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Article | 28/06/2013

Anatexie en conditions de (sub-)surface : les murs vitrifiés du camp de Péran et autres phénomènes anthropiques ou naturels

28/06/2013

Gilbert Crevola

Anciennement, Université Bordeaux 3

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Pierre Thomas

ENS de Lyon - Laboratoire de Géologie de Lyon

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Murs vitrifiés, fusion accidentelle et phénomènes naturels analogues de fusion (buchites, enclaves, impactites).


En géologie, les trois origines classique de la fusion sont 1) la fusion par décompression (dorsales, rifts, points chauds, relaxation de chaînes de montagne...), cas le plus fréquent, 2) la fusion par hydratation (magmatisme de subduction...), 3) fusion par augmentation de température (accumulation d'énergie radioactive en cas d'épaississement crustal prolongé...), cas le plus rare. Dans les conditions de sub-surface, la pression est très faible et quasi-constante, c'est l'augmentation de température qui est à l'origine de l'anatexie. À partir de la fusion-recristallisation, d'origine humaine, observée dans les murs vitrifiés du camp de Péran, un petit tour d'horizon des phénomènes d'anatexie anthropiques et naturels en condition de surface est proposé, en s'intéressant aussi bien aux roches fondues résiduelles qu'à leurs verres respectifs lorsqu'ils sont observables.

Les murs vitrifiés du camp de Péran, Plédran (Côtes d'Armor)


Les forts vitrifiés, ou murs vitrifiés, sont des vestiges d'enceintes fortifiées dont les plus vieux pourraient dater de l'âge du fer, constituées de blocs de roches soudés par un verre résultant de la fusion de la périphérie de ces blocs et/ou d'un amalgame interstitiel (fondant, arène granitique ?). Il en existe plus d'une centaine en Europe occidentale, particulièrement en France et en Écosse. Le fort de Péran, ou camp de Péran, situé sur la commune de Plédran, au Sud de Saint-Brieuc (Côtes d'Armor), est le mieux conservé des forts vitrifiés français. Présenté souvent comme un fort viking, son âge reste en fait controversé. Facile d'accès, de forme ellipsoïdale (134 x 110 m), il présente les vestiges d'une double enceinte. Plusieurs portions de murs vitrifiés, dégagées de leur couverture végétale, composées de roches variées soudées par "vitrification", peuvent y être observées.

Reste de mur vitrifié, dégagé de sa couverture végétale 

Figure 2. Reste de mur vitrifié, dégagé de sa couverture végétale 

Le mur est fait d'une agglomération de blocs décimétriques de granite s.l. (couleur grise) et de quartz (couleur blanche) soudés par un verre sombre abondant.


Portion de mur vitrifié, composé ici surtout de blocs de granite s.l. soudés par du verre bulleux

Figure 3. Portion de mur vitrifié, composé ici surtout de blocs de granite s.l. soudés par du verre bulleux

À droite, le verre sombre présente des bulles atteignant le centimètre. En haut, à droite, la roche devenue bulleuse, présente un aspect boursouflé qui rappelle les laves cordées.


Portion de mur vitrifié composé de blocs de quartz et de granite s.l. en voie de fusion

Figure 4. Portion de mur vitrifié composé de blocs de quartz et de granite s.l. en voie de fusion

Les quartz gardent leur forme anguleuse et ne sont pas affectés par la fusion, alors que les blocs de granite s.l. deviennent bulleux.



Les études archéologiques ont montré que la vitrification était obtenue par la combustion d'un appareillage de poutres de bois qui arment les murs, de type murus gallicus. Cependant, son caractère intentionnel, en tant que procédé de construction pour une plus grande solidité des murs ou accidentel par incendie, de même que ses modalités de mise en œuvre restent débattus. Si des expérimentations de laboratoire ont permis d'atteindre la fusion, d'autres en vraie grandeur sur des murs reconstitués ont échoué.

