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Image de la semaine | 16/02/2004

La double réfraction de la calcite

16/02/2004

Pierre Thomas

ENS de Lyon - Laboratoire des Sciences de la Terre

Florence Kalfoun

ENS de Lyon / DGESCO

Emmanuelle Cecchi

Florence Kalfoun

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Le spath d'Islande et sa double réfraction.


Propriété de double réfraction de la calcite ou spath d'Islande

Figure 1. Propriété de double réfraction de la calcite ou spath d'Islande

Calcite plus connue sous le nom de spath d'Islande quand elle est transparente.


En 1669, Érasme Bartholin s'aperçoit que l'on voit double à travers les cristaux de "chaux carbonatée".

Ce terme "chaux carbonatée" n'est que l'ancien nom (17ème siècle) de la calcite, carbonate de calcium cristallisant dans le système rhomboédrique. Quand la calcite est transparente, on l'appelle spath d'Islande, car les premiers échantillons provenaient d'Islande. Ces cristaux tapissaient les parois de fissures et de cavités internes (géodes) que l'on trouve fréquemment dans les coulées basaltiques mises en place sous la mer (genèse voisine de celle desoursins d'aragonite).

La figure 2, montre un micro équivalent de ces grosses géodes islandaises : des micro-géodes dans un basalte de l'Est Islandais, tapissées de micro-cristaux de calcite (et aussi de zéolites).


Quand on regarde à travers une lame (à face parallèle), de verre, on voit "simple". Si un rayon lumineux arrive perpendiculairement à cette lame, le rayon n'est pas dévié (lois de Descartes). Quand on regarde à travers un cristal de calcite (dont les faces sont parallèles), l'image est dédoublée. L'une est "ordinaire" et suit les lois de Descartes ; l'autre est "extraordinaire" et ne suit pas les lois de Descartes. Les rayons donnant cette image extraordinaire, bien qu'arrivant perpendiculairement aux faces cristallines sont déviés, diffractés. Une série de rayons non déviés, plus une série de rayons déviés, cela donne bien deux images.

Le premier film montre bien qu'il y a un rayon ordinaire et un rayon extraordinaire.

Figure 3. Rotation du rayon extraordinaire autour du rayon ordinaire (avec flèche repère)

Le film montre l'image double d'un point unique. Le "point ordinaire" est fléché au départ du film. Son image est à la verticale du point, car le rayon qui la forme n'est pas dévié. Quand on tourne le cristal, on voit bien que ce point fléché ne bouge pas (au défaut de prise de vues près). Le "point extraordinaire" au contraire tourne autour du "point ordinaire". Il est "en bas" au début du film et tourne dans le sens des aiguilles d'une montre en passant à gauche, puis dessus, puis à droite… du "point ordinaire".


Figure 4. Rotation du rayon extraordinaire autour du rayon ordinaire (sans flèche repère)

Le film montre l'image double d'un point unique. Le "point ordinaire" est à la verticale du point, car le rayon qui la forme n'est pas dévié. Quand on tourne le cristal, on voit bien que ce point ne bouge pas (au défaut de prise de vues près). Le "point extraordinaire" au contraire tourne autour du "point ordinaire". Il est "en bas" au début du film et tourne dans le sens des aiguilles d'une montre en passant à gauche, puis dessus, puis à droite… du "point ordinaire".


Quelques années plus tard, Christian Huygens montra que ces deux rayons n'étaient pas constitués de lumière "naturelle" : en regardant cette double image à travers un 2ème spath d'Islande, Huygens s'attendait à voir une image quadruple, ce qui n'était pas le cas. Selon la position du 2ème spath, il voyait en double l'image ordinaire (et ne voyait plus l'image extraordinaire), ou voyait en double l'image extraordinaire (et ne voyait plus l'image ordinaire).

Un deuxième film vous montre une expérience analogue (faite avec un polaroïde, et non pas un 2ème spath, hélas).

Figure 5. Mise en évidence de la polarisation des rayons ordinaire et extraordinaire

Au début du film, on voit le spath avec la double image d'un point unique. Lorsqu'on met un polaroïde entre la caméra et le cristal, l'une des deux images du point disparaît. Puis on tourne le polaroïde, et l'image visible disparaît alors que l'image "disparue" réapparaît. On peut noter qu'il faut tourner le polaroïde de 90° pour passer d'une image à l'autre.


Huygens venait de découvrir que les deux rayons (ordinaire et extraordinaire) étaient polarisés, et polarisés perpendiculairement l'un à l'autre. Théoriquement, les cristaux de tous les systèmes cristallins présentent cette double réfraction, sauf ceux du système cubique. Mais la calcite est le seul minéral usuel pour lequel l'angle que font (entre eux) les rayons ordinaires et extraordinaires est suffisamment important pour que le phénomène se voie à l'œil nu. Mais même quand les deux rayons se propagent de façon peu différente, les différences de trajets optiques sont mis à profit (avec un jeu de polaroïdes) pour créer des interférences et générer les couleurs bien connues des géologues qui observent les lames minces en lumière polarisée/analysée.