs de ce type d'œuvres d'art qualifient plus généralement de « pierres dures », est donc variable. Ainsi, sur la figure 3, les départements de la Loire-Atlantique (Nantes), de la Mayenne (Laval) et de la Sarthe (Le Mans) sont en roches sédimentaires conglomératiques, l'Ile-et-Vilaine (Rennes) en jaspe rouge (silice hydratée), alors que le Maine-et-Loire (Angers) est représenté par ce qui paraît être une pegmatite graphique, donc une roche magmatique, où un feldspath blanc crème englobe des cristaux de quartz translucides. De même les ancien départements de la Seine (75)[3] et de Seine-et-Oise (78)[4] où l'agglomération parisienne (Seine, 75) est figurée par un jaspe rouge enchâssé dans le conglomérat détritique verdâtre de la Seine-et-Oise, qui lui-même jouxte le conglomérat calcaire utilisé pour l'Eure-et-Loire (Chartres).

Détail de la région des Pays de la Loire

Figure 6. Détail de la région des Pays de la Loire

On observe la diversité des roches employées comme fond pour les différents départements.


Détail de l'Île-de-France

Figure 7. Détail de l'Île-de-France

On observe la diversité des roches employées comme fond pour les différents départements.


Le seul véritable marbre au sens des pétrographes, c'est-à-dire un calcaire métamorphisé, semble celui employé pour figurer l'Atlantique et la Méditerranée, un marbre gris clair uni où l'on peut distinguer, de près, les cristaux de calcite (voir, ci-dessous, le zoom sur Marseille).

Au sein de ces plaques de roches polies, les lapidaires ont repéré les chef-lieux et les principales villes par des gemmes de diverses couleurs, de taille plus ou moins corrélée à l'importance de l'agglomération. Chaque gemme est sertie dans un anneau d'or et juxtaposée au nom de la ville, lui aussi en lettres d'or.

Cent six villes sont ainsi reportées, 38 d'entre elles par des quartz, 21 par des améthystes (quartz colorés en violet par des atomes de fer), par exemple Grenoble, Toulouse (figures ci-après), Rennes ou Angers (figures ci-dessus), 55 autres par des tourmalines (Lyon, notamment), quelques-unes par des hyacinthes (des zircons jaunes de qualité gemme, ZrSiO4) et certaines par des pierres plus rares. Ainsi Paris avec un rubis rose (variété de corindon, Al2O3, colorée en rouge par des oxydes de chrome, figure ci-dessus), Rouen un saphir (autre variété gemme du corindon), Marseille et le Havre une émeraude (cyclosilicate de formule générale Be3Al2Si6O18, coloré par des atomes de chrome, de vanadium et de fer, cf. figures ci-dessous), Nantes un béryl jaune, dit héliodore (autre cyclosilicate, coloré par du fer, figure ci-dessus), Toulon un chrysobéryl (aluminate de bérylium, BeAl2O4), Cherbourg une alexandrite (variété de chrysobéryl dont la couleur change selon la lumière qui l'éclaire), etc.

Les fleuves, enfin, sont matérialisés par des rubans de platine incrustés dans les marbres (figure 5b). Leur longueur totale atteint 7,5 m (Heffernan, 2002 [ref4)].

Détail de la Côte d'Azur, en bordure de Méditerranée

Figure 8. Détail de la Côte d'Azur, en bordure de Méditerranée

Toulon est un cristal de chrysobéryl.


Zoom sur Marseille, en bordure de Méditerranée

Figure 9. Zoom sur Marseille, en bordure de Méditerranée

La ville de Marseille est repérée par une émeraude.


Vue sur la région Midi-Pyrénées

Figure 10. Vue sur la région Midi-Pyrénées

Les noms des localités sont en or et les fleuves en platine !


Zoom sur Toulouse

Figure 11. Zoom sur Toulouse

La ville de Toulouse est repérée par une améthyste.


