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Article | 21/05/2001

L'éruption du Vésuve en 79 après J.C.

21/05/2001

Édouard Kaminski

Institut de Physique du Globe de Paris

Claude Jaupart

Institut de Physique du Globe de Paris

Benoît Urgelli

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Mise en évidence de deux phases majeures pour l'éruption du Vésuve en 79 après J.C., à partir de témoignages historiques et des caractéristiques des dépôts volcaniques principaux, entre autres à Pompéi et Herculanum. La première phase, dite plinienne, correspond à une pluie de cendres et de ponces. La seconde phase, de nuées ardentes, correspond à des avalanches de fragments du jet volcanique sur les pentes du volcan.


Sources :

  • H.Sigurdsson, S.Cashdollar, S.Sparks, 1982. Eruption of Vesuvius in A.D. 79: reconstruction, American Journal of Archeology (86), pp 39-51
  • H. Sigurdsson, S. Carey, W. Cornell, T. Pescatore, 1985. Eruption of Vesuvius in A.D. 79, National Geographic Research (3), pp 332-387

Introduction

Dans la nuit du 24 au 25 octobre[1]

de l'an 79 après JC, le Vésuve entre en éruption. En dix heures, les villes d'Herculanum et de Pompéi seront entièrement dévastées par ce qui reste une des plus marquantes des catastrophes naturelles documentées par l'homme civilisé. Cet événement, parce qu'il a donné naissance à une source d'informations très complète sur la vie romaine, mais également parce qu'il est le premier phénomène naturel décrit par un scientifique, Pline l'ancien, occupe une place particulière dans l'Histoire, l'histoire des sciences et bien sûr dans la volcanologie. Dans cet article, nous allons décrire les dépôts volcaniques principaux de l'éruption de 79 du Vésuve, en les rapprochant de la chronologie des événements telle qu'elle a été relatée par Pline l'ancien et Pline le jeune.

Reconstitution de l'éruption du Vésuve du 24 octobre 79 après J.C.

Figure 1. Reconstitution de l'éruption du Vésuve du 24 octobre 79 après J.C.

Cliquez sur l'image pour lancer l'animation.


Environnement géodynamique

L'activité volcanique du Vésuve, et plus généralement la majorité des phénomènes sismiques et volcaniques en Italie du Sud, peut être mise en relation avec la convergence entre les plaques Africaine et Eurasienne. La plaque Africaine se déplace en effet actuellement de 2,3 cm par an vers le Nord-Ouest et plonge sous l'Europe, entraînant la fermeture du bassin de la Méditerranée (Figure 1).

Plongement de la plaque africaine sous la plaque eurasienne

Figure 2. Plongement de la plaque africaine sous la plaque eurasienne

Les courbes donnent la profondeur des séismes en kilomètres.


Le plongement de la plaque est marqué par les séismes produits par le frottement entre la plaque chevauchante et la plaque subductée, lesquels définissent la zone de Bénioff. Sous le Vésuve, la plaque atteint une profondeur de près de 300 km.

À ces profondeurs, la température et la pression sont telles qu'elles induisent la déshydratation de la plaque plongeante. Les minéraux riches en eau se transforment alors par métamorphisme de haute pression et basse température en minéraux plus denses qui ne contiennent quasiment pas d'eau dans leur architecture cristalline. L'eau ainsi libérée induit alors une fusion hydratée du manteau en dessus de la plaque plongeante, et produit des laves que l'on retrouvera dans les émissions du Vésuve ou des champs phlégréens (Figure 2).


La libération de l'eau favorise la fusion des roches chaudes d'une façon un peu analogue à la formation de caramel lorsque l'on mouille du sucre chaud. En physique, on dit que l'eau abaisse le point de fusion, ou solidus. Les laves produites par la fusion hydratée sont en général riches en potassium, et c'est une signature des arcs volcaniques de subduction.

Histoire volcanique du Vésuve

La majeure partie de l'activité du Vésuve, au sein donc de l'arc de subduction, consiste en de petits épanchements de laves, sous forme de coulées, avec parfois des éruptions dites explosives, au cours desquelles la lave se met en place non pas sous forme de coulées, mais sous forme de fragments de magma, ou éjecta, appelés ponces lorsqu'ils sont gros et cendres lorsqu'ils sont petits.

