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Image de la semaine | 17/06/2013

Différenciation gravitaire dans un sill basaltique de la péninsule de Svartenhuk (la Pointe Noire), Groenland

17/06/2013

Pierre Thomas

ENS de Lyon - Laboratoire de Géologie de Lyon

Arnaud Agranier

Université de Bretagne Occidentale - IUEM

Olivier Dequincey

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Cumulat d'olivine dans un sill paléocène à éocène de la côte Ouest du Groenland.



L'Ouest du Groenland est séparé de l'archipel canadien par la Baie de Baffin, quasi-océan qui s'est ouvert au Paléocène ou à l'Éocène. C'est pour étudier les aspects magmatiques de cette ouverture qu'une équipe de 5 chercheurs de l'Université de Brest, dont Arnaud Agranier qui a pris ces photographies, a étudié des coulées, dykes et sills visibles sur cette côte occidentale du Groenland. Dans un sill de la péninsule de Svartenhuk (la Pointe Noire), épais d'une dizaine de mètres seulement, ils ont découvert les manifestations de la sédimentation magmatique des olivines dans ce sill, avec une couche d'environ 1 m d'épaisseur d'un basalte extraordinairement riche en olivines : un quasi-cumulat.

Vue globale brute du sill de la péninsule de Svartenhuk (Groenland) dans lequel se manifeste un phénomène de différenciation magmatique

Figure 2. Vue globale brute du sill de la péninsule de Svartenhuk (Groenland) dans lequel se manifeste un phénomène de différenciation magmatique

Les bordures figées correspondent aux deux zones d'épaisseur décimétrique où le magma basaltique s'est refroidi très rapidement au contact de l'encaissant froid (phénomène de trempe). Sur les quelques mètres d'épaisseur entre ces deux bordures figées, le magma est resté liquide beaucoup plus longtemps (quelques jours à quelques mois). Les olivines présentes dans ce magma, plus dense que le liquide, ont "coulé" vers le bas, s'y sont accumulées et y forment une couche métrique d'un basalte très riche en olivine, un quasi-cumulat d'olivine. Sur la majorité de son épaisseur, au-dessus de cette couche cumulative, le basalte est quasiment dépourvu de phénocristaux (basalte aphyrique).


Vue interprétée du sill de la péninsule de Svartenhuk (Groenland) dans lequel se manifeste un phénomène de différenciation magmatique

Figure 3. Vue interprétée du sill de la péninsule de Svartenhuk (Groenland) dans lequel se manifeste un phénomène de différenciation magmatique

Les bordures figées correspondent aux deux zones d'épaisseur décimétrique où le magma basaltique s'est refroidi très rapidement au contact de l'encaissant froid (phénomène de trempe). Sur les quelques mètres d'épaisseur entre ces deux bordures figées, le magma est resté liquide beaucoup plus longtemps (quelques jours à quelques mois). Les olivines présentes dans ce magma, plus dense que le liquide, ont "coulé" vers le bas, s'y sont accumulées et y forment une couche métrique d'un basalte très riche en olivine, un quasi-cumulat d'olivine. Sur la majorité de son épaisseur, au-dessus de cette couche cumulative, le basalte est quasiment dépourvu de phénocristaux (basalte aphyrique).




L'abondance des phénocristaux d'olivine dans la partie basale du sill pourrait poser le problème de leur lieu de cristallisation. Ces olivines peuvent avoir cristallisé "tranquillement", en profondeur, dans un réservoir ou un réseau de filons à de nombreux kilomètres sous la surface et le sill. On pourrait aussi proposer que cette cristallisation d'olivine a eu lieu dans le sill lui-même. Cette deuxième hypothèse ne tient pas. Si le refroidissement interne au sill avait été suffisamment lent pour engendrer de "grosses" olivines, alors les cristaux ayant cristallisé juste après, mais avec a priori la même lenteur de cristallisation, devraient avoir des tailles voisines. Or, à part ces phénocristaux d'olivine, on ne voit (à l'œil nu) qu'une pâte vraisemblablement constituée de microlithes et d'un peu de verre. Le refroidissement du sill a donc très vraisemblablement été rapide (car proche de la surface) et les phénocristaux d'olivine était donc déjà présents dans le magma quand il est arrivé près de la surface et a formé le sill.

La preuve de la présence d'olivine déjà cristallisée dans le magma quand il est "arrivé" et a formé le sill se trouve dans les bordures figées : elles contiennent des phénocristaux d'olivine, qui n'auraient pu se former lors du phénomène de trempe à l'origine de ces bordures.