L'intérêt géologique des forts vitrifiés réside dans l'observation de la fusion progressive des divers types de roches, sorte d'anatexie expérimentale spectaculaire, d'origine anthropique. Ce phénomène reconnu dans diverses enceintes fortifiées, avait retenu l'attention des pétrographes dès la fin du XIXème siècle. Les travaux que Gabriel Auguste Daubrée (1881) puis Alfred Lacroix (1898) ont consacrés aux forts vitrifiés, et au camp de Péran en particulier, restent, malgré leur ancienneté, des travaux de référence pour la problématique des murs vitrifiés. Ils intervenaient à une époque marquée par le débat sur l'origine du granite : le transformisme, c'est-à-dire sa formation à l'état solide, étant opposé au magmatisme, c'est-à-dire sa cristallisation à partir d'un liquide silicaté. De plus, cette fusion artificielle pouvait être rapprochée de celle, naturelle, que présentent les enclaves de socle granitique ou métamorphique ramonées par les laves, que Lacroix avait étudiées antérieurement. Cet auteur montre en 1898 l'intérêt des études sur les forts vitrifiés en ces termes : « Indépendamment de l'intérêt archéologique que présentent ces forts vitrifiés, leur étude soulève diverses questions minéralogiques qui méritent un intérêt attentif. Quel que soit le procédé employé pour leur construction, ils sont constitués par des roches qui ont été amenées à la température de fusion d'une partie au moins de leurs éléments, puis ont été refroidis lentement. Le minéralogiste trouve donc là de véritables expériences synthétiques, effectuées sur un cube considérable de matériaux, et par suite plus démonstratives que les opérations de laboratoire qui ne peuvent être faites que sur une faible quantité de matière ».

Les roches qui constituent les murs du camp de Péran sont d'origine locale. Les divers granitoïdes de Ploufragan, sur lesquels est bâti le camp, de composition granodioritique à tonalitique, et les quartz blancs filoniens sont les roches les plus utilisées. Mais on trouve aussi quelques blocs de gneiss, provenant des enclaves des granitoïdes, et quelques blocs de dolérite filonienne.

Divers aspects de le la fusion du granite s.l.

Figure 6. Divers aspects de le la fusion du granite s.l.

Le verre bulleux disséminé dans la roche traduit l'exsudation d'un liquide de fusion à partir du granite s.l..




Fractures injectées par du verre sombre dans un bloc de quartz à patine rose

Figure 9. Fractures injectées par du verre sombre dans un bloc de quartz à patine rose

Cette disposition montre la mobilité du verre de fusion.



Verre à bulles étirées

Les diverses roches montrent une fusion partielle plus ou moins avancée suivant leur nature originelle et, sans doute aussi, leur position par rapport aux foyers. Les deux principaux types de roches vont se comporter différemment. Les quartz blancs gardent leur forme anguleuse et ne sont pas affectés par la fusion ou tout au moins, ils ne fondent qu'à des températures bien supérieures à celles atteintes localement. On peut les rapprocher des restites des migmatites, roches réfractaires à l'anatexie. En conditions de surface, un "granite sec" fond vers 950°C et un "granite hydraté" vers 900°C, alors que le quartz pur ne fond qu'à partir d'environ 1700°C.

L'observation des murs vitrifiés montre que les granitoïdes deviennent d'abord poreux, puis évanescent et bulleux. Dans un stade plus avancé de fusion, la roche devient pâteuse et montre une véritable "ébullition" par vaporisation de l'eau interstitielle ou des minéraux hydroxylés comme les micas. Le verre bulleux de couleur noire, par sa dissémination dans la roche, traduit l'exsudation du liquide de fusion. Par son aspect boursouflé, il rappelle les scories volcaniques ou les scories de fonderies. Il montre une certaine mobilité, s'insinuant entre les blocs ou dans leurs fissures, présentant des figures de flux, avec des bulles étirées.

Échantillon de gneiss montrant des lits de verre bulleux disposés parallèlement au litage de la roche

Figure 12. Échantillon de gneiss montrant des lits de verre bulleux disposés parallèlement au litage de la roche

Cet échantillon remarquable, rappelle les migmatites « lit par lit ». Le refroidissement est relativement rapide ici, alors que dans les migmatites le leucosome a cristallisé lentement.


Certains échantillons de gneiss permettent d'observer une fusion lit par lit. La roche devenue poreuse et d'aspect saccharoïde montre l'apparition d'un verre sombre à microbulles disposé en lits réguliers épais de quelques millimètres, parallèlement à la foliation originelle. Cette structuration remarquable rappelle celle des classiques migmatites « lit par lit ». Elle peut être interprétée de la même façon, à savoir une fusion affectant des lits à composition favorable, avec éventuellement un apport de matière à partir des lits voisins, pour donner les "leucosomes". Les dolérites montrent, selon Lacroix, une fusion progressive en plusieurs stades, distincts par la proportion du verre.

Daubrée et Lacroix ont observé, dans les verres de fusion, la cristallisation de néominéraux particuliers, aciculaires ou dendritiques, distincts de ceux banals des roches ayant subi la fusion. De tels minéraux particuliers sont aussi observés dans les verres de fusion des enclaves de socle des laves, appelées buchites. Ces observations montraient que dans les roches magmatiques ou métamorphiques, les types d'assemblages minéralogiques dépendent des conditions physiques de cristallisation, résultat important pour l'époque.

