Image de la semaine | 14/09/2009
La carrière de Cerin (commune de Marchamp, Ain) et ses faciès sédimentaires
14/09/2009
Résumé
Une carrière de calcaire (sub)lithographique : faciès et contexte.
Les deux dalles présentées ci-dessus proviennent de la carrière de Cerin (Ain), qui exploitait de 1850 à 1910 des calcaires du Kimméridgien terminal (Jurassique supérieur, - 151 Ma). L'étude des faciès sédimentaires (cette semaine) et des fossiles (semaines suivantes) que l'on y trouve permet de reconstituer le milieu de sédimentation local. Un très bel exemple de reconstitution paléogéographique et paléobiologique.
Ces données sédimentologiques (calcaire à grain très fin, rareté des figures de courant, fentes de dessiccation, traces de gouttes de pluie probables…) couplées avec des études régionales permettent de reconstituer la paléogéographie et le milieu de sédimentation de Cerin, au Sud du massif du Jura. Au Jurassique supérieur, l'actuelle chaîne du Jura était occupée par une mer peu profonde, continuant au sud-est la mer épicontinentale occupant le Bassin Parisien. Cette mer peu profonde était séparée de l'Océan Alpin (encore plus au sud-est) par une barrière récifale. Vers la fin du Kimméridgien (-151 Ma), ces récifs furent démantelés par une alternance d'exondations et d'immersions successives, laissant la place à des groupes d'îlots séparés par des dépressions lagunaires peu profondes. Ces lagunes, protégées du large par ces chapelets d'îles, fonctionnaient comme des pièges à sédiment recevant la boue calcaire fine venant du front du récif en cours de démantèlement. L'actuel site de Cerin se trouvait dans l'une de ces lagunes abritées, susceptibles d'exondations temporaires (marées basses de vives eaux par exemple) comme l'attestent les traces de gouttes de pluie et les fentes de dessiccation.
La carrière de Cerin a été exploitée au 19ème siècle (et au début du 20ème jusqu'en 1910) comme carrière de calcaire lithographique. Des milliers de fossiles très variés et extraordinairement bien conservés y ont été récoltés, qui font de Cerin un véritable "lagerstätte" du Jurassique terminal (mot allemand signifiant « lieu de stockage », souvent employé au pluriel : lagerstätten, et désignant un site où on trouve de nombreux fossiles exceptionnellement bien conservés). D'importantes campagnes de fouille y ont été re-conduites de 1975 à 1995 sous la direction de l'Université de Lyon et du CNRS. La grande majorité des fossiles extraits avant 1910 sont maintenant dans les réserves du futur Musée des Confluences de Lyon, musée en cours de construction qui devrait ouvrir en 2014-2015. Sous la conduite éclairée de Didier Berthet, responsable des collections de Cerin, j'ai pu accéder à ces réserves et en photographier une (petite) partie. Merci à lui de m'y avoir guidé, et de m'autoriser à diffuser ces photographies. Merci également à Jacques Gastineau de m'avoir autorisé à photographier son échantillon (figures 1 et 2), actuellement déposé au Musée de la Mine de Saint Pierre la Palud.