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Article | 28/06/2011

Un astéroïde, l'astéroïde 2011 MD, nous a frôlé ce 27 juin 2011

28/06/2011

Pierre Thomas

ENS de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Un astéroïde est passé à seulement 12.000 km de la Terre.


Ce lundi 27 juin 2011, vers 15h30 (heure française), un astéroïde nous a frôlé. Il n'est en effet passé qu'à 12 000 km au-dessus de l'Atlantique Sud, ce qui est nettement plus près que la Lune (384 000 km), et même nettement plus près que les satellites météo ou de télécommunication qui sont à 36 000 km au-dessus de l'équateur.

D'après des mesures de luminosité, cet astéroïde mesure entre 5 et 20 m de diamètre. Il a été découvert par une équipe du LINEAR (Lincoln Near Earth Asteroïd Research) du Nouveau Mexique (USA).

Les deux figures suivantes montrent la trajectoire de cet astéroïde. La première est une vue prise depuis le plan de l'écliptique ; la deuxième est une vue prise perpendiculairement à l'écliptique.

De tels passage proches de la Terre ne sont pas exceptionnels, même si celui ci était exceptionnellement proche : plusieurs fois par an, un astéroïde « conséquent » (diamètre de quelques mètres) passe entre la Terre et la Lune. On peut avoir la liste des passage « connus » en allant sur le site du Near Earth Object Program . La carte suivante montre « l'encombrement » au voisinage de l'orbite de la Terre.

Carte de l'encombrement du système solaire interne

Figure 3. Carte de l'encombrement du système solaire interne

Les orbites de Mercure, Vénus et Mars sont figurées en bleu foncé ; celle de la Terre en bleu clair. Chaque point vert, jaune ou rouge représente un astéroïde dans sa position du 9 mai 2008. Les points verts sont les astéroïdes classiques, ceux qui orbitent entre Mars et Jupiter (dont l'orbite est extérieure à ce schéma). Les points jaunes et rouges correspondent à des astéroïdes potentiellement dangereux, les NEO (Near Earth Objetct), dont l’orbite tangente (jaunes) ou recoupe (rouges) régulièrement celle de la Terre. Ces derniers astéroïdes sont dits « géocroiseurs ». L'orbite figurée en pointillés rouges représente l'orbite d'un de ces géocroiseurs (localisé par une flèche rouge dans sa position du 9 mai 2008). Cet astéroïde croise 2 fois l'orbitre de la Terre au cours de sa révolution. Si, quand il croise l'orbite de la Terre, la Terre est exactement à cet endroit, c'est la collision. Attention, ce schéma a deux dimensions exagère apparemment le risque de collision, car il néglige la troisième dimension : un géocroiseur peut « croiser » l'orbite de la Terre en dessus ou en dessous du plan de l'écliptique, sans risque de collision donc.


Que serait-il arrivé si, au lieu de passer à 12 000 km au-dessus de nos têtes, 2001 MD avait heurté la Terre ? Il y a plusieurs sortes d'astéroïdes. Pour simplifier, ils sont compris entre deux extrêmes.

Un de ces deux extrêmes est constitué de roches mal agglomérées et de densité globale assez faible (< 3500 kg/m3). La destinée de tels « petits » astéroïdes est de se fragmenter et de se désintégrer dans l'atmosphère. Au sol, il ne tomberait rien ou seulement quelques petites météorites, et cette chute risquerait de passer relativement inaperçue.

L'autre extrême, c'est un astéroïde de fer, très solide donc. Il traverserait l'atmosphère en ne ralentissant qu'à peine, sans (trop) se fragmenter et arriverait au sol en engendrant une gigantesque explosion, ce qui créerait un joli cratère d'impact. Les astéroïdes métalliques, les plus dangereux, sont (heureusement) beaucoup plus rares que les astéroïdes rocheux. Tous les intermédiaires peuvent exister entre ces deux extrêmes, comme, par exemple, un astéroïde qui traverse les hautes couches de l'atmosphère mais qui explose violemment en arrivant dans les couches denses de la basse atmosphère.

Si on suppose le pire des cas possibles avec les données actuelles concernant 2011 MD (20 m de diamètre, astéroïde métallique, chute sur la Terre), on peut facilement calculer l'énergie que cela aurait dégagé. Avec ses 10 m de rayon (volume de 4.103 m3), sa masse volumique d'environ 104 kg/m3, si on lui attribue une vitesse relative (par rapport à la Terre) de 10 km/s, et si on suppose qu'il arrive au sol sans quasiment ralentir, son énergie cinétique (Ec = 1/2.mv2) serait d'environ de 2.1015J... ce qui correspond à approximativement 500 kilotonnes de TNT, soit à peu près la puissance de 30 bombes d'Hiroshima. Un gros « plouf » et un petit tsunami s'il était tombé dans l'Atlantique Sud, un beau cratère s'il était tombé en Amazonie, une catastrophe s'il était tombé sur une ville brésilienne.

Est-il déjà arrivé des collisions significatives « historiques » ? Aucune chronique ne relate un choc « extrême », comme aurait pu le faire 2011 MD (dans le pire des cas exposé ci-dessus). L'autre extrême (chute d'un astéroïde qui se fragmente complètement dans l'atmosphère et dont la chute passe relativement inaperçue est beaucoup plus courant. C'est une chute de ce type qui a eu lieu le 6 octobre 2008, chute d'une uréilite au Soudan.

On ne peut pas ne pas citer la chute du 30 juin 1908 dans la région de la Tunguska (Sibérie). Cette chute fit l'objet de nombreuses descriptions par des témoins directs, comme par exemple « Le 30 juin 1908, une gigantesque explosion détruit des km2 de forêt en Sibérie. À moins de 20 km de l'épicentre de Tunguska les 600 à 700 rennes de Vasiliy Dzhenkoul furent instantanément réduits en cendres, les chiens furent brûlés vifs, toutes les tentes des nomades furent brûlées ainsi que tous les stocks de nourriture et de bois ». Des explorations menées dans les années qui suivirent ne montrèrent aucun cratère, mais par contre la forêt complètement dévastée sur une surface de plusieurs dizaines de kilomètres carrés, avec tous les arbres couchés et orientés de façon radiale au centre de la zone dévastée. Cet événement est actuellement interprété comme une chute intermédiaire entre les deux extrêmes cités ci-dessus : un astéroïde qui traverse les hautes couches de l'atmosphère mais qui explose violemment en arrivant dans les couches denses de la basse atmosphère. Le diamètre de l'astéroïde qui a explosé est estimé à 50 m. L'énergie dégagée est estimée à 600 fois Hiroshima (= 10 mégatonnes de TNT = 40.1015J). La forêt é été totalement dévastée dans un rayon dune vingtaine de kilomètres (l'équivalent de Londres et sa banlieue proche), des dégâts importants ont affecté une zone d'un rayon d'une centaine de kilomètres alors que le phénomène a pu être vu et/ou entendu jusqu'à 800-1000 km.

Après l'explosion d'un astéroïde, 30 juin 1908 vers Tungunska

Figure 4. Après l'explosion d'un astéroïde, 30 juin 1908 vers Tungunska

La forêt dévastée vers Tungunska. Photographie prise en 1927 lors de l'expédition menée par Leonid Kulik pour tenter de retrouver un cratère d'impact. L'absence de cratère indique que l'explosion a eu lieu dans l'atmosphère à proximité du sol.

Source : Tungunska sur Wiikipedia, modifiée