Ces observations anciennes mettaient en évidence la fusion partielle de roches variées dans les conditions de la surface, mais sans contrôle de la température ou de la teneur en eau. Si elles venaient à l'appui des théories magmatistes, elles n'étaient pas directement transposables à la genèse des roches magmatiques qui s'effectue en profondeur. Il faudra attendre les années 1950 et 1960 pour que des expériences représentatives de phénomènes pétrogénétiques crustaux, avec contrôle des paramètres physiques, soient réalisées. Les travaux de Tuttle et Bowen (1958) et ceux de Winkler (1957) ont permis de préciser les conditions physiques de l'anatexie crustale et ont mis fin à la controverse du granite, qui était toujours vivace, en établissant définitivement son origine magmatique. Ces travaux expérimentaux fournissent aux archéologues des données assez précises sur les températures nécessaires à un début de fusion, pour les divers types de roches, en fonction de leur teneur en eau. Le camp de Péran permet d'examiner la fusion d'au moins trois types de roches différentes. Avec saturation d'eau, la fusion des gneiss peut être obtenue entre 850 et 900°C, celle des granodiorites et tonalites entre 950 et 1050°C, celle des dolérites entre 1050 et 1100°C. Ces températures étant correctement estimées, il reste à déterminer quel procédé permettra leur obtention et leur maintien pour arriver à la vitrification et à la soudure.

« Pour ramollir une roche aussi réfractaire que le granite, pour fondre son mica et quelquefois même son feldspath, sur des épaisseurs de plusieurs mètres, il a fallu une intention formelle, et en outre cette volonté a dû être servie par des efforts habiles et prolongés, ainsi que par une quantité considérable de combustible », (Daubrée, 1881).

Portion de murus gallicus reconstitué à Péran par le Centre des Monuments Historiques

Figure 13. Portion de murus gallicus reconstitué à Péran par le Centre des Monuments Historiques

Les murus gallicus, ou murs gaulois, décrits par Jules César dans la Guerre des Gaules, sont des remparts faits d'un empilement de blocs de roches rigidifié par un entrecroisement de poutres de bois. On comparera cette reconstitution avec le mur vitrifié présenté sur la figure 2.


Vue d'ensemble du murus gallicus du camp de Péran, reconstitué par le Centre des Monuments Historiques

Figure 14. Vue d'ensemble du murus gallicus du camp de Péran, reconstitué par le Centre des Monuments Historiques

Les murus gallicus, ou murs gaulois, décrits par Jules César dans la Guerre des Gaules, sont des remparts faits d'un empilement de blocs de roches rigidifié par un entrecroisement de poutres de bois.


Vue aérienne du camp de Péran, Plédran (Côtes d'Armor)

Figure 15. Vue aérienne du camp de Péran, Plédran (Côtes d'Armor)

Le camp de Péran, indiqué sur les cartes topographiques, est situé à 5 km au Sud de Saint Brieuc, un peu au Sud de l'échangeur de la double voie D700 avec la D10.


Localisation du camp de Péran sur carte topographique

Figure 16. Localisation du camp de Péran sur carte topographique

Le camp de Péran, indiqué sur cette carte topographique, est situé à 5 km au Sud de Saint Brieuc, un peu au Sud de l'échangeur de la double voie D700 avec la D10.


Autres exemples d'anatexie accidentelle ou naturelle

Fusion dans un tunnel ferroviaire : l'incendie du tunnel de Crozet (Loire), 1971

Le 20 mars 1971, un terrible accident ferroviaire eut lieu dans le tunnel de Crozet (Loire), entre les gares de La Pacaudière et de Saint-Martin-Sail-les-Bains. Alors que deux trains se croisaient dans le tunnel, le déraillement d'une citerne, suivi de la collision avec le train opposé, a entraîné un incendie qui dura une journée entière et s'arrêta faute d'oxygène suite à des effondrements partiels du tunnel. Depuis, le tunnel a été remplacé par une tranchée à ciel ouvert.

Environ 600.000 L de carburant, transportés dans des citernes, ont alimenté le feu pendant 24h. La fusion de bouteilles d'eau minérale, entre autres arguments, indique que des températures de l'ordre de 2000°C ont été atteintes. Les fortes températures et la durée de l'incendie expliquent que la structure du tunnel n'a pas résisté. La roche de l'encaissant, elle, a commencé à fondre comme on le voit ci-dessous sur les images d'échantillons récupérés aux lendemains de l'incendie par M. Michel Laurenchet.