La source : l'Oural

L’Oural, trésor minier de la Russie

Les données géographiques françaises avaient été fournies par le Service Géographique de l'Armée à l'ambassade de Russie à Paris, par la voie diplomatique (Heffernan, 2002 [ref4]). Mais tous les matériaux, roches, gemmes et métaux, employés dans la fabrication de la carte, provenaient de Russie, et, pour l'essentiel, de l'Oural, région réputée au XIXe siècle pour sa richesse minéralogique et pétrologique, notamment pour ses gemmes et ses gisements d'or et de platine. En 1827, sous le règne du tsar Nicolas Ier (de 1825 à 1885), le ministre des finances de la Russie envisagea même d'utiliser ce métal pour battre monnaie, et consulta à ce sujet le fameux naturaliste et explorateur Alexandre de Humboldt (1769–1859) (Duviols et Minguet, 1994, p. 86 [ref2]). Cette proposition peut surprendre aujourd'hui, mais s'explique par le faible intérêt qu'avait encore ce métal à l'époque. Le platine n'était, depuis sa découverte au XVIe siècle, qu'un sous-produit peu valorisé des gisements d'argent, d'où le nom, péjoratif, de platina (petit argent) que lui avaient donné les conquistadors espagnols. Il s'agissait donc, pour l eministre russe, de valoriser cette production. Le platine exploité au XIXe et au XXe siècle, dans la "ceinture du platine" (platinum belt) de l'Oural, provenait de gisements de placers, riches mais aujourd'hui en voie d'épuisement.

La réalisation de la carte, qui demanda trois ans de travail (comme l'indique son cartel : "1897-1900"), fut effectuée dans la capitale de cette province russe, Ekaterinbourg[5], où se situait depuis 1726 (Heffernan, 2002 [ref4]) l'une des trois « manufactures impériales de taille de pierres dures »[6], pionnières et spécialisées dans cette technique de la mosaïque de lames de pierre polie qui faisait la réputation du mobilier russe d'apparat depuis le XVIIIe siècle.

Depuis lors, la Russie comme l'U.R.S.S. n'a jamais cessé de mettre en avant la diversité minérale dont elle bénéficie et l'exploitation qu'elle en fait dans des productions manufacturières et artistiques (toujours plus valorisantes que les bénéfices tirés des exploitations minières). En témoigne le petit livre d'échantillons présenté ci-dessous.


Le platine de l'Oural

La chaîne de l'Oural, intensément érodée, est une ancienne chaîne de subduction érigée au Carbonifère-Permien par la plongée vers l'Est de l'océan qui séparait le paléo-continent Laurussia (réunion des blocs Laurentia et Baltica par fermeture de l'océan Iapétus lors de l'orogenèse calédonienne, au Dévonien) de l'ensemble Siberia. On identifie aujourd'hui dans l'Oural, juxtaposés par des chevauchements et de grands décrochements, des lanières d'anciens sédiments côté Ouest, les restes d'un arc volcanique andésitique du Silurien et, à l'Est, une chaîne interne parsemée de plutons granitiques et de complexes ophiolitiques.

Les gisements de platine sont pour la plupart associés à ces derniers ensembles ophiolitiques. Ainsi les massifs péridotitiques de Svtely Bor et de Beresov, et celui de Nijni Taguil (en anglais Nizhny Tagil, en russe Нижний Тагил) (voir plus bas), sont les sources de certains des plus grands gisements de placer mondiaux. Ce sont en effet surtout les concentrations secondaires, en placers, produits par l'érosion de ces massifs et la sédimentation du platine, qui ont fait la richesse de la région. Ces placers sont dispersés sur une longueur totale (sans tenir compte des interruptions) de près de 1200 km du Nord au Sud (Routhier, 1963 [ref7]), et constituent la « ceinture du platine » (platinum belt) de l'Oural (Tolstykh et al., 2015 [ref8]), qui a « assuré à la Russie le premier rang jusqu'à la Première guerre mondiale » ; au début des années 1960 « l'U.R.S.S. assur[ait] encore le quart de la production » (Routhier, 1963 [ref7]).


