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Article | 02/04/2001

Un pendule sismomètre

02/04/2001

Sylvaine Ferrachat

University of California

Jim McClain

University of California

Edouard Kaminski

Institut de physique du globe de Paris

Sébastien Chevrot

Observatoire Midi Pyrénées

Benoît Urgelli

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Enregistrement par un pendule des différentes arrivées d'ondes au cours d'un séisme.


D'après Norman Mc Leod, Port Townsend, Washington.

Nous présentons ici un enregistrement original du mouvement produit par les ondes sismiques lors d'un séisme récent.

Le 28 février 2001, un séisme de magnitude 6,8, situé à 100 km sous la surface de la Terre et à quelques kilomètres de distance de la ville d'Olympia dans l'État de Washington (USA), a ébranlé la Terre pendant un peu plus de 30  secondes. Durant cet événement sismique, un pendule, localisé dans le magasin "Mind Over Matter" à Port Townsend, a produit sur le sable de son socle la figure ci-dessous.

Les photos présentées ont été prises peu de temps après que le sol a cessé de trembler. Les courbes régulières à l'extérieur de la rose centrale sont les courbes tracées par le pendule en action, avant que le sol ne bouge. Elles correspondent à la trajectoire théorique du pendule prédite par la loi de Newton. Ici les traces avant le séisme ont été obtenues en actionnant deux fois le pendule.

Les traces dues au tremblement de Terre sont représentées par la rose centrale. Lors d'un séisme, deux types d'ondes sont générées : des ondes de volume (P et S) et des ondes de surface ( Rayleigh et Love).


De manière générale, les séismes fournissent peu d'ondes P (compression-dilatation), et beaucoup plus d'ondes S (cisaillement, à cause du glissement le long du plan de fractures...). On ressent donc peu les ondes P. Ici, on peut supposer que de toute façon, elles n'affectent pas beaucoup l'enregistrement avec un sismographe du type pendule.

Par conséquent, les ondes enregistrées dans le sable sont certainement des ondes de surface et des ondes S principalement. Quant à différencier ondes de surface et ondes S, c'est une autre paire de manche.

Lorsque l'on se trouve à proximité de la source du séisme (à moins de 1000 km), les ondes P arrivent d'abord (probablement non enregistrées ici car elles correspondent à un mouvement quasiment vertical), puis les ondes S (qui correspondent à un mouvement cisaillant) et enfin les ondes de surface (dans l'ordre ondes de Love puis ondes de Rayleigh). Les ondes de surface, qui se déplacent en paquets, sont les plus énergétiques. Ces ondes seraient à l'origine de l'enregistrement complexe (rosace) qui efface en partie, voire totalement, le signal dû aux ondes S.

Après le passage des ondes sismiques, le pendule a commencé à ralentir et à revenir à sa position initiale en traçant des cercles concentriques de plus en plus petits. À son tour, ce dernier mouvement du pendule a contribué à effacer l'enregistrement des ondes de surface. Ces recouvrements successifs rendent complexe l'interprétation du tracé du pendule.

On peut cependant penser que les ellipsoïdes externes de la rosace témoignent encore du passage des ondes. Admettons que ces ellipsoïdes externes ne correspondent qu'au signal dû aux ondes de surface (ondes S totalement effacées). On peut, dans ce cas, différencier les traces dues aux ondes de Rayleigh de celles dues aux ondes de Love.


Pour cela, il faut observer l'orientation des ellipsoïdes tracés par le pendule. En effet, la direction du grand axe d'un ellipsoïde nous renseigne sur la polarisation de l'onde de surface qui l'a généré, c'est-à-dire sur la direction de la vibration.

Or, les ondes de Rayleigh sont polarisées longitudinalement (c'est-à-dire dans un plan contenant la source du séisme et le pendule), alors que la polarisation des ondes de Love est transverse (perpendiculairement à un plan source-pendule). On devrait donc observer deux groupes homogènes d'ellipsoïdes perpendiculaires entre eux. De plus, les ondes de Rayleigh arrivant après les ondes de Love, un groupe d'ellipsoïdes devrait systématiquement recouper l'autre, nous permettant ainsi d'identifier ondes de Rayleigh et ondes de Love.

L'examen de la figure ne permet pas vraiment d'identifier ces deux groupes d'ellipsoïdes. Il apparaît plutôt un continuum d'orientations. Néanmoins, les ellipsoïdes les plus récents au centre de la rosace semblent à peu près tous orientés dans la même direction (en orange sur la figure). Même si ces traces ne correspondent vraisemblablement qu'au tracé du pendule lors de son retour à l'équilibre, on peut cependant penser que ces oscillations ont conservé l'orientation du dernier train d'onde, c'est-à-dire des ondes de Rayleigh.

Une étrange rosace difficile à interpréter

Figure 5. Une étrange rosace difficile à interpréter

Les grands axes des ellipsoïdes correspondant probablement aux traces de passage des ondes de surface : en bleu les ondes de Love, en orange les ondes de Rayleigh.


Dans ce cas, on peut également déterminer la direction probable de vibration des ondes de Love (axe bleu sur la figure). Le continuum d'orientations des ellipsoïdes serait alors dû à une transition continue des oscillations du pendule depuis la direction de vibration des ondes de Love jusqu'à celle des ondes de Rayleigh.

Il est nécessaire de préciser que les différences de vitesse de propagation des ondes de Love et des ondes de Rayleigh sont faibles. Pour un tremblement de terre aussi proche, elles arrivent donc quasiment simultanément. Ceci explique que les oscillations transitoires du pendule aient une amplitude équivalente à celles dues aux ondes sismiques elles-mêmes : le pendule n'a pas eu le temps de se stabiliser entre le passage des ondes de Love et celui des ondes de Rayleigh.

Pour finir, une observation attentive de la figure montre que le pendule s'est stabilisé dans une position différente de celle du centre des ellipsoïdes. On peut penser que ce décalage correspond à un léger déplacement de l'ensemble du bâtiment qui supporte le pendule.