Encaissant du tunnel de Crozet (Loire) montrant des traces de fusion et une couche périphérique de verre

Figure 17. Encaissant du tunnel de Crozet (Loire) montrant des traces de fusion et une couche périphérique de verre

Au premier plan, une couche de verre de fusion du granite dont on devine l'épaisseur. Dans le plan de coupe, on observe des bulles liées à la fusion et au transfert du magma vers la périphérie.


Encaissant du tunnel de Crozet (Loire) montrant des traces de fusion et une couche périphérique de verre

Figure 18. Encaissant du tunnel de Crozet (Loire) montrant des traces de fusion et une couche périphérique de verre

La couche superficielle de verre contient des minéraux résiduels de taille réduite. On retrouve des bulles plus "profondément" dans la roche.


Cet exemple du Crozet illustre une anatexie de surface liée à une hausse de température, ici accidentelle et non intentionnelle comme c'est probablement le cas pour les murs vitrifiés. Des exemples naturels montrent aussi des échantillons de roches ayant subi une fusion dans des conditions de surface ou de sub-surface.

Buchites et enclaves dans les basaltes de la coulée du Ray-Pic

Les roches des forts vitrifiés peuvent être considérées comme des buchites artificielles (de von Buch, 1774-1853, pétrographe allemand). Les buchites sont des roches de composition variée qui ont subi une fusion partielle ou totale par métamorphisme thermique extrême ou pyrométamorphisme, dans le faciès sanidinite dans les conditions de surface ou à proximité de la surface. Ce phénomène s'observe classiquement dans la nature, dans le cas d'enclaves de socle ramenées en surface par le liquide magmatique dans lequel elles vont cohabiter avec des enclaves de lherzolite d'origine mantellique. Elles se forment aussi par métamorphisme de contact affectant l'encaissant d'intrusions subvolcaniques ou l'encaissant de couches de charbon entrées en combustion à proximité de la surface. Leur intérêt est de présenter des paragenèsesde haute température et faible (très faible) pression, originales par rapport à celles des roches magmatiques et métamorphiques classiques. Suivant la composition de la roche de départ on observe les minéraux néoformés dans le verre tels que cordiérite (alumino-silicate de magnésium), diopside (pyroxène calco-magnésien), trydimite (forme de haute température de la silice à basse pression), hypersthène (orthopyroxène), melilite (silicate à Ca, Na et Mg,Fe, Al), mullite (silicate d'alumine rare dans la nature mais fréquent dans les briques et tuiles), sanidine (feldspath potassique de haute température), spinelle (oxyde d'Al et Mg). Ces minéraux, sous forme aciculaire ou dendritique, ont été effectivement observés par Lacroix et Daubrée dans des échantillons provenant de divers forts vitrifiés.

Des enclaves crustales sont fréquentes dans les basaltes. Elles peuvent apparaître quasi-intactes ou alors être très déformées et partiellement fondues. Ces enclaves sont arrachées par un magma qui les réchauffent et, lorsqu'une température supérieure à la température de fusion de la roche est atteinte (variable selon la nature de la roche), il peut y avoir fusion plus ou moins partielle.

Enclave de granite "fondu" avec verre recristallisé

Figure 19. Enclave de granite "fondu" avec verre recristallisé

Dans cet échantillon de basalte très bulleux, on trouve une enclave de socle granitique "spongieux", bulleux semblant avoir subi un étirement et ayant subi une fusion partielle (partie blanchâtre). La réaction du jus granitique avec le liquide basaltique donne une teinte "rougeâtre" en périphérie.


Enclave de granitoïde quasi-intact

Figure 20. Enclave de granitoïde quasi-intact

Cette enclave de socle est quasi-intacte. Ceci peut s'expliquer par une origine plus profonde (croûte inférieure) et donc une nature impliquant une température de fusion plus élevée que celle de l'enclave précédente.

Cela peut aussi s’expliquer par un arrachage explosif et superficiel du substratum, en effet, dans ce cas, l’enclave n’a pas le temps de fondre avant son refroidissement. Cas fréquent dans le cas des explosions phréatomagmatiques.


Ci-dessous, des exemples d'enclaves montrant des degrés variables de fusion et de dilacération dans un basalte de la coulée du Ray-Pic (Ardèche). Dans ces exemples, la présence d'un verre spécifique liée à la fusion des enclaves n'est pas visible, du moins à l'œil nu.