L'ensemble de ces éruptions a formé un strato-volcan ancien, appelé Somma, l'ancêtre du Vésuve. Des datations radioactives potassium-argon ont donné un âge de 300 000 ans pour la base du volcan. Il y a 17 000 ans, une grosse éruption a formé un dépôt étendu de ponces, connu sous le nom de " ponces basales ". Ce dépôt marque la fin de l'activité du Somma et le début de l'activité du Vésuve.


Depuis, le Vésuve a connu sept éruptions majeures, avec des périodes de repos du volcan variant entre 400 et 4 000 ans entre deux éruptions. Chacune de ces éruptions marque le début d'un cycle éruptif que l'on peut repérer à chaque fois par un paléosol souvent calciné et recouvert par les éjecta. Le cycle qui inclut l'éruption de 79 après J.C. était le cinquième, et a commencé avec l'éruption d'Alvellino, dont les dépôts recouvrent un paléosol daté au carbone 14 à -1 760 ± 70. Cette éruption fut assez semblable par sa composition, son étendue et son intensité à celle de 79 après J.C.

De nombreux historiens sous Auguste (-31 à 14), notamment Strabo, avaient noté le caractère volcanique du Vésuve, et le décrivaient comme un cône volcanique tronqué ; une peinture d'une maison à Pompéi le montre d'ailleurs ainsi. Aujourd'hui, le cône est en partie détruit, il est égueulé, et s'ouvre sur une sorte de chaudron, ou caldeira, formée par l'effondrement du volcan à la fin de l'éruption de 79 après J.C.


Reconstitution des phases de l'éruption d'octobre 79 après J.C. à partir des dépôts volcaniques associés

Une éruption volcanique explosive s'accompagne de l'éjection dans l'atmosphère à partir du conduit éruptif, d'un mélange de gaz volcanique et de fragments, ponces et cendres. Cette mixture forme un jet de gaz plus ou moins dense, violent et turbulent, que l'on appelle un panache volcanique. En prenant l'exemple simpliste d'une bouteille de champagne que l'on aurait fortement secoué, le jet qui se produirait à l'ouverture formerait le même type d'écoulement, les gouttelettes de champagne en suspension étant l'équivalent des fragments de magma. Les ponces et les cendres transportées par le panache retombent ensuite sur le sol et forment des dépôts volcaniques que l'on peut observer sur le terrain après l'éruption. Nous allons voir comment l'étude de ces dépôts, combinée aux témoignages historiques, permet de reconstituer les phases de l'éruption d'octobre 79.

Des signes précurseurs, quelques années auparavant

Lorsqu'une éruption volcanique est imminente, un signe précurseur habituel est l'enregistrement de séismes produits par la remontée de la lave qui se fraie un chemin vers la surface. Un second signe est également souvent l'activité accrue des fumeroles.

Ces deux signes semblent avoir été observés pour le Vésuve. En effet, 17 ans avant l'éruption, un fort tremblement de Terre (de magnitude estimée à 5 d'après les dégâts) causa des dommages importants à Pompéi et à Herculanum (Figure 6). Sénèque rapporte également qu'après ce tremblement de Terre, de nombreux moutons périrent aux alentours du Vésuve suite à des émanations de gaz toxiques.


Enfin, il semble également que le gonflement du volcan ait été enregistré par une baisse relative du niveau de la mer dans la région.

Toutefois, 17 ans est un délai très long entre une éruption et ses précurseurs : le Vésuve a certainement indiqué que de la lave s'était mise en place mais celle-ci n'était pas encore prête à l'éruption. Quelques 17 ans plus tard, le 20 octobre 79, de nouveaux séismes secouent la région avec une fréquence et une intensité croissante jusqu'au 24 octobre, indiquant la remontée finale de la lave. On note également le tarissement de nombreuses sources autour du volcan, par fermeture de fissures associée à la dilatation du volcan. (Attention cependant car parfois c'est l'inverse qui se produit : des sources naissent par d'autres fractures créées par le fissurage du volcan sous la pression).

Ces signes seraient aujourd'hui immédiatement suivis de l'évacuation de la population, mais à l'époque aucun lien ne fut fait entre une éruption du Vésuve et l'activité tellurique.