Ces ensembles ophiolitiques, sous forme de nappes, écailles ou boudins tectoniques (voir la carte schématique, plus bas), présentent des intrusions où sont associés des péridotites mantelliques plus ou moins fondues et les produits de fusion associés : harzburgite-dunite-grabbro, dunite-pyroxénite-gabbro, lherzolite-harburgite. Ainsi le massif de Nijni Taguil comprend un cœur de dunite, reliquat non fondu, entouré de pyroxénites, représentant l'accumulation des premiers cristaux formés dans le magma, puis, vers l'extérieur, des gabbros et des gabbro-diorites, issus de la cristallisation du liquide (Tolstykh et al., 2015 [ref8]).

Dans ces intrusions, dites de type « Alaska-Ural », le platine se trouve à faible concentration dans les dunites ou dans les pyroxénites (dans l'une ou dans l'autre, mais pas dans les deux), ou concentré dans des filons (schlieren) de chromite au sein de ces roches. Sa teneur dans les dunites est de l'ordre de la dizaine de ppb (0,01 gramme par tonne) (Garuti et al., 1997 [ref3]). Le platine peut s'y présenter en petits cristaux automorphes ou en masses plus grosses, qui donnent les pépites des placers, mais, majoritairement, on le trouve sous forme d'agrégats de chromites platinifères.

Dans les alluvions produits par l'érosion de ces sources primaires, en revanche, la concentration du platine atteint 2 à 3 grammes par tonne d'alluvions (Mungall, 2008 [ref5], Routhier, 1963 [ref7]). Cependant, avec l'épuisement de ces placers, les tentatives d'exploitation des massifs péridotitiques eux-mêmes se sont accentuées, même si elles ne représentent pour l'heure qu'une part minime du métal extrait de la région (Tolstykh et al., 2015 [ref8]).

D'une façon générale, les meilleures concentrations primaires du platine paraissent étroitement liées à la présence de liquides sulfurés dans les magmas produits par la fusion partielle des péridotites. En effet les "éléments du groupe du platine" (PGE, platinum-group elements, c'est-à-dire le platine, le palladium et le rhénium) ont une forte affinité pour ces liquides et forment des sulfures (PtS, PdS). À l'équilibre, quand une phase liquide saturée en sulfures se sépare du liquide silicaté, les PGE y sont 10 000 fois plus concentrés (Mungall, 2008 [ref5]). La concentration primaire du platine est donc facilitée par la production d'un liquide magmatique saturé en sulfures (où une phase sulfurée, dense, peut s'individualiser et se séparer du liquide silicaté au cours de la cristallisation fractionnée) ou par la circulation de liquides riches en sulfures à travers les minéraux déposés dans la chambre magmatique, par exemple dans un cumulat de pyroxènes (pyroxénites) en base de chambre. Le liquide sulfuré peut toutefois rester piégé dans la roche mantellique résiduelle si la fusion est faible et n'en sortir que pour un taux de fusion important (Mungall, 2008 [ref5]), ce qui peut expliquer pourquoi le platine se trouve soit dans les dunites, soit dans les pyroxénites.

Toutefois, certains gisements de platine de l'Oural semblent liés à des cristallisations de chromite sans développement d'une phase sulfurée. Dans ces cas-là, le platine a été, une fois encore, concentré secondairement sous forme de placers (Mungall, 2008 [ref5]).



Comme l'or, autre grande ressource de l'Oural, le platine est aujourd'hui un métal très demandé, principalement pour ses propriétés catalytiques et son inaltérabilité ; sa production mondiale a donc considérablement augmenté pour satisfaire les besoins des industries automobile et chimique. L'Oural en est toujours un producteur non négligeable, même si la majorité de la production totale des éléments du groupe du platine est désormais assurée par les gisements d'Afrique du Sud et du Zimbabwe. À l'orée du XXe siècle, la Russie pouvait encore se permettre d'utiliser ce métal à des fins purement décoratives pour éblouir son partenaire diplomatique. L'amitié franco-russe était alors à son apogée : la russophilie battait son plein en France, Nicolas II avait déjà été reçu triomphalement à Paris en 1896[7] et l'exposition universelle était aussi l'occasion d'inaugurer le pont Alexandre III à Paris, baptisé du nom du tsar précédent (de 1881 à 1894) et dont Nicolas II avait posé la première pierre en 1896.