Bloc de basalte à multiples enclaves péridotitiques et "granitiques", coulée du Ray-Pic

Figure 21. Bloc de basalte à multiples enclaves péridotitiques et "granitiques", coulée du Ray-Pic

Ce bloc de basalte montre de nombreuses enclaves. On reconnaît des enclaves de péridotite aux bords nets voire anguleux. Les enclaves crustales se présentent soit avec des bords relativement nets (en haut, à gauche), soit avec des bords montrant une dilacération en cours (au centre), soit sous forme de mini-enclaves formées d'un ou quelques minéraux dispersés dans la matrice basaltique.

Les images suivantes montrent des enclaves présentes sur les différentes faces de ce bloc.


Enclave "granitique" montrant des traces de fusion

Figure 22. Enclave "granitique" montrant des traces de fusion

Enclave granitique bulleuse à bords relativement nets, mêmes si des cristaux périphériques semblent en cours de "détachement".


Enclaves granitiques déformées, dilacérées

Figure 23. Enclaves granitiques déformées, dilacérées

En haut, amas globuleux d'origine granitique. Du basalte s'insinue entre des amas minéraux et isole parfois des cristaux.

En bas, l'enclave granitique a été étirée. Sa fusion partielle l'a rendue déformable si bien que l'écoulement du basalte a suffit à l'étirer.

Ici, a priori, aucune trace évidente de fusion (bulles...), même si la déformation a été favorisée par la fusion partielle de l'enclave. En comparant la structure de ces enclaves à la périphérie de l'enclave suivante, elles apparaissent toutefois comme des reliques de fusion.


Enclave "granitique" à cœur bulleux et périphérie en cours de dispersion dans la matrice basaltique

Figure 24. Enclave "granitique" à cœur bulleux et périphérie en cours de dispersion dans la matrice basaltique

Cette enclave comporte un cœur relativement compact et bulleux et une périphérie moins compacte semblable aux enclaves déformées précédentes. L'absence de déformation évidente permet de penser que l'aspect de la périphérie résulte bien de la fusion et de la dilacération consécutive de la roche initiale.


Les impactites du cratère du Ries (Bavière)

Le cratère du Ries (Bavière) a un diamètre de l'ordre de 24 km et date d'il y a environ 15 Ma. Lors de l'impact de la météorite, des matériaux sont fortement comprimés et chauffés, puis éjectés. Dans les éjectas, essentiellement constitués de roches "broyées" mais non fondues, on retrouve des blocs ayant totalement ou partiellement fondu. Ces roches "modifiées" lors d'un impact sont nommées impactites. Quand il y a une part significative de la roche qui a fondu, l’impactite prend alors le nom de suévite.

Impactite issue de la fusion d'une roche granitique, cratère du Ries (Bavière)

Figure 25. Impactite issue de la fusion d'une roche granitique, cratère du Ries (Bavière)

On observe ici, dans les éjectas, un morceau de verre bulleux issu de la fusion d'une roche de type granitique (cf. image suivante). Les débris comprimés et chauffés lors de l'impact ont pu fondre lors de leur éjection et de leur retour à pression atmosphérique, la baisse de température étant moins instantanée que la baisse de pression (fusion d'un matériau chaud lors de sa décompression, l'augmentation de pression n'étant pas un facteur favorable à la fusion).


Impactite issue de la fusion d'une roche granitique encore visible, cratère du Ries (Bavière)

Figure 26. Impactite issue de la fusion d'une roche granitique encore visible, cratère du Ries (Bavière)

Autre échantillon provenant du cratère du Ries. Sur cette face, on retrouve un verre bulleux mais, ici, la roche granitique d'origine est encore visible à son contact. Le "jus" de fusion a recristallisé sans avoir pu s'extraire complètement de son matériau originel.


Références

A. Lacroix, 1898. Sur les phénomènes de recristallisation présentés par les blocs de diabase du fort vitrifié du camp de Péran, près Saint-Brieuc, Bulletin du Muséum d'histoire naturelle de Paris, 396-400 [pdfvia BnF/Gallica]

G.A. Daubrée, 1881. Examen minéralogique et chimique des matériaux provenant de quelques forts vitrifiés de la France, Revue archéologique, 18-28 [pdfvia Bnf/Gallica]

G.A. Daubrée, 1881. On the substances obtained from some "Forts vitrifiés" in France, The American Journal of Science, 22, 128, 150-151 [pdfvia Carnegie Mellon University Libraries]

P. De Wever (collectif sous la direction de), 2003. Le volcanisme cause de mort et source de vie, Vuibert, 328p (p. 21, la seule mention des forts vitrifiés en géologie)

C.R.L. Friend, N.R. Charnley, H. Clyne, J. Dye, 2008. Experimentally produced glass compared with that occurring at The Torr, NW Scotland, UK: vitrification through biotite melting, Journal of Archaeological Science, 35, 12, 3130-3143