La phase phréatomagmatique

Les dépôts

La première phase de l'éruption correspond au premier lit de fragments et de cendres déposés sur le paléosol (Figure 7). Ce dépôt est limité aux flancs du volcan et à l'est du Vésuve. Ce dépôt est mal trié (les cendres et les ponces de toute taille sont mélangées) et les fragments qui le forment sont plutôt fins, que l'on soit proches du centre éruptif ou que l'on s'en éloigne. De plus, on peut trouver des fragments en forme de gouttelettes, ou lapilli, au sein de ce dépôt.

Vision d'ensemble des dépôts de l'éruption de 79, à Terzino

Figure 7. Vision d'ensemble des dépôts de l'éruption de 79, à Terzino

Le sujet à la main posée sur le paléosol, dans la trace laissée par un tronc d'arbre. Le premier lit, marron clair, fait environ cinq centimètres d'épaisseur et correspond à l'épisode phréatomagmatique par lequel débute l'éruption.


Ces observations sont typiques d'un épisode phréatomagmatique, où la lave explose au contact de l'eau d'infiltration. On peut imaginer qu'il correspond donc à la dernière phase de l'ascension de la lave qui rencontre l'eau stockée dans le sous-sol. L'explosion résultante "débouche" le conduit, et ouvre la voie aux phases suivantes.

Les témoignages historiques

Comme ce dépôt est assez fin et assez peu étendu, il correspond à une petite explosion du volcan. Il est donc probable qu'il fut à peine noté par les habitants de Pompéi et Herculanum.

Ceux-ci n'ont vu qu'un nuage noir et n'ont entendu que le son d'une explosion qu'ils ont interprété comme de l'orage au-dessus du volcan. Par contre, les villas sur les flancs du volcan ont reçu des cendres, et c'est une des propriétaires de ces villas, Rectina, qui appela Pline l'ancien à la rescousse le 24 octobre.

De plus, à une de ces villas, Rustica, le dépôt devant la porte ne montre pas de traces de pas des habitants, ce qui laisse penser que ce dépôt a eu lieu très peu de temps avant la phase principale de l'éruption qui allait tout recouvrir le matin du 24 octobre avant même que les habitants ne soient sortis. On peut donc postuler que le début de l'activité du Vésuve a eu lieu dans la nuit du 23 au 24 octobre, n'alarmant que les habitants au sommeil léger.

La première phase majeure : la phase plinienne

Les dépôts

Dépôts Pliniens clairs et foncés de l'éruption de 79 près de Stabiae

Figure 8. Dépôts Pliniens clairs et foncés de l'éruption de 79 près de Stabiae

On note l'évolution de la couleur des dépôts qui correspond au changement de la composition chimique des laves. La stratification horizontale indique une mise en place sous forme de pluie de ponces.


Le second dépôt que l'on peut identifier (Figure 8) est bien plus épais que le précédent et montre des caractéristiques assez différentes. Il est trié, c'est-à-dire que les gros fragments sont majoritaires à la base des lits alors que les cendres le sont au sommet (parfois on observe aussi une stratification inverse). De plus, la taille moyenne des particules dans le dépôt diminue en fonction de l'éloignement à la bouche volcanique (l'épaisseur maximale est cependant atteinte 10 km avant le conduit lui-même). On note également que le dépôt n'est pas symétrique autour du volcan, mais montre un allongement très net dans la direction sud-est, ce qui traduit l'effet des vents dominants dans l'atmosphère (de même que les bancs de sable suivent les courants dans les estuaires). Ce dépôt a, notamment à Pompéi, entraîné l'effondrement du toit de certaines maisons, mais sans les déplacer, ce qui indique une mise en place verticale, en pluie, et non pas horizontal, en coulée. Ces caractéristiques sont typiques de dépôts sédimentaires, et ici d'une sédimentation aérienne, fall-out en anglais. Ce dépôt correspond à une pluie de cendres et de ponces depuis le panache volcanique.

On note également une évolution progressive de la couleur des ponces qui passe de blanc au milieu du dépôt à gris au sommet. Cette évolution correspond à des laves de chimie différente remontées progressivement du fond de la chambre magmatique (les ponces blanches sont relativement plus riches en silicium, elles sont plus différenciées, alors que les ponces grises sont moins riches en silicium, plus primitives ou basiques, c'est-à-dire plus proches du matériel issu de la fusion).