Conclusion : un objet relégué dans l'oubli par l'Histoire

Depuis 1900, cette œuvre d'art a été bien oubliée, comme de nombreux autres objets ou constructions créés pour cette exposition universelle et dispersés ensuite. Pourtant, en découvrant cette carte, le président Émile Loubet avait déclaré à l'ambassadeur russe, le prince Ouroussoff, : « Cette carte de France est un véritable objet d'art. La place qu'il occupera est toute désignée. C'est au Louvre, au milieu de nos chefs-d'œuvre qu'elle figurera, car il faut qu'on la voie, que tout le monde l'admire » (Commentaire de Paul Gers, cité dans woldsfairs.info).

Intention qu'il confirmait dans une lettre de remerciements du 19 avril 1900, adressée au tsar : « J'ai été profondément touché lorsque Monsieur le prince Ouroussoff au nom de Votre Majesté m'a offert la magnifique carte de France qui après l'Exposition sera placée au Louvre au premier rang des objets précieux que nous possédons » (Extrait du cartel complet de la carte, aimablement fourni par le Palais de Compiègne).

De fait, tout le monde peut admirer cette « magnifique carte », mais pas au Louvre. Sa présence à Compiègne traduit la complexité des évolutions politiques et diplomatiques du XXe siècle : elle fut effectivement placée au Louvre jusqu'à la Première Guerre mondiale et la Révolution russe de 1917, à partir de laquelle, selon Michael Heffernan, elle fut alors « discrètement (et mystérieusement) soustraite à la vue du public », les responsables du Louvre et le Ministère des Affaires Étrangères la jugeant « trop controversée » après l'exécution de la famille royale de Russie dans la ville même de sa fabrication. Peut-être aussi « dans l'optique d'une détente croissance des relations entre la France et l'Allemagne » et parce que cette carte représentait la France dans ses limites d'avant 1918, amputée de l'Alsace-Lorraine[8] (Heffernan, 2002 [ref4]). C'est finalement en 1930 que fut décidé son transfert au Palais de Compiègne (Heffernan, 2002 [ref4]), avec pour argument le court séjour effectué sur le site par la famille impériale russe en septembre 1901 (Perot et Mariani-Ducray, 2001 [ref6]). Mais ces informations elles-mêmes semblent avoir été bien oubliées, quand on lit le petit cartel qui accompagne la carte dans le palais de Compiègne, et qui mentionne seulement que « selon la tradition [sic] cette carte aurait été offerte par le tsar Nicolas II en 1900 » [Figure 3, « Cartel accompagnant la carte, au Palais de Compiègne »]).

Depuis lors, le nombre de ses admirateurs est donc resté modeste[9]. On peut regretter qu'aujourd'hui encore, ce magnifique objet ne soit guère mis en avant par le Palais de Compiègne, et reste relégué dans une salle vide, sous un éclairage inadapté. Il est vrai qu'elle reste en marge des thématiques proposées par les trois musées du site.

Signalons néanmoins que le musée du Second Empire propose aussi, parmi ses collections, quelques beaux exemples de meubles décorés de plaques de marbre, comme ceux présentés ci-dessous.

Une vasque en "vrai" marbre sur un piédestal recouvert de plaques de gabbro

Figure 18. Une vasque en "vrai" marbre sur un piédestal recouvert de plaques de gabbro

Exemple de mobilier du XIXe siècle exposé au Palais de Compiègne et utilisant des parements en pierres dures.


Une table Second Empire recouverte de (probable) "vert d'Orezza" (gabbro à smaragdite – un pyroxène sodique et chromifère vert – de Corse)

Figure 19. Une table Second Empire recouverte de (probable) "vert d'Orezza" (gabbro à smaragdite – un pyroxène sodique et chromifère vert – de Corse)

Exemple de mobilier du XIXe siècle exposé au Palais de Compiègne et utilisant des parements en pierres dures.


Ces magnifiques pièces démontrent que visiter les musées, tout comme prêter attention aux matériaux de construction des vieilles villes, peut être une bonne occasion de s'intéresser à la géologie, sans avoir à aller bien loin ni à se charger d'un marteau.

Références

L. Antoine, 2009. Vestiges de l'exposition universelle Paris 1900. Page du forum du site worldfairs.info (visité le 13/09/2016)

J.-P. Duviols, C. Minguet, 1994. Humboldt. Savant-citoyen du monde, Découvertes, Gallimard, Paris

G. Garuti, G. Fershtater, F. Bea, P. Montero, E.V. Pushkarev, F. Zaccarini, 1997. Platinum-group elements as petrological indicators in mafic-ultramafic complexes of the central and southern Urals : preliminary results, Tectonophysics, 276.1, 181–194. ISSN : 0040-1951. doi : 10.1016/S0040-1951(97)00050- 4

M. Heffernan, 2002. The Politics of the Map in the Early Twentieth Century, Cartography and Geographic Information Science, 29.3, 207–226, doi : 10.1559/152304002782008512

J. Mungall, A.J. Naldrett, 2008. Ore Deposits of the Platinum-Group Elements, Elements, 4.4, 253–258, ISSN : 1811-5209. doi : 10.2113/GSELEMENTS.4.4.253

J. Perot, F. Mariani-Ducray, 2001. Un Tsar à Compiègne, Nicolas II, 1901. Publication associée à l'exposition organisée du 30 sept. 2001 au 14 janv. 2002 aux musées et domaine nationaux du Palais impérial de Compiègne. Réunion des Musées Nationaux.

P. Routhier, 1963. Les gisements métallifères. Géologie et principes de recherche, Masson, Paris

N. Tolstykh, A. Kozlov, Y. Telegin, 2015. Platinum mineralization of the Svetly Bor and Nizhny Tagil intrusions, Ural Platinum Belt, Ore Geology Reviews, 67, 234 –243. ISSN : 0169-1368, doi : 10.1016/j.oregeorev.2014.12.005

wolrdsfairs.info, 2001-2016. Exposition universelle et internationale de Paris 1900 (visité le 13/09/2016)



[1] Le Palais de Compiègne, ancienne résidence royale de campagne réaménagée en palais par Louis XV, encore agrandie et embellie par Louis XVI, réhabilitée après la Révolution pour devenir demeure impériale sous Napoléon Ier puis Napoléon III, abrite maintenant trois musées, consacrés respectivement au 1er Empire, au Second Empire et à l'automobile. (http://palaisdecompiegne.fr/)

[2] Conversion de 4 millions d'anciens francs de 1901 en euros de 2015 par le convertisseur de l'INSEE, en tenant compte de l'érosion monétaire et du passage des anciens aux nouveaux francs.

[3] Réunion de l'actuelle commune de Paris et de portions des actuels Hauts-de-Seine (92), Seine-Saint-Denis (93) et Val-de-Marne (94).

[4] Groupements des Yvelines (78), du Val d'Oise (95), de l'Essone (91) et des morceaux des actuels 92, 93 et 94 n'appartenant pas à la Seine.

[5] Ou Iekaterinbourg, ville rebaptisée Sverdlosk durant l'époque soviétique. C'est dans cette ville également que furent exécutés Nicolas II et ses proches en 1918.

[6] Les deux autres étant Peterhof, près de Saint-Pétersbourg, et Kolyvan, non loin de Novossibirsk, en Sibérie occidentale.

[7] Et même trop triomphalement à son goût, si l'on en croît la biographie que lui consacra le romancier français d'origine russe Henri Troyat (1911--2007), d'où le désir du tsar de résider à Compiègne lors de sa visite suivante, en 1901.

[8] On peut remarquer d'ailleurs que la carte suit les représentations françaises de l'époque, en cartographiant les territoires perdus dans les couleurs vertes des pays mitoyens, mais avec un vert légèrement plus clair et en précisant leurs frontières précédentes, alors que le reste de l'Allemagne reste indifférencié.

[9] Si modeste qu'on ne trouve quasiment pas d'image de cette carte sur la toile…