Les ponces grises sont plus riches en fer et magnésium, elles sont donc plus denses, ce qui explique pourquoi elles devaient être au fond de la chambre magmatique et donc ont été échantillonnées plus tard dans l'éruption. On remarque également que l'allongement des dépôts change légèrement entre les ponces grises et blanches, ce qui correspond à un changement de la direction des vents dominants (Figure 9).

Épaisseur des dépôts Pliniens, en centimètres

Figure 9. Épaisseur des dépôts Pliniens, en centimètres

Les courbes rouges correspondent aux ponces claires, les courbes bleues aux ponces foncées. Les dépôts se sont faits dans le sens du vent dominant, lors de l'éruption. Ils forment des ellipsoïdes. On note un léger changement de la direction du vent entre les deux épisodes.


Les témoignages historiques

Ce sont Pline l'ancien (le scientifique) et son neveu Pline le jeune (le lettré) qui fournissent le témoignage principal sur cette phase de l'éruption.

La mort de Pline

Figure 10. La mort de Pline

D'après A la découverte des volcans par D. Decobecq.


Comme nous l'avons vu, le matin du 24 octobre Pline l'ancien avait été alerté par son ami Rectina d'une activité inhabituelle du volcan dont les cendres étaient tombées sur sa villa. Pline l'ancien se préparait à quitter Misenia pour rejoindre Stabiae lorsqu'il fut témoin de la pluie de fragments. On voyait alors depuis Misenia le panache éruptif qui a été décrit en détail par Pline et que l'on appelle aujourd'hui un panache plinien, ou colonne plinienne ; la pluie de fragments définissant la phase dite plinienne de l'éruption, et les dépôts associés étant qualifiés de pliniens. Le panache formait une sorte de champignon s'écrasant dans la haute atmosphère et lâchant une pluie de cendres et de fragments sur les environs du volcan (Figure 11).


Pline prit alors le large avec une petite flotte de trières pour une mission de secours, mais il fut incapable d'accoster sur la cote ouest du Vésuve en raison de la présence de radeaux de ponces qui encombraient les flots (en effet, les pierres ponces flottent souvent sur l'eau en raison des nombreuses vésicules de gaz qu'elles contiennent, et qui diminuent leur densité).

Il fit alors voile vers Stabiae qu'il dut atteindre vers 7 heures. Stabiae était alors sous une pluie légère de cendres qui ne provoquait pas de panique dans la population. Pendant la nuit, la pluie de cendres et surtout de ponces continua, et de nombreux séismes se produisirent, qui poussèrent les habitants à passer la nuit dehors en se protégeant tant bien que mal des chutes de ponces qui commençaient à atteindre une épaisseur suffisante pour obstruer les portes. Le matin du 25 octobre, aux environs de 6 heures, les habitants de Stabiae furent témoins d'une manifestation du Vésuve assez forte pour les faire fuir en panique, en dépit des vents contraires qui gênaient la fuite par les eaux. Après avoir supporté 18 heures de pluie de cendres, leur réaction indique que cette nouvelle activité devait être plutôt terrifiante. Le pic d'intensité des tremblements de Terre est d'ailleurs atteint le matin du 25, avec même la formation de tsunami décrits par Pline l'ancien.

Que peut-on dire alors sur ce changement d'activité d'après les dépôts ?

La seconde phase majeure : les nuées ardentes

Les dépôts

Au-dessus des dépôts pliniens, on trouve des dépôts beaucoup plus hétérogènes, presque chaotiques (Figure 12), souvent très épais, et qui ne sont pas répartis de façon régulière autour du volcan.

Dépôt chaotique formé par les nués ardentes à Pozelle au Sud du Vésuve

Figure 12. Dépôt chaotique formé par les nués ardentes à Pozelle au Sud du Vésuve

On y trouve des blocs de lave de plus de 3 m de diamètre ainsi que des blocs de calcaire arrachés par l'avalanche.


Ces dépôts ressemblent à des dépôts de chenaux, montrent des loupes et des petites dunes en base de coulées, semblables à celles qui sont produites par les écoulements marins (Figure 13).


Ils suivent la topographie, sont plutôt fins sur les reliefs et très épais dans les vallées. Les dépôts contiennent souvent des bouts de toit ou de murs, des morceaux d'arbres calcinés et parfois même des restes humains qui ont été transportés dans l'écoulement. Ces dépôts ressemblent donc plus à des dépôts d'avalanche qu'à une pluie de cendres.

En accord avec une mise en place sous forme d'avalanches, on rencontre d'ailleurs des dépôts très importants devant les murs des cités contre lesquels ils se sont accumulés avant de les effondrer.


Enfin, on note que ces dépôts sont entrecoupés de dépôts Pliniens. Il est alors naturel d'associer ces dépôts à des avalanches naissant du panache volcanique et dévalant les pentes du volcan. On appelle ces avalanches des nuées ardentes. Dans les dépôts de l'éruption de 79, on peut compter jusqu'à six avalanches. La quatrième fut la plus forte et frappa Pompéi de plein fouet.

Dans la ville d'Herculanum, c'est plus de 20 m de dépôt que l'on trouve, la ville ayant été affectée par quasiment l'ensemble des nuées ardentes en raison de sa proximité avec le volcan (Figure 15). De plus il semble que les avalanches qui ont enseveli la ville aient été particulièrement chaudes comme le prouve la transformation de tout le bois de la ville en charbon, à une température de plus de 400°C.

Épaisseur totale moyenne des dépôts de nuée ardente (en m)

Figure 15. Épaisseur totale moyenne des dépôts de nuée ardente (en m)

En rouge sont figurées les zones principales de mise en place.


Les témoignages historiques

Pline l'ancien n'a pas témoigné sur les nuées ardentes car elles l'ont tué, ainsi que les habitants qui n'avaient pas fui sous la pluie de ponces. Par contre, Pline le Jeune a laissé des lettres décrivant les manifestations du volcan, observées à distance raisonnable.

À Stabiae, les habitants furent envahis par des odeurs de souffre et une pluie de feu (des bombes volcaniques explosant en touchant le sol) alors que l'avalanche promettait d'atteindre la ville, provoquant la fuite éperdue des habitants. À Misenum, protégée par la direction des vents, la ville avait été épargnée par les chutes de ponces de la phase Plinienne précédente. Par contre, les séismes dus à l'éruption furent ressentis avec une intensité de plus en plus forte au cours des 24 et 25 octobre. Les objets furent complètement renversés et les chars, même bloqués par des pierres, furent déplacés lors des tremblements de terre. Le 25, peu de temps après les plus violents séismes, Misenum fut témoin de la première nuée ardente, formant un noir nuage traversé d'éclairs d'électricité statique et descendant vers la mer.

Les nuées ardentes vont alors se succéder, emportant d'abord Pompéi puis Herculanum. On pense que seulement un dixième de la population fut tué par les nuées car de nombreux habitants avaient fui pendant la phase plinienne. Pline le jeune eut la chance de s'enfuir assez tôt pour se trouver à la périphérie de la zone détruite par les avalanches ; Pline l'ancien n'eut pas cette chance et mourut d'avoir voulu observer l'éruption de trop près.

Conclusion : vers la physique des éruptions volcaniques explosives

Nous avons vu qu'à la fois les témoignages historiques et les caractéristiques des dépôts montrent la présence de deux phases majeures dans l'éruption. La première phase dite plinienne correspond à une pluie de cendres et de ponces depuis le champignon plinien. La seconde phase, de Nuées Ardentes, correspond à des avalanches de fragments du jet volcanique sur les pentes du volcan. On peut expliquer ces deux phases par un modèle de dynamique des fluides pour les éruptions volcaniques explosives que l'on développera ultérieurement…

Voir aussi...

The 79 AD Eruption of Vesuvius, par Scandone, Giacomelli, et Gasparini.



[1] Mise à jour - Décembre 2022. La date du 24 au 25 aout a longtemps été proposée même si de nombreux indices (fruits, vêtements, éléments historiques autour de l’empereur Titus…) font penser depuis longtemps à une date plus tardive (cf. par exemple G. Stefani, Archeo, 2006). La découverte en 2018 d’un inscription mentionnant la date du 17 octobre (impossible si la ville est engloutie depuis fin aout) permet de replacer la date à la nuit du 24 au 25 octobre (une erreur de copie de la lettre de Pline le Jeune à Tacite expliquant certainement la première date).